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Mise en place du Sénat : Les Burkinabè face au devoir de bonté correctrice ou epieikéia

Publié le samedi 21 septembre 2013 à 23h08min

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Après la remise du rapport circonstancié du 31 août, rapport qui ne pouvait que constater l’impossibilité légale de rejeter ce que la Loi fondamentale consacre, dura lex sed lex. La discordance des préoccupations exprimées inhérentes à leur pluralité hétéroclite (pouvoir, opposition, société civile), nous ramène à l’impératif moral pour tous d’observer de la bonté correctrice pour nous-mêmes en tant que communauté nationale.

Cette impossibilité légale de supprimer le Sénat s’applique plus durement pour le premier garant de la Loi fondamentale qu’est le Président du Faso.

Pourquoi ? Parce que précisément, peut-il sans le couvert de la loi, praeter legem, mieux en porte-à-faux avec elle, contra legem, supprimer le Sénat ? A l’évidence, non. Aussi, il revient à l’opposition de faire des propositions concrètes. Or, peut-elle articuler une seule proposition concrète lorsque les uns attendent une révolution improbable, certains, néo-libéraux fiers de leur franchise idéologique, voudraient parler au nom de socialistes apparentés aux sociaux- démocrates du CDP, tandis que les autres, les syndicats ne pourraient raisonnablement accompagner les néo-libéraux. Peuvent-ils se mettre au service de leurs bourreaux de demain si jamais le rêve de rupture ou de basculement de ceux-ci advenait ?

Il n’y aura donc point de proposition unique et tactique, à fortiori stratégique venant des opposants. Il faut donc saluer la sagesse du Président dans son entreprise de consulter tous les milieux et regroupements socio-politiques aux fins de délibérer.

C’est sage en ceci qu’il a perçu qu’il ne peut se détourner de la phronesis suivant laquelle la prudence est la vertu de la raison en acte. Au bout de ce processus ouvert, l’epieikéia ou bonté correctrice pourrait signifier pour lui, garant des libertés publiques et du libre fonctionnement des institutions de la République, d’en appeler au peuple souverain pour trancher.

Le mécanisme pour les consultations populaires existe, c’est le référendum. La société savante de juristes peut très bien soumettre un questionnaire couplant le Sénat, l’article 37 et aussi adjoindre l’obligation pour toute formation ou regroupement politique concourant à l’expression de la volonté populaire de se soumettre désormais à une course au leadership en leur sein tous les cinq ans. Une seule consultation pour liquider tous les fantômes de cette guérilla verbale, c’est moins cher payer. Le cœur de la démocratie, ça n’est pas l’alternance vaille que vaille.

C’est fondamentalement, la liberté i.e. le choix libre offert à chacun dans une délibération contradictoire, publique et transparente de se prononcer. Ce que demandent les opposants, à vrai dire, c’est la summum ius summa iniuria sur la dura lex sed lex, ou simplement l’équité, la justice comme équité comme théorise le philosophe américain John Rawls. Mais leur demande exige d’eux-mêmes, un réquisit moral indubitable : qu’ils aient de la bonté correctrice eux aussi pour eux-mêmes et pour la population qui est en droit d’attendre de la société politique toute entière le respect scrupuleux de l’intérêt de la paix et de la cohésion sociale. Pour les opposants à la mise en place du Sénat, cette bonté correctrice signifie, puisqu’elle se dit mobilisée, l’acceptation d’en appeler le peuple souverain pour trancher. Leur contradiction est celle-ci : Vous exigez que le Président du Faso viole la Constitution sans la modifier ? Seul le référendum modifie la Constitution sans la violer.

Puisque le peuple souverain est détenteur unique du pouvoir, les uns auront alors le moyen de transformer ce référendum à venir en plébiscite vu que leur figure emblématique a des états de service fort défendables, tandis que les autres, y verront opportunément une aubaine pour un référendum révocatoire du leadership du Président Compaoré et de son parti.

Feu Hugo Chavez s’y était soumis en son temps au Venezuela, montrant en cet appel au peuple, qu’il est démocrate et qu’il a foi en son peuple. Et le meilleur moyen pour asseoir une légitimité et subséquemment, une légalité dans une République, tant pour les uns que pour les autres, ce n’est point de se recroqueviller en tant que technostructure sur le microcosme politique, ce qui dénote un certain mépris pour le peuple mais plutôt de se soumettre à son verdict.

Les manipulations rhétoriques des uns et la peur des manipulations opportunistes de la Constitution par les autres, ont engendré cette controverse inutile sur le Sénat lors même que, se voulant démocrates, tous devraient, avec allégresse, en appeler au peuple. C’est la seule revendication valable pour nos droits. Et ces droits, ils appartiennent à tous.

N’est-ce pas là une évidence aveuglante ? N’habitons pas dans la peur des verdicts, cette peur panique des politiciens.

Le temps est venu d’affronter, sans consolations espérées ni désolations redoutées, la fatigue de nos arguments en empruntant la voie grandiose du référendum qui nous ramènera la convivialité sociale. Et celle-ci à son tour nous permettra de cultiver la singularité universelle de notre république, de contenir le contingent et d’engager le particulier suivant les circonstances.

Mamadou Djibo

Docteur en philosophie

Spécialiste des courants mathématiques contemporains

L’Express du Faso

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Vos commentaires

  • Le 23 septembre 2013 à 09:04, par WANG YU En réponse à : Mise en place du Sénat : Les Burkinabè face au devoir de bonté correctrice ou epieikéia

    Doctus cum libro, tu as déjà pensé au carnage qu’il y aura dans les bureaux de vote du réferendum ?
    Je suis croyant mais Dieu serait injuste si pour le pouvoir éternel de son futur homologue Compaoré le sang des Burkinabè devrait se figer.

  • Le 23 septembre 2013 à 10:02, par lepaysanbf En réponse à : Mise en place du Sénat : Les Burkinabè face au devoir de bonté correctrice ou epieikéia

    Pas de commentaire à cet écrit plein de pureté et de rigueur. Tout âme éprit de liberté, de sens élevé de clairvoyance et surtout encline des valeurs démocratiques et républicaines ; s’y trouve.

  • Le 23 septembre 2013 à 10:06, par Naam Tiibo En réponse à : Mise en place du Sénat : Les Burkinabè face au devoir de bonté correctrice ou epieikéia

    Je ne sais pas si je dois douter de votre sincérité quand vous proposez le référendum comme une évidence aveuglante. Vous êtes effectivement tellement aveuglée par votre solution que vous ne vous rendez pas compte qu’elle n’est évidente comme vous le dites. Êtes vous de bonne foi ou êtes-vous de ceux feignent la bonne foi pour mieux tromper ? C’est pour cela que je ne sais pas si je doit douter de votre sincérité. S’il y a une chose qui est évidente dans l’histoire politique de notre pays, c’est le fléau du bourrage des urnes pendant les élections et du trafic des résultats des élections depuis le dépouillement dans les bureaux électoraux jusqu’à leur proclamation. On a même vu notre administration attribuer les résultats déjà publiés d’un parti à un autre faisant d’un perdant un gagnant dans une mairie, sans que ce qui a été reconnu comme étant une erreur puisse être corrigé. Les élections couplées de Décembres 2012 ne sont pas encore loin et souvenir des cas fraudes sont encore fraiche pour que l’on puisse objectivement regarder le vote référendaire comme une solution évidente, à moins d’un aveuglement évident ! Et si l’on croit que le sénat, est incontournable, pourquoi encore demander à ceux qui n’en veulent pas ce qu’ils en pensent. Ils n’y verront, et à raison, qu’une manœuvre tendant à faire croire que tout le monde a participé à la délibération. C’est précisément parce qu’on se méfie des votes bidons par lesquels un régime peut tenter de se maintenir au pouvoir en utilisant l’appareil administratif pour conserve indûment le pouvoir, c’est à cause de cette dérive prévisible qui se vérifie avec le régime actuel qu’on avait prévu dès le départ la limitation des mandats depuis 1991. Voyez vous, c’est évident que malgré une telle précaution les démons du pouvoir a vie n’ont pas été découragés. Il faut une lutte et une détermination supplémentaire pour guérir notre démocratie et la débarrasser de ce fléau. - - - - - - - Si on ne veut pas imposer le sénat de force à tout le monde, il faut simple faire appel au conseil constitution qui reconnaitra (ce qu’elle aurait dû faire en toute indépendance) que la loi concernant le sénat est anticonstitutionnelle parce que n’ayant pas fait l’objet d’un consensus national. Il pourrait même constater l’irrégularité de la procédure car le CCRP n’est pas une institution républicaine apte à rendre des décisions contraignantes pour les citoyens. Si le pouvoir reconnait qu’il aurait dû commencer par rechercher le consensus, il est donc possible de revenir sur cette loi sur le sénat comme un élément étranger contrat social expression d’un consensus nationale qu’est la constitution. Cela voudra dire que le pouvoir, à commencer par le Président, reconnait s’être trompé et reprend le bon chemin. Pourquoi ce régime ne veut jamais reconnaitre ses erreurs et les corriger sans ennuyer toute la nation ? C’est exactement la même attitude que pour la journée nationale du pardon, on commet des impaires mais on ne reconnait pas ses fautes et on demande aux victimes de faire des sacrifices, de faire des efforts pour la paix de la nation. Le pouvoir, lui ne peut-il pas donner l’exemple en reconnaissant ses erreurs pour travailler à la paix sociale ? Le président sait consulter pour savoir qui veut faire parti du sénat décrié ; mais peut-il nous dire s’il va respecter l’article 37 le concernant et ne pas se présenter en 2015 ? Pourquoi est-ce si difficile pour lui de dire haut et fort, d’affirmer qu’il va faire ce que commande la loi fondamentale ? Je refuse un pacifisme qui revient à laisser toute la place aux violents qui ne veulent rien céder, pas même de ce qu’ils ont usurpé. Oui pour la paix et en même temps oui pour la Justice. Pas de Justice, pas de paix. Il faut choisir et si c’est difficile, il ne faut pas en vouloir à ceux qui réclament Justice.

  • Le 23 septembre 2013 à 11:02, par citoyen En réponse à : Mise en place du Sénat : Les Burkinabè face au devoir de bonté correctrice ou epieikéia

    Pas de réferendum au Faso ! As-tu l’argent pour organiser cela !
    Avec le CDP qui pratique les prévotes (faire voter les gens avant, ceux ci iront jeter le bulletin prévoté dans l’urne, et ramener le bulletin vierge reçu au bureau de vote, pour pouvoir encaisser les 2000 F proposés à cet effet), avec cette population manipulable, même aux USA où la majorité sait lire et écrire, l’alternance obligatoire après 2 mandats est pratiquée !
    Donc mon cher, pas de modification de l’article 37 .. Au fait, dites nous pourquoi votre mentor ne veut pas quitter ?? Et le jour qu’il va mourir, vous tous vous allez le suivre dans son tombeau) !!!

    Mamadou Djibo, tu as reçu combien ?

  • Le 23 septembre 2013 à 15:23, par LAGUI ADAMA En réponse à : Mise en place du Sénat : Les Burkinabè face au devoir de bonté correctrice ou epieikéia

    Dans tout ça, toi en tant que citoyen burkinabè, quelle est ta position ? De quelle référendum parles-tu ? Il faut réfléchir avant de proposer les choses, pauvre docteur. Le sénat, nous n’en voulons pas. Tu n’apportes rien au débat.

  • Le 23 septembre 2013 à 16:41, par Beoogo En réponse à : Mise en place du Sénat : Les Burkinabè face au devoir de bonté correctrice ou epieikéia

    "Seul le referendum modifie la constitution sans la violer",pardon docteur ! la constitution modifiée en juin 2012 l’a été par referendum ? Qu’avez -vous dit quand on la modifiait ? ou bien vous n’aviez pas encore obtenu votre doctorat "boit l’eau" ? Puisque j’ai l’impression que vous voulez exhiber votre titre de docteur que de proposer une solution aux controverses provoquées par la mise en place du sénat. Docteur, je vous informe que depuis l’adoption de notre constitution en juin 1991, elle a fait l’objet de plusieurs modifications mais aucune ne l’a été par référendum.A t-on voler la souveraineté du peuple en procédant ainsi ?De toutes les façon nous ne voulons pas de referendum ici !

    • Le 23 septembre 2013 à 19:44, par Lapatrie ou la mort En réponse à : Mise en place du Sénat : Les Burkinabè face au devoir de bonté correctrice ou epieikéia

      mon ami le foulosophe ! il faut arrêter de vivre dans les nuages en regardant les réalités du pays avant dédain ! Avec quel argent veux tu utiliser pour faire ton referendum ?
      Pas de referendum dans ce pays des hommes intègre ! En 1998 le peuple s’est calme par ce qu’on a inséré l’article 37, promettant ainsi la fin du mandat de blaise en 2015. Maintenant cas 2015 est proche il parle de manœuvre pour aboutir à la modification de cet article ! Jamais ! il faut prendre les gens pour des idiots ! Jamais ! pas de SENAT ! Jamais ! pas de referendum ! Jamais ! pas de modification de l’article 37 !! Jamais !Jamais !Jamais !

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