LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Vous n’empêcherez pas les oiseaux de malheur de survoler votre têtе, mаis vοus рοuvеz lеs еmрêсhеz dе niсhеr dаns vοs сhеvеux.” Proverbe chinois

Démocratie : Les petits pas du Burkina Faso

Publié le mercredi 8 août 2012 à 23h01min

PARTAGER :                          

Lentement, mais sûrement, le Burkina Faso avance dans son apprentissage de la démocratie. Un regard retropectif du pays, de 1960 à 2012, suffit pour soutenir qu’un grand pas a été franchi (l’actuel Burkina Faso ayant connu cinq coups d’Etat depuis son indépendance en 1960). Beaucoup d’eau a sûrement coulé sous le pont , mais le pays poursuit dans sa quête de renforcement du processus démocratique. Pour preuve, un acte important est en cours. Le rêve de l’enrôlement biométrique est en train de se concrétiser. Cette revendication de l’ensemble de la classe politique burkinabè et de la société civile, convaincue que sans l’enrôlement biométrique, il est difficile de parler de fichier électoral fiable, donc d’élections crédibles et transparentes, a fini par être acceptée.

Et depuis le 1er juin 2012, le processus a été lancé, à coup de milliards. Il prendra fin par la zone IV, le 16 août prochain à Ouagadougou et Bobo-Dioulasso. En dehors de quelques têtes brûlées qui ont agi de sorte à perturber un peu le processus tout semble bien fonctionné. Le chef de file de l’opposition politique, Me Bnénwendé Stanislas Sankara, habituellement très critique a salué le travail de Me Barthélémy Kéré et son équipe de la Commission électorale nationale indépendante (CENI). Le processus n’est pas encore à terme, mais le point dans les zones qui ont fini l’opération donne des résultats encourageants, car l’on est généralement au dessus des 50% d’inscrits.

En attendant le bilan général pour avoir une idée précise, la préoccupation, c’est ce que les Burkinabè vont faire de cet enrôlement. Ce serait dommage si les résultats de cette opération qui a coûté tant d’argent au budget national, venaient à être mal utilisé. Pour éviter de vendanger les résultats de l’opération, il faut un changement de mentalité, à tout point de vue.

D’abord, après l’enrôlement biométrique, que l’on donne les chiffres exacts, de façon transparente, à tout le monde, surtout aux états-majors des partis politiques, pour prendre de l’avance sur les supputations et autres suspicions. Ensuite, s’agissant de l’organisation des élections, que chaque Burkinabè se dise qu’il est un agent de la transparence et de la vérité. Il s’agit d’enlever de la tête des uns et des autres, toute envie de fraudes, de votes multiples et autres manœuvres qui pourraient jouer négativement sur ces élections tant attendues.

Le souci est de faire en sorte qu’après le 2 décembre 2012, jour arrêté pour les élections couplées au Burkina Faso, que l’on sache quel est le poids de chaque parti politique sur la balance. Cela nécessite des élections transparentes et crédibles pour accompagner l’enrôlement biométrique. Sinon, enrôlement biométrique pour enrôlement biométrique ne sert à rien (…)

Clarifier le jeu politique au Burkina Faso

L’intérêt de l’opération, c’est de clarifier le jeu politique en le rendant plus crédible et legitime. Ainsi, l’on saura qui est qui et qui vaut quoi. Qui sait, peut-être que ces élections vont entraîner un bouleversement comme aux élections législatives de mai 2002 où, dans leur analyse intitulée : « Elections historiques au Burkina Faso : vers une maturité démocratique ? », Pr Augustin Loada et Carlos Santiso notaient que « le parti au pouvoir, qui a monopolisé le pouvoir politique depuis le début de la transition amorcée par le pays en 1991, a vu sa part de sièges considérablement réduite. Même s’il garde une majorité simple avec 57 sièges sur les 111 que compte l’Assemblée nationale, le Congrès pour la démocratie et le progrès, a partagé le pouvoir législatif avec l’opposition qui a vu la part de ses sièges passer de 7 à 57 ».

Peut-être aussi que ces élections, à travers une organisation transparente, permettront de démontrer que l’opposition burkinabè est insignifiante et qu’avec ou sans biométrie, le parti majoritaire est un éléphant qui ne craint pas la rosée. En tous les cas, le défi mérite d’être relevé, afin qu’une bonne fois pour toute, les accusations et autres affirmations sans fondement, mais sources de tensions, cessent et que le Burkina Faso sorte renforcé avec une démocratie forte. Cela donnera raison au maire de Ouagadougou, Simon Compaoré, qui soutenait dans un exposé titré : « Les institutions de la démocratie et de l’Etat de droit de 1990 à 2000 : l’expérience du Burkina Faso », que : « l’existence d’un Etat de droit est une réalité tangible au Burkina Faso et l’expérience démocratique dans notre pays depuis bientôt une décennie, en tant que forme de gouvernement, est entièrement adoptée par l’ensemble des composantes de la société burkinabè.

Cette réalité s’affirme au quotidien dans la conscience collective et se traduit, entre autres, par la tenue régulière de toutes les élections … »
La balle est donc dans le camp de la CENI, des partis politiques et de la société civile burkinabè. A la CENI de tout mettre en œuvre pour une bonne organisation des élections. Aux partis politiques de jouer, chacun son rôle. Que la majorité, avec le CDP en tête, agisse proprement, sans donner l’impression qu’elle influence les élections à venir, encore moins les résultats. Que l’opposition aussi arrête les jérémiades du genre « on méprise l’opposition » et mette en place des stratégies pour ternir la dragée haute au méga parti. Après tout, dans quel pays caresse-t-on l’opposition ? Mais l’espoir est permis. Déjà, certains regroupements, comme le cas du PDS/METBA, avec Arba Diallo et ses camarades, méritent d’être encouragé.

Aussi, l’opposition qui crie généralement au manque de moyens, qui n’est même pas en mesure de se représenter dans les bureaux de vote, pourrait se regrouper, choisir, pourquoi pas un représentant unique de l’opposition dans les bureaux de vote. Encore faut-il que l’on se fasse confiance et sache que l’union fait la force !

L’erreur de la société civile burkinabè

Quant à la société civile burkinabè, elle doit aussi prendre conscience qu’elle a un grand rôle à jouer dans le processus démocratique en cours au « Pays des Hommes intègres » et changer ses méthodes, car, comme le dit Siaka Coulibaly, lui-même juriste, politologue et acteur de la société civile, dans une analyse intitulée : « Quelle société civile pour le renforcement de la démocratie au Burkina Faso ? », « les évolutions au niveau politique ou même de la gouvernance ont été obtenues suite à des mobilisations populaires, plus que par les résultats des séminaires à répétition.

En 1999, les secousses orchestrées par le Collectif des organisations de masse et des partis politiques, formé autour de l’affaire Norbert Zongo, ont abouti à une réforme du code électoral et l’introduction de la proportionnelle au plus fort reste. La conséquence en a été une forte entrée de nouveaux partis politiques, surtout d’opposition, à l’Assemblée nationale et une décrispation de la vie politique nationale ».

Ainsi, la société civile burkinabè devrait jouer le rôle qu’on lui prédestine, comme le note Siaka Coulibaly, très peu satisfait de l’existant. En effet, il pense que « bien que le plaidoyer soit la fonction la plus indiquée dans le contexte burkinabè, la grande majorité des OSC du pays préfère s’orienter vers l’option d’ONG ou association de développement. Même les OSC qui n’ont pas le statut d’ONG, ni les infrastructures correspondantes, se comportent comme tel. Bien entendu, cette option se fait au détriment de la fonction du plaidoyer politique. En parlant de rôle politique, cela doit être compris comme la participation à la prise de décision à des fins d’amélioration des politiques sociales et non pas la compétition pour le pouvoir politique.

Cela s’appelle, pour la société civile, l’action politique non partisane. De ce point de vue, la société civile du Burkina Faso semble avoir commis une erreur stratégique qui la rend assez peu capable de jouer son rôle institutionnel d’acteur de la démocratie et de la gouvernance… » Que ce soit pour les partis politiques, la société civile ou les citoyens lambda, le renforcement de la démocratie au Burkina Faso profite à tous. Il est, de ce fait, de bon ton, que chacun s’implique, pour des élections paisibles, transparentes et crédibles !

Ali TRAORE (traore_ali2005@yahoo.fr )

Sidwaya

PARTAGER :                              

Vos commentaires

  • Le 9 août 2012 à 06:33, par testeur En réponse à : Démocratie : Les petits pas du Burkina Faso

    Extrait de la charte d’éthique professionnelle des journalistes :
    Un journliste digne de ce nom :

    • Tient l’esprit critique, la véracité, l’exactitude, l’intégrité, l’équité, l’impartialité, pour les piliers de l’action journalistique ; tient l’accusation sans preuve, l’intention de nuire, l’altération des documents, la déformation des faits, le détournement d’images, le mensonge, la manipulation, la censure et l’autocensure, la non vérification des faits, pour les plus graves dérives professionnelles ;

  • Le 9 août 2012 à 07:46, par L’Africain En réponse à : Démocratie : Les petits pas du Burkina Faso

    Le problème de notre pays est bien plus profond que cela, le gouvernement actuel n’a pas une légitimité assez forte pour installer une démocratie, la journée du pardon, n’a compté que pour ceux qui y ont participé. Pour mettre en place une démocratie, ce qu’il faut c’est un programme basé sur le respect des droits, une justice pour tous, un fort mouvement de lutte contre la corruption, un desengagement de l’Etat de l’activité économique. Or au Burkina Faso, aucune de ces bases n’est acquise. Tout comme un criminel ou un voleur ne peut faire croire qu’il rendra justice, il est difficile pour ce gouvernement dirrigé par Blaise Compaoré de mettre en place une démocratie, car la justice sera toujours faite au cas par cas, les hommes ne sont donc pas tous éfgaux à l’égard de la loi. La solution pour mettre en place une démocratie ne peut venir de ce gouvernement, tout ce qu’il peut faire, c’est laisser la place et assumer ses erreurs, ce qui est impossible. Nul doute que le Président actuel, ne veut pas répondre de ses crimes commis entre 1983 et aujourd’hui, de la même manière, il ne peut juger ceux qui sont suffisament proches de lui et qui ont commis ou commettent des crimes sous ce gouvernement. Si cette injustice demeure, ce gouvernement restera incapable de mettre en oeuvre une démarche démocratique ; vosu ne pouvez pas exigez des autres, ce que vous n’êts pas capables d’exiger de soi-même. Si vous ne montrez pas l’exemple en subissant vous même la justice, vous ne pourrez jamais mettre en place une démarché démocratique. Votre échec demeure même au coeur de votre système, corriger cela et vous avancerez. Il faut dire la vérité est peuple, c’est déjà un premier pas.
    Ce que nous avons au Burkina est une anocratie, c’est-à-dire un pays dont le pouvoir est détenu par une minorité qui gouvernent et imposent ses règles à tous les niveaux, notamment politique, économique et juridique, dans une telle situation l’avènement d’une démocratie viable est impossible. Ce gouvernement ne laissera malheureusement pas un héritage positif à notre pays, certains ont eu 25 ans et on échoué pendant 25 ans, que voulez vous donc nous prouver.
    J’espère avoir l’avis des autres lecteurs sur ce sujet, alors invitation à contribution et "malheur à ceux qui baillonnent leur peuple", ceci pour demander au gestionnaire du site de nous laisser libre de nous exprimer, ce sera une avancée démocratique, ne vous faites pas complices de nos bourreaux

  • Le 9 août 2012 à 10:34, par Bamin En réponse à : Démocratie : Les petits pas du Burkina Faso

    Bonjour mon ami,
    Je réagi à votre article sur deux points, (1) enrôlement biométrique et (2) avancées du Burkina Faso.
    - Enrôlement biométrique : je ne vois en quoi cette technique est différentes des autres, si ce n’est que pire en terme de tricherie. En effet, entre Souleymane-Souleyman-Soulemane-Souleman...., l’ordinateur reconnais des individus différents. Ces robots ne font que suivre la volonté humaine. Il n’y a donc pas de différence, même si on l’accepte. Arrêtez de nous distraire, nous ne sommes des illettrés de ces robots.
    - Avancées du Burkina : je constate au fil du temps une bipolarisation du Burkina. Cette dipolarisation s’accentue au fil du temps. En effet nous sommes partis d’une population plus ou moins homogène à une population dipolaire. Un pôle massue est très pauvre contre un pôle minime au richesse luxuriante. Dite moi quel est votre bord pour que vous tenez ces propos ? Connaissez la vie réelle des burkinabèS ? Écartez vous du pôle d’opulence et contemplez le Burkina les yeux fermés, vous comprendriez que ce pas simple. Les gens supportent la situation imposée.
    D’ailleurs comment pouvons nous faire cette auto-évaluation de façon crédible ? On évalue par rapport à une référence, or il n’y a pas de référence à ce que je sache. Un seul régime à vie avec ces éléments comme évaluateurs ??!!!! Nous avons besoin de pouvoir comparer. Sinon actuellement si nous prenons le cas de Ouagadougou, nous avons : Ouaga (comme ouaga 2000) et dougou (comme les délaissés).

  • Le 9 août 2012 à 10:53 En réponse à : Démocratie : Les petits pas du Burkina Faso

    Ne nous y trompons pas ! L’enrôlement biométrique à lui tout seul ne règle pas les questions de transparence ou de fraude. C’est plus une question d’hommes que de technique. Déjà à à Sapouy, Ouahigouya et Bobo des cas de tentatives de fraudes ont été décelées dans la majorité comme dans l’opposition. Les cas qui n’ont pas été pour l’instant décelés sont de combien ? Par ailleurs, pour les doublons il est dit que le contrôle et la vérification des doublons se fera plus tard. Qui en garanti la transparence et la complétude ? Et si ce dernier contrôle ne se faisait pas ou ne se faisait que partiellement ? Chacun doit rester vigilant pour barrer la route à la fraude et surtout assainir le monde politique de tous ces escrocs à la petite semaine. JE finis par penser que cette opération à coup de milliard a été faite encore une fois pour enrichir quelques délinquants.

  • Le 9 août 2012 à 11:46, par sidzabda En réponse à : Démocratie : Les petits pas du Burkina Faso

    Pour ce qui de la question de démocratie au Burkina s’il vous plait ôter nous du sujet de la biométrie dont les limites notoire sont visibles par de multiple tentatives de fraudes par des leaders politiques. Si le CDP a accepté facilement que ce biométrie soit d’actualité dans le processus électoral c’est par ce qu’il savent qu’à tout moment ils peuvent en venir à leur fin de tricherie habituelle.Et je craint fort que le CDP impose une liste addictive au fichier car peut être qu’à Kossyam il se déroule labà aussi de façon officieux un enrôlement biométrique.Qui sait ?avec ce parti là il faut s’attendre à tout.

 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique
Burkina Faso : Justice militaire et droits de l’homme
Burkina Faso : La politique sans les mots de la politique