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2012 : Plus de justice et d’équité sociale

Publié le mercredi 4 janvier 2012 à 00h32min

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Sur le coup de minuit du 31 décembre, nous avons tourné la dernière page de 2011 et ouvert la première de 2012 avec tous les espoirs qu’elle peut susciter chez chacun. Mais à coup sûr, on se souviendra, nous Burkinabè et pour longtemps, du calamiteux premier semestre de l’année 2011, marqué par des manifestations de rues et des mutineries de militaires qui ont sérieusement ébranlé les fondements du pacte républicain. La colère des élèves qui a éclaté au grand jour le 22 février contre les circonstances dans lesquelles leur camarade, Justin Zongo, avait trouvé la mort quelques jours plus tôt, puis celles des militaires dans la nuit du 22 mars exigeant la libération immédiate de cinq frères d’arme condamnés par un tribunal civil à des peines allant de 12 à 15 mois fermes pour « outrage public à la pudeur, vol, complicité d’outrage public à la pudeur, complicité de vol », ont cruellement révélé le peu de crédibilité de la parole publique et de l’institution judiciaire aux yeux de nombreux Burkinabè.

S’il faut saluer la tenue rapide du procès de l’affaire Justin Zongo, il serait cependant naïf d’occulter la dimension politique dans la célérité avec laquelle la justice a instruit, jugé et condamné fin août les policiers reconnus coupables de « coups et complicité de coups mortels » sur la personne du collégien. Les trois policiers condamnés ont-ils pour autant été sacrifiés au nom de la paix sociale au détriment d’une vraie justice ? La réponse à cette question est loin de faire l’unanimité.

Ce qui, revanche semble une évidence pour les élèves, c’est que la mobilisation a payé et a évité que le dossier n’aille rejoindre bien d’autres dans les tiroirs poussiéreux de la justice. Et en reconnaissant la culpabilité des trois « poulets », la justice leur donne a postériori raison, eux qui avaient fermement rejeté la thèse défendue par les autorités administratives et hospitalières, selon laquelle Justin Zongo est mort de méningite.

Quant aux militaires, dont le reflexe a été d’aller libérer à coups de crosses leurs camarades, n’entendaient-ils pas, certes maladroitement, exprimer un sentiment d’injustice généralisée, les peines prononcés contre ces derniers étant, selon eux, disproportionnées comparativement à des cas flagrants de violation de la loi, mais restés impunis ? Dans l’affaire Justin Zongo comme dans l’affaire des militaires condamnés, c’est l’institution judiciaire qui est pointée du doigt pour son incapacité-involontaire ou délibérée- à traiter les Burkinabè sur un pied d’égalité.

A la vérité, on n’a bien le sentiment que la justice burkinabè fonctionne à la carte : très efficace contre les petites gens coupables de larcins, mais étrangement complaisante à l’égard des hauts placés pourtant régulièrement épinglés par la Cour des comptes ou l’Autorité supérieure de de contrôle de l’Etat pour leur gestion très approximative de la chose publique. Cette impunité dont jouissent les prédateurs de biens publics doit cesser, car source de frustration et de vengeance.
Le 28 décembre, en conseil des ministres, le gouvernement a révélé que 228 marchés étaient en « difficultés » dans les départements ministériels, doux euphémisme pour parler de marchés en retard d’exécution, comme ceux par exemple de l’aéroport de Ouagadougou ou du palais de la culture de Bobo-Dioulasso.

Il a aussi annoncé « la résiliation de façon collective et accélérée de tous les marchés publics en souffrance, notamment ceux échus en 2009 et ceux abandonnés depuis 2010 en vue de permettre de sélectionner de nouveaux prestataires ». Depuis sa nomination en avril 2011, le premier ministre Luc Adolphe Tiao a montré sa détermination à traquer la mal gouvernance. Il doit aller jusqu’au bout en engageant des poursuites judiciaires contre ces prestataires indélicats tout en prenant davantage en compte les préoccupations de la majorité silencieuse.

En présentant les vœux de nouvel an au président le 30 décembre, les corps constitués ont été bien inspirés en lui lançant un appel « à procéder à d’importantes réformes pour faire de la justice burkinabè une justice crédible, équitable et accessible à tous ».
En ce début d’année 2012, quoi de mieux que la justice sociale pour consolider la paix encore fragile dans notre pays ?

Bonne et heureuse année à tous les Fasonautes

Joachim Vokouma

Lefaso.net

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Vos commentaires

  • Le 4 janvier 2012 à 04:30 En réponse à : 2012 : Plus de justice et d’équité sociale

    ce n’est pas un sentiment que la justice burkinabè fonctionne à la carte car c’est une réalité qu’aucune personne de bonne foi ne peut renier et cette injustice est à la source de tous nos malheurs
    je suggère le suppression du ministère de la justice et la mise en place d’une haute autorité de justice qui soit vraiment indépendante car au nom de quoi l’exécutif a à venir mettre son nez dans les affaires judiciaires si ce n’est pour étouffer ses propres forfaits ?
    sans justice,le pays continuera à émerger dans la médiocrité mais c’est ce qu’on nous barratine les oreilles tout les jours avec leur burkina émergent ?
    honte à eux et bonne année 2012 aux vrais patriotes qui ne trempent pas leurs mains dans des affaires sales

  • Le 4 janvier 2012 à 05:32, par Tapsoba En réponse à : 2012 : Plus de justice et d’équité sociale

    Pas de justice crédible possible sans indépendance.Or,notre justice est loin d être indépendante.

  • Le 4 janvier 2012 à 12:35, par Pierros En réponse à : 2012 : Plus de justice et d’équité sociale

    Analyse très pertinente. Bravo pour ce questionnement qui à mon humble avis suscitera des réformes sérieuses et des mesures vigoureuses pour la « justice » au pays des hommes intègres.
    D’abord au sein même de la justice, un toilettage doit être fait pour réellement assainir l’appareil judiciaire. Il faut mettre hors d’état de mir tous ces brebis galeuses qui profitent la naïveté et de l’analphabétisme de la population pour se faire des deals car la justice a en son sein des corrompus.
    Ensuite il faut absolument transformer le ministère de la justice en une institution républicaine. Qu’elle-même élise ses premiers responsables en fonction de leur compétence, leur sens la justice sociales et sur la base de leur preuve sur le terrain. Il faut absolument abandonner cette pratique de nomination des premiers responsables de la justice.
    Enfin il faut lui donner le quitus d’interpeler quiconque soupçonné d’une quelconque dérive.

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