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Amnistie des Chefs d’Etat : De l’audace pour la paix et le changement

Publié le mardi 13 décembre 2011 à 00h55min

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Le Burkina Faso sort lentement d’une crise multidimensionnelle : crise de croissance démocratique, de gouvernance, de citoyenneté et de déficit de rédistribution des fruits de la croissance. Déjà en 1999, le Collège des Sages, dans son rapport, faisait l’analyse suivante : « La crise actuelle que notre pays traverse depuis quelques mois est réelle et profonde. Elle n’est pas que conjoncturelle ; elle est structurelle. Elle s’étend à tous les secteurs de la vie nationale et touche toutes les couches de la population. Elle se manifeste dans le domaine social et culturel, politique et administratif, économique et enfin au niveau éthique… ».

La récente crise manifeste depuis le premier semestre 2011 est à la fois politique, sociale, culturelle, économique, entre autres. Il est faux de prendre en compte un aspect et d’occulter les autres. Le traitement doit tenir compte de tous les paramètres. La paix est la résultante de plusieurs choses. L’amnistie proposée par le CCRP et consolidée par les assises nationales sur les réformes politiques fait l’objet de la présente réflexion. Elle fait la preuve de la hauteur d’esprit du peuple burkinabè prêt à se surpasser pour avancer vers un futur maîtrisé.

Il y a dans la marche de toute communauté humaine des périodes de rupture et de remise en cause. Les choses et la réponse aux situations échappent souvent à la compréhension et à la maîtrise des premiers responsables de la nation. Des individus ou des groupes d’individus se sentent délaissés ou victimes d’injustice et de crimes divers par le fait de la puissance publique. Déjà en 1987, le président Blaise COMPAORE était conscient de cette réalité : « L’accélération de l’histoire fait défiler les évènements à une allure telle que la maîtrise par l’homme des faits devient impossible, rendant celui-ci artisan de situations non désirées. Les instants tragiques que nous avons vécus, le 15 octobre courant, font partie de ces types d’événements exceptionnels que nous fournit souvent l’histoire des peuples ».

Ces manquements graves, connus et reconnus par tous, doivent être exorcisés pour un passé et un présent assumés et un futur maîtrisé. La vérité est donc connue et il faut tourner la page, avec audace, tolérance et pardon comme l’invite l’Homme d’église, Mgr Anselme T. Sanou : « Chacun a besoin de la paix de tous et nous avons besoin de la paix de chacun ».

Dans certaines situations, l’audace, l’humilité et la responsabilité sont indispensables pour restaurer la confiance et indiquer la voie. En rappel, le 30 mars 2001, le Président du Faso, en toute humilité, demandait pardon en ces termes : « En cet instant solennel, en notre qualité de président du Faso assurant la continuité de l’Etat, nous demandons pardon et exprimons nos profonds regrets pour les tortures, les crimes, les injustices, les brimades et tous les autres torts commis sur des Burkinabé par d’autres Burkinabé, agissant au nom et sous le couvert de l’Etat, de 1960 à nos jours ».

Une décennie plus tard, le 30 mars 2011, il s’adressait une fois encore à la nation pour appeler à l’apaisement, au dialogue et à la concertation pour restaurer la quiétude et la paix entamées par les manifestations violentes de scolaires, d’étudiants, de commerçants et de militaires. Sa volonté de trouver une issue à la crise a été très explicite dans son message à la nation : « J’en appelle au sursaut des forces politiques et sociales empreintes de patriotisme et de civisme, afin que le respect de la République et du patrimoine commun soit davantage enraciné. C’est dans le but de promouvoir ces valeurs que j’ai invité l’ensemble des acteurs politiques à mûrir les réflexions sur les réformes indispensables à l’approfondissement de la démocratie, au raffermissement de notre système de gouvernance politique et institutionnelle. Les décisions issues de ces concertations seront immédiatement appliquées pour renforcer nos acquis ».

Le processus de réformes politiques et institutionnelles, depuis la collecte des propositions jusqu’aux assises nationales en passant par la session du CCRP et les rencontres régionales entre mars et décembre 2011, constitue un test réussi de la capacité de notre peuple à se remettre en cause, à préserver l’essentiel et à bâtir le futur. L’une des décisions les plus emblématiques de ces assises demeure la proposition de l’amnitie des Chefs d’Etat de l’indépendance à nos jours.

L’amnistie est la traduction en action de la valeur de pardon qui caractérise les sociétés burkinabè. Elle permet de solder courageusement le compte avec l’histoire afin de s’engager dans une nouvelle marche de responsabilité, de compréhension et de respect mutuel. Le pardon joue un rôle essentiel en tant que transaction à travers laquelle, celui qui avoue sa faute se voit accorder le bénéfice de la rémission de ses péchés. Il constitue une étape indispensable pour toute réconciliation, pour bâtir ensemble un avenir radieux.
En reconnaissant en 2001 les manquements de l’Etat depuis l’indépendance et en tendant la main en 2011 à toutes les composantes de la nation pour sauver le pays, le premier magistrat à fait preuve de reconnaissance de la réalité critique et de l’insuffisance de la gouvernance, source de toute la soif de justice et de liberté revendiquée malheureusement de manière violente. Il s’agit là d’une responsabilité d’une nation en quête de bien-être, en mal en sa démocratie et en sa citoyenneté.

L’amnistie en soi est apaisante et ouvre la porte des possibles, de l’espérance et du changement approprié. Elle symbolise le devoir de reconnaissance des mérites de ceux qui ont assumé des responsabilités au plus haut niveau et de tolérance de leurs actes manqués, sans oubli, pour la paix et le progrès.
L’amnistie constitue une leçon d’éthique et de violence sur soi d’un peuple en quête d’un co-devenir harmonieux, paisible et prospère. Loin d’être une démission, l’amnitie est une victoire sur les faiblesses humaines. Si le peuple décide d’accorder l’amnitie à ses Chefs d’Etat de l’indépendance à nos jours, cela répond à la philosophie de la sage de Taïwan, Maître Cheng qui affirme que « Quand la justice est de votre côté, vous devez parler doucement. Quand la raison est de votre côté, vous devez pardonner aux autres ».

Un peuple grandit par sursaut et par audace sur lui-même et sur son passé en niant la loi du silence, en se regardant dans le miroir et en assumant ses forces et ses insuffisances à l’image des échanges courageux lors des assises nationales. L’amnistie en est un outil d’action. Il faut avoir l’audace de tourner la page afin que rien ne soit plus comme avant, que chaque citoyen fasse preuve de changement dans sa tête et dans son comportement pour qu’émerge un Burkina Faso de concorde, de respect mutuel, de progrès et de paix. Pour rendre opérationnel le nouveau contrat social, il faut davantage de dialogue et de concertation pour suivre, évaluer et interpeller tous les acteurs sur leurs responsabilités individuelles et collectives.

L’histoire d’un pays ne doit pas être un éternel recommencement. Il faut que ça change. En 2011, on a eu l’impression de vivre les mêmes réalités avec plus d’entensité qu’entre 1998 et 2001 et d’entendre les mêmes propos à savoir l’invitation faite aux Burkinabé à se pardonner mutuellement pour les torts causés ou subis dans le règlement des différends politiques ou autres et à bannir à jamais la violence. Si nous croyons aux vertus du pardon comme une chose sacrée, consistant à remettre à Dieu ce qui s’est passé nous permettant d’accepter ce qui s’est passé au nom de l’intérêt supérieur de la nation, il faut résolument faire nôtre cette citation d’Albert Einstein : « La folie, c’est de faire tout le temps la même chose et de s’attendre à un résultat différent ».

Dr Poussi Sawadogo
Animateur/Facilitateur de processus de changement
Enseignant à l’ULB/ Doyen du CRYSPAD

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Vos commentaires

  • Le 13 décembre 2011 à 04:48 En réponse à : Amnistie des Chefs d’Etat : De l’audace pour la paix et le changement

    Amnestie que Blaise veut la c’est etre reelu.

  • Le 13 décembre 2011 à 06:47, par Beurk En réponse à : Amnistie des Chefs d’Etat : De l’audace pour la paix et le changement

    C’est navrant que des intellectuels se permettent de donner des leçons biaisées à la terre entière,ce qui dénote leur manque de courage à dire la vérité.En effet,voilà un monsieur qui comprend les choses plus que le commun des mortels mais au lieu d’analyser la situation froidement avec lucidité en nous éclairant,cherche plutôt à nous administrer des piqûres de morphine pour encore mieux nous endormir et pour preuve,il a bien dit et on ne peut que souscrire avec lui que "la récente crise manifeste depuis le premier semestre 2011 est à la fois politique,sociale,culturelle,économique,entres autres".
    Mais quelles sont les solutions à apporter pour désamorcer cette crise ?
    - Un CCRP avec P comme "Politique".
    Mais Dr Poussi Sawadogo,où sont passés :
    - le S comme "Social",
    - le E comme "Economique",
    - le C comme "Culturel" etc etc ?
    D’ailleurs ce que vous avez trouvé comme la meilleure des mesures dans ce CCRP pour nous distraire intellectuellement,c’est le mot "amnistie",ce qui prouve d’ailleurs que ce CCRP est une mascarade qui ne résoud en rien la crise,tout au contraire.Alors pour revenir à votre amnistie avec vos contradictions,vous dites :"Celui qui avoue sa faute se voit accorder le bénéfice de la rémission de ses péchés".Soit mais pourquoi ce CCRP accorde des amnisties à des assassins qui n’ont rien avoué,qui ne nous ont pas dit qui et qui ils ont assassinés,torturés etc ?A mon entendement,avant le pardon,l’aveu et donc que ces chefs d’Etat qui vivent encore,viennent à la queue leu leu et devant tout le peuple à la RTB dans un sacrement de pénitence et de réconciliation sinon niet,pas d’amnistie.Merci

    • Le 13 décembre 2011 à 19:30 En réponse à : Amnistie des Chefs d’Etat : De l’audace pour la paix et le changement

      Bravo t’es intègre a ce ke je vois pcq bien aimé ton intervention par raport a l’article de ces soi disants intellectuels mangemils qui ne trouvent rien ds les recherches mais aime parlé pour se faire voir.Des longs et kilometres tubes digestifs pr remplir leur ventre mais tu l’a bien envoyé ds les chiottes avec son article de moounafica
      Tchurrrrrrrrrr

  • Le 13 décembre 2011 à 09:10, par tièkadiyé En réponse à : Amnistie des Chefs d’Etat : De l’audace pour la paix et le changement

    Bonne conclusion. Effectivement vous êtes fou. Et ça se dit intellectuel. Je regrette de t’avoir félicité depuis votre première apparition. Tu agis comme tous les autres. On fait le bruit pour se faire remarquer et après on est appelé à la soupe. Bravo ! Rappelez-vous cependant que le collège des sages recommandait d’identifier les tombes de tous les disparus, un point capital sur la voie du pardon. L’autopsie de la tombe du PF, vous en dites quoi ?

    Le peuple d’aujourd’hui n’est pas le peuple de demain. Le cours des évènements peut changer au détour d’un accidant de l’Histoire et ceux les parias d’aujourd’hui peuvent devenir les prophètes de demain. Il se pourrait que cela arrive demain ou après demain. De votre vivant ou après votre mort. Donc, faites attention dans votre propension maladive à vous faire coopter par les puissants du moment. Tout intellectuelle que vous êtes, l’Histoire pourrait vous rattrapper.

  • Le 13 décembre 2011 à 12:44 En réponse à : Amnistie des Chefs d’Etat : De l’audace pour la paix et le changement

    Je partage vraiment votre analyse , et je dirais meme que vous m`avez devense sur le sujet car j`etai entrain de faire un ecrit sur le meme sujet.l`Amnistie pour l`afrique de nos jours est un passage oublige pour instaurer la demoncratie dans nos differents Pays

  • Le 13 décembre 2011 à 17:25, par ous En réponse à : Amnistie des Chefs d’Etat : De l’audace pour la paix et le changement

    De quoi ce monsieur parle t’il ? vraiment.... Amnist quoi pas possible ! Chacun doit payer au dégré de sa forfaiture. Ne cherchons pas des glorioles en voulant légitimer les injustices des grands. Ce n’est pas cela que l’intellectuel doit servir l’humanité. les grands hommes Jesus Mohamed n’ont pas chercher l’amitié de Cesar ponce pilate Abou Djahal et autre Aboulahan pour marquer leur époque et l’humanité ils ont servi la justice et defendu les pauvres.
    De grace si on rien à dire pour consoler l’orphelin la veuve que l’on se taise SVP.

    • Le 13 décembre 2011 à 18:56 En réponse à : Amnistie des Chefs d’Etat : De l’audace pour la paix et le changement

      Peut etre que j’ai été plus virulent que toi puisque faso.net a censuré ma contribution mais in fine,j’avais la meme position que toi pcq ce monsieur ne fait pas honneur aux intellectuels car tout son écrit n’est que des balivernes pour se faire voir car pour moi,avant d’avoir le pardon du peuple,il faut commencer par avouer ses crimes avec les noms parceque ces assassinats n’ont pas été commis au nom du pays mais ce sont des crimes commis à dessein personnel.Donc on ne peut pas se cacher derrière la notion de l’Etat pour demander le pardon alors qu’un pays n’assassine pas ses enfants.Impossible
      PS:espère que le webmaster ne me censure pas cette fois-ci car j’ai été soft pour ne pas dire très cool

  • Le 13 décembre 2011 à 19:46, par tienmi En réponse à : Amnistie des Chefs d’Etat : De l’audace pour la paix et le changement

    Merci à tous ceux qui m’on prècédé en désaprouvant le Dr. SAWADOGO, que je connais bien. Je dois dire que là, à travers cet écrit je ne le reconnais plus. Il semble comme si quelqu’un avait usurpé sont Identité, car ça ne lui ressemble pas du tout ce style de "mauvais griot".
    Bref pour mon opinion, j’estime que ce registre dont fait leur depuis un temps un certain nombre de personnes ne seduit plus personne. Il faut pas donner l’habitude des amnistie à tous les dictateurs sinon de quoi , eux et ceux qui leur succéderont, auront-ils peur désormais ? De Dieu ? Il y a longtemps que ces gens n’en ont plus.
    Pour ceux qui disent que l’aministie est la seule solution pour qu’il y ait alternance, je dis archi faut, parce que tant que nous ne commenceront pas à faire juger tous ces potentats criminels chacun viendra au pouvoir faire ce qu’il voudra et cherchera avant de quitter à se faire armistier.
    Bref, à chacun la récompense de ses oeuvres !

  • Le 13 décembre 2011 à 21:14, par mackiavel En réponse à : Amnistie des Chefs d’Etat : De l’audace pour la paix et le changement

    A te lire, on a l’impression que ceux qui sont au pouvoir sont des preneurs d’otages et pour nous en sortir, il faut leur accorder l’impunité. Le vent a soufflé, les plus grands dictateurs (Ben Aly, Khadafi, Moubarack...) sont tombés et certains sont sur le point de l’être. Le long règne d’intimidation qui a commencé depuis le 15 octobre 1987 n’a pas su s’adapter et le chef s’est séparé de ses plus fidèles compagnons comme Salif Diallo donnant l’impression qu’il n’a pas d’ami mais juste des sujets. Quand les peuples ont cessé d’avoir peur il faut craindre l’explosion. Les ministres (du latin serviteurs) du gouvernement qui vient d’être écarté n’ont pas laissé bonne impression. Le gouvernement de transition actuel ne montre que des signes de fragilité. Ainsi, les conditions d’une explosion sociale sont réunies et les petites augmentations de salaires n’y font rien. Il reste à craindre, à l’heure actuelle, le soulèvement de "ceux qui veulent mourir débout". Le prince est lâché par l’extérieur car personne ne croit aux démentis de Bourgi.

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