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Editorial de Sidwaya : Voici le temps de la justice et de la paix

Publié le lundi 11 juillet 2011 à 04h30min

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Devant une affaire aussi sensible que celle liée au destin de l’élève Justin Zongo , on ne peut oser un traître mot qu’en choisissant ses dires avec crainte. On risque même de rester éternellement muet, stylo en suspension, cloué à son bureau comme un piquet au sol, à force de tourner sa langue faute de trouver les termes adéquats. Mais le métier commande qu’on en parle, qu’on ose par-delà la peur d’être mal compris, qu’on informe envers et contre tout, que la parole partagée mette du baume dans les cœurs naguère blessés par une malencontreuse accélération d’un segment de notre histoire nationale.

Tout en formulant le vœu que l’information qui va suivre participe à l’apaisement des esprits, nous nous permettons de faire un petit rappel de l’événement malheureux, avant de dire ce qui peut l’être en cette semaine du mois de juillet 2011.

Le 16 décembre 2010, Justin Zongo et Ami Zongo, tous deux élèves d’un lycée de Koudougou, ont une altercation. Les responsables de l’établissement n’ayant pas pu les réconcilier, Ami Zongo dépose plainte au commissariat de police de Koudougou, le 18 décembre 2010, pour coups et blessures volontaires (CBV) portés par son camarade de classe. Après avoir répondu à la convocation de la police, Justin Zongo, à son tour, se plaint au procureur du Faso contre un agent de police pour CBV. Le procureur du Faso lui conseille d’aller se soigner et de ramener un certificat médical et les ordonnances prescrites... Cependant, il convoque les policiers incriminés et leur demande des explications relatives à l’audition et aux « coups » qu’aurait reçus le plaignant.

Malheureusement, ce dernier ne revient plus voir le procureur du Faso avec le certificat médical, mais essaye plusieurs fois de se soigner au CSPS du secteur N°5 de Koudougou, de Ralo et de Poa avant d’être évacué à l’hôpital de Koudougou où il décède le 20 février 2011. Les médecins qui l’ont pris en charge, diagnostiquent une méningite fatale. A l’annonce du trépas de Justin Zongo, les élèves de Koudougou réagissent violemment, s’insurgeant contre l’énoncé des causes de la mort. Voici, sans faire considération aucune des bruits et murmures agitant les esprits de nos concitoyens, les faits tels que la justice les perçoit, sans état d’âme.

Pour plus de sérénité dans l’instruction du dossier, celle-ci fut confiée à un juge de Ouagadougou désigné par la chambre criminelle de la Cour de cassation. Elle est dorénavant close et le dossier transmis à la chambre d’accusation de la Cour d’appel de Ouagadougou pour qu’elle l’examine à charge et à décharge… Le mercredi 6 juillet de 8h à 19h, ce fut fait, à travers les principes de la justice de second degré. Et comme on le sait, la chambre peut remettre en cause le travail du premier juge et aller à la condamnation ; comme il est également possible qu’elle aille dans la manifestation de la vérité, vers un non-lieu …

Si cela est-il que tous les acteurs de la cité sont à la recherche de la vérité, il faut, humainement, s’attendre à tout... C’est pourquoi, au délibéré, projeté pour le 20 juillet 2011, les juges ont la responsabilité et le devoir de dire, avec forte perspicacité, si cette affaire est renvoyée pour être jugée devant la chambre correctionnelle ou la chambre criminelle. Si le dossier est transmis au tribunal correctionnel, cela voudrait dire que les faits ont été requalifiés en délit, donc les auteurs punissables d’une peine délictuelle. Ceux des Burkinabè, sujets à la tentation de l’amalgame, qui attendent une peine modèle le comprendraient-ils ?

Attention cependant à ne pas faire primer l’émotion sur la raison. Les Burkinabè ont droit à un procès exemplaire et transparent, à une justice impartiale, tout comme, Etat de droit oblige, les accusés. La justice marche sur des œufs : des œufs représentant autant sa propre crédibilité que les aspirations de quiétude et de droiture des Hommes Intègres. Il serait malvenu de transformer l’un ou l’autre en omelette… Pour ce faire, à nos yeux, c’est l’impératif de clarté qui devra primer. Un procès opaque et tortueux alimenterait sûrement les discussions de comptoir, tendrait la perche à un rejet pur et simple du verdict, de la part de la société civile ou des supposés malfaiteurs. Si le dossier est renvoyé devant la chambre criminelle, il aura l’avantage d’être examiné par des juges professionnels et des jurés qui, à l’issue, pourront décider s’il s’agit d’un crime, d’un délit ou même d’une simple contravention.

Il y aurait plus de transparence, beaucoup plus de communication et une possibilité de couverture médiatique constante par les médias qui le voudraient... Et c’eût été bien que le jugement se fasse en période d’année scolaire, en juin dernier, si les procédures judiciaires l’avaient permis… Cela aurait encouragé les scolaires, entre autres, à suivre ce didactique procès, leur aurait appris à mieux comprendre que le droit se dit bel et bien dans l’affaire Justin Zongo…

Le public, si le dossier est mis en jugement ouvert, aura l’occasion de comprendre enfin les tenants et aboutissants de cette malheureuse affaire. La tension sociale pourra baisser d’un cran ou même totalement lorsque la vérité éclatera.
Mais la procédure est telle qu’après être passé chez le juge d’instruction, le dossier revient chez le procureur du Faso, puis chez le procureur général avant de parvenir devant la chambre d’accusation. Ce qui nous conduit à un jugement prononcé au moment où les scolaires seront en vacances…

Que faire ? Il est certainement de nécessité que la justice burkinabè, qui à travers cette affaire fera face à une énorme responsabilité pour un retour de la paix au Burkina Faso, mette en place une stratégie de communication avant, pendant et après le procès et que chacun, le mieux qu’il puisse, aille à l’information juste. Plus d’une fois, les rumeurs, ces certitudes disponibles sur la place du marché, ont ruiné une communauté humaine ayant fait preuve de solidité et de clairvoyance… Nous devons avoir foi en la capacité de nos institutions à rendre justice, crédibiliser et respecter leurs décisions. Car, comme le dit Jean Hatzfeld, « la réconciliation, c’est le partage équitable de la confiance » …

Par Ibrahiman SAKANDE ( sakandeibrahiman@yahoo.fr)

Sidwaya

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Vos commentaires

  • Le 11 juillet 2011 à 06:40 En réponse à : Editorial de Sidwaya : Voici le temps de la justice et de la paix

    Au Burkina,de quelle justice vous nous dissertez ?Une justice aux ordres du pouvoir en place avec une justice pour les pauvres et une justice pour les puissants et vous nous parlez de justice.Nous nous connaissons très bien au Faso

  • Le 11 juillet 2011 à 13:16 En réponse à : Editorial de Sidwaya : Voici le temps de la justice et de la paix

    c’est vrai ce que tu dis mon ga !!!!!!!

  • Le 11 juillet 2011 à 16:34, par Déhèska En réponse à : Editorial de Sidwaya : Voici le temps de la justice et de la paix

    Bonne mission, que celle de préparer les esprits au verdict à venir. Mais, entre nous, c’est la mort et la manière de donner la mort à Norbert Zongo qui ont revélé aux yeux du monde que notre justice n’est pas une et que l’impunité était un mode de gouvernance au Burkina. Ce qui est sûr, rien et plus rien ne sera comme avant sur cette terre dite des hommes "intègres". Renseignez-nous sur les manifestations de cette intégrité prochainement, SVP. Entre jeunes, entre travailleurs, entre ouvriers, entre mendiants... par exemple.

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