LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Vous n’empêcherez pas les oiseaux de malheur de survoler votre têtе, mаis vοus рοuvеz lеs еmрêсhеz dе niсhеr dаns vοs сhеvеux.” Proverbe chinois

ACCES AUX MEDIAS D’ETAT : L’opposition dénonce le "camouflage de l’information"

Publié le vendredi 11 mars 2011 à 01h02min

PARTAGER :                          

Dans la présente lettre adressée à Madame la présidente du Conseil supérieur de la communication (CSC), le Chef de file de l’opposition dénonce "le camouflage de l’information" dans les médias d’Etat. Il l’invite par conséquent à se prononcer sur ce genre de "marginalisation".
Madame la présidente,
Les graves événements qui ont endeuillé et secoué notre pays, particulièrement le Boulkiemdé, sont une préoccupation majeure de l’heure pour l’opposition burkinabè, ses militants et le peuple meurtri dans son ensemble. La preuve a été donnée par la mobilisation exponentielle qui a suivi la mort hautement suspecte de l’élève Justin Zongo avec pour conséquence l’alourdissement des tueries à Koudougou, Kindi et Poa, dans le Boulkiemdé.

Inutile de vous dire que cette mobilisation est toujours en cours dans les autres localités de notre pays et pourrait même s’amplifier malgré le choix du gouvernement de fermer les établissements d’enseignement allant de la maternelle au supérieur, dès les premières heures, mais aussi les tentatives de diversion. Ainsi que vous devriez le savoir également, il s’agit d’une expression populaire qui met à nu, une fois encore, les incohérences d’un pouvoir connu pour sa férocité à l’encontre de notre peuple à chaque fois qu’il veut manifester pour réclamer ses droits fondamentaux ; le droit à la vie, en premier.

Vous comprenez, Madame la présidente, que face aux dérives policières et à la complicité de quelques hommes et femmes, mis aux pas par un pouvoir qui a mal à son passif, le peuple n’a de choix que de se faire entendre dans la rue. Dans ces conditions, le rôle social de l’opposition politique lui impose de réagir pour limiter les dégâts monstrueux que l’on connaît déjà (la répression des enfants). Du reste, en ce qui concerne les évènements survenus au Centre-Ouest, une mission d’urgence du Chef de file de l’opposition a été envoyée dès les premiers jours sur le terrain et a pu mesurer l’extrême gravité des faits à partir de constatations et d’informations précises.

En réaction, les responsables des partis politiques réunis en assemblée générale le 24 février 2011 autour de la question ont jugé nécessaire de publier, le jour suivant, une déclaration face aux hommes de médias au siège du Chef de file de l’opposition où la Télévision nationale a envoyé un journaliste. Malheureusement, notre déclaration sera purement et simplement charcutée par la Télévision nationale au journal de 20h sans que l’opinion n’ait eu la juste information que nous avons donnée. Nous estimons qu’il s’agit d’un préjudice grave que la Télévision nationale fait subir à l’opposition et votre conseil devrait s’atteler à se saisir de la question et se prononcer sur ce genre de marginalisation dans la presse d’Etat.

Nous estimons, par ailleurs, que la raison d’être des médias, en l’occurrence les médias d’Etat, est de pouvoir donner l’information juste au peuple en respectant l’équilibre qu’il faut. Or, en la matière, nous assistons à un camouflage déguisé de l’information. Nous citions plus haut la Télévision nationale qui a brillé par la diffusion très camouflée de la déclaration des partis politiques de l’opposition en date du 25 février dernier portant sur les graves événements survenus au Boulkiemdé. A contrario, et pour ne prendre qu’un exemple flagrant, le même organe a diffusé en intégralité une déclaration du CDP sur le même sujet le 28 février 2011 au journal de 20h.

Le hic est que c’est la présentatrice du journal qui a eu, elle-même, le loisir de lire ladite déclaration mot à mot. Nous passons sous silence les déclarations du gouvernement et de ses organisations vassales bien connues dont le seul but est de jouer au bon samaritain. On est aussi fortement tenté de croire que certains journalistes sont purement et simplement empêchés par qui l’on sait de faire leur travail d’information. Et qui sait s’ils ne sont pas tout simplement "sommés" d’ignorer ou de mettre de côté les messages de l’opposition en pareil cas ?

Mais Madame la présidente,

Le Code de l’information dont vous avez la charge du respect stipule bien à son article 1er que « le droit à l’information fait partie des droits fondamentaux du citoyen burkinabè ». Et les informations émanant de l’opposition ne sauraient faire exception, surtout quand elles visent à mettre fin à des actes barbares et de destruction de vies de nos compatriotes. Fort de toutes ces raisons, nous vous invitons, en votre qualité de première conseillère du monde des médias dans notre pays, à examiner avec diligence cette question de camouflage des informations non justifié par nos médias d’Etat. Nous vous demandons d’ailleurs pour cela de bien vouloir faire une déclaration publique afin d’appeler les responsables et les journalistes qui y travaillent au respect de la pluralité en vous appuyant sur le cas flagrant du traitement qui a été réservé à la déclaration de l’opposition par les médias d’Etat.

Pour vous en convaincre, nous vous invitons à faire une simple comparaison entre ladite et ce que la Télévision nationale a diffusé. Cela est possible au vu des archives disponibles. En d’autres termes, à la longue liste des injustices que nos concitoyens n’ont cessé de subir sous la 4e République, pourrait s’ajouter désormais ce que nous appellerons « l’injustice médiatique dans les organes d’Etat » au détriment de notre peuple. Dans ce cas, auront à répondre les dirigeants des institutions comme le CSC habilités à garantir l’exercice de ce droit à l’information équilibrée aux populations mais qui malheureusement ont observé le silence au moment où leur responsabilité était engagée.

Et quand nous le disons, ce n’est point que nous sommes contre les règles d’éthique et de déontologie dont certains habitués de la désinformation pourraient se prévaloir, mais parce que la mainmise et la censure sur les vraies informations et messages forts de l’opposition à l’adresse du peuple portent préjudice à la démocratie. De notre point de vue, il s’agit bien de cas d’atteinte à la liberté d’expression et au droit à l’information. Pour vous en donner une juste idée, nous mentionnions clairement dans notre déclaration notre stupeur et notre indignation sur la situation en citant quelques cas d’affaires toujours pendantes comme ceux de Flavien Nébié, Salam Konsimbo, Boukary Dabo, Clément Oumarou Ouédraogo, Norbert Zongo, Thomas Sankara et ses compagnons, etc.

Bien évidemment ces quelques noms ne sauraient être limitatifs puisqu’en dehors des anonymes, on dénombrait déjà en 2000 au moins quatre-vingt quatorze (94) personnes tuées ou assassinées (voir le journal Bendré n°623 du 13 décembre 2010, page 6 : liste des victimes). A supposer qu’il n’y eût même plus eu de victimes depuis cette époque, n’est-il pas trop que d’en rajouter ? Nous précisons que pour en arriver à sa déclaration, l’opposition s’est rendue sur le terrain et a pu recueillir des éléments choquants (observation des corps des enfants tués couverts de sang, ampleur des dégâts matériels, indignation de la population, terne situation des activités économiques, etc.) De tels éléments ne pouvaient commander l’indifférence.

Madame la présidente, C’est cela la triste réalité que l’opposition dénonce, condamne et dont elle veut siffler la fin sans condition aucune. Pour finir, nous osons croire que la présente lettre sera prise au sérieux afin que dans les meilleurs délais, des dispositions soient prises par le Conseil supérieur de la communication pour libérer les médias d’Etat en faveur d’une expression plurielle, surtout à des périodes où il est question de la vie humaine. En tout état de cause, l’opposition fera tout son possible pour se faire entendre. Veuillez croire Madame la présidente, en l’expression de notre profond respect pour vous-même et votre conseil, mais surtout du ferme engagement de l’opposition politique à mettre fin au camouflage de l’information et aux injustices médiatiques dans les médias d’Etat. Ouagadougou, le 07 mars 2011 Le Chef de file de l’opposition politique Maître Bénéwendé S. SANKARA (Président de l’UNIR/PS)

Le Pays

PARTAGER :                              

Vos commentaires

  • Le 11 mars 2011 à 09:35, par le solutionneur En réponse à : ACCES AUX MEDIAS D’ETAT : L’opposition dénonce le "camouflage de l’information"

    Plagions Norbert ZONGO qui disait : "Tous les peuples ont les dirigeants qu’ils méritent" et disons : "Tous les dirigeants ont les élèves qu’ils méritent". Au Lieu d’incriminer une main invisible (derrière tout cela), posons nous les bonnes questions : depuis 24 ans de pouvoir, qu’avons nous fait comme effort pour éviter cette situation ? Que sommes nous entrain de faire pour gérer la situation et qu’allons nous faire demain pour prévenir une telle situation". L’ère où l’armée tirait au hasard sur les populations civiles est dépassé depuis l’immolation de Mohamed Bouazizi en Tunisie. De nos jours, la répression ne peut plus rien gérer. En réalité, c’est parce que beaucoup de dirigeants africains manquent d’honnêteté ils refusent de diriger leur peuple comme il aurait voulu être dirigés s’ils étaient à la place du place. Tout le problème réside dans ce manque d’éthique politique ou éthique de gouvernance. Que Dieu aident les pauvres et les siens !

 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique
Burkina Faso : Justice militaire et droits de l’homme
Burkina Faso : La politique sans les mots de la politique