Les néo-libéraux avaient, à l’époque, le vent en poupe à Bretton Woods, à Washington, à Wall Street, à City Bank , ainsi que, de gré ou de « force », à la BCEAO, à l’UEMOA, à la BEAC, voire chez « nos grands commis de l’Etat burkinabè en charge de gérer nos finances et nos stratégies prospectives de développement » ! Et pourtant...
Pour faire des résultats, il faut se fixer des objectifs et se donner les moyens humains, financiers, matériels, logistiques (…). Les hauts cadres promus à des postes de responsabilité reçoivent des lettres de mission. Ce qui est tout à fait logique.

La culture de rendre compte fait partie de la bonne gouvernance administrative et partant du renforcement de la démocratie.
On a souvent, dans les assemblées du type de celle qui va évaluer la Réforme globale, décrié la rareté des ressources financières et matérielles. Mais sont-ce là les seuls handicaps ? La qualité des ressources humaines constitue la première richesse d’un pays. Cette vérité semble s’imposer de plus en plus dans les cercles, même les plus réfractaires.Aussi, c’est le lieu de réfléchir sur la qualité des personnels et même du leadership supérieur mis à la disposition ou aux côtés des hauts commis de l’Etat pour faire des résultats. Il est courant de se retrouver avec du personnel incompétent et démotivé... Quelle que soit la volonté d’un manager, il est difficile d’insuffler le goût du travail à ces agents fort endormis. Toutes opportunités qui s’offrent à eux (mariage d’un arrière-cousin, funérailles de la belle tante, baptême de la cousine de l’ami, formation aux objectifs discutables…) sont saisies aux fins de « tourisme ». « Mais, il faut les sanctionner », répondra-t-on !

Le plus souvent, ces agents inexploitables bénéficient de protection de certains gros bonnets par alliance, par amitié ou par relation de complicité, par soucis d’espionnage puéril ou de division bolchévique ! Intouchables, ils sont d’une nuisance inouïe pour l’ensemble du groupe social et spécialement pour la dynamique de celui-ci. Ils découragent par leurs comportements, les plus motivés. Par des rumeurs savamment distillées, ils fragilisent la cohésion du groupe. Quand le moindre de leurs intérêts est menacé, ils découvrent brusquement les vertus du « syndicalisme » ou des textes ô mal compris. Or une équipe ne fait des résultats que quand elle est cohérente et orientée vers l’atteinte des objectifs. Tous les meneurs d’hommes en sont conscients.
Dans une telle situation, celui qui a l’obligation de rendre compte se retrouve handicapé. Toute tentative d’affectation de ces types d’agents dans des postes où ils sont susceptibles d’être plus utiles rencontre une suite de non recevoir de la part de la hiérarchie.

« Il faut faire avec… » entend-on dire. Quand aux sanctions de type supérieur, cela fait longtemps, qu’on n’a plus entendu pareille nouvelle à la Fonction publique. Bien au contraire, il n’est pas rare d’entendre sur les ondes de la radiodiffusion nationale des communiqués du type « M. ou Mme X absent(e) de son poste depuis un an est prié de le rejoindre, faute de quoi les sanctions... »
Que doivent penser les collègues d’un tel travailleur, d’une telle situation ? L’ambiance au travail se transforme en un véritable calvaire. Le premier responsable peut être traité de tous les noms d’oiseaux et même d’incompétent, alors qu’objectivement, les moyens de réussite lui ont été refusés et par « les textes » et bien malicieusement (!) par les pratiques, essentiellement (…).

Il revient au ministère en charge de la Fonction publique de veiller à ce que les textes qui régissent l’administration publique soient des textes d’une administration de résultats et qu’ils soient appliqués avec réelle honnêteté et sens de la repartie ! Ce n’est pas la volonté qui manque ; mais il n’est pas évident…, étant donné que décideurs et praticiens du droit administratif baignent dans une culture toute autre.
Les premiers responsables de la Fonction publique devraient être plus regardants sur les sanctions positives et négatives. Positives pour booster l’esprit du travail bien fait. Négatives pour décourager la paresse, la fainéantise, sources de multiples maux.

Les recrutements, particulièrement ceux sur les mesures nouvelles ne devraient pas être la source d’invasion de l’administration par des agents sans niveau, ni motivation. Il faut qu’ils cessent d’être des règlements de situations sociales qui n’apportent aucune valeur ajoutée.
Les écoles et institutions de formation doivent se remettre en cause en termes de savoir, de savoir-faire et de savoir-être.

Ce n’est pas parce que quelqu’un est admis dans une telle structure, qu’il doit forcément en sortir, nanti d’un brevet « bon à employer par la Fonction publique ». Car à partir de là se constituent les bases de fonctionnaires inutiles et nuisibles pour les initiatives gagnantes, car plus aptes aux « kalabulé », pour reprendre une expression de nos frères ghanéens.
Avec de telles ressources, il semble de plus en plus complexe de réussir une mission. La contre-productivité devient la norme et l’adage « A l’impossible nul n’est tenu » s’impose au plus combatif qui désarme et craque. A quand donc une fonction publique saine, consciente et respectueuse de la déontologie professionnelle ? Il est temps de rendre effective la Reforme de la fonction publique pour un service de qualité aux contribuables et aux citoyens.

Certes, les commis de l’Etat n’ont pas que la médiocrité à gérer. La grande majorité des agents de l’administration publique burkinabè sont des fonctionnaires honnêtes, compétents, travailleurs. C’est ce qui explique les résultats atteints. Les directeurs généraux s’appuient sur ces intelligences. Cela explique pourquoi l’excellence prend le dessus sur la médiocrité, au-delà de tout ! L’évaluation de la Réforme de l’administration doit viser à décourager la médiocrité. La culture de résultats ne sera pas un leurre, si ensemble, gouvernés et gouvernants s’y investissent. Bien sincèrement, sans hypocrisie, sans cagoule, avec la nécessaire ouverture de la fenêtre de Johary entre acteurs...!

Par Ibrahiman SAKANDE (sakandeibrahiman@yahoo.fr)

Sidwaya