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Inondations à Ouagadougou : De là doit commencer le chemin des apothéoses

Publié le vendredi 11 septembre 2009 à 02h19min

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Depuis une dizaine de jours, les Ouagalais en général et les quelque cent cinquante mille sans-abri en particulier font face à de multiples difficultés dans leur vie quotidienne. Une vie qui était déjà dure et qui s’est vue subitement empirée par l’imprévisible pluie qui s’est abattue sur la capitale. Cette pluie (et naturellement ses conséquences) étaient d’autant plus imprévisibles que la météo ne l’a pas vue venir et que le phénomène se produit apparemment une fois tous les quelque cent ans.

Mais là n’est pas notre souci du jour. En effet, la catastrophe est advenue, et à cela, on n’y peut plus rien. Pendant des années et des décennies, on en parlera certainement encore. Si le cours des choses qui se sont passées n’est pas changeable, il n’en n’est pas de même pour celui des phénomènes à venir. Il y a certes une marge d’incertitude, mais les humains sont moins soumis aux déterminismes du futur qu’à ceux du passé. Venons-en donc aux faits : Dans l’immédiat, on a constaté un fort élan de solidarité. A notre connaissance, les différences politiques, sociales et économiques se sont, comme par enchantement, effacées pour laisser la place à la compassion, à la disponibilité, à la générosité du cœur. Tout cela entre Burkinabé, entre Burkinabé et les autres communautés vivant au Burkina et enfin entre les Burkinabé et les organisations internationales et non gouvernementales.

Toutefois, ce que l’on peut craindre, c’est le sort que pourrait subir les fruits de la générosité des citoyens, des pays amis, des organisations internationales et non gouvernementales. Cependant, il est un fait que, dans de telles circonstances, tous les acteurs n’ont pas les mêmes motivations. Certains sont guidés par des mobiles politiques, d’autres par des motivations économiques (en ce sens qu’ils estiment pouvoir faire de bonnes affaires en écoulant leurs marchandises), une autre catégorie de personnes pourrait être intéressées par le détournement, à leur seul profit, des dons. Tout cela est déjà arrivé sous le ciel du Burkina. On se souvient encore de ce préfet qui a dissipé les vivres destinés aux populations alors que celles-ci étaient frappées par la famine. On est également coutumier de l’exploitation politique outrancière de certaines catastrophes de moindre envergure.

Si l’on peut comprendre qu’il n’est pas facile de faire un distinguo net entre le devoir du politique (quelle que soit la représentativité de sa base sociale) d’assister la population et l’exploitation maladroite qu’il peut faire de certains sinistres afin de capitaliser politiquement ses actions, il est, par contre, évident que, par des mécanismes de contrôle en amont, on peut éviter que des personnes aux apparences angéliques mais aux motivations diaboliques ne trouvent là des occasions d’assouvir leur desseins. Sont de cette catégorie certains responsables politiques et administratifs, certains dirigeants d’ONG et certains opérateurs économiques. Pour ce qui est de ces derniers, l’occasion peut être plus que belle de réaliser des profits exponentiels à travers la vente des produits de première nécessité, de la literie, des matériaux de construction…

Alors, le gouvernement doit penser à prendre des mesures en termes de facilitation de l’approvisionnement du pays et particulièrement de Ouagadougou et en termes de contrôle des prix. Quand bien même ceux-ci sont libéralisés, il reste que le contexte exceptionnel que vivent les Ouagavillois commande des mesures tout aussi exceptionnelles. Au-delà de ces dispositions à prendre dans l’immédiat, c’est une réflexion d’ensemble qui s’impose dans les domaines suivants :
- l’aménagement du territoire en général et de nos villes en particulier. Si ce qui arrivait à Dhaka au Bangladesh et que nous suivions ébahis sur le petit écran est arrivé à Ouagadougou, il n’y a pas de raison que cela n’arrive pas une deuxième ou troisième fois ; tout comme les autres villes du pays peuvent connaître pareilles situations. Du reste, les précédents hivernages étaient déjà des signes annonciateurs de ce qui s’est passé le 1er septembre 2009. Une localité comme Bama dans les Hauts-Bassins en porte encore les stigmates.

Comme notre corps, la nature nous parle, et pour peu que nous l’écoutions, nous pouvons éviter bien de situations désobligeantes ou au moins en minimiser les conséquences. A l’échelle de la planète, le réchauffement climatique, avec son lots de perturbations imprévisibles, y est probablement pour quelque chose. Les météorologues affirment en effet que ce qui est arrivé pouvait advenir à tout moment. Il y en a même qui soutiennent que nous ne sommes pas au bout de nos peines pour l’hivernage 2009. Alarmisme ou hypothèse fondée, nous ne pouvons pencher ni d’un côté ni de l’autre. Mais, rien n’est à exclure ;

- la rigueur dans le respect des normes de construction. C’est triste mais le constat est que les techniciens en la matière font régulièrement état du non-respect des normes de construction : mauvais dosage des matériaux, non-prise en compte de l’état du terrain dans la réalisation des ouvrages ou des immeubles, etc. Tant et si bien que les histoires relatives aux accidents dans ces domaines sont nombreuses. Les propriétaires de ces ouvrages et de ces immeubles, que sont l’Etat et les particuliers, doivent être plus regardants sur la construction, car c’est d’abord dans leur intérêt et dans celui des usagers ensuite. Les villes du Burkina se construisent, et tous, nous en sommes fiers, mais si les normes ne sont pas respectées, cette fierté risque de se muer en désolation au moindre caprice de la nature ;

- le rôle de l’Etat, que ce soit dans l’aménagement ou que ce soit dans l’imposition du respect des normes de construction d’immeubles ou d’ouvrages. En tant que puissance publique, propriétaire de certains immeubles et des ouvrages, garant de l’intérêt général et gendarme, il occupe une place primordiale et doit accomplir pleinement sa mission. C’est pourquoi la politique d’aménagement du territoire en général, son volet urbain en particulier, doit faire l’objet de mise à jour. Dans la même foulée, les services techniques de l`Etat devront revoir leurs mécanismes d’intervention et de contrôle, car ce qui a frappé la capitale doit servir de leçon à tous : individuellement et collectivement.

En somme, l’idée, c’est de dire qu’en même temps qu’il faut parer au plus pressé afin que les sinistrés voient leurs peines soulagées quelque peu, il faut déclencher une réflexion stratégique sur la question dès à présent ; surtout que les esprits s’y prêtent, dans la mesure où c’est en période de crise que l’activité intellectuelle est la plus intense, et vu que les partenaires techniques et financiers sont plus sensibles aujourd’hui qu’hier. C’est pourquoi le Comité de crise devrait disposer d’une cellule qui planche déjà sur une vision à terme inspirée par la présente catastrophe. C’est ainsi qu’à partir de cette descente aux enfers de Ouagadougou, on pourra tracer le chemin qui mène aux apothéoses.

Zoodnoma Kafando

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Vos commentaires

  • Le 11 septembre 2009 à 09:36, par Tapsoba en Hollande En réponse à : Inondations à Ouagadougou : De là doit commencer le chemin des apothéoses

    Si on s en tient aux décisions prises en conseil de ministres où il est demandé que la société civile dans toute sa composante soit autorisée à avoir un oeil sur la gestion des contributions des uns et les autres ,d ores et déjà ,nous pouvons dire que les exploitations malhonnêtes dans toutes leurs formes seront limitées.Reste à savoir que ferront les bénéficiaires des aides.Quant à la question prévisionelle,cela est corsée.

    En effet,la dessus ,nous sommes face à un dilemme :

    L état doit-il faire des exonérations fiscales sur les matériaux de base de construction afin de mettre la pression sur les opérateurs économiques de baisser les prix au profit des consommateurs ? Encore faut-il qu il ait les moyens dissuasifs de le faire et quel impact aura une telle démarche sur le consommateur quand on sait que le même scénario avait tourné au fisco suite à la crise de la faim.Des opérateurs qui se remplissaient les poches au détriement et de l état qui voyait ses récettes s éffriter et du consmmateur qui ne voyait aucun changement dans son panier.Donc ce scénario me parait plus improductif que productif.

    L autre hypothèse est:Est-ce l état doit-il privilégier la construction des logements sociaux ? Et a t-il vraiment les moyens de le faire ? ce scénario aura comme avantage ,le respect des normes de construction.Car même s il optait pour la subvention ou l exonération de taxes sur les matériaux,combien sommes nous au Burkina capables de respecter les normes de construction d immeubles ? Quand on assiste à l éfondrement de ces maisons,cencées appartenir à ceux qui en ont les moyens,avant la fin de leur réalisation,ce ne sont pas les citoyens "lamda" qui pourront relever ce défit.Des gens qui éprouvent déjà des difficultés à se nourir correctement en ces temps de vie chère,se soucient moins de la qualité quand bien même ,ils n ignorent pas les conséquences de leur légèreté.Donc ,c est dire que nous sommes encore loin de sortir de l auberge tant que nous vivrons majoritairement dans la pauvrété.

  • Le 11 septembre 2009 à 10:02, par PECOS En réponse à : Inondations à Ouagadougou : De là doit commencer le chemin des apothéoses

    Les gouernants ont une grosse part de responsabilité dans ce qui est arrivé et va se reproduire encore.Où est la ceinture verte de Ouaga Mr le maire vous qui parlez souvent de "Ouaga la verte" ? Ha partie en fumée pour des besoins de parcelles donc d’enrichissement illicite de certaines personnes ? REGARDEZ BIEN LA PHOTO ET DITES MOI SI CET ECARTEMENT EST CONVENABLE ?PENSEZ VOUS A UN SYSTEME D’EVACUATION DES EAUX DE PLUIES OU USEES ?NE ME DITES QUE C’EST UNE INSTALLATION ANARCHIQUE CAR LES POTEAUX(SONABEL ET ONATEL) SONT LA POUR VOUS CONTREDIRE.

    PERSONNE NE L’EMPORTERAS AU PARADIS

    • Le 12 septembre 2009 à 13:00 En réponse à : Inondations à Ouagadougou : De là doit commencer le chemin des apothéoses

      je voulais attirer l’attention du gouvernement de la ségration dans les villes.il fait sourd oreille sur l’innondation qu’ont connu les habitants de la ville de Sya en 2008. aucun membre du gouvernement n’est passée soutenir les pauuvres habitants. n’oublions pas les innondations dans les autres villes où il ya eu des pertes en vie humaine,l’accident survenu sur la route de Bobo-Dioulasso. C’est dégoutant.

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