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Biométrie : 4 421 003 inscrits, la désillusion n’est pas loin

Publié le mercredi 29 août 2012 à 22h05min

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Biométrie : 4 421 003 inscrits, la désillusion n’est pas loin

Les Burkinabé attendent avec une certaine impatience les résultats, ne serait-ce que provisoires, du recensement biométrique qui vient de s’achever le 16 août 2012. Les citoyens de ce pays ont-ils accepté, pour une fois, de se faire recenser massivement ? C’est la grande curiosité surtout avec les gros moyens déployés et les sacrifices budgétaires consentis au niveau de l’Etat et des partenaires : 4 000 opérateurs, 12 000 aide-opérateurs, environ 30 milliards F CFA. C’est une injection à forte dose XXL en matière de mobilisation, mère de la participation électorale qui est l’élément par excellence par lequel se jauge la légitimité du système politique et du processus électoral.

L’opération de recensement biométrique dans le cadre des préparatifs des élections couplées législatives et municipales du 02 décembre 2012 a pris donc officiellement fin avec la zone 4, constituée des régions du Nord, du Centre et des Hauts Bassins. Pour rappel, c’est la commune de Banfora qui avait abrité le vendredi 1er juin 2012, la cérémonie officielle de lancement de l’enrôlement, placée sous le haut patronage du Premier Ministre et Chef du Gouvernement, Béyon Luc Adolphe TIAO qui s’était fait représenter par le ministre d’Etat ministre chargé des Relations avec le parlement et des réformes politiques Arsène Bongnessan Yé. Beaucoup d’espoirs se fondaient en matière de participation massive de la population à l’opération. Les projections 2012 tablaient sur 7 604 423 inscrits.

Aux décomptes, à la fin de l’enrôlement dans toutes les zones et avant le dédoublonnage prévu, l’opération a pu mobiliser 4 421 003 inscrits soit 58,14% des projections. C’est un chiffre provisoire mais déjà, la désillusion n’est pas loin si fait que certains acteurs politiques et sociaux demandent une prolongation du délai des opérations. Toujours est-il qu’il était illusoire de penser que les Burkinabé changeront de façon spectaculaire leur abstentionnisme électoral. Que faut-il faire à présent ? Prolonger les délais pour avoir le maximum d’inscrits et éviter, comme certains le pensent, des frustrations au risquer de mordre sur les délais du processus (comme certains le craignent) ou encore accepter la situation actuelle en se disant que malgré tout, on a fait mieux qu’en 2010 où le nombre d’inscrits s’élevait à 3 232 006 ?

A titre de comparaison, en 2010 la tenue d’une seconde phase de recensement avait permis d’avoir en plus 851 552 nouvelles personnes. Le total cumulé des deux phases est de 3 257 680 inscrits sur un potentiel électoral de 7 025 352. Ce chiffre indiquait que 46,37% du potentiel s’était inscrit. Parmi ces 3 257 680, il fallait faire remarquer que beaucoup se sont fait recenser avec leur acte naissance qui n’est pas une pièce valide quand il s’agissait de voter. A l’époque on avait pensé que le taux de 46,37% d’inscrits ne répondait pas aux objectifs et aux attentes d’un pays qui voulait faire de son élection présidentielle, celle la plus propre, la plus transparente et la plus disputée, et cela, pour donner la preuve au monde entier que le Burkina Faso est un exemple de démocratie, et cela encore, parce que toutes les conditions auraient été réunies. Malheureusement, la démocratie a la peau dure dans ce pays des hommes intègres.

En faisant une revue rapide des élections depuis 1991, on a l’impression que les Burkinabé ont cette tradition de bouder la participation. Les chiffres officiels parlent d’eux-mêmes. Au référendum constitutionnel de 1991, le nombre de Burkinabé inscrits a été de 3 403 351. Le taux de participations, 48,78%. A l’élection présidentielle de la même année, les inscrits se chiffraient à 3 433 331 ; taux de participation 25,28%.

Aux législatives de 1992, le nombre d’inscrits a été de 3 564 510 ; taux de participation 35,25%. Aux législatives de 1997, on dénombrait 4 985 352 inscrits ; taux de participation 44,53%. Aux législatives de 2002 sur près de 11 000 000 de Burkinabé, environ 3 000 000 se sont inscrits. Pour l’élection présidentielle de 2005, 3 918 103 personnes s’étaient inscrites sur la liste électorale. 2 288 257 ont effectivement voté. Le taux de participation officielle était de 57% environ.

Pourquoi la biométrie n’a pas emballé ? Et que faire ?

Visiblement, on ne devrait pas s’alarmer beaucoup par rapport au 58,14% de taux atteint car même si par exemple, le nombre d’inscrits en 2012 est inférieur à celui de 2007 (4 465 668 inscrits), les rapports de qualité plaide pour la situation actuelle en considérant les garanties de fiabilité du système biométrique. En 2007 et les autres années d’ailleurs, les inscriptions fictives ont abondé et le fichier électoral est resté infecté.

Malgré les garanties de sécurité, dès que les chiffres de la biométrie seront connus des acteurs politiques et de l’opinion, il ne manquera pas de commentaires de toutes sortes. Les uns chercheront des boucs émissaires, à répartir les responsabilités et les autres demanderont une autre session de rattrapage pour permettre d’avoir d’autres inscrits supplémntaires. Pour les premiers, la CENI et les partis politiques seront certainement épinglés avec une accentuation sur les insuffisances organisationnelles constatées ; la qualité médiocre d’une partie du matériel d’enrôlement avec les pannes techniques notées, le mauvais rendement (donc la non maitrise du matériel) de certains agents, l’insuffisance dans l’implication des partis politiques en matière de mobilisation des citoyens, les problèmes de communication, etc.

Pour la seconde catégorie de personnes, il s’agira en particulier de donner une autre chance à ceux qui ne se sont pas fait enrôler pour telle ou telle raison. En tout cas, la CENI cherche la meilleure formule et il est évident que dans quelques jours, une communication sera faite autour du processus de recensement. Le Président de la CENI, Me Kéré est dans une logique de consultation avec les partis politiques pour voir la position à adopter face à une telle situation. Déjà, le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) semble opposer un non possumus (son refus) avec pour raison principale le risque du non respect du calendrier électoral en cours.

Si le gouvernement donne son accord pour une prolongation des opérations en rapport avec les moyens disponibles, le CDP se pliera face à la pression que pourraient exercer les partis politiques de l’opposition et la société civile qui donnent des signes d’une certaine convergence de vue sur la question. Il se susurre que la raison profonde du refus du CDP de voir l’opération se prolonger est qu’il aurait déjà fait enrôler le maximum de son électorat. Le fichier électoral qui devrait résulter ferait donc son affaire. Affaire à suivre.

En attendant que les choses se décident dans les jours à venir, on peut noter que globalement l’enrôlement s’est déroulé dans des conditions acceptables en dépit des insuffisances multiples qui sont soulevés par les uns et les autres. Le grand enseignement de cette opération est que la population ne s’est pas beaucoup emballée et ne s’est pas laissé séduire par la nouvelle technologie. Preuve que les problèmes de la démocratie au Burkina Faso se trouvent peut-être ailleurs. Au lieu de se passionner pour atteindre des taux record pour faire bonne mine pour l’image du pays, le Burkina Faso devrait peut-être se résoudre à composer avec les citoyens qui veulent participer aux élections ou à la vie politique de façon générale en réunissant déjà les conditions idéales de la transparence, de la compétitivité et de l’équité.

Par Michel NANA

Bendré

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Vos commentaires

  • Le 30 août 2012 à 06:45, par oran En réponse à : Biométrie : 4 421 003 inscrits, la désillusion n’est pas loin

    La désillusion est bien présente. Le votant revient cher mais le plus important est que le pouvoir dispose d’un mécanisme qu’il activera à tout moment pourl’article 37.

  • Le 30 août 2012 à 09:56, par olar system En réponse à : Biométrie : 4 421 003 inscrits, la désillusion n’est pas loin

    l’opération n’a pas été facile avec les opérateurs qui ont traversés a charrette à tricycle dormir dans des cases même au dehors pour avoir se maigre taux, vu les conditions une prolongation s’impose surtout dans les chefs lieux et environnant car après avoir enlevé les doublon et les erreurs le taux va baisser et pire combien vont voter pour enfin un vrai changement

  • Le 30 août 2012 à 12:46, par JACKS En réponse à : Biométrie : 4 421 003 inscrits, la désillusion n’est pas loin

    ENVIRON 6785 F PAR ÉLECTEUR INSCRIT. POUVAIT MIEUX FAIRE SI LA CLASSE POLITIQUE ÉTAIT CONSCIENTE QUE C’EST L’ARGENT PUBLIC QUI EST MOBILISÉ POUR FINANCER ; J’ESPÈRE QUE LA CENI CONSERVERA JALOUSEMENT CETTE BASE DE DONNÉES POUR LES ÉLECTIONS FUTURES ; PLUS BESOIN DONC DE S’INSCRIRE A CHAQUE ÉLECTION ; LA CENI PEUT CONSERVER QUELQUES KITS POUR UN RECENSEMENT PERMANENT DES ÉLECTEURS AU NIVEAU DES COMMISSARIAT DE POLICE OU DES HAUTS COMMISSARIATS DE PROVINCE POUR DES ACTUALISATIONS EN TEMPS RÉEL ; MAIS AU PAYS DES DEALS ET DES FRAUDES, ON ATTENDRA ENCORE 2014 POUR LANCER DES OPÉRATIONS DE RECENSEMENT POUR LES ÉLECTIONS PRÉSIDENTIELLES DE 2015 ; AYONS PITIÉ DE NOS FINANCES PUBLIQUES, LES DÉSAFFECTION DES POPULATIONS SONT LIÉES A CES MOBILISATIONS RÉCURRENTES POUR S’INSCRIRE ;

  • Le 30 août 2012 à 18:40, par akim En réponse à : Biométrie : 4 421 003 inscrits, la désillusion n’est pas loin

    j’aimerai bien qu’on ouvre un second passage d’inscription

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