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Pronunciamiento en Guinée-Bissau : La CEDEAO a cédé

Publié le lundi 14 mai 2012 à 02h03min

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C’est le moins qu’on puisse dire de sa décision, vendredi, que Manuel Sérifo Nhamadjo, initialement proposé par les putschistes du 12 avril pour diriger le pays, conduise la transition : le 21 avril, les militaires l’avaient proposé pour diriger le pays jusqu’aux prochaines élections, mais, considérant que sa nomination sortait de la "légalité", il s’était rebiffé. Dissident du PAIGC, Nhamadjo était arrivé 3e au premier tour de la présidentielle du 18 mars avec 15,75% des voix. "Le président de l’Assemblée nationale assure la transition", a déclaré à la presse le Secrétaire d’Etat nigérian aux Affaires étrangères, Nurudeen Mohammad, arrivé jeudi à Bissau à la tête d’une délégation de la CEDEAO.

Il "n’est plus question d’un retour" donc au pouvoir des ex-Premier ministre, Carlos Gomes Junior, et président par intérim, Raimundo Pereira, renversés lors du coup d’Etat du 12 avril ; plus question de leur retour au sommet de l’Etat, car, précédemment, la Communauté avait exigé le retour du dernier cité à la tête du pays ; même que, à son sommet d’Abidjan, où sont exilés les deux, ou de Dakar, la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest les avait associés ; à quel titre si ce n’était pour montrer aux putschistes qu’elle misait toujours sur eux ?

Visiblement, ni cela ni les différentes mesures et menaces de rétorsion de la CEDEAO n’auront impressionné la junte bissau-guinéenne, qui, aura obtenu, ne serait-ce qu’en partie, que l’organisation ouest-africaine entérine, in fine, ce qu’elle voulait en perpétrant le pronunciamiento du 12 avril : le départ de Raimundo Pereira et, surtout, de Carlos Gomes Junior, soupçonné de vouloir, au moyen du contingent militaire angolais (Missang), tenir en respect la Grande Muette, la mettre au pas pour la républicaniser en la soumettant à l’autorité du pouvoir civil et, pourquoi pas, extirper de ses rangs "les trafiquant-narco". En effet, instable depuis son indépendance en 1974, le pays est devenu une plaque tournante du trafic de drogue, dans lequel des militaires comme des hommes politiques seraient impliqués.

Qu’en est-il du renvoi du contingent angolais, officiellement accusé d’avoir des visées colonialistes sur leur pays comme sur le Congo-Brazzaville, où l’armée angolaise a remis en scelle Denis Sassou N’Guesso pour qui elle a combattu contre les partisans de Lissouba ?

La délégation de la CEDEAO n’a pas, devant la presse en tout cas, parlé du retrait des environ 600 soldats de la Mission angolaise (Missang), encore moins de l’arrivée de la force militaire ouest-africaine supposée à la remplacer. C’est pourtant la présence de la Missang qui a, officiellement, été la cause du coup de force du 12 avril !

Toujours est-il que, de l’opposition politico-militaire entre, d’un côté, Carlos Gomes avec le PAIGC ainsi que la Missang et, de l’autre, le PRS de Koumba Yala et l’armée nationale, c’est les seconds qui sont sortis vainqueurs avec, comme cerise sur le gâteau, la constitutionnalisation et la reconnaissance internationale de leur nouvel ordre des choses.

Pas étonnant donc que le Parti africain pour l’indépendance de la Guinée-Bissau et du Cap-Vert ait rejeté la décision de la CEDEAO, qu’Augusto Olivais de ce parti a qualifiée "d’anticonstitutionnelle".

En attendant, constitutionnelle, inconstitutionnelle, voire anticonstitutionnelle, la solution de la CEDEAO réjouit certainement Me Bocounta Diallo, avocat de la veuve du regretté président Nino Vierra dans l’affaire du dépeçage de son mari. En effet, dans une lettre à la Communauté, le célèbre avocat malien s’est prononcé contre toute issue à la crise bissau-guinéenne qui aurait permis à Carlos Gomes d’être au pouvoir, donc d’avoir une immunité qui lui aurait évité d’être entendu par la justice pour son éventuel rôle de commanditaire de l’assassinat du prédécesseur de Raimundo Pereira ; à écouter l’avocat du Barreau de Bamako en effet, selon des personnes auditionnées, l’ex-Premier ministre fraîchement chassé du pouvoir et du pays en serait l’instigateur.

Ahl-Assane Rouamba

Sidwaya

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