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AFRIQUE DU SUD : Voyage au pays des contrastes

Publié le jeudi 22 juillet 2010 à 00h57min

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L’Afrique du Sud vient de réussir brillamment l’organisation de la 19e édition de la Coupe du monde de football. C’était du 11 juin au 11 juillet 2010. A la faveur de cet événement planétaire, nous avons (re)découvert cette « nation arc-en-ciel » aux mille et une richesses avec ses poches de misère. Retour sur un voyage mémorable !

Nous sommes le 5 juillet 2010 ! South Africa Airways, la compagnie sud-africaine se dépose à l’aéroport international de Johannesburg. Il est 7h 10mn, heure d’Afrique du Sud, soit 5h 10 à Ouagadougou et à Koudougou. La délégation que conduisait Lassiné Diawara du groupe Bolloré s’attelle à avoir la correspondance qui devait l’amener directement à Durban, cette autre ville sud-africaine où nous devions suivre la deuxième demi-finale du Mondial. Très rapidement, les 9 membres de la délégation (Diawara, François Compaoré et son épouse, Djibrila Barry, Zambendé Théodore Sawadogo, Salif Kaboré, le confrère malien Mamadou Diarra, Alexis Konkobo et moi) accomplissent les formalités et sont prêts pour le décollage. Pas de formalités policières. En moins d’une heure (55 mn), nous sommes à l’aéroport de Durban. Un aéroport tout neuf, construit spécialement pour la Coupe du monde. Le groupe débarque, à l’instar des autres passagers. J’aperçois une pancarte : "Bolloré" ! Ça y est, ceux qui doivent nous accueillir sont là. Un homme, visiblement âgé, mais au dynamisme perceptible à travers la démarche s’approche et nous souhaite la bienvenue.

Très vite, il nous conduit à l’extérieur où nous attendaient l’ambassadeur du Burkina en Afrique du Sud, Moumini Fabré et son protocole Michel Diendéré. Retrouvailles ! On se croirait dans une rue de Ouaga. Le mooré est tout de suite parlé. Le bus qui doit nous amener à l’hôtel est prêt. 25 mn après son démarrage, notre guide se saisit du micro et annonce : « Bienvenus en Afrique du Sud. Je suis guide touristique. Je me nomme Justus. Mon nom de famille est plus compliqué. On retient Justus. Je suis Sud–Africain ». Je jette un coup d’œil sur le badge qu’il portait pour savoir que son nom de famille est « DE Boéré ». A peine les présentations terminées, que notre guide , qui a tout de suite affiché son professionnalisme, nous décrit les rues et les sites traversés. Les membres du groupe ne tarissent pas de questions. Le paysage est beau. Les autoroutes sont impressionnantes. Je revois le bonheur que j’ai eu lors de mon premier séjour dans ce pays en 1996 à l’occasion de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN).

Avant de rejoindre notre hôtel, on a fait escale dans un restaurant pour se refaire des forces. Un vieux bateau qui sert de restaurant et qui s’appelle du reste "CARGOT". Une belle enceinte, mais le service y était lent. Ce qui n’a pas manqué de troubler l’estomac de certains. Par la suite, on comprendra que notre guide Justus accepte tout réaménagement du programme, sauf celui du repas. Lorsqu’il est arrivé de revoir le programme avec lui, d’un ton calme et respectueux, il énonce : « Comme vous voulez ! Mais il y a un problème : le restaurant ! C’est déjà réservé ». Cette phrase constituera le sujet d’humour tout au long du séjour.

Loger avec les champions du monde

Après ce repas, nous voilà enfin à l’hôtel, « Protea hôtel ». Un bel hôtel qu’avait également choisi l’équipe espagnole. Je me retrouve être le voisin du coach adjoint de l’équipe. Un monde encercle le bus des Espagnols au sol. Chacun voulait voir les coéquipiers de Iniesta qui sortaient pour aller à l’entraînement en vue de la demi-finale contre l’Allemagne. La police veille au grain. Personne de nous ne savait qu’il logeait avec les futurs champions. Ils firent un match propre en demi-finale contre l’Allemagne (1-0). De toutes les façons, depuis le début du Mondial, l’Espagne avait toujours triomphé sur ce même score.

Ce jour-là, l’ambiance était au rendez-vous au stade de Durban. L’aéroport de Durban, apprend-on, est envahi par des jets privés. Plus de place à l’aéroport de Durban ! Des vols réguliers n’ont donc pu se poser, privant ainsi des supporters à bord de cette demi-finale. Accueilli par Arnaud de la société, les délégués de Bolloré Afrique sont bien logés au stade. Des VIP admis dans des suites et restaurés tout au long du match. De la liqueur au vin, de la bière à la sucrerie en passant par le jus, chacun en a pris de son goût. Mais, Diawara, Salif et autre Djibrila, en bon El Hadji, ne se contentaient que des jus qui arrosaient les bons plats servis.

Les positions divergent. Les supporters espagnols sont Salah Compaoré, Djibrila Barry et Mamadou Diarra. Les seuls Allemands du jour étaient François Compaoré et Zambendé Théodore Sawadogo. Les défis se lancent. Chacun promet de "terrasser" l’autre en achetant les gadgets de son équipe. Membre permanent de la CAF , François Compaoré évite de porter un gadget distinctif. La suite, on la connaît. « Les Espagnols » du Burkina étaient aux anges. Alors, le chef de mission, Lassiné Diawara fait sauter un champagne en l’honneur des vainqueurs. En fair-play, les vaincus acceptent partager le verre dans un restaurant jouxté au stade. A l’issue de la victoire espagnole, on attendait de revoir ces Espagnols à l’hôtel. Mais Torres et les siens n’y étaient plus retournés. Du stade, ils ont directement rejoint l’aéroport pour rallier directement Johannesburg en vue de leur finale. Personne ne regrette d’être allé à Durban, là où se trouve le 9e plus grand port du monde et le 1er au niveau africain.

Prêts pour la finale du 11 juillet

La finale ? Nous aussi, faisons nos bagages pour ne rien rater de cette rencontre entre Espagnols et Hollandais. Nous rallions donc Johannesburg, cette fois, sans François Compaoré et son épouse, qui ont continué sur Paris pour d’autres contraintes. L’ambiance dans le groupe est réconfortante. Djibrila Barry ne cesse de taquiner son copain et ami Diawara qui répond toujours par un sourire et un calme olympien. Notre confrère malien et Salif Kaboré, soutenus par Djibrila Barry évoquent l’histoire du football africain et mondial. Arrivés à Johannesburg le 8 juillet, c’est toujours le même accueil, le même confort, un hôtel de luxe.

Dans les rues de Soweto

Avant le jour "J", notre guide Justus nous permet de visiter l’historique Soweto le 9 juillet. C’est la ville qui décrit mieux l’histoire de l’apartheid, cette ville jumelle de Johannesburg, créée à part pour les ouvriers noirs. Les habitations, malgré la modernisation de cette ville en chantier, sont désolantes. Des taudis aux toits qui ne résisteront pas à un grand vent, comme une poubelle. Beaucoup d’habitants clandestins parmi 5 millions d’habitants. C’est là que je me suis rappelé que dans les années 60-70, Soweto était devenu le centre des activités anti-apartheid avec ce quartier historique nommé Orlando, la région de Nelson Mandela. Là, la plupart vivent sans eau courante et sans électricité.

« Il y a parfois 20 à 25 personnes qui habitent la même maison », ajoute notre guide. Des maisons sous forme de boîtes d’allumettes. La visite se poursuit jusqu’au domicile de Nelson Mandela devenu un site touristique. Arrivés, nous trouvons plusieurs nationalités venues visiter ce domicile pas comme les autres. L’entrée est payante. On y revoit la chambre, avec toujours le lit, des deux enfants de Mandela. Des photos retraçant la lutte héroïque de l’icône sud-africain, de sa femme Winnie jonchent les murs du site avec des messages-photos. Les prises de vue sont permises. Les membres de notre délégation s’y donnent à cœur joie.

Cap maintenant sur cette petite colline où se trouve le domicile de Winnie Mandela, ce personnage assez discuté en Afrique du Sud et qui a joué le rôle qui est le sien dans la lutte pour la libération. On n’a pas eu accès à l’intérieur de la cour. En repartant à l’hôtel, je vois cette église catholique de Soweto qui rappelle sa forte contribution dans la lutte contre l’apartheid. Le guide explique mieux : "L’Afrique du Sud est un pays à 80% protestant.

Il y a une communauté importante de catholiques. L’Eglise catholique de Soweto était le centre de la lutte contre l’apartheid. C’est là où les prêtres blancs et noirs étaient opposés à l’apartheid. C’est là où les étudiants tenaient leurs réunions et planifiaient leurs actions contre le gouvernement et l’apartheid. Cette église est devenue un symbole de la résistance contre l’apartheid". Et le guide de conclure : "On peut dire en toute franchise que l’Eglise catholique, avec les autres églises, a joué un grand rôle dans la lutte contre l’apartheid". Retour à l’hôtel pour un repos mérité en attendant la finale. Dans le bus, le DG de la SONABEL ne cesse de donner des instructions téléphoniques à ses directeurs régionaux. Il veut voir tout le monde à son poste le jour de la finale pour résoudre tout souci lié aux coupures le jour de la finale.

Vivre une finale de Coupe du monde

Le 10 juillet, le Secrétaire général du gouvernement, Yacouba Barry, nous y rejoint. Les camps s’affichent. Les supporters connus des Espagnols défient cette fois les supporters des Hollandais que sont Salif Kaboré et Zambendé Théodore Sawadogo, président de la FBF. "Vous allez voir", lance le DG de la SONABEL au conseiller Djibrila Barry qui rétorque "On n’est pas pressé". Et de dire à son "adversaire" du jour : "Salif, si la Hollande gagne, je te donne tout ce que tu veux ; mais si l’Espagne gagne, je vais souffler mon vuvuzéla devant ta chambre toute la nuit". Contrat signé ! Le conseiller spécial Barry s’essaie déjà à souffler sur deux vuvuzéla car il n’est pas aisé de souffler dans cet instrument.

Il y avait des indécis comme Diawara, Yacouba Barry, Alexis Konkobo et moi : Espagne ou Hollande ? Un bref spectacle de clôture. Puis une apparition de l’idole sud-africaine, Nelson Mandela, sur la pelouse, dans un fauteuil roulant. Le stade explose. Le vénéré est là. Un autre coup réussi par l’Afrique du Sud. Le match commence. Le Président du Faso est dans les tribunes. L’Espagne inquiète la Hollande. Salif est inquiet. Djibrila est optimiste. C’est lui remporte le match. C’est lui le champion du monde. Salif qui était son voisin se lève et lui serre la main. « Félicitations », lui lance-t-il. Puis intervient la remise du trophée. Extase ! Soirée en couleurs, surtout avec ces feux d’artifices extraordinaires. Yacouba Barry, ne sait plus dans quelle position faire ses photos. Le temple de Soccer City Stadium et ses 94 500 places vibrent. Je suis aux anges pour assister une fois de plus à une finale de Coupe du monde après celle de Berlin en, 2006.

Réduire les inégalités

La fin d’un Mondial en apothéose ! L’Afrique du Sud venait de relever un pari. La FIFA est aux anges. Elle donne une note d’excellence à l’Afrique du Sud : 9/10. En effet, le pays de Nelson Mandela et de Jacob Zuma a réglé cette coupe de la Coupe du monde comme la cadence de pas militaires. Rien à redire ! 8 stades dont un neuf de 70 000 places et le superbe Soccer City de Johannesburg et ses 94 500 places. Des autoroutes, des aéroports comme le tout nouveau de Durban, des aéroports rénovés comme ceux de Johannesburg et de Cape Town, des TGV ! Bref, des investissements qui vont profiter au pays et qui ont coûté la bagatelle de 40 milliards de rands (la monnaie sud–africaine), soit environ 5 milliards d’euros. En F CFA, prenez vos calculatrices : 650 milliards multipliés par 5. Combien ? J’ai essayé, mais ma machine marque "Erreur".

Vous avez compris : la somme ne peut s’afficher sur ma calculatrice. Enorme comme budget ! Satisfaction à deux niveaux : psychologiquement, ce Mondial a intensifié et fait progresser les aspirations de l’Afrique du Sud. Economiquement, elle va recueillir de gros dividendes. Il n’y avait qu’à voir ces gadgets immensément et qualitativement confectionnés, avec des vuvuzéla, et le tout s’arrachait comme du pain. On annonce déjà un bénéfice de 483 millions d’euros, soit près de 314 milliards de F CFA.

Quoi de plus normal pour ce pays aux 49 millions d’habitants ! L’Afrique du Sud constitue la centrale du continent avec un niveau de développement surprenant. Des centrales électriques ! Premier producteur d’or en Afrique et 2e au monde (250 tonnes par an) après la Chine (260 tonnes par an). Premier producteur de platine au monde puisqu’elle produit 80% de la platine mondiale. Ce pays à l’extrémité australe du continent séduit donc. Puissance continentale, mais aussi un pays de contrastes. En effet, les ressources semblent y être mal réparties comme dans bien des pays. Il n’y a qu’à voir ce grand centre commercial, Sound Topwn city, merveille des merveilles, où l’on trouve tout, mais Alexis Konkobo, Mamadou Diarra et moi, réfléchissions par deux fois avant d’y acheter un article. Ce centre est situé à 3 km des bidonvilles, le quartier noir. Ecoeurant donc de voir ces immeubles côtoyer ces taudis.

L’Afrique du Sud peut mieux faire. Elle est une puissance économique indéniable. Le taux du chômage est élevé : 35% dans les quartiers noirs et 8% chez les Blancs. 79% de Noirs vivent en Afrique du Sud aux côtés de 9,5% de Blancs, 8,9% de métis et 2,6% d’Asiatiques. Cette « nation arc-en-ciel » peut faire quelque chose, elle doit faire quelque chose, car elle en a les moyens. Les inégalités et la xénophobie qui courent toujours doivent disparaître. En attendant, nous sommes revenus heureux, heureux d’avoir été témoins privilégiés d’une fête réussie, d’une Afrique honorée, heureux d’avoir été de ce voyage du groupe Bolloré. Si le retour fut fatiguant à cause d’un retard de vol assuré par ASKY (Accra-Lomé), le reste fut des plus mémorables. C’était l’essentiel !

Alexandre Le Grand ROUAMBA (Ouaga-Afrique du Sud-Ouaga)

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