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Présidentielle du 21 novembre 2010 : "DJ Mouss" et la Ceni, hors gamme !

Publié le vendredi 7 mai 2010 à 02h02min

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A 7 mois d’une présidentielle que beaucoup estiment (presque) sans enjeu, au regard du déséquilibre des forces politiques en présence, le débat électoral au Burkina a pris une tournure très polémique, avec les prises de position de certains acteurs. En cause, le faible taux d’inscription sur les listes électorales ; maigre récolte pour les moissonneurs de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni). En deux sorties, ils totalisent à peine un peu plus de 3 millions de personnes inscrites.
Trois millions, c’est moitié moins qu’en 2005, pour un budget qui, paradoxalement, est passé de 5 à 7 milliards de francs CFA. La partie des prolongations a d’ailleurs officiellement englouti la bagatelle de 200 millions de francs CFA. En somme, beaucoup d’argent pour un revers cinglant !

Il n’en fallait pas plus pour irriter Moussa Michel Tapsoba. Tout simplement parce que monsieur le président de la Ceni refuse que l’on veuille procéder à un croisement des chiffres entre ceux d’il y a 5 ans et ceux de 2010.

Puis, au détour d’une réplique mal ajustée, il lâche la petite phrase qui fait tant de bruit depuis lors : même avec 10 électeurs inscrits, selon lui, l’élection se tiendra à la date prévue et selon le chronogramme arrêté !
Au passage, le président de la Ceni, qui sort ainsi de sa zone d’inviolabilité, a tenu à régler quelques comptes avec des personnalités du monde politique, des médias et de la société civile : leurs opinions ou réserves émises sur le processus en cours ont été systématiquement battues en brèche par l’organisateur en chef des élections au Faso.

Pour lui, ces différents points de vue exprimés ne sauraient tenir lieu de vérité biblique, encore moins de boussole aux commissaires de la Ceni ; ils n’engageraient que leurs auteurs respectifs. Conclusion, les chiens aboient, et la caravane passera tranquillement son chemin.
Epargné, l’Office national d’identification (ONI) ? Que nenni. Convaincu de son bon droit, le patron de la Ceni accuse ouvertement l’ONI d’avoir gardé par-devers lui les extraits d’acte de naissance de nombreux citoyens. Ceci, dans le cadre de l’opération de délivrance massive des nouvelles cartes nationales d’identité burkinabè. Une situation qui, de l’avis de « DJ Mouss », aurait empêché de nombreuses personnes d’aller à la rencontre des agents recenseurs.

Quoi qu’il en soit, elle est bien là, la désaffection des citoyens par rapport à l’élection à venir. Et pendant que certains partis (de l’opposition comme du pouvoir) appellent les citoyens à se mobiliser pour la victoire de leur candidat, d’autres formations appellent, de leur côté, à un report de l’élection. Pour l’heure, aucune réponse n’a encore été apportée en haut lieu, par rapport à cette revendication. Mais pour qui connaît le Faso et ses mœurs politiques, ce silence des autorités n’est pas difficile à décrypter.
Dans le meilleur des cas, il pourrait signifier un dilemme, et donc une possibilité d’arrondir les angles. Dans ce cas, un décalage des échéances ne serait pas à exclure. Hypothèse peu plausible toutefois, puisque le président de la Ceni a déjà mis son honneur en jeu, en excluant toute idée de report.

En outre, repousser le rendez-vous du 21 novembre 2010 reviendrait à stopper la mécanique mise en branle par certains des candidats qui semblent manifestement très pressés d’en découdre. C’est le cas de Bénéwendé Sankara, qui tisse sa toile de campagne aux quatre coins du Burkina. Alors même que d’autres s’interrogent sur la stratégie à mettre en œuvre pour ratisser les parrainages, le chef de file de l’opposition, lui, installe ses directeurs régionaux de campagne.

Animé par le secret espoir (on s’en doute aisément) de faire mentir tous ceux qui prédisent un résultat téléphoné pour le "capitaine", le leader sankariste est résolument engagé dans la conquête d’un électorat qui fait de la résistance. Dans le pire des cas, en revanche, si nous n’y sommes pas déjà, c’est la tactique du rhinocéros qui devrait nous conduire en toute bonne logique vers une élection sans un réel engouement de la part des électeurs. Et contrairement à ce qui est dit à ce sujet, un tel cas de figure porterait un coup rude à une culture électorale qui fêtera bientôt ses 20 ans de pratique. En effet, imaginons que sur 14 millions d’habitants, dont une population électorale d’à peu près 8 millions d’individus, moins d’un tiers se sente concerné par le choix du Président du Faso ! Manifestement, il y aurait un problème ! Ce qui appelle inévitablement à une introspection de la part de l’élite. Cette dernière, par son discours radicalement opportuniste et souvent démagogue, n’a fait que renforcer la distance entre elle et les citoyens.

A. TraorÈ

Journal du Jeudi

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