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Ambassadeur de Taïwan, Zhang Ming-Zhong : “L’importance de la formation professionnelle ne se discute pas”

Publié le mardi 23 mars 2010 à 00h32min

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L’ambassadeur de la République de Chine Taïwan, Zhang Ming-Zhong

Ouagadougou a abrité, le 15 mars 2010, un atelier d’information et de concertation sur la mise en œuvre du Programme de renforcement de la formation professionnelle (PRFP). Deux personnalités, le ministre délégué, chargé de l’Enseignement technique et de la Formation professionnelle, Maxime Somé, et l’ambassadeur de la République de Chine Taïwan, Zhang Ming-Zhong, apprécient, dans les lignes qui suivent, cette rencontre. Pour la dernière citée, l’importance de la formation professionnelle dans le développement d’un pays ne se discute pas.

Rappelez-nous le contexte de cette rencontre d’échanges.

• C’est depuis 2007 que nous avons procédé au lancement du Programme de renforcement de la formation professionnelle (PRFP) et au recrutement d’un coordonnateur pour son fonctionnement. Après quelque trois ans, il était normal que nous marquions un arrêt pour évaluer le chemin parcouru. Beaucoup de choses ont été faites. Je peux vous citer, par exemple, les plans architecturaux qui ont été présentés aux différents acteurs participant à ces échanges.

Si vous allez sur le terrain, vous pourrez constater que certains schémas ont même déjà démarré. D’où cette rencontre entre partenaires pour apprécier ce qui a déjà été fait afin d’impulser une énergie nouvelle pour le reste des chantiers à exécuter. Ensemble, nous avons discuté sur les réalisations et la vision de l’après-programme qui, vous le savez, est conçu pour une période de six ans dont la moitié est déjà consommée.

Lors de ces échanges, il s’est donc agi pour nous de mesurer le chemin parcouru pour mieux envisager les trois ans restants et l’après-programme. Au présidium de cette rencontre, nous avions la Chine Taïwan, représentée par son ambassadeur au Burkina, le représentant du Cadre de concertation des PTF engagés dans l’enseignement technique et la formation professionnelle au Burkina ainsi que des nationaux.

Les participants étaient issus d’autres pays, des ministères sectoriels qui sont impliqués dans la mise en œuvre de ce programme mais surtout les professionnels. Au départ, le programme de l’enseignement technique et de la formation professionnelle avait commencé timidement avec quelque 7 ministères. Mais après l’élaboration du plan d’action en cours d’exécution, nous avons enregistré 15 secteurs ministériels. Tous ceux qui, au début, ne se sentaient pas concernés, s’intéressent aujourd’hui à la formation professionnelle.

Les diplômés qui sont le produit de nos écoles techniques et professionnelles est considéré par nombre d’entreprises comme des théoriciens. Comment expliquez-vous cela ?

• Demandons-nous si notre pays, le Burkina Faso, dispose d’entrepreneurs assez ouverts pour recevoir des gens formés. Je pense qu’il nous faut d’abord un tissu industriel et d’entrepreneurs qui comprennent que leurs établissements sont des champs d’application pour les gens qu’on va former et qu’ils vont employer bientôt. Nous avons deux partenaires, à savoir le monde de la formation pédagogique et celui de l’entreprise.

La formation professionnelle ne peut pas se faire sans les professionnels. Nous insistons aujourd’hui pour que les deux mondes appréhendent la nécessité de collaborer. Cela y va de l’intérêt de tous et de toute la nation pour que nous ne formions pas que des théoriciens. Sachez que c’est un long chemin que nous venons d’engager, parce que le domaine de l’enseignement technique et de la formation professionnelle, n’ayant pas été développé dans le passé comme il le faut dans ce pays, il est encore à ses débuts.

Sachez que le gouvernement en a fait l’axe 1 du programme du président du Faso orienté sur la valorisation du capital humain. Et c’est fondamental, cet engagement, de doter le Burkina du capital le plus important qu’il puisse avoir, notamment l’homme formé pour le hisser parmi les pays émergents. Ce ne sont pas de vains mots qu’on aligne, mais une nécessité.

Regardez les pays asiatiques, ils se sont développés parce qu’il y avait une masse critique de gens bien formés. Il en est de même pour les pays anglophones qui, au lieu de se contenter d’un enseignement général ou théorique, ont mis l’accent sur l’enseignement technique et professionnel.

Prenons également l’exemple de nos partenaires taïwanais qui nous accompagnent dans cet important programme à hauteur de 35 milliards de francs CFA. Dans leur pays, en plus de l’enseignement général, il faut avoir au moins trois certificats dans le domaine professionnel pour valider ses diplômes. Ce n’est pas le cas chez nous où les gens se sentent complexés quand ils doivent opter pour l’enseignement technique.

L’enseignement technique et la formation professionnelle semblent méconnus aujourd’hui. Pourquoi ?

• La méconnaissance de l’enseignement technique était due à la considération qu’on avait de ce sous-secteur de l’éducation dans notre pays. Nous avons hérité cela du système français. Au Burkina, les élèves excellents étaient envoyés au lycée Zinda. Ceux qui étaient moins brillants, dans les années 1923, allaient au Centre de formation professionnelle qui est devenu le Collège d’enseignement technique.

Les moins bons étaient orientés à l’Ecole militaire qui est l’ancêtre du Prytanée militaire de Kadiogo (PMK). Ce n’est que dans les années 70, avec l’arrivée de l’armée aux affaires, que la formation militaire a été valorisée. Quant à l’enseignement technique, il n’avait pas évolué. On considérait que ceux qui allaient à l’enseignement technique avaient échoué ailleurs.

Il faut qu’on sache que cette façon de voir les choses est fausse. Nous devons comprendre que chacun a ses prédispositions et ses capacités. Dans des pays comme l’Allemagne, l’enseignement technique et la formation professionnelle font partie du premier choix. Là-bas, contrairement au système français, c’est quand on a échoué qu’on va à l’enseignement général.

Vous savez bien qu’au Burkina, avant, il fallait être barbu pour aller à l’enseignement technique. On empêchait les jeunes qui n’avaient pas 14 ou 15 ans, titulaires du Certificat d’études primaires (CEP), de s’orienter à l’enseignement technique. Eh bien ! nous avons récemment, avec le ministère de l’Enseignement de base, sauté ce verrou. Maintenant l’enseignement technique est ouvert à tout enfant ayant son CEP. Il faut maintenant que nous, parents d’élèves, cessions de mépriser l’enseignement technique et la formation professionnelle.

Quelles dispositions avez-vous prises pour que l’enseignement technique et la formation professionnelle aient un lien avec le marché de l’emploi ?

• Nous avons fait des tournées dans toutes les régions, nous avons discuté avec les différents acteurs (la société civile, les politiques, les spécialistes) et c’est sur les propositions des populations que nous avons arrêté les programmes qui doivent être exécutés dans les établissements.

Nous nous sommes inspirés également des documents élaborés par le Service national de développement, qui donnent le tissu économique du Burkina Faso, pour déterminer les filières. Bref, suivant les projections dont nous disposons, nous estimons que cela colle bien à la réalité.

Mais comme le monde évolue, si dans le futur le tissu économique change par rapport aux propositions actuelles, nous réadapterons notre vision à la réalité économique. Nous voulons que les formations qui seront développées soient accessibles aux secteurs économiques qui vont booster le développement du Burkina et faire de lui un pays émergent.

Qu’est-ce qui, à votre avis, peut constituer un blocage au succès du PRFP ?

• C’est l’homme qui est au départ et à la fin de toute action. Nous disposons aujourd’hui d’une stratégie. Il faut qu’on se l’approprie et que ça fonctionne. En tout cas, l’Etat a une vision claire après avoir adopté la politique et nous mettrons les moyens qu’il faut pour que ça fonctionne. Nous avons les partenaires qui nous accompagnent. Maintenant tout dépend de l’homme. Autrement dit, si nous avons la volonté et la conviction, nous allons réussir.

L’ambassadeur de la République de Chine Taïwan, Zhang Ming-Zhong

Votre impression sur la rencontre qui vient de se dérouler ?

• Les discussions se sont bien passées. La mise en œuvre du Programme jusqu’à présent est bien, mais je me demande si l’on ne peut pas faire mieux. J’estime que le gouvernement de mon pays a suffisamment contribué au réseau des structures du Programme de renforcement de la formation professionnelle.

Mais nous comptons sur les autres bailleurs de fonds, c’est-à-dire les autres Partenaires techniques et financiers (PTF) dans la phase suivante, notamment après la construction des infrastructures et l’achat des équipements pédagogiques. J’ai profité de ces échanges pour susciter un débat utile en faveur d’une meilleure participation du milieu professionnel à ce projet.

Parce que les jeunes que nous allons former ont besoin d’un emploi. Après tout, l’objectif des efforts déployés par mon pays tout comme ceux du gouvernement burkinabè ou des PTF, c’est de donner l’espoir aux générations futures pour un développement national durable du Burkina Faso.

Qu’est-ce qui a motivé l’implication de votre pays dans ce processus d’autonomisation du Burkina en matière de formation professionnelle ?

• Il ne se discute plus aujourd’hui l’importance de la formation professionnelle ou de l’éducation en général dans le développement national. Pour vous en convaincre, référez-vous à mon pays, où le revenu annuel par habitant à Taïwan, après la Seconde Guerre mondiale, était de moins de 100 dollars américains. N’ayant pas de ressources naturelles, nous n’avions pas d’autre choix que de compter sur nos propres forces.

En dépit des difficultés financières, le gouvernement à l’époque a fait preuve d’une volonté politique en optant pour l’investissement dans les ressources humaines. Il y a 40 à 50 ans, 80% de la population taïwanaise vivait de l’agriculture tout comme le Burkina Faso aujourd’hui. Mais actuellement, ce secteur ne représente que 1,7% de notre produit intérieur brut (PIB). Bref, c’est pour traduire la pertinence du choix du président du Faso, Son Excellence Blaise Compaoré, de valoriser le capital humain.

Que peut bien attendre le ministère de la Jeunesse et de l’Emploi de l’ambassade taïwanaise pour le développement de la certification professionnelle ?

• Telle est là une des préoccupations du programme de renforcement de la formation professionnelle. Nous allons essayer de transplanter toute cette conception à la formation professionnelle au Burkina Faso. J’ai rencontré des représentants d’organisations internationales qui nous encouragent à appuyer les efforts du gouvernement burkinabè dans ce domaine. La certification, pour nous, est un système indispensable pour que la formation professionnelle soit couronnée de succès. Sans cela, la société ou les entrepreneurs ne reconnaîtront pas la valeur des sortants des différents établissements de formation professionnelle qui voudront bien entrer dans le marché de l’emploi.

Pensez-vous que le nombre de lycées prévus dans le PRFP soit suffisant ?

• Pour un départ, j’estime que c’est suffisant, les quatre lycées professionnels dont la construction est en cours d’exécution. Retenez que parmi ces infrastructures, la superficie la plus petite est de 20 hectares et la plus grande, l’école d’application professionnelle à Koudougou, est de 25 hectares. Quant à votre préoccupation sur la capacité d’accueil, elle est juste mais il convient d’attendre les résultats de ce que nous sommes en train de réaliser, probablement dans trois à cinq ans, pour envisager l’extension.

Je voudrais profiter de l’occasion pour rappeler que mon pays, en dehors de notre contribution au PRFP, offre chaque année des bourses à des étudiants burkinabè désireux d’approfondir leurs études à Taïwan, surtout dans l’enseignement supérieur ou la recherche.

Au-delà du financement de l’expertise, que doit-on faire, selon vous, pour assurer le succès du Programme de renforcement de la formation professionnelle ?

• Je me réjouis de constater que le gouvernement du Burkina Faso a mis en place une équipe compétente pour la mise en œuvre de ce programme. Si celle dont nous disposons aujourd’hui continue avec la même détermination, il n’y a pas de raison que les résultats escomptés ne soient pas atteints. J’ai la conviction que le Burkina Faso a besoin de la formation professionnelle.

Nous comptons sur la même efficacité dans la phase suivante, c’est-à-dire après la construction des infrastructures et l’achat des équipements. Outre ce que nous sommes en train de faire dans le PRFP, il faut rappeler que Taïwan, consciente de la place de l’enseignement technique et de la formation professionnelle, investit depuis longtemps dans la valorisation du capital humain au Burkina Faso.

Des formateurs ont été formés par exemple, dans ce cadre, au Centre régional de la formation à Taïwan. Je souhaite sincèrement qu’il soit privilégié dans la phase suivante la question de la pérennisation des acquis de ce programme. Pour notre part, je puis vous assurer que Taïwan s’est engagée, aux côtés d’autres partenaires techniques et financiers, à accompagner le gouvernement burkinabè dans ce domaine pour que le développement national soit encore plus visible.

Je tiens cependant à relever que le processus de renforcement de la formation au Burkina ne peut connaître un succès tant que les acteurs du milieu professionnel ne s’y impliquent pas. Il faut ajouter que pour une mise en œuvre efficace du PRFP, on doit pouvoir disposer de données statistiques sur les besoins du marché de l’emploi. En somme, une synergie d’actions, comme l’a relevé la représentante du chef de file des PTF engagés dans l’enseignement technique et la formation professionnelle, est nécessaire pour que nos efforts soient utiles.

Propos recueillis par Hamidou Ouédraogo

L’Observateur Paalga

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Vos commentaires

  • Le 23 mars 2010 à 13:51, par Alexander En réponse à : Ambassadeur de Taïwan, Zhang Ming-Zhong : “L’importance de la formation professionnelle ne se discute pas”

    Le secteur professionel c"est alpha omega du developement de toute l"afrique.Les professions qui n"etaient pas considere sont reellement le levier de la reussite des pays asiatiques ont supri le monde entiers avec la maitrise de l"electronique.Le centre autrichien d"antan en est la preuve,a fourni des elektroniciens a l"Asecna.Mais malheuresement ce a connu en mauvais destin.La revalorisation des metiers telque:La couture,la ciusine,la mekanique,la soudure,l"eletronique,la coiffure etc... doivent rentre dans nos moeurs.

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