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Vincent Kinda, président de l’APBAM : « Je souhaite que les autorités discutent avec la diaspora car nous avons des choses à proposer qui leur permettront d’ajuster leur politique d’ensemble »

Publié le jeudi 10 décembre 2009 à 23h47min

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François SawadogoC’est en principe le 12 décembre que l’ambassadeur du Burkina à Paris, Luc Adolphe Tiao installera officiellement Michel Fructus dans ses fonctions de Consul honoraire du Burkina à Marseille, dans la région Provence Alpes Côtes d’Azur (PACA) où vit une forte communauté Burkinabè. Combien de Burkinabè vivent dans cette région du sud de la France et quel type de rapports entretiennent-ils avec leur pays d’origine ? Explications avec Vincent Kinda, professeur de Lettres, président de l’Association panafricaine des Burkinabè et assimilés de Marseille (APBAM) et conseiller municipal de Saint-Mitre-Les-Ramparts, près de Marseille.

Quand l’association dont vous êtes le président a t-elle été créée et combien de membres compte t-elle ?

Il existait une vieille association qui s’appelait l’Association des Burkinabè de la région Provence Alpe Côte d’Azur (PACA) qui avait été créée dans les années cinquante, mais depuis plusieurs années, cette association ne fonctionnait plus correctement, ses activités étaient devenues rares. En décembre 2007 nous avons donc décidé de créer l’Association panafricaine des Burkinabè et assimilés de Marseille (APBAM) à l’initiative de François Sawadogo qui était le président de l’ancienne association, afin de mieux mobilier les énergies pour l’épanouissement des Burkinabè vivant dans la région, promouvoir les valeurs culturelles de notre pays et participer au développement du Burkina. Nous suivons avec beaucoup d’intérêts la politique de décentralisation lancée au pays et nous nous sommes dit que notre contribution au développement de notre pays pourrait passer par la coopération décentralisée. Mais tout cela ne sera possible que si nous montrons notre capacité à nous rassembler ici et surtout à agglomérer toutes les associations qui travaillent sur le Burkina. Nous accordons de l’importance à la promotion des valeurs culturelles car beaucoup d’enfants sont nés ici et nous estimons qu’il est bon de leur inculquer aussi l’amour du Burkina, et cela passe leur bien-être matériel et moral dans leur famille et l’association peut y contribuer.

Comment comptez-vous organiser les membres de l’association et « les amis du Burkina » de la région afin que leur contribution au développement du Burkina soit plus efficace ?

Individuellement, chacun apporte du soutien à sa famille et à ses amis et certains ont des activités économiques au pays. Nous voulons aider tout Burkinabè vivant ici afin qu’il puisse initier des projets durable et les réaliser au pays. Nous savons qu’il y a des activités économiques qu’on peut faire et il faut que ceux qui souhaitent s’y lancer soient bien organisés. Par ailleurs, il y a des associations de la région qui travaillent beaucoup avec le Burkina et nous pensons que nous pouvons aider à mieux rationner leurs activités. Il faut par exemple éviter que plusieurs associations se concentrent sur une zone ou région alors qu’ailleurs, les besoins sont là aussi. Le gouvernement a déclaré vouloir harmonier les choses à ce niveau et nous soutenons cette politique avec la conviction que la diaspora peut jouer le rôle d’orientation des ONG en fonction des besoins.

Pour beaucoup de nos compatriotes ayant vécu ici, le retour n’est pas toujours facile et nous pensons qu’à travers l’association, ils pourraient repartir dans le cadre d’une activité et apporter un savoir faire acquis ici. Et puis, nous avons remarqué que quand nos enfants vont participer à des activités avec des ONG au Burkina, au retour ils en sont fiers. Y a t-il meilleure manière de leur inculquer l’amour du pays ?

La région PACA entretient-elle des relations avec une région burkinabè à l’image par exemple de Rhône-Alpes ou la Gironde avec Ouagadougou ?

Il y a des associations qui interviennent au Burkina, mais des relations entre deux fortes entités, ça n’existe pas à ma connaissance et nous allons nous y atteler. Vous savez, grâce au port de Marseille, la région PACA est une grande porte d’accès à l’Asie et à l’Afrique et dans certains domaines, nous pouvons profiter de son expertise. Par exemple, la région a une maîtrise de l’eau depuis l’époque romaine et contrairement à certaines parties de la France qui connaissent parfois des sécheresses, ici, il n’y en a jamais. L’eau est drainée jusqu’ici par des canaux à partir des fleuves. Marseille est d’ailleurs la capitale de la conférence internationale de l’eau et nous estimons que c’est dommage que cette région n’ait pas de relations avec un pays comme le Burkina qui connaît des problèmes d’eau de façon récurrente. Voilà un chantier que nous allons ouvrir. Nous sommes aussi dans une région qui est la plus agricole de France, notamment dans la production de fruits et légumes. Il y a donc des choses à faire ensemble surtout qu’Air Burkina vient d’ouvrir une ligne à Marseille et Ouagadougou n’est qu’à 4 hures de vol. Je lance donc un appel aux autorités pour qu’elles discutent avec la diaspora car nous avons aussi des choses à proposer qui leur permettront d’ajuster leur politique d’ensemble. Ce qui n’est quand même pas négligeable !

Combien de Burkinabè vivent dans la région et quel est leur profil ?

Nous n’avons pas de chiffres exacts, mais on n’est pas loin de 500 ! Le gros lot est composé de travailleurs qui sont arrivés ici par circuits divers ; certains sont venus d’Abidjan en compagnie de leur patron français. Puis il y a les nouveaux arrivants, des étudiants qui sont restés, mais aussi les enfants nés ici qui sont des architectes, officiers de l’armée, pilotes, ingénieurs, etc. Nous avons des compétences et nous souhaitons qu’elles soient souvent sollicitées par le Burkina au lieu de faire venir des « experts » à coup de millions. Déjà, nos enfants ont participé à la construction d’école à Yako par exemple et il est évident que plus tard, ils seront toujours disponibles pour apporter leurs expertises. Nous tenons en tout cas à ce qu’ils fassent partie des missions de travail au pays et ne pas laisser les Européens y aller seuls car ça donne l’impression que nous qui sommes ici, nous ne foutons rien !

Avez-vous des occasions de vous rencontrer souvent ?

Bien évidemment, même si ce n’est pas facile de trouver une date qui satisfasse tout le monde ! Mais maintenant, notre objectif est tout autre. Nous voulons nous ouvrir aux Marseillais, et ne plus nous retrouver seulement entre nous de temps en temps, manger et nous raconter nos histoires. Il y a une bonne ambiance entre nous, même si je dois reconnaitre que certains n’ont pas adhéré toute suite à l’APBAM dont l’existence a été communiquée à l’ambassade en mars dernier. Mais quand ils ont vu notre capacité de mobilisation, leurs réticences ont été levées. Mi octobre, nous avons invité l’ambassadeur Luc Adolphe Tiao qui est venu ici pour la première fois ; il a rencontré les Burkinabè de la région et a été reçu par les autorités municipales. La légitimité de l’APBAM n’est contestée par personne, mais notre challenge est de gagner le pari du rassemblement. Le bureau de l’association compte cinq membres, mais nous avons prévu de l’étoffer plus tard en confiant des postes de responsabilités bien précises à d’autres membres. Nous attendons maintenant l’investiture du nouveau Consul pour lui présenter des projets que nous souhaitons réaliser avec lui dans l’intérêt des Burkinabè de la région et du Burkina

Propos recueillis à Marseille par Joachim Vokouma, Lefaso.net.

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