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Non-respect des bormes et règlements : La preuve par la main de Dieu ?

Publié le lundi 14 août 2006 à 00h00min

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Fortunes subites, gaspillages des fils à papa qui ne se gênent plus dans les maquis de Ouaga et même de Paris pendant que ceux qui ont sué sang et eau pour bâtir la richesse de leurs parents meurent dans l’indifférence quasi générale, c’est ce qui scandalise l’auteur des lignes qui suivent.

"Le secret des grandes fortunes sans cause apparente est un crime oublié parce qu’il a été proprement fait", a dit Honoré de Balzac. L’auteur de la « Comédie humaine » ne croyait pas si bien dire ; sa formule est si vraie qu’elle a traversé l’espace et les âges pour s’appliquer à bien des opérateurs économiques au Faso. Mais chez nous, à l’inverse du monde de Balzac, le crime est presque toujours grossièrement fait.

En effet, la main basse sur les terrains, l’utilisation de produits chimiques que font certains au mépris de toute norme sécuritaire ou les odeurs pestilentielles devenues le quotidien des riverains (suivez mon regard !), les opérations mafieuses à la Al Capone que toute la Nation tétanisée suit impuissante, donnent au finish des centaines de choses bâties au rabais en sous-traitance au mépris de certaines exigences techniques pourtant à valeur cardinale, et vendues à prix d’or ; la preuve :

l’on se souvient que par le passé, des écrits ont dénoncé cet état de fait, mais à quoi ça rime, des écrits à Ouagadougou ? Comme dirait l’autre, que peut-on dire de nouveau sur les pratiques des gens qui nous gouvernent et ceux de leurs alliés, que tout le monde ne sait déjà ?

Mais comme au Faso on met toute critique sur le compte de la médisance, de la jalousie ou encore de l’aigreur (ah l’aigreur ! Une formule si friande dans la bouche de ces nouveaux riches qui veulent se donner ainsi bonne conscience, mais qui savent qu’ils ont tout à se reprocher).

Cette chute spectaculaire de chantier d’immeuble ou cet éboulement dans la mine de Poura censée être fermée avec des gens pour veiller à la sécurité et à l’inviolabilité des lieux, tous deux ayant fait au passage quelques veuves et orphelins, devraient être perçus comme des avertissements de celui à qui rien ne peut être caché.

Pour le premier drame, dommage que notre chaîne du plaisir partagé, d’habitude si friande de scoops, n’ait fait qu’évoquer cette catastrophe sans nous montrer d’image, elle qui nous gave d’images de cyclones et autre tsunami en Asie ou dans la lointaine Amérique.

Elle qui peut aller jusqu’à Gorom pour nous montrer nos "généreux" bienfaiteurs déverser leurs vivres en temps de disette sur les pauvres hères en guenilles.

Il faut le dire, il faut même l’enfoncer dans toutes les têtes, dussions-nous utiliser pour cela le marteau en dehors des règles strictes devant être valables pour tous, et des institutions mises en place avec des hommes compétents pour les animer, en dehors du traitement égalitaire de l’information dans la cité, qui devient une jungle dans laquelle ceux qui auront le plus à perdre, ce sont ceux qui ont indûment amasé fortune ; ça au moins, c’est sûr. La preuve aussi que nous sommes dans une république bananière, c’est l’attitude des pouvoirs publics dans ce type d’affaire.

Dans les grands pays où il y a autorité et chapeau de l’Etat pour tous et où le pauvre peut se prévaloir et s’enorgueillir de la protection de son Etat, il y a longtemps que des gens seraient au frais en attendant d’apporter la preuve (du fond de leur cachot et par avocats interposés) que cupidité et négligence criminelle ne se sont pas donné la main dans ces affaires.

Dites donc ! Qui n’eût pas été riche dans de telles conditions où tout lui est donné et quand tout le monde se casse quand il passe ? Qui n’eût pas été riche s’il peut "dealer" quelques pépites d’or comme c’était très probablement le cas, en envoyant quelques pauvres gueux par le fond dans une mine, dont il doit faire appliquer la décision de fermeture ?

Pas de succès dans les excès et le gaspillage

Un autre indice révélateur de l’origine douteuse, voire criminelle des enrichissements fulgurants au Faso, c’est la grande propension des nouveaux riches pour les prodigalités et autres monstruosités financières que même ceux chez qui nous allons quémander financements et prébendes ne s’autorisent pas :

des villas des mille et une nuits poussant comme des champignons à Ouaga 2000 (que des étrangers de passage, éberlués, surnomment non sans raison Las Vegas !), des véhicules de luxe comme chez les milliardaires en euros de Monaco, la concurrence sur les acquisitions d’apparts à Paris, des centaines de millions pour soutenir des cocos par-ci, d’autres pour aider à la campagne du candidat bien-aimé par-là et que sais-je encore !

Pendant ce temps, on spolie et affame ses propres employés, ceux par qui on est devenu riche ! Tenez-vous bien ! Il semble qu’un rejeton d’un de nos "barons", inscrit dans une université ou plus exactement en villégiature dans l’Hexagone, y a voiture et chauffeur.

D’autres font le voyage de Ouagadougou chaque week-end pour ne pas rater le show dans leur boîtes de nuit favorites, et s’en retournent tranquillement reprendre leurs cours lundi sur les bords de la Seine. Et croyez-moi, ceux qui sont restés au pays ne sont pas en reste, loin s’en faut, tant leurs frasques dignes des contes des mille et une nuits, défraient régulièrement la chronique.

En effet, leurs virées gargantuesques avec leurs bandes, après main basses sur quelques liasses dans le placard trop plein de papa, pour distribuer à la volée, portables, motos et même voitures ne sont plus un secret pour personne. Cela seul suffit à jeter le doute sur l’origine des fortunes, tant il est vrai que ceux qui ont, sué sang et eau pour être riches ont tous quasiment ce travers d’être radins ou, à tout le moins, d’avoir le sens de la mesure.

Pour ces privilégiés de la République et à titre individuel, il ne fait aucun doute qu’il y a développement, et ce sont sans doute aussi eux qui proclament que nous n’avons pas de pétrole, mais nous avons Blaise Compaoré. Et on comprend aussi pourquoi ces gens se plaignent du classement du PNUD : 175e sur 177 Etat.

C’est le développement des masses qui influent sur ce genre de statistiques et non le stupre et la luxure de quelques individus. Sinon, je parie que les principes de réussite en entreprise comme dans d’autres domaines sont partout les mêmes à savoir prévision, rigueur, prudence ; souvent même austérité. A l’inverse, pas de succès dans les excès et le gaspillage.

Dans de telles conditions, il n’est pas étonnant que ceux qui nous gouvernent et qui, assurément, se sont définitivement coupés de leur peuple, pérorent à longueur de journée sur la bonne santé économique de notre pays et font des démonstrations cabalistiques pour prouver que nous nous développons.

Ah ! Comme ils ignorent que les salariés sont tous devenus des indigents, que les paysans, frappés par les mauvaises pluviométries successives, ne peuvent plus faire manger leur famile, que bravant toutes les vexations et brimades dont ils sont victimes dans certains pays d’émigration, nos jeunes désertent en masse chaque jour le Faso pour ce "Yémbdo" (esclavage) des temps modernes ; c’est un symbole qui veut tout dire ! Pour nos enfants scolarisés, cela fait belle lurette qu’ils ont perdu tout rêve et toute illusion d’avenir radieux !

Pour ma part, je me fais fort de cette pensée d’Albert Schweitzer qui dit : "La vérité n’a pas d’heure, elle est de tous les temps, elle est précisément de l’heure où elle paraît inopportune".

Karkourba Mondalmoto

Observateur Paalga

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