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<I>Droit dans les yeux</I> : Lutter contre la fraude est possible

Publié le mardi 8 août 2006 à 08h19min

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Monsieur Sibri de Nyoko voulait mettre son fils Adama à l’école, mais Adama n’avait pas d’acte de naissance. Sibri partit à Saaba pour obtenir un acte de naissance. Après quelques heures d’attente, un monsieur lui dit de revenir le surlendemain.

Sibri s’en retourna donc et le surlendemain il se rendit de nouveau à Saaba. Cette fois, après quelques heures d’attente, assis sur un banc, il s’entendit dire de revenir la semaine suivante. Après avoir fait six voyages sans obtenir l’acte de naissance, un copain lui dit : "Tu donnes mille francs au monsieur qui te renvoie chaque fois et tu auras ton acte de naissance le même jour." Mais Sibri ne voulait pas entendre ce langage.

Le jour suivant, il alla demander audience chez le préfet qui le reçut tout de suite au vu du motif avancé : "Raison très personnelle." Sibri raconta ses mésaventures pour obtenir l’acte de naissance de son fils, et expliqua au préfet que tous ces voyages inutiles avaient des répercusions très graves. Sa femme était malade et ne pouvait pas travailler aux champs. C’est lui et Adama, son enfant de six ans, qui étaient les seuls aptes à cultiver.

Il avait déjà perdu six matinées pour venir à Saaba sans obtenir l’acte de naissance de son fils ; il était bien en retard pour ses travaux champêtres. Le préfet appela le fonctionnaire de l’état civil, vérifia les faits racontés par Sibri, et donna l’ordre d’établir immédiatement l’acte de naissance du petit Adama. Une semaine plus tard, une autre personne de Nyoko vint chercher un acte de naissance, mais le fonctionnaire lui répondit : "Non, si c’est pour les gens de Nyoko ils vont chercher l’acte de naissance chez le préfet comme votre Sibri." Sibri a eu chaud dans le village car maintenant tous les gens de Nyoko ont des difficultés pour avoir des papiers à la préfecture. Pourquoi Sibri n’a-t-il pas payé mille francs comme tout le monde ? L’histoire de Sibri montre que la lutte contre la fraude et la corruption peut être gagnée.

La paix n’est pas pure absence de guerre et elle ne se borne pas seulement à assurer l’équilibre des forces adverses. Elle ne provient pas non plus d’une domination despotique, mais c’est en toute vérité qu’on la définit : œuvre de justice (Vatican II).

Forte de cette affirmation, la Commission épiscopale Justice et Paix du diocèse de Nouna s’est attelée à la lutte contre la corruption.

Après la sensibilisation des sept paroisses, elle a formé dans chaque paroisse des para juristes dans les domaines des juridictions, les droits des citoyens, des solutions en cas de fraude, solutions à l’amiable ou par le dialogue ou par la saisine des institutions administratives et judiciaires compétentes. Les devoirs sont souvent expliqués avec force par les autorités : s’arrêter au feu rouge, avoir avec soi sa carte d’identité, avoir un permis quand on veut couper du bois ou transporter du bois, avoir les papiers de la voiture, de la mobylette et même de la bicyclette, etc. Mais les droits ?

Les parajuristes s’en chargent. La plupart des problèmes sont des conflits entre éleveurs et agriculteurs, mariages forcés, héritages détournés au détriment de la veuve, violences faites aux femmes, démarches administratives difficiles ou infructueuses, escroqueries et abus de confiance. Les simples gens commencent à croire que la justice est possible au niveau de leur village, leur commune, et leur province. Ils savent de plus en plus à quoi ils ont droit. Ils ne paient plus n’importe quoi pour n’importe quel service. Les fraudeurs ne sont pas heureux de cette démarche. Les gens ne paient pas, ou plus difficilement, pour des services censés être dus gratuitement. Ils vont chez les para juristes pour demander conseil et parfois ceux-ci les accompagnent dans leur démarche.

Une généralisation de cette démarche aiderait beaucoup de gens dans l’obtention de leurs droits et enrayerait une partie de la petite corruption.

Les gens ne connaissent pas leurs droits et surtout ils ne savent pas comment les obtenir.

Les parajuristes ont établi quatre-vingt-seize dossiers dont la plupart ont déjà été résolus en l’espace de trois mois. Pour étendre cette action à tout le Burkina, il faut moins d’un milliard de CFA pour cinq ans. La HACLC (Haute autorité de coordination de lutte contre la corruption) a deux milliards et demi pour cinq ans. Reste à voir ce qui est le plus efficace pour le peuple. C’est vrai, la Commission épiscopale pour la justice et la paix ne fait rien contre la grande corruption, mais que fait de plus la HACLC ?

En attendant, aidons notre pays. Consommons et achetons les produits burkinabè, même s’ils sont légèrement plus chers.

Bonne nouvelle : Une partie de la jeunesse de Côte d’Ivoire s’est levée contre la dictature et l’oppression.

F.Balemans
B.P.332
Koudougou

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