LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Vous n’empêcherez pas les oiseaux de malheur de survoler votre têtе, mаis vοus рοuvеz lеs еmрêсhеz dе niсhеr dаns vοs сhеvеux.” Proverbe chinois

Cascades : cri du cœur d’un fils du terroir

Publié le mardi 20 juin 2006 à 08h06min

PARTAGER :                          

Appel pressant à mes frères des Cascades

Dans un écrit qu’il nous a fait parvenir, Jean-Marie Sourabié, un fils de la région des Cascades appelle les siens à la dignité et à la responsabilité pour qu’ensemble ils bâtissent une région qui en a grandement besoin.

Au delà des militants CDP, c’est à tous mes frères et sœurs de la Comoé et de la Léraba et particulièrement à ceux de la ville de Banfora que je m’adresse. Les élections municipales du 23 avril dernier, intervenues dans le cadre de la mise en œuvre de la communalisation intégrale, conçue et exécutée par le gouvernement de notre pays, ont donné leur verdict ; sur les 17 communes urbaines et rurales, le CDP perd 2 communes au profit du RDB, et gère donc 15 communes urbaines et rurales et très certainement le conseil régional. C’est un résultat honorable et une lourde responsabilité pour le CDP.

En termes clairs, cela veut dire que lorsque viendra I ‘heure de restituer les résultats obtenus au terme de la mandature des 5 ans à venir pour le compte de notre région, en rapport avec les objectifs pertinents fixés par la politique de communalisation, objectifs repris et centrés dans le cadre stratégique régional de lutte contre la pauvreté, le bilan des 2 communes qui échappent au CDP ne sera pas dissocié de celui des 15 autres communes.

Au delà de la responsabilité qu’engage sa qualité de président du conseil régional, il y a obligatoirement un contrat de résultats qui lie l’ensemble des populations de chaque commune prise à part, et collectivement, mais surtout l’ensemble des formations politiques appelées à gérer la chose publique et à promouvoir le développement de la région. C’est là, me semble t-il un exercice nouveau qui appelle de chacun et de chacune de nous, un sens plus élevé de la responsabilité et du devoir, individuellement et collectivement encore une fois.

Si l’objectif de base de la communalisation est de créer les espaces normatifs et de droit, pour une participation entière et efficiente des populations au développement des collectivités dont elles relèvent, comment parviendrons-nous à des résultats probants, dans la confrontation perpétuelle, les règlements de comptes, la délation, les intrigues et l’aveuglement né de l’expression vaille que vaille d’ambitions personnelles hors de proposition et à tout le moins nuisibles pour l’intérêt commun. L’approche prospective, la gouvernance locale, la promotion du genre, l’emploi des jeunes et la coopération décentralisée qui sont entre autres principes, des indicateurs de bonne tenue de nos futures communes, exigent de nous, une synergie d’actions soutenues par une mise en commun des intelligences et des efforts, et chacun à la place qui est la sienne, peut et doit y contribuer.

Que l’on soit Goin, Turka, Karaboro, Nantioro, Sénoufo, Gourounsi, Komono, Mossi ou Dogossè, que l’on soit fonctionnaire en activité ou à la retraite, cultivateur ou éleveur, griot, féticheur ou balafoniste, il n’y a qu’une seule bagarre que nous devons mener tous à présent contre le seul ennemi commun : la bagarre pour le développement des cascades contre la pauvreté et ses corollaires de tous ordres.

La politique, c’est l’art de gérer la cité.

La politique voyez-vous, n’est rien d’autre que l’art de gérer la cité ; elle ne doit pas appeler à la guerre fratricide ; même les confrontations d’idées qu’elle autorise, sont régies par la loi, pour des périodes et des espaces de temps précis, et selon des règles et des conditions précises. La politique, ce n’est donc pas la confrontation perpétuelle comme il m’a été donné d’en faire le constat depuis quelques années à Banfora et plus particulièrement de façon plus inquiétante ces derniers jours. En tout cas c’est le sens que je donne à la politique. Par ailleurs, ma conviction est établie que les querelles entre frères et/ou entre ethnies, instrumentalisées à dessein, ont ceci de fâcheux qu’on sait quand elles commencent mais qu’on ne sait jamais quand est-ce qu’elles finiront.

Une fois qu’on les active, elles s’entretiennent d’elles-mêmes et leurs effets collatéraux sont le plus souvent, plus nocifs que les buts pour lesquels on les a activées. J’en appelle donc à tous les militants sincères du CDP et à ceux du RDB aussi, qui sont en réalité et en majorité des militants CDP fraîchement partis de chez nous pour des raisons qui leur sont propres, pour qu’ils sachent raison garder. Personne de nous ne sera décoré parce qu’il a terrassé ou humilié son frère des cascades.

Le nouveau maire et ses camarades du RDB qui sont appelés à gérer la commune de Bafora pour les 5 ans à venir ne sont pas des étrangers ; ils sont des frères qui ont accédé à ce niveau de responsabilité par la force et la volonté de notre loi commune ; ils n’y sont pas parvenus par la force des armes ; s’il y a des armes qu’ils ont utilisées, c’est alors les armes que leur ont données les failles et les faiblesses de leurs adversaires politiques, en l’occurrence les militants CDP que nous sommes, et nos dirigeants régionaux en tête. Ne pas le reconnaître et ne pas l’accepter serait proprement malhonnête et totalement contre productif pour l’avenir. J’ai la nette impression, et cela me chagrine, que Banfora n’a que de nom le titre de 3ème ville du Burkina ; même l’appellation de ville ouvrière me semble aujourd’hui osée, vu ce qui s’y passe.

L’absence notoire d’ONG chez nous pendant que d’autres régions, grâce à leur unité d’actions, croupissent sous les fruits d’une coopération décentralisée active et dynamique, l’assèchement de nos rivières, l’impraticabilité de nos routes alors que nous avons de bonnes productions de coton qui nous ont valu l’implantation d’une usine d’égrenage, le manque criant d’eau potable alors que nous sommes l’une des régions les mieux arrosées, et j’en passe, tout cela devrait nous appeler à plus de réflexion, à plus d’abnégation et de mesures dans nos ambitions individuelles, pour apprécier la situation réelle de notre région, des personnes qui y vivent et à qui nous devons chacun et tous, quelque chose. Il faut mettre fin au règne du one man show, de la fanfaronnade et de l’exhibitionnisme (les jeunes d’aujourd’hui diraient du farotage).

Ne compromettons pas les chances que nous offre la communalisation. Qu’on se le dise, ceux qui avec Mamadou Koné ont démissionné de notre parti, avaient des raisons valables de le faire en son temps. Je le dis et je l’assume entièrement. On pourrait en parler car au rendez-vous de l’histoire, (si rendez-vous il y a) comme le dirait Alain Foka, chacun aura son mot à dire.

La dignité et le sens de la responsabilité, des vertus immuables.

Par contre la démission de l’un des frondeurs de la nouvelle vague, me laisse pantois ; et on mesure là l’irresponsabilité et ce que c’est que pour un homme, le refus de s’assumer. Pourquoi ?

Parce que précisément ce frère est l’un de ceux qu’en son temps j’ai approché plusieurs fois pour lui prêcher la modération et la retenue dans ce qu’il disait être ses convictions et ses jugements, lorsque, sabre au clair, l’index pointé sur l’ennemi, l’oeil étincelant, de jour comme de nuit, de Ouo à Ouolokonto, il vouait aux géhennes, en promettant l’humiliation et la déchéance à tous ceux qui lui étaient proches. Celui qu’il veut rallier aujourd’hui.

La dignité et le sens de la responsabilité sont des vertus immuables, elles devraient servir aussi en politique ; surtout en politique. Je ne suis pas un donneur de leçon ; je n’en ai jamais donné et ceux qui me connaissent savent que je suis toujours resté assez discret, pas par manque d’ambition, mais par esprit de compromis pour l’intérêt commun.

Ce qui est arrivé à mon parti dans notre région, et qui, je le répète, n’est pas déshonorant, n’est pas une fin en soi et je reste confiant que la direction politique nationale, dans sa sagesse, saura décrypter les causes réelles de cet état de fait pour redonner au parti et à ses militants, les ressorts nécessaires pour rebondir et revenir à la place qui a toujours été la sienne depuis 1992.

Mon père (Que Dieu ait pitié de lui) disait toujours, lorsqu’il avait fini de dire ses vérités : « la parole est comme une nourriture que l’on fait cuire dans son ventre avant de la servir ; il n’est pas toujours sûr que l’on serve cette nourriture de la même manière qu’on l’a faite cuire ». Fort de cette sagesse, j’affirme que ce que j’ai dit plus haut, est cuit dans mon ventre sans méchanceté et sans intention malveillante.

Que ceux qui pourraient se sentir blessés, ne retiennent de mes propos que l’intention de Rassembler. Car voyez-vous, on est fort aujourd’hui, on ne l’est plus demain ; on est riche, on ne l’est plus ; on n’est vivant, demain on ne l’est plus ; seuls Bafora et la région sont éternels. Taisons donc nos rancoeurs et investissons-nous dans ce qui nous survivra à tous : la région des cascades.

Que Dieu, et les ancêtres qui sont sous terre, qui nous voient et nous entendent, guident nos pas et nous donnent à chacun et à tous la sagesse de savoir pardonner et de nous atteler à l’essentiel.

Jean Marie SOURABIE
Ouagadougou
Tél. : - 70 25 17 73
- 50 30 77 21

PARTAGER :                              
 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique
Burkina Faso : Justice militaire et droits de l’homme
Burkina Faso : La politique sans les mots de la politique