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Présidentielle : Ça sent la bagarre

Publié le vendredi 11 novembre 2005 à 08h40min

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La question du financement des partis politiques, l’ambiance électorale et les ambitions des différents prétendants au fauteuil présidentiel, ce sont là des sujets que Jonas Hien aborde dans l’article qui suit.

A l’occasion de l’élection présidentielle de novembre 2005 au Burkina Faso, le Conseil supérieur de la Communication (CSC) a pris des dispositions en vue d’un égal accès des candidats à la presse publique et privée. Outre les pages accordées dans le journal d’Etat, Sidwaya, les différents candidats bénéficient de tranches horaires dont 5 mn au journal parlé de 13h à la Radiodiffusion nationale et 5mn à celui de 13h15 mn à la Télévision nationale du Burkina.

Ainsi, au journal parlé de 13h du dimanche 6 novembre 2005, la Radiodiffusion nationale recevait le candidat Nayabtigoungou Congo Kaboré, président du Mouvement pour la tolérance et le progrès (MTP). Entre autres questions, le journaliste Zanga Issoufou Ouattara, qui présentait le journal, lui a posé cette question : « Depuis le début de la campagne, dans combien de provinces vous vous êtes rendu ? » Le candidat à la présidence du Faso répondit : « Je me suis rendu dans la province du Kadiogo, mais la campagne n’est pas encore terminée ».

Le constat que l’on peut faire à partir de cet élément d’information, c’est que la campagne présidentielle se déroule normalement. Mais le plus intéressant à retenir, c’est que cette campagne vient rappeler que le pouvoir appartient au peuple. Quand on est président, cela signifie qu’on est un porte-parole du peuple. C’est le peuple qui, dans sa majorité, a décidé de vous retenir et de vous confier la gestion des affaires publiques. Il va sans dire que cette gestion doit tenir compte des intérêts majeurs du peuple.

Aucune personne ne voudrait confier son destin à une autre qui ferait ses malheurs. Même après une prise du pouvoir par la force, la gestion du pouvoir doit être comprise dans ce sens puisqu’on a forcément agi au nom du même peuple. Et en tant que délégué, porte-parole, le titre de président de la République ne saurait faire de la personne élue un superhomme bénéficiant de tous les avantages de la société et soumettant les autres citoyens à toutes sortes de devoirs.

Aucun candidat à cette élection n’aura perdu autant de temps, dépenser autant d’argent, parcouru tant de distances s’il était le détenteur du pouvoir. Le pouvoir appartient donc à chacun de nous, que l’on confie à d’autres personnes pour agir dans l’intérêt commun.

Des critères pour le financement des partis

C’est d’ailleurs pourquoi il est admis que les fonds publics servent à appuyer les candidats dans leur campagne. Mais une telle vision de la chose ne saurait expliquer l’utilisation systématique des fonds publics pour des dépenses ayant un intérêt pour la Nation. C’est dire que le financement des partis politiques qui participent à des campagnes électorales doit être repensé.

L’audience du parti, son implantation sur l’ensemble du territoire, son expérience politique, entre autres, devront faire partie des critères de financement des partis politiques en compétitions électorales. Cela contribuerait à assainir les dépenses publiques et à éviter que la politique devienne une autre trouvaille dans la lutte contre ’’sa’’ pauvreté.

En effet, je m’explique difficilement qu’un candidat à une élection présidentielle, qui a bénéficié d’une subvention de l’Etat, n’ait pu se rendre que dans sa province de résidence, à quelques jours de la fin de la campagne ! La démocratie gagnerait avec des hommes politiques entreprenants, endurants, proches des populations, donc crédibles. C’est dire que les hommes politiques devraient travailler à renforcer véritablement l’Etat de droit et la démocratie pour lequel ils se sont engagés.

L’exemple a été donné par le Conseil supérieur de la communication (CSC) à l’occasion de cette élection. En effet, outre les insuffisances inhérentes à tout être humain ou à un regroupement d’hommes, le CSC mérite des félicitations pour sa participation à cette campagne. A travers le CSC, il convient également de saluer les organes de presse engagés dans la couverture de la campagne pour le professionnalisme avec lequel les journalistes déployés sur le terrain ont traité l’information. Que ce soit les organes de presse sonore, audiovisuelle ou écrite, les journalistes reporters méritent des félicitations.

Nayab ne se laissera pas faire

Par contre, du côté des partis politiques, ça sent déjà la bagarre. Pour preuve, le candidat du MTP, qui s’est rendu dans sa province de résidence, met déjà sérieusement en garde le candidat Blaise Compaoré si jamais il lui volait la victoire au soir du 13 novembre 2005 ; car finalement, le candidat du MTP a fini par déclarer à la télévision nationale, s’adressant aux populations, qu’il n’irait pas en campagne.

Et en voici les raisons : « Sous la Révolution, j’ai parcouru toutes les provinces avec le Président Thomas Sankara. Thomas Sankara a déjà battu la campagne pour moi. Je n’ai donc plus besoin de venir vous voir. C’est à vous de me voter le 13 novembre ». Connaissant le charisme du Président Thomas Sankara, il sera effectivement difficile d’admettre qu’un candidat qui a bénéficié du soutien de Thomas Sankara ait échoué à cette élection. Nayab ne se laissera donc pas faire.

En outre, le candidat Toubé Clément Dakio tient à son agriculture pour que « les gens n’aient plus faim ». Il ne veut donc plus de famine au Burkina Faso. C’est pourquoi il attend les formalités pour occuper la nouvelle et belle maison de Ouaga 2000. Philippe Ouédraogo a déjà promis 100 mille emplois aux jeunes et n’est pas prêt à récolter la honte : le fauteuil présidentiel ou rien. Gilbert Bouda tient à expérimenter sa fasocratie coûte que coûte.

Si jamais quelqu’un tentait de lui rendre le passage difficile vers Ouaga 2000... Laurent Bado aime son peuple et ne veut plus d’un peuple ignorant dans ce pays. Le dernier rang qu’occupe le Burkina Faso sur le plan mondial lui fait mal. Pensez-vous qu’il accepterait de regarder toujours les Burkinabè souffrir ? Soumane Touré a déjà lancé son ultimatum : Blaise Compaoré doit lui céder le fauteuil. Emile Paré est pressé de voir les Burkinabè se soigner gratuitement.

Outre les coupeurs de routes, Ali Lankoandé a pris l’engagement de bouter hors du cœur du pouvoir les coupeurs de fonds publics. Ram Ouédraogo ne comprend pas pourquoi Blaise Compaoré s’entête à rester au pouvoir et entend occuper ’’son’’ fauteuil pacifiquement ; sans oublier les sankaristes révoltés désireux à retrouver le paradis perdu.

Or, Blaise Compaoré avait déjà annoncé la couleur à travers une image qui traduit sa décision finale : ’’J’y suis, j’y reste’’. Il a en main un sabre, une épée, si vous voulez, un long couteau, et est prêt à opérer sur qui s’aventure vers ’’son’’ joyau du même Ouaga 2000. L’inauguration de la grande maison de Ouaga 2000 ne sera donc pas facile. Ça ne sent pas la bagarre, ça ?

Jonas Hien

Observateur Paalga

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