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Présidentielle ivoirienne : Le report était prévisible

Publié le vendredi 9 septembre 2005 à 08h23min

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Le Premier ministre Seydou Diarra (milieu)

Sur le papier, c’est le 30 octobre prochain que les Ivoiriens devraient se rendre aux urnes pour désigner celui qui doit présider aux destinées de leur pays.

Mais voilà qu’à moins de deux mois de cette date, la Communauté internationale vient de reconnaître la quasi- impossibilité de respecter cette disposition de la Constitution ivoirienne qui leur imposait le scrutin en fin octobre 2005.

En tout cas le haut représentant de l’ONU en Côte d’Ivoire, Antonio Monteiro, dont la mission, faut-il le rappeler, est d’y "réunir les conditions de réalisation des élections" l’a bien signifié. Le scrutin présidentiel, a rassuré le mandataire de Kofi Annan, aura bel et bien lieu, mais pas au jour du 30 octobre qu’il estime n’être pas "une date fétiche". L’essentiel, selon ce missionnaire onusien, est de garantir les préalables du scrutin par une préparation sérieuse, l’élaboration de listes électorales crédibles pour parvenir à des consultations libres et acceptées par tous les acteurs politiques ivoiriens.

Mais, faut-il le noter, si tous les protagonistes semblent s’accorder sur cette clairvoyance de l’ONU en déclarant l’impossibilité de l’organisation de la présidentielle en octobre prochain, le probable report pose un autre problème sur le tapis : il s’agit de la question de la transition. En fait, elle faisait déjà partie des doléances des rebelles et a été renouvelée récemment par Jules Yao Yao et Mathias Doué, les deux officiers supérieurs naguère proches de Gbagbo. Pour eux, la condition sine qua non d’un retour à la paix est le départ de celui dont il faisait l’affaire il n’y a pas longtemps.

C’était également un des principaux points des accords de Marcoussis, qui préconisait le transfert réel des pouvoirs exécutifs au premier ministre Seydou Diarra. C’est à ce dernier qu’il revenait, avec l’appui de l’ONU, d’organiser des élections, bien sûr sans y prendre part lui-même. Maintenant que la tenue de la présidentielle à la date prévue par la Constitution sera "violée", cette situation nécessite un "pont" dont on ne peut prédire la durée. Cela ne souffre pas de doute quand on sait que présentement le nœud gordien demeure la façon dont cela va se passer.

Si du côté des opposants irréductibles du père fondateur du FPI, cette transition est plus qu’une nécessité et doit se faire sans Gbagbo aux affaires, du côté du pouvoir en place à Abidjan, on soutient avec le ton martial qui convient que la Côte d’Ivoire vit une transition depuis l’accord de Marcoussis. En un mot comme en dix, Gbagbo devrait continuer à régner à la tête de la Côte d’Ivoire jusqu’à l’éventuelle élection de son remplaçant. Cependant, il est pénible de constater que le premier ministre Seydou Diarra n’a nullement les mains libres pour accomplir la mission à lui assignée au sortir de Marcoussis.

Concernant le report du scrutin, Guillaume Soro a manifesté son désaccord, arguant qu’aucune disposition constitutionnelle ne prévoit ce cas de figure. Pour lui, une transition politique sans Gbagbo est la solution à tous les problèmes liés à la crise, la question identitaire, les réformes constitutionnelles et législatives, la restructuration de l’armée nationale et la tenue d’élections libres, justes et transparentes auxquelles tout le monde participe.

A en juger par l’attitude de l’ensemble des protagonistes, on a l’impression qu’aucun d’eux ne veut jouer franc jeu. C’est à croire qu’ils n’ont pas tous intérêt à ce qu’il y ait élection. Peut-être par peur, d’une part, de perdre, pour les Guillaume Soro, naturellement qu’on saute le bouchon pour se rendre compte de leur représentativité sur le terrain.

D’autre part Gbagbo et les siens craignent légitimement que la cession du pouvoir à une tierce personne pour la transition ne soit qu’une descente aux enfers en cas d’échec à l’issue d’un scrutin transparent. En d’autres termes, personne ne semble être sûr de lui-même ou confiant aux Ivoiriens. Bref, la condition d’un scrutin transparent réside dans le verrouillage du système électoral pour qu’aucun prétendant ne puisse frauder.

C’est pour cela en fait que depuis on tourne en rond et le pays d’Houphouët Boigny, plus que jamais, est à la croisée des chemins. Pourtant, il faudrait bien qu’on voie le bout du tunnel. Car la survie de la sous-région en dépend.

Hamidou Ouédraogo

Observateur Paalga

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