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Léon Paul Toé, directeur général de l’urbanisme et des travaux fonciers : « On devrait avoir une vision assez claire de ce que nos villes doivent devenir dans le futur »

Publié le jeudi 10 novembre 2011 à 02h15min

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Léon Paul Toé est le directeur général de l’urbanisme et des travaux fonciers au ministère de l’Habitat et de l’Urbanisme. A ce titre, il participe les 10 et 11 novembre 2011 à Bobo-Dioulasso, à l’atelier de lancement des études d’élaboration des Schémas directeurs d’aménagement et d’urbanisme (SDAU) de douze capitales régionales du Burkina Faso. Dans cette interview, M. Toé situe l’importance de la rencontre. Il évoque aussi la problématique de l’urbanisation au Burkina Faso.

Sidwaya (S.) ? : Quel est l’état des lieux actuel de l’urbanisation au Burkina Faso ? ?

Léon Paul Toé (L.P.T.) ? : La situation actuelle de l’urbanisation au Burkina Faso fait ressortir que nous sommes à un taux d’urbanisation d’environ 25%. Cela correspond au pourcentage des populations vivant dans les localités considérées comme villes. On se rend compte que ce taux est relativement faible par rapport au processus général dans le monde où beaucoup de pays sont au-delà de 50% de taux d’urbanisation. On peut donc dire que notre pays est faiblement urbanisé.

S.? : L’urbanisation au Burkina Faso ne souffre-t-elle pas d’un manque de planification ? ?

L.P.T. ? : C’est même cela qui constitue la grosse difficulté. Nous sommes au début du processus d’urbanisation. Ce qui fait que nous avons des problèmes pour asseoir une démarche planifiée. On devrait, en principe, avoir une vision assez claire de ce que nos villes doivent devenir dans le futur. Les acteurs de la ville devraient avoir une vision très claire du type de villes que nous voulons construire. C’est à partir de là qu’on peut faire le cheminement pour y arriver. Mais au Burkina Faso, on essaye de gérer chaque fois des problèmes pressants. Le problème de lotissements dans les centres urbains nous a entièrement occupés si bien qu’on a négligé la démarche de la planification pour bien asseoir une urbanisation qui cause moins de travers sociaux.

S.? : Le pays dispose-t-il d’outils de planification ?courants ? ?

L.P.T. ? : Il y a des outils dans la démarche du ministère de l’Habitat et de l’Urbanisme depuis que ce département ministériel existe. On a élaboré un code de l’urbanisme et de la construction qui est la réglementation régissant le secteur. Ce document indique clairement qu’en matière de planification, les outils qu’on devrait utiliser au Burkina Faso sont les Schémas directeurs d’aménagement et d’urbanisme (SDAU) qui avaient été déjà énoncés dans la version actuelle de la Réforme agraire et foncière (RAF). On a réalisé beaucoup d’études dans ce cadre mais qui n’ont pas été validées comme il se doit pour qu’elles soient des outils efficaces pour les autorités qui ont en charge la gestion des villes.

Pour le moment, il n’y a que le Schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de Bobo-Dioulasso qui a été adopté en conseil des ministres en 1989. A cela s’ajoute le Schéma directeur d’aménagement du grand Ouaga dont la première version a été adoptée également en conseil des ministres. Ce sont les deux seuls schémas qui ont été adoptés dans les formes. Les autres localités ont connu des études concernant leurs schémas directeurs respectifs, mais ces études n’ont pas encore été validées encore moins adoptées en conseil de ministres.

S. : Est-ce cette insuffisance que l’atelier de Bobo-Dioulasso, les 10 et 11 novembre 2011, va-t-il essayer de corriger ? ?

L.P.T. ? : Nous espérons que la rencontre de Bobo va permettre d’amorcer le virage de la planification urbaine dans notre pays. C’est-à-dire qu’on a l’occasion de procéder à l’élaboration de douze (12) Schémas directeurs d’aménagement et d’urbanisme (SDAU) qui correspondent principalement aux 12 capitales régionales, exceptée Ouagadougou. Les 12 villes vont connaître, en même temps, l’élaboration de leur SDAU. Cela devrait nous permettre d’inscrire cette démarche comme moyen de gestion de la ville ? : passer par l’élaboration des schémas directeurs avant de procéder à des aménagements. Pour la première fois, on a l’occasion, avec l’appui du projet Pôles régionaux de développement financés la Banque mondiale, de procéder à l’élaboration de 12 schémas des plus grosses villes du pays. Ouagadougou n’est pas concernée parce que la ville dispose déjà du Schéma directeur d’aménagement du grand Ouaga. Le document est en cours de validation.

S.? : Qui sont les participants attendus à l’atelier de Bobo-Dioulasso ? ?

L.P.T. ? : Tous les maires des capitales régionales accompagnés de techniciens de chaque commune y sont attendus, ainsi que les techniciens du ministère de l’Habitat et de l’Urbanisme. Sans oublier d’autres personnes-ressources qui seront associées puisqu’il s’agit de discuter de planification et d’urbanisme. Aussi, nous allons procéder au lancement des études sur les douze capitales régionales.

S.? : De façon concrète, que vont apporter les SDAU ? ?

L.P.T. ? : Avec les SDAU, on aura une idée précise des déterminations des sols sur le territoire de la commune. A partir de là, on donne un rythme aux opérations de réalisation des aménagements qui doit s’imposer à tous les acteurs.

S. ? : Combien de temps va prendre tout le processus ?des SDAU ?

L.P.T. ? : Les études que nous allons lancées à Bobo-Dioulasso vont prendre sept mois avant de les soumettre à l’adoption en conseil des ministres. La procédure d’élaboration est confiée à un cabinet qui a cinq mois pour déposer son rapport. Ce rapport devrait être validé d’abord, au niveau de la commune concernée par la commission communale d’urbanisme et de construction. Il s’agit d’une structure créée par le code de l’urbanisme pour trancher des questions d’urbanisme au niveau des communes. Ensuite, le document est acheminé à la commission régionale d’urbanisme et de construction qui doit l’adopter.

En même temps, on envoie un exemplaire du schéma dans les structures d’aménagement du territoire, notamment, la commission provinciale d’aménagement du territoire, qui doit attester qu’il n’y a pas de contradiction avec les orientions en matière d’aménagement du territoire concerné. C’est lorsque le conseil régional aura adopté le document que nous le transmettrons au gouvernement pour adoption en conseil des ministres.
L’adoption en conseil des ministres est une autre manche. On ne maîtrise pas le temps que cela va prendre. On imagine que cela peut durer deux mois.

S. : Comment se fait le financement des actions des SDAU sur le terrain ? ?

L.P.T. ? : Dans les dispositifs institutionnels, il est spécifié que c’est l’Etat et la collectivité qui ont la charge la mise en œuvre du SDAU. Pour sa part, l’Etat doit réaliser dans chaque ville, un certain nombre d’infrastructures. C’est son devoir et sa partition par rapport au développement de la ville. Il y a d’autres actions relevant de la compétence de la collectivité locale concernée. C’est-à-dire qu’au niveau de chaque commune, il y a un budget avec des actions. L’Etat intervient de manière multifonctionnelle dans plusieurs secteurs tels que l’éducation, la santé, les infrastructures, etc. Que ce soit l’Etat ou la collectivité, chacun agit avec l’appui de partenaires.

S. : ? La suspension des lotissements décidée, courant avril dernier, par le chef du gouvernement, Luc Adolphe Tiao, n’a-t-elle pas freiné vos activités dans une certaine mesure ? ?

L.P.T. : Cela ne peut pas freiner nos activités pour la simple raison que l’urbanisation ne s’arrête pas avec cette mesure. Le décret concerne seulement les opérations de lotissements. Bien au contraire, cette mesure va nous permettre de mieux réfléchir et de partir sur de meilleures bases par rapport à notre manière de gérer les lotissements. Cela permet aussi de reposer la problématique de planification urbaine. Est-ce que les lotissements qu’on a réalisés s’intègrent dans une démarche de prise en compte de la ville en moyen et long terme ? ? C’est la question que l’on doit se poser aujourd’hui. Nous sommes bien à l’aise de dire aux uns et aux autres que c’est l’occasion de recadrer les choses pour avoir une démarche plus cohérente pour qu’on ne soit pas tirer par les lotissements. Nous devons être capables de considérer les lotissements comme moyens d’agrandissement des villes.

Interview réalisée par Alban KINI

Sidwaya

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