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Recrutement de 600 enseignants pour le secondaire : Le MESSRS provoque une hémorragie au MEBA

Publié le jeudi 7 octobre 2010 à 02h31min

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Le Ministère de l’enseignement de base et de l’alphabétisation (MEBA) enregistre un départ important de son personnel enseignant. Près de six cent (600) instituteurs titulaires d’un diplôme supérieur ont été admis à enseigner au secondaire. Une mesure qui arrive sans doute sous des acclamations mais attention aux problèmes en perspectives.

Ils sont exactement 594 enseignants du primaire qui rejoindront le secondaire dès la présente rentrée scolaire. Ils ont été retenus suite à l’examen de 635 dossiers d’instituteurs d’école reçu dans le mois de mars par le Ministère de la fonction publique et de la reforme de l’Etat (MFPRE). Selon le communiqué du MFPRE en date du 16 mars, il s’agit d’un "recrutement à titre exceptionnel d’enseignants du secondaire parmi les enseignants du primaire titulaires d’un diplôme universitaire sur sélection de dossier". En plus de la condition du diplôme, les postulants devraient être des instituteurs adjoints certifiés ou des instituteurs certifiés âgés de cinquante ans au plus au 31 décembre 2009.

Les titulaires de la Licence seront affectés dans les lycées tandis que ceux qui ont le DEUG seront destinés aux Collèges d’enseignement général (CEG). Ce sont des enseignants de Français, d’Anglais, d’Allemand, de Philosophie, d’Histoire-Géographie et de Physique-chimie qui viennent ainsi réduire le déficit jamais comblé dans le secondaire ces dernières années. Selon Daniel Nissato Hien, directeur des ressources humaines du MESSRS, " Chaque année, le ministère est confronté à un déficit d’au moins 1500 enseignants à rechercher. ". Cette année, à la date du 5 août, les besoins exprimés font état d’un déficit global de 2527 enseignants pour les collèges et lycées : 101 enseignants en Français, 35 en Philo, 196 en Math, 74 en Histoire-géo, 33 en Allemand, 497 en Français-anglais, 501 en Français-histoire/géo. La liste n’est pas exhaustive et l’importance des besoins varie en fonction des disciplines et des régions.

Les régions du Sahel, de l’Est, du Sud-ouest, et de la Boucle du Mouhoun sont les plus déficitaires. Ces régions, pour des raisons subjectives ou objectives sont des destinations moins prisées par les enseignants. Le présent recrutement à partir du primaire a permis d’avoir 308 enseignants en Français, 144 en Philo, 74 en Histoire-géo, 33 en Allemand, 497 en Français-anglais, 501 en Français-histoire/géo, 1 en Physique-chimie. Ces effectifs seront complétés par le recrutement direct de 250 enseignants prévu en octobre et, la sortie de 600 enseignants de l’Ecole normale supérieure de Koudougou (ENSK) et de l’Institut supérieur des sciences (IDS). Malgré tout, le déficit ne sera pas comblé se doute le DRH du MESSRS qui pense que les prévisions seront en deçà des besoins réels à cause de l’ouverture de classes qui n’auraient pas été prévues.

L’idée de recruter des enseignants du secondaire parmi ceux du primaire date de 2008. La démarche a été matérialisée en 2009 par la mise en place d’un comité interministériel composé du ministère de la Fonction publique, du ministère de l’Emploi et de la Jeunesse, du ministère des Finances et des deux ministères de l’éducation. C’est une idée qui a déjà été expérimentée au moins une fois au Burkina en 1979. La commission interministérielle a travaillé et proposé six solutions qui sont entre autres, l’introduction de modules de formation en sciences de l’éducation dans les universités en vue de susciter davantage la vocation d’enseignant chez les jeunes, l’accroissement des capacités d’accueil des écoles de formation d’enseignants, le recrutement d’enseignants du secondaire à partir des enseignants du primaire. La dernière proposition entretient un réel espoir au ministère parce qu’elle permet de résoudre le déficit à court terme.

Les nouveaux recrutés ont bénéficié d’une formation de trois semaines à l’université de Ouagadougou du 9 au 27 août. Celle-ci s’est déroulée en deux étapes majeures composées d’un module en tronc commun qui a duré une semaine puis des ateliers par options (disciplines d’enseignement) pendant les deux dernières semaines. Ce sont des encadreurs des enseignants déjà en exercice du MESSRS qui ont assuré la formation. La stature des formateurs a été la première assurance pour les nouveaux enseignants au regard de l’expérience de ces encadreurs rompus dans le métier de l’enseignement. A la psychologie de l’enfant dont les nouveaux recrutés avaient déjà la maîtrise, ils ont ajouté la psychologie de l’adolescent pour être en phase avec la catégorie d’âge qui est celle des élèves du secondaire.

La formation a abordé la déontologie de la Fonction publique, la méthodologie, la pédagogie, les techniques de dissertation, de commentaire de texte, de prise de notes, la présentation des programmes officiels des différentes matières, etc. Hilaire Somda se dit doublement satisfait à l’issue de la formation : d’abord de voir que son diplôme universitaire va enfin servir, mais également satisfait de l’ambiance qui a régné pendant la formation. Titulaire d’une licence en psychologie, il quitte désormais l’enseignement primaire pour assurer des cours de philosophie au lycée. A la question de savoir comment il appréhende la mission qui les attend, il se dit serein. Pour lui, la formation de trois semaines a déjà permis de répondre à nombre de difficultés avant même que celles-ci n’émergent mais aussi, ajoute-il, il appartiendra à chaque enseignant de renforcer cette formation par un investissement personnel. Le défi, pense Somda, sera de maîtriser le contenu des cours pour être à l’aise avec les élèves.

Si les nouveaux arrivants au ministère de l’enseignement secondaire trouvent leur compte dans l’opération, pour le MEBA c’est une perte sèche, estime Hilaire Somda. Le ministère de l’Emploi et de la Jeunesse s’engage à palier le vide créé en procédant à un recrutement massif de volontaires enseignants au profit du MEBA. Il restera cependant le capital d’expérience de ces enseignants partis qui ne sera pas de si tôt comblé. Le MEBA pour ne pas trop "s’appauvrir" a d’ailleurs fait opposition à la candidature des instituteurs principaux au recrutement du MESSRS. Le MEBA s’oppose au départ de ces derniers qui avec leur expérience et leur grade sont des encadreurs de jeunes enseignants qui arrivent au MEBA. Joachin Compaoré vient de finir sa formation d’instituteur principal de l’enseignement de base et il reste dans ce ministère. Même s’il apprécie positivement le nouveau statut des désormais ex-instituteurs, Il imagine néanmoins que la tâche pourra être ardue pour ses collègues partis servir le MESSRS.

Pour lui, les trois semaines de formation peuvent s’avérer très insuffisantes parce que le cycle normal de la formation pour enseigner au secondaire prend deux années. Kanléifé Dambina, professeur de lycée soutient pour sa part que les nouveaux arrivants pourront bien s’en sortir sans pour autant démentir Joachin Compaoré. Il prend en exemple la catégorie d’enseignants (des étudiants en majorité) recrutés sur concours direct et directement envoyés dans les lycées et collèges sans passer par une école de formation. Certains rencontreraient de sérieux problèmes liés à la maîtrise de la pédagogie et à leur aptitude à enseigner. Le DRH du MESSRS, confiant, pense qu’" a priori, il ne faut pas douter de la compétence des nouveaux recrutés ". Il loue surtout " la rigueur et la discipline " des enseignants du primaire à qui il reconnaît " une formation pédagogique suffisante ". Les enseignants ont fait la promesse de donner le meilleur d’eux même pour mériter la confiance de leur nouveau tuteur. Du côté des syndicats d’enseignants, c’est plutôt la satisfaction.

Dans une déclaration publiée le 27 août passé, le Syndicat national des travailleurs de l’enseignement de base (Synateb) et le Syndicat national des travailleurs de l’éducation et de la recherche (Synter) voient dans cette " promotion ", l’aboutissement d’une revendication qui date de 1995 et qui demandait "l’élargissement du concours des professeurs du second degré aux enseignants du primaire détenteurs de diplômes universitaires". C’est sur la gestion de la nouvelle carrière de recrutés que les syndicats se sont montrés soucieux. Le DRH du MESSRS rassure que le traitement des dossiers connaît un cours normal et que les intéressés ont eu les informations nécessaires lors de la formation et préalablement dans le communiqué de recrutement. Ce qui était encore attendu aux derniers jours, c’est le déploiement de ce personnel à l’intérieur du pays.


De Ouagadougou à Paris, la même reforme ou presque

Si la rentrée scolaire fait l’actualité au Burkina, elle l’est aussi en France et un peu partout dans le monde. En France, de nouveaux maîtres et professeurs de lycées et collèges vont se retrouver devant des élèves sans avoir subi de formation pédagogique. C’est la conséquence de la nouvelle reforme de l’éducation nationale. Les nouveaux enseignants ont eu droit à seulement une demi journée de formation pédagogique. Très insuffisant pour les rassurer comme il ressort de leurs déclarations dans les médias. Ils sont suivis par les syndicats qui dénoncent avec les associations de parents d’élèves " la réforme la plus catastrophique de ces quinze dernières années ".

Habituellement, les nouveaux admis aux concours de l’enseignement avaient droit à une formation d’un an dans les Instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM) où ils apprenaient leur futur métier à travers cours théoriques et stages pratiques. Les 16 000 diplômés admis à la session 2010 des concours de l’enseignement rejoignent directement les classes. Pour beaucoup qui sont passés ipso facto du statut d’élève à celui d’enseignant, ils feront leurs armes sur le tas. Pour les jeunes enseignants du primaire, ils seront dans un premier temps assistés par des enseignants aguerris avant d’être lâchés plus tard. Leurs collègues du secondaire qui ont moins de chance iront directement au charbon. Ils auront néanmoins un accompagnement de 216 heures de formation qui se déroulera en dehors de leurs classes. Ils devront donc par moments confier leurs classes à des enseignants remplaçants, le temps de retourner prendre des cours. Alors que des critiques vives sont émises contre la reforme, le ministère de l’Education soutient que c’est " un progrès " parce que les enseignants seront désormais recrutés à partir du Master, soit BAC + 5 .

Par Boukari Ouoba

L’Evénement

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Vos commentaires

  • Le 7 octobre 2010 à 12:31, par messager En réponse à : Recrutement de 600 enseignants pour le secondaire : Le MESSRS provoque une hémorragie au MEBA

    je n’appelle pas ça une hémorragie parce que les autorités sont prévenus à l’avance. Elles savaient que les 600 enseignant déposeraient leur bagages au secondaire. C’est une très bonne chose et même très économique pour le pays. Il suffit que le MESSRS mette à la disposition du MEBA les fonds qui étaient alloués à récruter son personnel ! Nous avons combien de jeunes frères diplômés qui attentent d’entrer à la fonction publique que le MEBA récrute tout simplement. Ce qui est déplorable les gens prenneent des décisions sans trop réfléchir à leur repercussion. sinon ça encourage les travailleurs à chercher à s’instruire pour quitter le statut d’un simple enseignant du primaire à un proviseur de lycée s’il a les compétences contrairement chez les frères militaires de l’armée burkinabé où un sergent peut étre détenteur d’une maîtrise et partir à la retraite adjudent chef major alors que peut etre un colonel ira à la retraite sans avoir connu une université sinon tout au plus détenteur d’un DEUG seleument

  • Le 7 octobre 2010 à 16:21, par Inoussa verite En réponse à : Recrutement de 600 enseignants pour le secondaire : Le MESSRS provoque une hémorragie au MEBA

    le titre de votre article est malsain. Cette decision n’est que justice rendue à ces braves instituteurs titulaires de diplomes universitaires. je profite encourager les autres qui n’ont pas de diplomes universitaires à poursuivre leurs etudes dans la mesure du possible et surtout à tout faire pour avoir leur baccalaureat au moins.Quant au deficit à combler dans le primaire ce ne sont pas des candidats qui manquent...et " L’Evenement " le sait.

  • Le 7 octobre 2010 à 16:54, par kabako En réponse à : Recrutement de 600 enseignants pour le secondaire : Le MESSRS provoque une hémorragie au MEBA

    Comparaison n’est pas raison au regard du niveau au pays on va tout droit au charbon.une licence en pschy serait suffusente pour enseigner au lycee ? sauf l’eternel réfuge dans le apprendre par coeur.

  • Le 7 octobre 2010 à 18:45 En réponse à : Recrutement de 600 enseignants pour le secondaire : Le MESSRS provoque une hémorragie au MEBA

    Cette année, à la date du 5 août, les besoins exprimés font état d’un déficit global de 2527 enseignants pour les collèges et lycées :
    • 101 enseignants en Français,
    • 35 en Philo,
    • 196 en Math,
    • 74 en Histoire-géo,
    • 33 en Allemand,
    • 497 en Français-anglais,
    • 501 en Français-histoire/géo.
    La liste n’est pas exhaustive et l’importance des besoins varie en fonction des disciplines et des régions.
    Les régions du Sahel, de l’Est, du Sud-ouest, et de la Boucle du Mouhoun sont les plus déficitaires. Ces régions, pour des raisons subjectives ou objectives sont des destinations moins prisées par les enseignants.
    Le présent recrutement à partir du primaire a permis d’avoir :
    • 308 enseignants en Français,
    • 144 en Philo,
    • 74 en Histoire-géo,
    • 33 en Allemand,
    • 497 en Français-anglais,
    • 501 en Français-histoire/géo,
    • 1 en Physique-chimie.

    RETROUVEZ L’ERREUR !

    Comment est ce possible ?

    On cherche 35 enseignants en PHILO et à l’aarrivée on se retrouve avec 144 !!!!

  • Le 7 octobre 2010 à 20:40, par Jamal En réponse à : Recrutement de 600 enseignants pour le secondaire : Le MESSRS provoque une hémorragie au MEBA

    Tout récemment, j’etais en voyage d’affaire en Chine et je me rends compte à quel point l’éducation est important dans ce pays. Dès le plus bas age, les enfants apprennent à lire et à ecrire en chinois mais surtout à respecter leur pays et la valeur sacré du travail.
    Je crois qu’il faut vraiment mettre les moyens pour eduquer nos enfants et aussi lutter contre la corruption dans le gouvernement et l’administration. Il faut un veritable "plan marshall" de l’enseignement si on veut vaincre le sous-developpement.

  • Le 7 octobre 2010 à 20:50, par AROSS En réponse à : Recrutement de 600 enseignants pour le secondaire : Le MESSRS provoque une hémorragie au MEBA

    Cette mesure, au-delà de ces aspects positifs comporte des inconvénients certains et prévisibles notamment cette hémorragie de capital humain avec une somme colossale d’expérience du primaire vers le secondaire. Ce qui est déplorable, c’est le fait que nos autorités, au lieu de penser des solutions durables et efficaces, en recrutant par exemple depuis deux ans plus d’enseignants qui seraient formés dans les ENEP, elles ont préféré la voie de la courte échelle en recourant aux volontaires sans formation préalable adéquate. Quel enseignement recevront nos enfants dans ces condtions ? Une fois de plus, l’enseignement est sacrifié et la cause des pauvres ignorée et bafouée en toute impunité et sans état d’âme. C’est simplement dommage pour un pays dont on connait le taux d’analphabétisme. Cette mesure est bonne en son principe mais elle est suicidaire en son apllication car elle ampute et déshérite l’enseignement primaire d’une ressource exceptionnelle qu’on ne pourrait ni trouver ailleurs ni inventer à nouveau. De grâce, faites des prspections avant de décider car gouverner, c’est prévoir !

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