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LUTTE CONTRE LA CORRUPTION : La France réactive, l’Afrique laxiste

Publié le jeudi 8 juillet 2010 à 00h41min

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Les démentis ne suffisent plus, la pression se fait forte après les dernières révélations sur le financement irrégulier de la campagne de Sarkozy lors de la présidentielle de 2007. L’opinion attend que le chef de l’Etat français s’explique. Mais l’on peut se féliciter en Occident, de voir évoquer fréquemment et abondamment des cas d’abus de biens sociaux et de corruption des élites politiques. La police et la justice y mènent des enquêtes et informent. En Afrique par contre, rien ne filtre ou presque et on fait très peu pour inquiéter les corrompus et les corrupteurs. Pourtant, sur ce continent, l’on aime bien à singer le Blanc, mais dans le mauvais sens.

Sarkozy voulait rénover la république et instaurer l’austérité en principe de gouvernement. Aujourd’hui, on reproche à son régime d’être dispendieux, lui qui, sitôt installé, n’avait pas su résister à l’offre d’un célèbre armateur de faire un tour à bord de son bateau. Aux yeux des critiques, Sarkozy venait alors de tisser alliance avec les gourous du privé. Mais la situation paraît encore plus grave de nos jours. En effet, la Brigade de répression de la délinquance sur la personne (BRDP) a retrouvé la trace d’un retrait de 50 000 euros, à l’agence de la BNP de la Grande-Armée, confirmant ainsi les propos de l’ex-comptable Claire Thibout. Celle-ci soutient que Patrice de Maistre, le gestionnaire de la fortune de Liliane Bettencourt, a remis en fin mars 2007 une somme de 150 000 euros au trésorier de l’UMP Eric Woerth, l’actuel ministre français du Travail impliqué. Cette somme, « trois fois supérieure à l’habitude", devait, dit-on, servir à financer la campagne du candidat Sarkozy.

En France, des acteurs politiques mêlés aux histoires de détournements et de corruption, sont presque toujours interpellés par la justice. En dépit des pressions, les magistrats évitent généralement de troquer leur indépendance et leur impartialité. Les procès menés jusqu’au bout, permettent d’innocenter ou d’incriminer des ténors de la classe politique : cas de Jacques Chirac, Alain Jupé, Dominique Strauss-Kahn, et plus récemment encore Charles Pasqua. Tous ont subi le calvaire de la rumeur et les quolibets des adversaires politiques. D’autres ont été frappés d’inéligibilité. Toutefois, le débat existe, les droits de la défense surtout. Pas de tabou, chacun est passible de sanction.

La liberté de presse étant effective, les médias sont toujours prompts à véhiculer les premières informations. La police et la justice, elles, enquêtent sans répit. La procédure suivant son cours, l’acteur public en vient à démissionner afin de protéger les acquis et d’assurer sa défense, sa dignité. Un tel scénario en Afrique ? Du rêve ! Pourtant, la corruption gravit les échelons. Elle est même devenue presque chose banale. Ainsi, acteurs politiques et opérateurs économiques affichent publiquement leurs accointances, bravent les mesures bannissant les conflits d’intérêts. De hauts responsables ne résistent plus aux faveurs du privé. Le hic, c’est lorsque des bailleurs de fonds semblent impuissants face aux auteurs avérés de détournements crapuleux de fonds destinés aux plus vulnérables. Faudrait-il, à l’instar du Tribunal pénal international, trouver une formule qui permette de neutraliser les délinquants à col blanc et de permettre aux contribuables d’ici et d’ailleurs de récupérer leur dû ?

Maintes fois, nous l’avons souligné dans ces colonnes : l’Afrique doit éviter de suivre le mauvais exemple ; elle doit plutôt s’inspirer des meilleurs qui viennent d’ailleurs. Cela, d’autant que la corruption fait énormément de ravages et de mal au continent. C’est l’une des causes majeures du grand retard du continent. Aussi à son entrée à la Maison blanche, le président Obama en a-t-il fait son cheval de bataille dans les rapports nouveaux à établir avec l’Afrique. La corruption est si engluée dans les méandres de l’appareil d’Etat, qu’elle empêche les gouvernants africains de répondre efficacement à la demande sociale. Cinquante ans après les fameuses indépendances "cha cha cha", les voilà encore qui tendent la main pour donner à boire et à manger à leurs propres populations, à les soigner, les éduquer, etc. Il en aurait sans aucun doute été autrement si la situation avait été suffisamment maîtrisée.

Hélas, face à la corruption, l’autorité semble quasi-inexistante en Afrique. Les libertés démocratiques étant le plus souvent confisquées, l’on tend davantage à étouffer les dossiers du contentieux.

La justice, elle, a du mal à progresser, et à clarifier la situation et punir les coupables. Des commissions, des structures ad hoc ont été créées. Des enquêtes et des études ont été menées. Les suites ? De temps à autre, on sacrifie du menu fretin pour amuser l’opinion. Les gros poissons, généralement proches du prince, sont très souvent épargnés. Ce qui les incite à reprendre du service et à narguer le citoyen lésé. Forces de l’ordre muselées, justice sous ordre, droits humains bafoués, services publics sevrés de tout, marchés publics sous contrôle avec évidence de conflits d’intérêts, la corruption prend des proportions de plus en plus inquiétantes. L’hydre à têtes multiples se révèle très difficile à combattre.

En effet, à la maison, en dépit de la vie chère, des familles ont un train de vie déroutant. La progéniture qui n’est pas dupe, se prive donc difficilement de ces excès qui ne scandalisent même plus la rue. Elle sait parfaitement que l’autorité morale que devraient incarner les parents se trouve fort limitée du fait même de la forfaiture de ces derniers. Vu le manque de repères, l’éducation tend alors à devenir un véritable boulet au pied des familles, et des autres institutions sociales.

En milieu de travail également, la gangrène des espèces sonnantes et trébuchantes sape les efforts des plus consciencieux et des plus dévoués au service public. Depuis belle lurette déjà, la médiocratie a pris le dessus sur la méritocratie. Cela s’observe dans les secteurs public et privé où les réseaux mafieux ont élu résidence avec pour principes : le népotisme, l’arrivisme , la complaisance et la courte échelle. Les choses se passent comme si la société entière avait abdiqué devant l’ampleur du mal. Qui fera donc quoi, quand, et pourquoi dans cette Afrique en danger ? Faut-il poursuivre sur cette voie sans issue alors même que parallèlement, on voudrait pouvoir, avec faste, commémorer cinquante ans d’indépendance.

"Le Pays"

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Vos commentaires

  • Le 8 juillet 2010 à 15:05 En réponse à : LUTTE CONTRE LA CORRUPTION : La France réactive, l’Afrique laxiste

    Moi, à vous lire j’ai les larmes aux yeux ! Je vous dit sincèrement les vrais larmes !
    C’est la catastrophe ! Je ne sais pas qu’est ce qu’il faut
    faire pour générer un effet de ral bol dans nos populations
    afin qu’elles prennent en charge leur destin !
    Je ne sais pas qu’elle serait effet générateur de cette prise de conscience !
    A bien refléchir c’est ce que le Pr Laurent Bado s’ervertue
    à nous faire comprendre mais en vain !
    L’heure est grave ! Et ce qui est écoeurant c’est que nos gouvernements ne resentent aucune honte à dépenser dans des organisation bidons pour la célébration de je ne sais quel
    indépendance ! nous devrons avoir honte ! vraiment !
    Je ne dis pas que rien n’est fait ! Je ne dis pas qu’il n’y’a pas d’acquis, mais l’essentiel est dérisoir ! mitigié !
    Moi je vous le dis c’est la catastrophe !
    Je pense qu’il nous faut un laurent Bado dans chaque secteur
    afin de conscientiser les gens !
    Je ne suis ni un partisant du PAREN, ni un "phana" de Bado !
    seulement j’apprécie son franc parlé et la façon dont il
    depeint la situation au pays des hommes désintègres afin intégres !

  • Le 13 juillet 2010 à 09:42, par Barnabé En réponse à : LUTTE CONTRE LA CORRUPTION : La France réactive, l’Afrique laxiste

    Je suis Française, je peux vous dire que la presse n’est pas si libre que vous le dites, il faut que certains journaux comme Mediapart (en ligne),le Canard Enchaîné, dénoncent les faits pour qu’ils soient repris par les grands quotidiens, car les propriétaires de ces journaux sont les copains de Sarkozy. Dans l’affaire Bettencourt, l’Etat freine des quatre fers pour qu’elle ne sorte pas sous tous ses aspects nauséeux. Les Français ne sont pas dupes, attendons Septembre et les manifestations contre la réforme des retraites, je crois qu’il y aura du monde. La justice n’est pas aussi libre que vous le croyez,certains magistrats ont été nommés par Sarkozy qui prévoit de supprimer le Juge d’Instruction parce qu’il est indépendant. De toute façon, quelle que soit l’issue de l’affaire Bettencourt, Sarkozy est le premier président qui aura réussi à se faire rejeter par les Français après 2 ans et demis de gouvernance précisément parce qu’il a mené une politique d’injustice. Ce qui porte les Français vers la contestation c’est lorsqu’on oublie l’inscription qui est au-dessus de chaque Mairie : Liberté - Egalité - Fraternité. S’il y avait moins de corruption dans votre pays, les citoyens n’émigreraient pas. C’est à vous, la presse, de dénoncer cette gangrène. Vos sols sont riches, vous pourriez être heureux.

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