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TEMOIGNAGE D’UNE SEROPOSITIVE : « Ce qui me fait mal, c’est… »

Publié le mardi 25 mai 2010 à 02h27min

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Christine Kafando

Lorsque mes yeux ont rencontré ceux de Christine
Kafando ce 16 avril, je me suis souvenu de cette dame qui a posé
publiquement avec le président du Faso, révélant ainsi à la face du
monde qu’elle était séropositive. Mais aussi que l’espoir était permis
si l’on faisait réellement de la lutte contre le Sida et la prise en
charge des malades, une priorité. Christine Kafando a créé l’Association
Espoir pour demain qui s’occupe des enfants infectés et qui se bat, sans
cesse, pour la prévention de la transmission mère-enfant. Près de 1000
personnes bénéficient actuellement des services de cette association.
Grâce, en partie, au soutien du PNUD. Témoignage d’une femme qui croit
en ce qu’elle fait.

Le Reporter : Pourquoi avez-vous décidé de créer cette association ?

Christine Kafando : D’abord parce que je suis une personne vivant avec
le VIH. Je suis ma sérologie depuis 1996. Je me suis portée volontaire
dans les services de santé pour recevoir les personnes nouvellement
infectées afin de les aider à accepter leur sérologie comme moi. Et de
vivre positivement ! Mais je me suis rendu compte qu’il n’y avait rien
pour les enfants, notamment sur le plan médical et associatif. J’ai
donc décidé de créer l’association afin qu’elle s’occupe uniquement des
enfants et de la prévention de la transmission mère-enfant.

Ces enfants bénéficient-ils aujourd’hui de tous les soins dont ils ont
besoin ?

Je suis très satisfaite aujourd’hui, parce qu’en 2003, j’ai perdu
beaucoup d’enfants par manque de soins. Mais à l’heure actuelle, on
arrive à sauver les enfants grâce au traitement. De plus, les parents
des enfants infectés adhèrent à l’observance. Aujourd’hui, tout est
gratuit pour les enfants : tant les examens biologiques que les
antirétroviraux.

Vous dites être vous-même infectée. Comment arrivez-vous à surmonter
toutes ces difficultés ?

Grâce à mon caractère. Je me suis fait une philosophie : que je sois
infectée ou pas, je vais mourir. Tôt ou tard, je vais mourir. Même si on
me dit que je n’ai pas le Sida et que je vais mourir demain, je fais ce
que j’ai à faire et je meure. Je connais des gens qui ne sont pas du
tout infectés mais qui sont morts avant moi. Le VIH n’est pas lié à la
mort. Même quand on n’a pas le VIH, et que sur le plan psychologique, on
n’est pas fort, par exemple, quand on a un simple paludisme, on peut
mourir parce qu’on ne supporte pas sa maladie. C’est ce qui fait que je
me suis accrochée. Je ne vais pas me laisser déstabiliser par une
maladie, quelle qu’elle soit.

Qu’est-ce qui vous a particulièrement marqué dans votre vie de
séropositive ?

Lorsque je faisais les consultations à l’hôpital avec les médecins, j’ai
assisté à une scène… une femme séropositive… Non, là, vous allez me
faire pleurer. (elle observe un bref silence, puis reprend son souffle).
Elle était en train de mourir sous mes yeux parce qu’en son temps, il
n’y avait pas de traitement. Elle applaudissait en mourant. Avez-vous
déjà vu ça ? Quelqu’un qui applaudit et qui meurt ! Elle refusait de
partir. Elle était essoufflée mais elle applaudissait. Elle criait « au
secours ! ». J’ai appelé les médecins, mais c’était trop tard. Cette
scène m’est restée dans la tête, indélébile. Jusqu’à présent, lorsque je
dors et que je me réveille, si je pense à la lutte contre le Sida, je
pense automatiquement à cette femme. Depuis lors, ses enfants sont avec moi.

Parlez-nous d’une autre scène qui vous a plutôt réconfortée…

C’est le cas d’une femme que j’ai récupérée et qui avait quatre CD4.
C’est-à-dire que si jamais elle avait une petite toux, elle serait
morte. Elle était enceinte de neuf mois. Tous les médecins avaient fait
leur diagnostic et avaient estimé que ce n’était plus la peine de
continuer. J’avais mon traitement à l’époque mais je ne pouvais pas le
partager avec cette dame parce que ce n’était pas faisable ; mais j’ai
décidé de le faire sans l’avis d’un médecin. Aujourd’hui, cette femme
témoigne à visage découvert. Elle a eu deux autres enfants. Pour moi,
c’est un motif de satisfaction.

Avez-vous, au fond du cœur, autre chose de particulier que vous
souhaitez dire…

C’est ensemble que nous pouvons y arriver. Ce qui me fait mal en ce
moment, c’est le fait que les examens biologiques pour les adultes sont
toujours payants. De nombreux patients n’arrivent pas à y faire face.
C’est d’ailleurs le reste de mon combat. Si nous arrivons à obtenir la
gratuité des examens biologiques, je n’aurais plus rien à faire dans le
domaine de la lutte contre le Sida.

Propos recueillis par Hervé D’AFRICK

Le Reporter

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Vos commentaires

  • Le 25 mai 2010 à 17:35 En réponse à : TEMOIGNAGE D’UNE SEROPOSITIVE : « Ce qui me fait mal, c’est… »

    en voila une qui merite les medailles, plus que ces marchands de la mort, tous ces ronflonflons qui ne cherchent qu’a manger l’argent alloué au sida. Le sida est une maladie qui se guerit C’est la pauvrete qui laisse mourir les gens Les riches qui ont les moyens s’en sortent C’est la realité Avec 4 CD4 (s’il y a pas d’erreur de frappe) il a suffi de quelques medicaments et l’espoir revient ! Qu’en est-il si elle avait un traitement comme les autres gens "bien". Meme pauvre on a le droit de vivre, comme cette pauvre qui bat des mains en s’accrocchant à la vie ; ca fait mal ; on meurt (PRESQUE TOUJOURS) de l’egoisme des autres
    SOME

    • Le 25 mai 2010 à 20:22 En réponse à : TEMOIGNAGE D’UNE SEROPOSITIVE : « Ce qui me fait mal, c’est… »

      Tout a fait d’accord avec Vous mon Frere, j’ai eu la chance de travailler avec des personnes vivant ave le VIH pendant plus de 4 ans , effectivement seuls ceux qui ont les moyens de s’offrir 3 bons repas quotidien, en plus du traitement medical offert par les associations presentent peu ou presque pas de symptomes. Le systeme immunitaire est est tres renforce quand l’alimention est saine et reguliere.
      Encore Courage a Christine...

  • Le 25 mai 2010 à 18:40, par kuanda En réponse à : TEMOIGNAGE D’UNE SEROPOSITIVE : « Ce qui me fait mal, c’est… »

    Courage à vous madame. On a fait toute une plubicité meurtrière autour de cette maladie si bien que le simple fait d’entendre le mot SIDA donne à mourir.
    Mais je vous assure, gardez courage et soyez fortes dans la tête ; vos efforts seront recompensés. Mes pensées à tous ceux qui souffrent de cette maladie, ce n’est pas la fin du monde...

  • Le 25 mai 2010 à 22:22, par Armando En réponse à : TEMOIGNAGE D’UNE SEROPOSITIVE : « Ce qui me fait mal, c’est… »

    Que Dieu vous bénisse et vienne en aide aux malades.Ayons une pensée envers tous les malades et agissons ensemble pour stopper la maladie.

  • Le 26 mai 2010 à 13:31, par TOE En réponse à : TEMOIGNAGE D’UNE SEROPOSITIVE : « Ce qui me fait mal, c’est… »

    Vous êtes une brave femme Madame. Que le Seigneur vous le rende. Votre lutte nous permet de voir encore plus clair par rapport à cette maladie.Soyez bénis. Caroline

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