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Milieu scolaire : Le téléphone portable, un outil perturbateur

Publié le mardi 11 mai 2010 à 01h49min

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Introduit au Burkina Faso en 1996, le téléphone cellulaire est devenu aujourd’hui aussi incontournable que la télévision et se révèle un instrument d’utilité multifonctionnel dans le quotidien des Burkinabè. Le nombre d’abonnés des réseaux de téléphonie mobile (Telmob, Telecel et ZAIN) est passé de 3 017 659 en fin 2008 à 3 816 000 au 31 décembre 2009, soit un taux de progression de 26, 45%. Les élèves des lycées et collèges sont comptés parmi ces millions d’utilisateurs. Mais, au fil des années, le téléphone portable s’est révélé être un instrument véritablement dangereux à cause des multiples possibilités de fraude qu’il offre en milieu scolaire.

Les élèves des lycées et collèges de Bobo-Dioulasso font du téléphone portable un moyen de communication privilégié. A cela, s’ajoutent les possibilités de distraction avec les fonction d’écoute de la musique (vidéo ou audio), de la radio, de prise de photos.

Au-delà de ces atouts, les élèves s’en servent pour d’autres besoins spécifiques au cadre scolaire. D’emblée, les uns évoquent les accidents de circulation qui sont fréquents dans nos villes. « Mes parents m’ont acheté le portable pour qu’en cas d’agression, d’accidents ou d’autres urgences, je puisse les appeler », laisse entendre Anicet Romaric Waro, élève en 1re A au lycée Ouézzin Coulibaly (LOC).

Maïmouna Traoré, parente d’un élève au lycée Béthanie I explique que le téléphone portable qu’elle a donné à son enfant sert à la joindre en cas de besoins. Oumar Ouattara, censeur au LOC, ajoute les cas de maladies comme l’asthme, les chutes brutales et autres accidents qui peuvent survenir au cours des séances d’éducation physique et sportive (EPS).

L’intrus de la classe

Des élèves, à l’exemple de Aboubacar Prosper Kaboré en Bac Pro 1 bureautique-comptabilité au Lycée professionnel de la ville de Sya, disent s’en servir pour joindre régulièrement leurs parents qui ne sont pas à Bobo-Dioulasso. En plus de l’avantage d’être un lien entre parents et progénitures, le téléphone portable, aux dires de Sansan Karin Palé, délégué général des élèves du Collège de Tounouma Garçons, fait économiser du temps et réduit considérablement les distances.

Il lui permet d’informer ses camarades de classe pour les rendez-vous de travaux de groupe ou en cas d’absence du professeur par un simple SMS. Malgré ce chapelet d’avantages qui font du téléphone portable un moyen considérable pour l’amélioration de leurs conditions d’étude, une interrogation demeure cependant : Les élèves utilisent-ils leurs portables à bon escient ?

« Le phénomène du portable est devenu un véritable fléau qui perturbe énormément les cours. Quand les portables sonnent en classe, cela interrompt le fil des idées du professeur et distrait les autres élèves.

Les SMS reçus en classe retiennent l’attention de l’élève et lui font perdre une partie des explications et du cours dispensés par le professeur », s’indigne Salif Sidibé, professeur de français au Lycée Béthanie I. C’est aussi la conviction de Amadou Barry, enseignant de mathématiques au LOC, quand il témoigne qu’il a dû faire recours à la police et à l’un des réseaux de téléphonie mobile pour détecter un élève qui le bipait régulièrement, rien que pour perturber son cours, parce qu’il n’aime pas la matière qu’il dispense.

Le censeur du LOC, Oumar Ouattara précise de son côté qu’il y a généralement trois cas de figure quand les portables des élèves sonnent : « Soit il a oublié d’éteindre le portable et ça le surprend en classe ou alors l’élève n’aime pas celui qui fait le cours et il veut le perturber. Enfin, il y a des portables qui même, sous vibreur dérangent ». Par ailleurs, le téléphone portable est parfois utilisé par les élèves comme un moyen de fraude lors des évaluations et examens.

C’est du moins ce que confie le directeur du Collège de Tounouma, le Frère Anicet Kpoda, qui dit avoir exclu deux élèves qui ont triché avec leurs portables lors d’un devoir de mathématiques l’année dernière (2008-2009). Pour Salif Sidibé, avec des portables qui contiennent des dictionnaires électroniques, « si les élèves ne connaissent pas l’orthographe exacte d’un mot ou la conjugaison d’un verbe, il suffit de l’introduire et l’appareil les corrige. C’est en contrôlant que j’ai vu ce dictionnaire en classe ».

L’autre méfait du portable est l’influence de plus en plus perceptible du vocabulaire SMS dans les rédactions des élèves. Selon Yacouba Ouattara, professeur d’histoire-géographie au Lycée Ouezin Coulibaly, « les élèves, à force d’abréger les mots pour plus de rapidité et pour économiser leurs crédits par les SMS, écrivent aussi de la même manière dans les devoirs, sans même se rendre compte. Cela contribue à baisser leur qualité rédactionnelle et par conséquent leur niveau en français ».

Pour les mêmes raisons, le sociolinguiste et enseignant à l’Université de Ouagadougou, Abou Napon, dans son livre intitulé « Description et reconstruction de la langue française par les étudiants burkinabé : l’exemple des abréviations en milieu estudiantin », a relevé un nombre important de mots abrégés dans les travaux des étudiants tels que : exple = exemple ; grpe = groupe ; dt = dont ; dc = donc ; pr = pour ; ds = dans. En outre, les jeux, les sonneries et la musique, les images et les vidéos que les élèves enregistrent dans leurs portables, prennent souvent le dessus sur les leçons, la lecture, en un mot les études faisant du portable leur compagnon fidèle.

De son côté, Carine Wendlassida Kinda, élève postulant pour le BAC pro 1 bureautique-comptabilité, confie que « certaines personnes, surtout les garçons, prennent ton numéro et pendant que tu es en classe ou quand tu étudies, elles t’envoient des SMS ou bien t’appellent pour te déranger ». Professeurs, responsables d’établissements, parents, élèves, bref tous les acteurs du monde de l’éducation sont unanimes à reconnaître que les élèves utilisent leurs portables à des fins inavouables.

Pour sa part, Idrissa Sanou, parent d’élève au Lycée Béthanie I, pense qu’il est difficile d’inculper les parents d’élèves parce que les enfants sont ce qu’ils sont. En cela dit-il, « avec les portables et les cybercafés, ils sont capables d’enregistrer des images et des vidéos peu recommandables. Je fais référence aux images qui ont été tournées dans des lycées à Ouagadougou par des élèves et que la plupart d’entre eux avaient dans leurs portables ».

Hamadou Ouédraogo, cet autre parent au Lycée municipal accuse, lui, les parents parce que dit-il, « au lieu d’acheter des portables simples, juste pour appeler ou envoyer des SMS, ceux-ci offrent à leurs enfants, des portables sophistiqués avec des lecteurs audio et vidéo, des appareils photo ».

Un professeur qui a requis l’anonymat, confie que certains professeurs reçoivent de leurs élèves, des SMS pour leur proposer des relations sexuelles en échange de bonnes notes. Viennent s’ajouter les cas de vols de portables, dans les établissements dont les professeurs et les élèves sont victimes.

Alaye Alou Dicko, élève en Terminale C au LOC raconte qu’ « un professeur était sorti pour régler une affaire à l’administration dans un établissement et qu’à son retour il a cherché son portable en vain ». Ivan Victorien Bambara élève de la 5e A au Collège de Tounouma abonde dans le même sens : « Le portable d’un de mes camarades a été volé en classe. Malgré les recherches on ne l’a jamais retrouvé ».

A chaque établissement sa règlementation

L’utilisation incontrôlée du téléphone portable est un danger et une menace pour les élèves. C’est pourquoi une règlementation y relative pourrait servir à « rétablir l’ordre » dans les établissements d’enseignement.

Malheureusement, dans le règlement intérieur général des établissements d’enseignement secondaire au Burkina Faso (Arrêté 2003/054 du 20 mars 2003 portant règlement intérieur des établissements secondaires), il n’y a aucun passage spécifique à l’utilisation du téléphone portable en milieu scolaire. Les textes font seulement référence à l’interdiction de « l’utilisation d’appareils autres que ceux autorisés pour les besoins du cours ou les devoirs ».

Mais à ce propos, le Directeur régional des Enseignements secondaire, supérieur et de la recherche scientifique (DRESSRS),Guidiouma Oumar Sanou rassure : « A la conférence des proviseurs et responsables d’établissements tenue en 2009, nous avons évoqué le problème du téléphone portable. Je pense que très prochainement, des textes y relatifs seront introduits dans le règlement ».

Néanmoins, certains établissements ont pris leurs précautions. Si le Lycée Ouezzin Coulibaly ne dispose pas de textes spécifiques y relatifs au Lycée privé Béthanie I, le règlement intérieur en son article 7, alinéa 6, précise que « les tenues sales,…les appareils de musiques, les téléphones portables ne sont pas admis au lycée ». Au Collège Tounouma Garçons, la règlementation est plus catégorique. Son article 10 stipule, en effet que les portables doivent être éteints et invisibles dans l’enceinte de l’établissement sous peine d’être confisqués pendant 3 mois.

Le Lycée professionnel de Bobo-Dioulasso va encore plus loin. Selon son censeur et directeur des études, Zakaria Dao, la confiscation du portable dépend du comportement de l’élève. « S’il se montre discipliné, on peut le lui remettre au bout d’un mois. On note son nom comme avertissement. Mais quand il veut faire la forte tête avec le professeur ou le surveillant, on le confisque pour le semestre et on lui fait arroser les arbres pendant les congés ». Malgré tout, l’application scrupuleuse des textes se voit confrontée à la réalité. Le surveillant général du LOC, Blahéma Sissao déclare qu’en l’absence de textes précis, il faut être prudent.

« Nous sommes avant tout des éducateurs et notre rôle est d’éduquer et de sensibiliser les enfants et non de les sanctionner durement », a-t-il souligné. Les sanctions vont ainsi du simple avertissement à la confiscation du téléphone portable pendant une, deux, trois semaines ou un trimestre.

Au Lycée Béthanie I, le surveillant général, Atié Samuel Gogohiribou avoue également qu’« on ne peut pas être trop sévère avec les enfants, parce que leurs parents ont payé les portables pour les joindre en cas d’urgence ». Pourtant certains élèves, à l’exemple de Yacouba Sana, de la 1re D du même établissement et délégué général au sport, dont le portable a déjà été confisqué, pense que le téléphone fixe de l’établissement pourrait servir à cela.

Chaque établissement, après avoir confisqué les portables, fait appel aux parents pour les informer des dangers que courent leurs enfants avec leur utilisation en classe avant de les inviter à les sensibiliser, une fois rentrés à la maison. En attendant des textes officiels, certains établissements comme le Lycée Béthanie I et le Lycée professionnel, procèdent par l’affichage de notes de service dans leurs cours, les couloirs et allées et enfin dans les salles de classe invitant les élèves à éteindre leurs portables.

Une initiative salutaire puisque comme le reconnaît Sansan Karin Palé du Collège de Tounouma « en montant dans les salles, c’est devenu un réflexe grâce aux affiches et on éteint le portable avant de rentrer en classe ».

Gékon Dani, surveillant général du Lycée professionnel partage le même avis : « Avec les affiches, le phénomène est devenu moins fréquent, on peut faire un mois sans que le portable d’un élève ne sonne en classe. Pourtant, presque chaque semaine, les portables sonnaient avant ces mesures. »

Jean-Marie TOE

Sidwaya

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Vos commentaires

  • Le 11 mai 2010 à 10:19 En réponse à : Milieu scolaire : Le téléphone portable, un outil perturbateur

    Comm
    Comme contribution, je dirai que les etablissements scolaires doivent simplement prendre des mesures invitants les eleves a eteindre leurs portables en classes. Si l’eleve se fait prendre avec un telephone qui sonne en classe plus de trois fois par semaine par exemple son portable doit etre retire pour indiscipline.

  • Le 11 mai 2010 à 10:53, par Fidel En réponse à : Milieu scolaire : Le téléphone portable, un outil perturbateur

    Messieurs les administrateurs du site vs pouvez quand meme une photo qui convienne mieux a cet ecrit sur les telephones portables en milieu scolaire.L’auteur semble s’est inspiré du contenu d’une soutenance que j’ai suivi ds une ecole de journalisme sur le meme sujet.

    • Le 7 mai 2011 à 18:48, par HYPPOLITE KABORE En réponse à : Milieu scolaire : Le téléphone portable, un outil perturbateur

      a mon avis il faut ètre stricte sur les choses.l’élève qui se fais prendre avec un téléphone portable en etat de delit il faut le sanctionner selon les tetes c’est tout les gens ont tendance à oublier que nou sommes dans un etat de droit mais aussi dans un etat de devoir.donc je pense que cela n’est pas du tout à negocier

  • Le 11 mai 2010 à 10:58, par fring En réponse à : Milieu scolaire : Le téléphone portable, un outil perturbateur

    Rien à dire article propre. Félicitation

  • Le 11 mai 2010 à 11:06 En réponse à : Milieu scolaire : Le téléphone portable, un outil perturbateur

    Il ne faut pas se tromper de combat :le problème de l’éducation au BF est bien au delà du téléphone portable .
    pourquoi s’acharner sur des collegiens et lycéens , alors que les "fleaux" que vous citer est pire dans les grandes écoles et univ.?

    "" Le phénomène du portable est devenu un véritable fléau qui perturbe énormément les cours. Quand les portables sonnent en classe, cela interrompt le fil des idées du professeur et distrait les autres élèves "" (rire)

  • Le 11 mai 2010 à 11:38 En réponse à : Milieu scolaire : Le téléphone portable, un outil perturbateur

    Cete initiative est vraiment salutaire et que l’article est bien riche en forme et fond, tous les cotés et contours y sont pris en compte, reste des mésures (règles) nationales pour le bon fonctionnement de nos lycées et collèges (publiques ou privés que ce soit).
    Suury Zabda !

  • Le 11 mai 2010 à 11:59, par Bobo En réponse à : Milieu scolaire : Le téléphone portable, un outil perturbateur

    Un très joli article avec des sources variées...

  • Le 11 mai 2010 à 12:49, par patriote burkinabé En réponse à : Milieu scolaire : Le téléphone portable, un outil perturbateur

    c’est vrai qu’il y’a des élèves qui envoient des sms à leur professeurs pour avoir de meilleurs notes en échange de relations sexuelles mais il y’a peut être plus de professeurs qui proposent des notes en échange de relations sexuelles !

  • Le 12 mai 2010 à 19:05, par KENZO En réponse à : Milieu scolaire : Le téléphone portable, un outil perturbateur

    merci p

    MERCI pour votre information continue. Moi je suis un etudiant mais ca m’enerve d’entendre le portable sonner dans les amphis pendant les cours. Un de nos prof nous disait qu’on n’est pas né avec le portable et qu’on n’ est plus le president du faso. on vivait sans portable donc fermer le portable pendant le cours ne nous coute rien. MERCI

  • Le 16 mai 2010 à 00:02, par gaoua74 En réponse à : Milieu scolaire : Le téléphone portable, un outil perturbateur

    vous avez raison c’est trés difficille de se concentrer en cours avec les portables qui sonnent à la fois pour les enseignants et pour les éleves.

  • Le 10 novembre 2014 à 09:37 En réponse à : Milieu scolaire : Le téléphone portable, un outil perturbateur

    les causes et consequences du telephone portable en milieu scolaire

  • Le 19 mai 2016 à 16:41 En réponse à : Milieu scolaire : Le téléphone portable, un outil perturbateur

    Le crâne d’un enfant est moins développé et plus mince durant sa croissance, donc encore plus vulnérable aux effets secondaires. Des radiations micro-ondes des mobiles
    Les experts estiment donc que le cerveau d’un enfant est plus sensible aux dangers des rayonnements des ondes du téléphone portable

  • Le 4 avril 2018 à 19:40, par Nour En réponse à : Milieu scolaire : Le téléphone portable, un outil perturbateur

    je trouve qu’utiliser un portable au lycée est devenu un gadget car il ne sert meme à sa fonction première (telephoner ; mais à s’envoyer des SMS en cours , se qui cause la déconsentration.

  • Le 22 décembre 2019 à 13:02, par Cissoko En réponse à : Milieu scolaire : Le téléphone portable, un outil perturbateur

    quant à moi les telephones ne sont pas bon car il est dévenu le point d’achet chez les fille encore c’est le premier perturbateur dans le milieu scolaire

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