Dans la famille Dankambary, à la trame d’accueil de Ouaga 2000, madame Abiba Tiemtoré s’affaire à laver le dernier né de la famille. Le bébé n’a que trois jours et ses pleurs emplissent la cour. Elle pratique le massage des bébés depuis des dizaines d’années.

C’est elle qui s’occupe de laver et de masser tous les bébés de la famille et ce, depuis très longtemps, confie le père du nouveau-né. Il est 17 heures ce vendredi 22 janvier 2010 quand Abiba Tiemtoré débute la toilette du nouveau-né. Elle commence par un bain tiède au savon dans une petite bassine en plastique. Ensuite, cette eau savonneuse est récupérée dans un seau et remplacée par de l’eau propre.

Cette eau propre-assez chaude- est répandue sur la tête du bébé en faisant très attention au visage, puis sur le reste du corps. C’est en ce moment que les cris de bébé se font le plus sentir. La laveuse souffle dans ses oreilles et le pose sur ses genoux. On lui enduit du beurre de karité sur le corps et le massage peut commencer. Les pleurs ont déjà presque cessé. La masseuse tire les membres supérieurs devant et derrière, passe aux jambes qu’elle plie et déplie et aussi au cou qu’elle remue en manipulant le menton.

Le massage prend fin par un “jonglage” de bébé afin de l’éveiller et de lui apprendre à lutter contre la peur : trois à quatre fois selon le sexe de l’enfant. Mais, elle n’oublie pas de masser un peu le nez du bébé pour d’éventuelle correction esthétique et également le nombril qui reçoit du beurre passé sur un morceau de pot de terre chauffé. Le massage se fait deux fois par jour, sur deux à trois mois le plus souvent, selon Abiba Tiemtoré.

Mais, le massage de l’enfant est-il tout bénéfice pour l’enfant ? Tout le monde est unanime à reconnaître les bienfaits, à commencer par les parents et les masseuses. Néanmoins, des spécialistes de la médecine moderne, s’ils n’y trouvent pas d’inconvénients, bien au contraire, recommande la prudence.

« On a parfois constaté chez des nourrissons, une luxation du plexus brachial (ensemble de nerfs et de vaisseaux en liaison avec le bras). On ne sait pas encore s’il s’agit là d’une anomalie congénitale, ou si c’est une conséquence des massages tels que pratiqués traditionnellement sur les enfants », avait constaté la revue africaine d’éducation et de développement dénommée « Famille & développement » dans son numéro 37 du 1er trimestre 1984.

Les bébés malades aussi

Azara Zongo est une sexuagénaire officiant au marché de Sanbin, dans l’arrondissement de Nongr-Massom. Elle vend des produits de la pharmacopée traditionnelle, notamment des écorces, feuilles, racines, herbes pour les soins de l’enfant et de la mère.

Le massage des bébés figure aussi dans ses activités. « Si une mère vient vers moi pour chercher des feuilles et autres racines pour soigner son enfant, ou si tout simplement son enfant fait de la fièvre, je lui donne les conseils nécessaires. La fièvre est très souvent synonyme que l’enfant a une luxation.

Là, au lieu que je vends à la maman des tisanes et autres produits, je procède à son massage », explique Azara Zongo. Elle masse surtout les enfants victimes de luxation parce que le jour même de la délivrance, un enfant peut se blesser. Dans ce cas, le massage se fait, non pas avec les mains, mais avec le menton.

Mah Zara comme on l’appelle affectueusement, a hérité sa science d’une longue pratique ancestrale. Ce sont des connaissances innées et pratiquées par les membres de la famille originaire de Doundoulma, dans la commune de Tanghin-Dassouri, province du Kadiogo. Le massage est effectué sans eau ni beurre de karité. Cependant, elle refère aux centres de soins modernes tous les bébés dont le mal nécessite une consultation médicale.

Selon l’Association belge de massage pour bébés (ABMB), la première forme de communication perçue par le bébé et le premier langage qu’il développe passent par la peau.

Le Dr F. Leboyer souligne que « Etre touché, massé et caressé est nourriture pour le nouveau-né - une nourriture aussi nécessaire que les vitamines, les protéines et les oligo-éléments. » L’Association belge de massage pour bébés (ABMB) explique que dans le ventre de la mère, la vie est d’une richesse infinie.

Passé la tempête de la naissance, l’enfant a besoin de retrouver le rythme du mouvement et les sensations de la peau connus in-utéro. Il faut nourrir les bébés, sans aucun doute …Mais nourrir leur peau tout autant que leur ventre ! La stimulation de la peau est indispensable à une évolution physique, psychologique et émotionnelle adéquate chez les êtres humains

Par Souleymane Sawadogo

Les bienfaits du massage Pour l’enfant

 Favorise le lien d’attachement et renforce la relation parent/enfant

 Apporte à l’enfant relaxation, détente, réassurance et sommeil.

 Stimule, fortifie et régularise les systèmes circulatoire, respiratoire, gastro-intestinal, immunitaire et nerveux

 Aide au développement de l’intelligence, en aidant à faire l’équilibre entre le stress et la relaxation. Nous permettons ainsi à l’influx nerveux de mieux circuler ce qui favorise l’apprentissage et la mémoire. A l’âge adulte nous constatons également moins de problèmes reliés au vieillissement comme la perte de mémoire chez les sujets massés pendant l’enfance.

 Aide à soulager les petits malaises tels les maux reliés à la dentition, gaz et colique, congestion nasale et pulmonaire, arthrite de croissance etc.

 Aide au développement de la conscience corporelle

 Aide à la concentration

 Stimule le gène de croissance et aide à l’absorption de la nourriture, une des raisons pour laquelle le massage est bénéfique pour les bébés nés prématurément.

 Aide la réorganisation du système nerveux des bébés nés avec une dépendance à la drogue.

 Aide également les enfants souffrant d’asthme Pour les parents :

 Le fait de s’occuper de son enfant d’une façon nourrissante permet au corps de sécréter

 une hormone : la prolactine, présente autant chez le père que chez la mère, qui permet au parent de se sentir plus près de son enfant et l’encourage à s’en occuper davantage.

 Le massage pour bébé permet aux parents de découvrir les signes et le langage non-verbal de leur bébé et d’y répondre plus facilement. Il offre un temps d’arrêt dans la journée, où le parent se concentre uniquement sur son bébé, créant ainsi une relation privilégiée.

 L’ocytocine est également sécrétée chez la mère ce qui aide aussi bien à la contraction de l’utérus qu’à la production de lait ainsi qu’à la détente.

 Des recherches récentes ont montré que le massage aide aussi bien les parents déprimés que les enfants qui souffrent de dépression en baissant le niveau de cortisol responsable de cette dépression.

 Selon une étude faite dans les quartiers défavorisés ; les mères qui massent leurs bébés sont plus présentes aux visites médicales.

S.S.

Sources : (ABMB)

Le reboutage d’accord, mais sous surveillance médicale

A côté des massages pour bébés, l’on peut parler du massage et des soins pour personnes bléssées, tel que le reboutage. Mais, à condition qu’il soit effectué dans les règles de l’art. A Nong-Néré, un village situé à une quinzaine de kilomètres à l’ouest de la vile de Ouahigouya, Boukaré Ouédraogo, un septuagénaire, riche de plusieurs décennies de pratique du massage et du reboutage note qu’il est d’abord un don de Dieu.

L’histoire de la science du reboutage serait partie d’un acte de jalousie entre deux coépouses. Cette jalousie était telle qu’une des deux femmes a cherché en vain de mettre l’autre en difficulté. Puis, vint un jour où une coépouse brisa par mégarde le pilon de l’autre.

Celle-ci exigea que le même pilon lui soit rendu. Après avoir longtemps pleuré et s’être confuse en excuses, elle n’obtint pas le pardon escompté. Elle implora Dieu de lui venir au secours. Le seigneur entendit ses prières. Alors, elle prit du beurre de karité, un peu d’eau et procéda au reboutage du pilon. L’opération est concluante. Le pilon fut remis en l’état à la coépouse.

C’est seulement la descendance de cette dernière qui est habilitée à soigner et personne d’autre. Cependant le massage et le reboutage sont très exigeants selon lui. Si la réusssite est l’œuvre divine selon Boukaré Ouédraogo, le masseur qu’il était devait rester très pur, pureté allant jusqu’à l’abstinence sexuelle et autres pendant tout le temps qu’il mettra à s’occuper d’un patient.

Malheureusement, il souligne que de nos jours, la jeune génération n’a pas toujours su observer cette discipline. Conséquences : des échecs enregistrés en matière de reboutage.

S.S.

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