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Sanné Mohamed Topan, ambassadeur du Burkina au Mali : "Nous gérons beaucoup de cas sociaux"

Publié le jeudi 15 octobre 2009 à 05h35min

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Dans le cadre d’un voyage d’études à Bamako organisé par le Réseau d’initiatives des journalistes (RIJ), nous avons rencontré l’ambassadeur du Burkina au Mali, Sanné Mohamed Topan, pour échanger sur bien des sujets. Synthèse d’un entretien réalisé par le groupe de journalistes présents dans la capitale malienne.

Quelle est la contribution des Burkinabè du Mali à l’économie de leur pays d’origine ?

• Je vais être le plus objectif possible. Entre le Burkina et le Mali, il s’agit beaucoup plus de fraternité et de liens de sang. Ce n’est point un langage diplomatique que de le dire. Ces deux pays ont une histoire commune. De 1932 à 1947, une bonne partie de la Haute-Volta relevait du Soudan français qui est une partie de l’actuel territoire du Mali, du Burkina Faso et d’autres Etats que je ne voudrais pas citer.

Et l’aire géographique de notre pays qui relevait du Soudan français, sous réserve de me tromper parce que la mémoire peut faire défaut, couvre les provinces du Soum, du Lorum, du Yatenga, du Zondoma, du Bam, du Sourou, du Nayala, de la Kossi et une partie des Balé.

Le colonisateur, à l’époque, avait constaté que la zone de l’Office du Niger pouvait nourrir toute l’Afrique ou, au moins, l’Afrique de l’Ouest. Pour ce faire, il fallait construire le pont de Markala, lequel l’a été grâce à la main-d’œuvre burkinabè, ce qui explique la forte concentration de nos compatriotes dans la 4e région du Mali, notamment dans les cercles de Ségou et du Macina.

Cela étant, quel peut être l’impact des Burkinabè qui travaillent ici sur l’économie du Burkina ? Il ne serait pas juste de voir la question sous l’angle économique parce que l’intégration, qui est en marche dans notre sous-région, interdit de voir l’aspect strictement national, c’est-à-dire les intérêts du pays d’origine. Partout où le Burkinabè s’épanouit et peut gagner sa vie en harmonie avec les habitants du pays hôte, il apporte sa contribution au développement.

Mais chaque fois que nous sortons sur le terrain, nous les convions à ne pas oublier leurs frères et sœurs restés au pays et qui peuvent avoir besoin d’eux. Et puisque certains de leurs enfants sont amenés à renouer avec le pays natal, ils devraient songer à avoir des habitats sur place pour ceux qui en ont les moyens et participer un tant soit peu à la construction de leur pays d’origine.

Donc, de façon quantitative, je ne peux pas dire quel est l’impact mais les villes telles que Ouahigouya, Gourcy et Tougan pourront éventuellement vous dire quelle est la réalité puisqu’elles ont de nombreux ressortissants au Mali. Sinon, de façon globale, chacun apporte ce qu’il peut.

A combien chiffre-t-on le nombre de Burkinabè vivant au Mali ?

• Il s’agit d’une question extrêmement complexe. Quand je suis arrivé, je n’ai pas trouvé de statistiques, mais je ne donne pas cette réponse puisqu’on peut me reprocher de ne pas travailler à avoir les chiffres depuis que je suis ambassadeur.

C’est parce qu’il y a des difficultés et vous en êtes les témoins privilégiés. Aujourd’hui, en allant faire un recensement par exemple à l’Office du Niger où les gens sont installés depuis les années 30 et ont eu des enfants puis des petits-enfants, qui va-t-on recenser ? Des Maliens d’origine burkinabè ou des Burkinabè résidant au Mali ?

Il faut que ce soit les populations elles-mêmes qui viennent se faire immatriculer mais l’immatriculation n’intéresse pas tout le monde. Il y a des travailleurs saisonniers à l’Office du Niger qui ne se font pas enregistrer à l’ambassade. Beaucoup de Burkinabè nés ici vont à la commune de leur localité pour établir à moindres frais leur acte de naissance sans se signaler à notre niveau, ce qui fait qu’il est difficile d’avoir des statistiques fiables.

Avant, je me risquais à l’estimation, mais aujourd’hui je ne donne aucun chiffre parce qu’il y a beaucoup de Maliens d’origine burkinabè et je constate aussi qu’il y a quelques Burkinabè qui résident ici et qui restent véritablement attachés au pays.

Comme aujourd’hui la loi permet aux Burkinabè de l’étranger de voter dans leur pays de résidence, ceux qui viendront s’inscrire permettront d’avoir une base de données pour répondre aisément à votre question. Dans tous les cas, ç’a toujours été un souci du gouvernement burkinabè d’avoir une idée des statistiques concernant nos compatriotes.

Quelle appréciation faites-vous du vote des Burkinabè de l’étranger ?

• Il faut saluer le vote de cette loi qui est une avancée politique. Mais je dois souligner que les Burkinabè de l’extérieur n’avaient pas le droit de vote. Tout Burkinabè jouissant de ses droits a le droit de voter au Burkina Faso.

La loi dit que nos compatriotes de l’étranger peuvent voter dans leur pays de résidence, mais ils viennent accomplir ce devoir civique à l’ambassade ou au consulat général. C’est à ce niveau qu’il y aura des difficultés pour ceux qui ne résident pas dans la capitale puisqu’ils doivent se déplacer pour voter.

Dans l’exercice de votre mission, vous rencontrez sans doute des difficultés... ?

• Nous sommes régulièrement confrontés à des cas sociaux. Il arrive que des Burkinabè qui n’ont pas pu s’intégrer viennent à l’ambassade avec leurs problèmes. On a eu plusieurs cas où un taxi est venu déposer un compatriote malade n’ayant pas les moyens. Il faut d’abord le soigner et ensuite l’évacuer.

Il y a deux semaines, une compatriote est décédée et il n’y avait personne à côté. En pareilles circonstances, c’est l’ambassade qui assume et cela est courant. On rencontre aussi des Burkinabè qui se font dépouiller de leurs biens au cours de leur voyage pour le Mali et qui se présentent sans le sou et sans document d’identité.

En dehors de cela, lorsque d’autres difficultés se posent, nous essayons, avec les autorités compétentes, d’y trouver des solutions. On a toujours prêté une oreille attentive aux préoccupations de nos compatriotes. Mais pour certains cas sociaux, nous sommes souvent obligés d’appeler les parents pour qu’ils apportent leur contribution.

Entretien retranscrit par
Adama Ouédraogo
Damiss

L’Observateur Paalga

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