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Kilwin : Pollution au minerai de zinc et au nitrate

Publié le mercredi 12 août 2009 à 01h21min

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Le mardi 11 août 2009, dans le quartier Kilwin, à la périphérie de Ouagadougou, sur la route de Ouahigouya, la Coordination nationale de lutte contre la fraude (CNLF) a intercepté un groupe de pollueurs. Ces indélicats procédaient au mélange du minerai de zinc et du nitrate afin d’obtenir un produit servant à l’extraction de l’or, notamment lors du lavage. Leur activité de production de cette mixture toxique n’est pas sans conséquences sur l’environnement et la santé des populations.

L’événement est insolite. A une dizaine de km sur la route de Ouahigouya, à la périphérie de Ouagadougou, s’étalent des champs dont la verdure naissante témoigne du stade de la campagne agricole actuelle. Nous sommes pile à l’intersection des quartiers Kilwin et Bissiga. Au milieu des jeunes pousses de mil et de maïs, une vingtaine de personnes sont arrêtées à côté de véhicules 4x4. Devant elles, un trou creusé dans le sol avec tout autour des bassines contenant de l’eau et des mixtures. Entre ces récipients sont disposés des bidons noirs pleins d’acide nitrique.

L’activité des jeunes trafiquants qui y opéraient venait d’être stoppée par la Coordination nationale de lutte contre la fraude (CNLF) qui effectue une sortie de terrain. Les agents de la coordination, alertés, sont venus intercepter un groupe de pollueurs qui y menaient leur activité. Debout près d’une bassine en aluminium pleine d’une substance suspecte de couleur sombre de laquelle s’échappent des bulles, l’un d’entre eux, Frédéric Ouédraogo, nous explique leur procédé de fabrication : “Nous nous procurons le minerai de zinc sur les sites d’orpaillage et l’acide nitrique, nous l’achetons en ville. Nous mélangeons ici les deux substances pour obtenir un produit qui sert à l’extraction de l’or, notamment lors du lavage”. Prétendant ignorer les conséquences que peut avoir leur activité, Frédéric assure qu’ils prennent des précautions en maniant l’acide. Il ajoute qu’ils doivent souvent s’éloigner en fonction de la direction du vent car le mélange produit des gaz toxiques.

Leur pratique est très dangereuse, estime le colonel Gérard Korsaga, ingénieur des Eaux et Forêts : “Les produits utilisés sont très toxiques et s’infiltrent dans le sol, pouvant contaminer la nappe phréatique. De plus, les eaux de ruissellement les entraînent dans le conduit à proximité qui est un affluent du barrage de Baskuy. Ils peuvent ainsi se retrouver dans l’eau de boisson. De même, les poissons peuvent être infectés et leur consommation peut causer des éruptions cutanées et bien d’autres maladies. Sans compter les effets néfastes sur l’environnement car on constate déjà que la végétation alentour s’assèche. Et les fruits et légumes que nous achetons en ville peuvent provenir de jardins qui auront utilisé de l’eau pour les arroser provenant de ce genre de sites. A terme, il faut craindre pour la santé même des pollueurs”.

Au dire du coordonnateur national, Paténéma Kalmogo, la multitude de sites aurifères du CNLF au Burkina peut se révéler un couteau à double tranchant : ils procurent des ressources pour le développement mais constituent aussi une source de maux au regard de la toxicité des produits qui y sont utilisés de façon artisanale, tels que le cyanure, l’acide sulfurique, le sodium, le nitrate... : “Les produits sont très dangereux car ils sont non dégradables et donc perdurent dans la nature, pénétrant dans les sols qu’ils contaminent et polluent l’air”.

Pour lui, il faut informer suffisamment la population pour créer une synergie d’actions afin de parer à ce genre de dérives : “Plus que la répression, nous prônons la sensibilisation des populations car le plus souvent les pollueurs ne savent pas qu’ils se mettent eux-mêmes en danger. Pour ce cas précis, les indélicats sont les premiers exposés aux conséquences de leur produit car ils l’inhalent à longueur de journée. La pollution demeure l’un des principaux problèmes de Ouaga avec de multiples cas comme ceux du dépotoir puant d’immondices au niveau de la gare routière et la carrière au secteur 17 où on brûle des pneus pour concasser du granite”. Boukary Ouédraogo dont le champ de mil et de maïs est juste à proximité avoue ne pas s’occuper de ses voisins qui se sont installés depuis près de deux mois à la lizière de sa plantation : “Ce que j’ai remarqué, c’est qu’il y a une femme qui les aide.

De temps en temps, quand ils font leur mélange, la fumée qui se dégage et que le vent pousse vers nous est tellement irrespirable qu’on est obligé d’abandonner le champ quelques instants. J’ignorais que c’était dangereux, c’est seulement ce matin lorsque je suis allé puiser de l’eau pour mes légumes que les agents m’ont informé que l’eau n’était pas bonne”. Dame Zénabo Ilboudo, puisque c’est d’elle qu’il s’agit, nous confie que c’est le chômage depuis son retour de la Côte d’Ivoire qui l’a contrainte à faire ce boulot consistant à puiser de l’eau pour les jeunes. Tout travail méritant salaire, à la fin de chaque journée, elle attache au bout de son pagne entre 2000 et 3000 FCFA.

Noellie Ouédraogo, une autre cultivatrice riveraine, était méfiante face à cettte pratique : “Je me doutais bien que c’était dangereux, avec les gaz irrespirables qui s’échappaient ; alors je ne m’approche pas et je l’ai interdit à mes enfants”. Sur-le-champs, les agents de la coordination de lutte contre la fraude ont procédé à la confiscation du matériel des trafiquants et des convocations pour leurs patrons leur ont été remises. Des dispositions du code de l’environnement prévoient des sanctions pour ce genre d’exactions, conformément à son article 34 (voir encadré).

Toutefois, selon nos informations les pollueurs auraient repris leur activité dans la soirée. “Nous allons y repartir cette fois avec la gendarmerie. Si cela s’avère, nous serons fermes”, promet Paténéma Kalmogo. En rappel, la coordination, qui regroupe en son sein des agents de plusieurs ministères dont ceux de l’Environnement, du Commerce, des Finances, travaille sur le terrain sur renseignement. Ses indicateurs, qui sont couverts par l’anonymat, ont droit à un pourcentage sur les amendes infligées grâce aux renseignements qu’ils fournissent. De quoi motiver plus d’un à alerter qui de droit.


L’article 34 du code de l’environnement

Une transaction allant de 10 000 à 10 millions de francs CFA est applicable à toute infraction commise en violation des articles 49, 50 et 51 du code de l’environnement relatifs aux rejets, déversements, dépôt ou toute activité susceptible de provoquer à court, moyen, et long terme une dégradation de la qualité des sols et des eaux de surface ou souterraines, non conforme aux normes de rejet ou de dépôt spécifique.


Effets sur la santé du nitrate et du zinc :

Bien que l’homme puisse proportionnellement gérer des quantités importantes de zinc, trop de zinc peut tout de même provoquer des problèmes de santé importants, comme des crampes d’estomac, des irritations de la peau, des vomissements, des nausées, de l’anémie. De très grandes quantités de zinc peuvent endommager le pancréas, perturber le métabolisme des protéines et provoquer de l’artérioclérose. Une exposition intensive au chlorure de zinc peut provoquer des désordres respiratoires. En ce qui concerne le nitrate, on lui prête plusieurs effets sur la santé. Les plus communs sont :
- Réactions avec l’hémoglobine du sang, provoquant une diminution des capacités de transport de l’oxygène
- Diminution du fonctionnement de la glande thyroïdienne
- Manque de vitamine A
- Production de nitrosamines, qui sont connues comme l’une des causes les plus communes de cancer.

Source Internet

Hyacinthe Sanou (Stagiaire)

L’Observateur Paalga

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Vos commentaires

  • Le 12 août 2009 à 13:23, par aimso En réponse à : Kilwin : Pollution au minerai de zinc et au nitrate

    Merci pour cet article car notre bien etre est intimement lié à la qualité de notre environnement, lequel est malheureusement soumis à une constante dégradation, soit par ignorance soit du fait de la pauvreté ou tout simplement en raison des deux.Pour cela je suggère que vous fassiez un dossier à part entière sur cette question en mettant à contribution les enseignants et les étudiants du Centre pour la promotion, l’aménagement et la protection de l’environnement (CEPAPE) à l’UFR SVT de l’université de Ouagadougou.Cela permettrait d’éclairer davantage la lenterne des uns et des autres et fera comprendre aux associations aussi que les questions environnementales ne se limitent pas au seul reboisement.Elles sont complexes et les journalistes comme vous, et je vous félicite, et les centres de recherche en environnement se doivent de communiquer davantage sur les questions environnementales au meme titre que les questions politiques sur lesquelles nous devisons en ce moment.Et le ministère de l’environnement dans tout ça ?Sur que le ministre est en vacance et ne juge pas qu’il s’agit d’un fait aussi important que l’occupation des forets classées et les camps de reboisement pour en parler !Non, PARLONS EN !TOUCHE PAS A MON ENVIRONNEMENT COMME TOUCHE PAS A MA CONSTITUTION !

  • Le 13 août 2009 à 19:23, par Super Jos En réponse à : Kilwin : Pollution au minerai de zinc et au nitrate

    Merci bcp pour cet article. je vis dans une région aurifère et cette pratique est généralisée ici. Plus que l’acide nitrique, les orpailleurs utilisent le cyanure qui est le plus toxique des acides connus.
    Je ne connaissais pas la réglementation en la matière

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