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Lookman SAWADOGO : « A priori tout régime est bon, tout dépend des acteurs politiques »

Publié le mercredi 22 juillet 2009 à 18h49min

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Lookman SAWADOGO, secrétaire général du Collectif devenons citoyens (CDEC)Selon vous quel peut être l’intérêt d’un régime parlementaire ?

On dit que le système parlementaire, c’est le système qui consacre la toute puissance de l’Assemblée nationale. De façon pratique, ce qui veut dire que le Premier ministre est nommé par la force politique qui aura plus de sièges à l’Assemblée nationale. Cela a l’avantage de renforcer le rôle de contrôle de l’Assemblée nationale sur le gouvernement. Si c’est l’opposition qui arrive en tête, ça devient beaucoup plus intéressant en ce sens qu’il y aura une cohabitation.

Mais si ce n’est pas le cas, c’est comme si on était dans un régime semi-présidentiel. L’intérêt d’un régime parlementaire c’est si et seulement si les forces en présence s’équilibrent de sorte à ce que le Premier ministre soit de l’opposition ou de la majorité sans dépendance vis-à-vis du président amenant une concurrence politique assez rude. Mais dans notre contexte, je ne vois vraiment pas comment il y aura une cohabitation à l’issue d’un tel régime.

Il n’est donc pas opportun d’instaurer un régime parlementaire au Burkina Faso ?

A priori tout régime est bon, tout dépend des acteurs politiques qui l’animent. Que ce soit un régime présidentiel, semi-présidentiel ou parlementaire, le type de régime importe peu mais ce sont les individus qui l’animent qui peuvent le rendre dynamique. Le principal intérêt de l’instauration d’un régime parlementaire est que cela peut amener un changement c’est-à-dire la possibilité que l’opposition contrôle le gouvernement. Si par exemple, l’opposition arrivait à prendre le dessus à l’Assemblée nationale et ce qui relèverait de l’extraordinaire, on aura une cohabitation. Cela peut avoir une influence positive sur la gestion des choses.

On dit que le régime présidentiel consacre trop de pouvoir entre les mains du président alors qu’avec un régime parlementaire, le Premier ministre a beaucoup plus de pouvoir. Je veux bien comprendre, mais est-ce que dans notre réalité les relations politiques dépendent des textes ? Je ne le crois pas. Je ne pense que même s’il y a cohabitation avec un régime parlementaire que le Premier ministre ait plus de pouvoir que le président en ce sens que dans notre contexte, les rapports humains sont plus importants que la réalité des textes.

Mais est-ce qu’un quelconque type de régime peut amener à un équilibre des forces politiques ?

Je ne pense pas que dans le contexte de notre pays la nature du régime soit la cause du déséquilibre des forces politiques. Que ce soit sous un régime présidentiel ou parlementaire, le problème de l’équilibre des forces ne dépend pas de là. Ça dépend de la réalité des forces qui animent la vie politique. Je ne crois pas qu’un régime parlementaire puisse renforcer l’organisation ou la capacité de l’opposition. Ça m’étonnerait donc qu’au Burkina le régime parlementaire favorise un équilibre politique. Il faut bien que l’opposition cherche à mieux se structurer et à mieux occuper le terrain politique.

A votre avis, quelles sont les insuffisances au système politique actuel ?

Il faut que les partis politiques se renforcent. Avec près de 150 partis politiques, comment peut-on avoir les forces politiques réelles dans cet émiettement là ? Notre système politique souffre, en effet, de cette dispersion des partis. Il est donc nécessaire que les acteurs politiques constituent des cartels de partis pour être aussi forts et pouvoir faire face. Non pas pour faire seulement face à la majorité mais aussi être présent sur le terrain.

En tant que membre de la société civile, quel commentaire faites-vous des propositions de Salif DIALLO ?

C’est vrai qu’il y a trop de débat autour de ses propositions, mais en tant qu’acteur de la société civile je ne vais pas spéculer sur ce qui appartient à la subjectivité des choses. Je vais plutôt m’intéresser à ce qui est objectif. Actuellement, dans le contexte de la gouvernance nationale les propositions de Salif DIALLO ont un certain intérêt. Par exemple, quand il propose une Constituante qui est le regroupement de toutes les sensibilités pour réfléchir sur quelque chose y compris la Constitution, je crois que cela pourrait améliorer la gouvernance. Il y a aussi une autre proposition intéressante, à savoir la composition d’un gouvernement d’ouverture qui consacre l’entrée des autres forces politiques pour mieux réussir les réformes. Il y a des moments où pour nous les pays africains subissant des crises financières et autres aléas de la mondialisation nous réfléchissions à des types de gouvernement d’union nationale qui est une unité dans la différence.

Mais cela ne remet-il pas en cause les réformes politiques qui viennent d’être adoptées et qui interdisent la participation de l’opposition dans un gouvernement sauf en temps de crise majeure ?

Mais on ne finira jamais de proposer des choses d’intérêt pourvu que ça n’entre pas en contradiction avec les autres.

C’est justement le cas non ?

Dans tous les cas, moi je suis pour les gouvernements ouverts où tout le monde travaille. Il nous faut sortir de la logique classique majorité-opposition qui ne nous fait guère avancer. Les réels problèmes de la gouvernance aujourd’hui à travers le monde vont bien au-delà de ce débat classique avec deux camps qui se regardent comme des ennemis. Nous ne sommes plus au temps de la guerre froide.

Si dans l’opposition, il y a des forces qui peuvent, qu’on les appelle pour travailler. Cela ne veut pas dire qu’elles viennent se saborder. Ce qui est certain, il faut qu’on réfléchisse à des formes d’alternance qui peuvent se faire par des arrangements politiques bien en fonction de nos réalités. Une alternance, ce n’est pas seulement le départ de Blaise COMPAORE, ça peut être aussi le renouvellement de son entourage.o

Drissa TRAORE

L’Opinion

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