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Burkina / An un du MPSR 2 : Des acquis, mais aussi des dérives, selon l’Observateur Paalga

Publié le jeudi 28 septembre 2023 à 21h00min

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Burkina / An un du MPSR 2 : Des acquis, mais aussi des dérives, selon l’Observateur Paalga

Dans son édito datant du 27 septembre 2023 et intitulé « Mon capitaine, il faut changer votre fusil d’épaule », notre confrère de l’Observateur Paalga faisait le bilan des actions du MPSR 2 , un an après sa prise du pouvoir ( 30 septembre 2022).
Le journal souligne qu’il y a eu des acquis. Cependant, il y a des dérives qui sont constatées depuis l’arrivée au pouvoir du capitaine Ibrahim Traoré.

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« … En un an, de nombreux actes souvent volontaristes et mâtinés d’idéologie ont été posés. Ainsi, et à titre d’exemples, de la dénonciation des accords militaires et fiscaux qui nous liaient à la France, du renvoi de la force Sabre qui stationnait à Kamboinsin, de la mise en œuvre de l’actionnariat populaire, de l’offensive agro-sylvo-pastorale, des nouvelles bornes légales imposées aux promoteurs immobiliers, de la résiliation du contrat sur l’aéroport de Donsin qui liait l’Etat à une société française, de la cession d’actifs miniers d’Inata et de Tambao à AfroTurc, etc.

Sauf à pécher contre l’esprit, on ne peut donc pas nier que de nombreuses mesures ont été prises même si pour certaines, il faut attendre d’en mesurer l’efficacité et l’impact dans le temps. Cependant, douze mois après l’avènement du MPSR II, force est de reconnaître que le problème qui a justifié l’irruption du capitaine Traoré sur la scène politique nationale est loin d’être réglé.

Bien au contraire, malgré l’acquisition de moyens substantiels, notamment en matière de vecteur aérien (drones et hélicoptères), le recrutement massif de Volontaires pour la défense de la patrie (VDP) la réorganisation du maillage sécuritaire du territoire qui avait déjà commencé avec Roch et Damiba, malgré la neutralisation par centaines de ces fourmis rouges qui s’incrustent dans tous les coins et recoins du pays et la destruction de leurs bases, on ne perçoit toujours pas de résultats objectivement mesurables dans la reconquête du territoire même si, fort opportunément, une dizaine de jours avant l’anniversaire, le Conseil des ministres, en sa séance du mercredi 20 septembre dernier, a annoncé le retour de 191 937 personnes déplacées internes dans leurs localités d’origine. Un chiffre très précis, à la PDI près, dont on ne peut que se féliciter en espérant que toutes les conditions (sécuritaires en l’occurrence) ont été réunies sur place pour qu’elles y restent et ne soient pas de nouveau contraintes de fuir et, surtout, que cette tendance positive se poursuivra.

Car pendant que certains regagnent le bercail, d’autres prennent toujours le chemin inverse.
Ces douze derniers mois, le nombre de PDI a franchi allègrement la barre des 2 millions, le nombre d’écoles, de centres de santé fermés continue sa courbe ascendante et le retour de l’Etat dans ces zones où la vermine fait la pluie et le beau temps se fait attendre.

(…)Si donc, sur le terrain miné de la reconquête du territoire, les indicateurs objectivement mesurables et constatables ne sautent pas forcément aux yeux nonobstant l’engagement sans faille de nos FDS et des VDP qui continuent de tomber chaque jour au champ d’honneur, les restrictions des libertés individuelles et collectives, elles, par contre, sautent aux yeux.

Qu’on se comprenne bien. En temps de péril, il est normal que pour sauver la patrie en danger, chaque citoyen concède une partie de ses droits et que la cité remette pour un temps déterminé son sort entre les mains d’un « dictateur », détenteur de l’imperium au sens noble où on l’entendait dans la Rome antique. Mais de là à instaurer une chape de plomb sous le couvert de la lutte contre le terrorisme juste parce qu’on ne souffre pas la contestation, il y a un pas que le capitaine aurait gagné à ne pas franchir.

Des partis politiques et des OSC mis sous coupe réglée, des tentatives de musèlement des journalistes dont la plume tremble chaque fois qu’ils doivent opiner sur la situation nationale (beaucoup ne s’y risquent même plus), des magistrats tenus en laisse par le premier magistrat…pour le capitaine Traoré, tout le monde doit marcher au pas et gare à celui qui ne file pas droit.

Pendant ce temps, d’autres campent sur la place publique et sont autorisés à manifester. Ce n’est pas juste comme l’Etat doit savoir l’être en toutes circonstances et s’il suffisait de bâillonner toutes les voix discordantes, d’installer une forme de terreur kaki pour que la paix revienne, il y a longtemps que le problème aurait été réglé. Or deux putschs après, on est loin d’apercevoir le bout du tunnel.
Il ne faut donc pas se tromper d’ennemi.

On aurait tort en effet de prendre ceux qui sont d’un avis contraire pour des « apatrides » qu’il faut abattre alors que dans le même temps, on proclame l’union de tous les Burkinabè car nous vaincrons ensemble ou nous périrons ensemble.

Au demeurant, depuis sept ans que nous sommes embourbés, et pour ne parler que des pisse-copies, Dieu seul sait combien de fois les médias ont permis aux politiques et aux FDS de rectifier le tir là où il le fallait. On ne le dira jamais assez, les vérités qu’on n’aime pas entendre sont celles qu’on gagnerait à méditer le plus.

Et s’il est bien une catégorie d’individus dont l’homme du 30-Septembre doit se méfier, c’est moins ceux qui critiquent son action pour lui permettre de se corriger et de nous sauver que ceux qui lui chantent chaque jour qu’il est le plus beau, le plus fort et le plus intelligent. Ils seront les premiers à retourner leur veste au moindre pépin comme on l’a si souvent vu dans l’histoire récente du Burkina. Comme le disent les Ecritures, ils vous auront renié trois fois avant que le coq n’ait chanté. C’est juste un conseil d’ami.

Autre chose, mon capitaine, si le discours officiel chante les vertus de la bonne gouvernance, les actes trahissent parfois une gestion patrimoniale des affaires publiques.

Certes, on ne gouverne qu’avec ses amis et non avec ses ennemis et comme le dit un adage bien de chez nous, « le naam se bouffe en famille ». Qu’à cela ne tienne, avec ses petits et grands frères, ses oncles, papas et tantes qui gravitent dans les premiers cercles du pouvoir, on a parfois le sentiment d’un IB & Co plutôt gênant, surtout quand on veut jouer au révolutionnaire au-dessus de tout soupçon comme la femme de César.

Comparaison pour comparaison à Sankara, le leader de la révolution d’août-83 n’aurait pas fait cela. Seulement voilà, 40 ans après, les officiers subalternes qui roulent carrosse, au propre comme au figuré, savent que la révolution à la sauce potasse de leurs devanciers n’était pas particulièrement ragoutante. On l’a bien compris, « la révolution n’a jamais aboli les privilèges, elle change juste les privilégiés » (Albert Camus). Seulement, ça fait tache au moment où la majorité des Burkinabè étouffent à cause des multiples taxes et impôts créés pour soutenir l’effort de guerre et des conditions de vie on ne peut plus difficiles.

Pour toutes ces raisons et bien d’autres, il n’y a vraiment pas de quoi pavoiser et les zélateurs du régime qui s’apprêtent à commémorer l’An I du MPSR rectifié devraient se garder de plastronner. S’il fallait faire le bilan d’une année de rectification du MPSR, au lieu de se gargariser sur les acquis, ce serait bien de s’appesantir sur les lacunes et insuffisances pour redresser la barre pendant qu’il est temps

Et si commémoration il devait y avoir, ça devrait être une journée d’hommage, de souvenir et de recueillement pour les martyrs de Koumbri, de Nassoumbou, de Foutouri, de Bourzanga, de Seytenga, de Solenzo, de Solhan, de Déou-Oursi, d’Ougarou… de tous ces éléments des FDS et VDP ainsi que des nombreux civils fauchés par les balles assassines de ceux qui ont juré notre perte. Pas pour faire le panégyrique d’un homme, soit-il messianique, et de son régime.
Pas en ces temps troubles. »

Source : L’Observateur Paalga

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Vos commentaires

  • Le 29 septembre 2023 à 06:56, par HORUDIAOM En réponse à : Burkina / An un du MPSR 2 : Des acquis, mais aussi des dérives, selon l’Observateur Paalga

    Merci lefaso.net et l’observateur paalga. C’est un bilan sans complaisance de la transition conduite par Ibrahim TRAORE. Comme je l’ai toujours mentionné sur ce forum, il ya un certain nombre de choses qu’il faut absolument éviter. L’enlèvement des citoyens renvoie à une mauvaise image du pays. Faisons donc les choses dans les règles de l’art. C’est d’ailleurs l’occasion de féliciter la justice militaire pour la bonne gestion du dossier de la tentative de coup d’état du 26/09/2023. J’encourage les autorités à faire le bilan d’une année de transition afin de rectifier tout ce qui n’a pas marché et de corriger les erreurs. Je précise que la transition doit étre inclusive et non clanique.
    Quant à la crise sécuritaire, elle est très profonde, complexe et metastasée qu’on en voudrait à la transition. Depuis l’arrivée de Traoré au pouvoir, la guerre a pris une autre dimension avec les moyens acquis. Les terroristes sont traqués partout, ce n’est pas suffisant certes, mais je pense qu’on est sur le bonne voie( point de vue de profane). Il serait interessant de faire aussi le bilan de la guerre et d’en tirer les leçons. Courage au président Traoré, ce n’est pas facile de gérer un pays comme le notre. Pour certains, tant que leur babine n’est pas trempée dans la soupe, il faut destabiliser le pays ; pour d’autres, on n’a pas de salut en dehors de la France. Le pays saura reconnaitre les siens.

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  • Le 29 septembre 2023 à 09:31, par kwiliga En réponse à : Burkina / An un du MPSR 2 : Des acquis, mais aussi des dérives, selon l’Observateur Paalga

    Hum, l’observateur ! Même pas peur d’être suspendu, kidnappé, recruté en tant qu’Involontaire pour la Défense de la Patrie, mobilisé, réquisitionné, hué par des foules hurlantes, menacés, harcelés, waké par des guérisseuses et autres féticheurs...
    Bravo, à l’heure où les plumes critiques se font de plus en plus légères, où le verbe devient flatteur, c’est une joie de constater que tout le monde n’a pas encore plié devant la dictature.
    Je constate néanmoins que pour la journée de célébration de nos martyrs, vous n’avez point cité Karma... un oubli ?

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  • Le 29 septembre 2023 à 10:31, par Pimus En réponse à : Burkina / An un du MPSR 2 : Des acquis, mais aussi des dérives, selon l’Observateur Paalga

    Tout à fait d’accord avec cette analyse. La question que l’on peut se poser est celle-ci : à ce jour et face au déferlement quotidien de plusieurs centaines de ces malfaiteurs sur notre territoire, quelle aurait été la situation si nous n’avions pu entre-temps acquérir des drones et autres vecteurs aériens ? On voit bien que ces équipements sont incontournables dans cette guerre qui nous est imposée sur une très grande étendue du pays ; rien qu’en permettant de désorganiser ces hordes de barbares sans foi ni loi, en attendant leur neutralisation par nos vaillants FDS et VDP. Il faut effectivement du temps pour que les résultats de toutes les acquisitions faites se ressentent, et surtout qu’ils soient stables et durables. Nous avions pris cette guerre, clairement sournoise, à la légère pendant trop longtemps. Mais il ne faut pas désespérer qu’on en arrive à bout. Découragement n’est pas burkinabè !

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  • Le 29 septembre 2023 à 19:19, par vrai visionnaire En réponse à : Burkina / An un du MPSR 2 : Des acquis, mais aussi des dérives, selon l’Observateur Paalga

    Quelle analyse pertinante et sans complaisance de la sitruation du pays et de la gestion du MPSR 2. toutefois vous avez omis de parler aussi des envois des civils au front alors que des militaires sont tapis à ouagadougou dans les bureaux. La gestion patrimonioal du pouvoir d’Etat qui profite à une famille et à un cercle restreint d’amis est aussi un faux pas de la gestion de IB. Trop de derrives.

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  • Le 30 septembre 2023 à 06:53, par Zougma En réponse à : Burkina / An un du MPSR 2 : Des acquis, mais aussi des dérives, selon l’Observateur Paalga

    Belle analyse objective et sans complaisance de l’Observateur Paalga. C’est d’autant courageux ! Certes, des acquis sont visibles sauf qui décide expressément de les voir, mais l’accent devrait être plus mis sur les dérives, les imperfections, c’est ce qui peut permettre de rectifier le tir. S’il y a des restrictions de libertés, que cela s’applique à tous ! On ne peut pas permettre à un groupe de personnes de sortir au moment voulu et à la moindre rumeur faire du bruit sur les rues alors que certains sont sommés de se taire. Ce n’est pas dans un état de droit en tout cas !

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  • Le 1er octobre 2023 à 11:53, par Baoyam En réponse à : Burkina / An un du MPSR 2 : Des acquis, mais aussi des dérives, selon l’Observateur Paalga

    C’est curieux que vous l’Observateur qui avez combattu Sankara de façon plus virulente le présentez aujourd’hui comme un modèle de comparaison pour IB. Peut-être que dans 30 ans IB aussi sera un modèle quoi contesté par vous aujourd’hui.

    Si vous avez des faits spécifiques sur IB et ses proches, dites les, car faire des accusations vagues ressemble à du dénigrement.

    La presse n’est pas libre selon vous mais pouvez citer un exemple de situation où vous l’Observateur avez été inquiétés ? Ceux qui sont inquiétés posent des actes de démoralisation de l’armée. Si le gouvernement les laisse faire, il échouera et s’il les en empêche vous critiquez. C’est mieux de réussir contre vos critiques.

    Vous dites l’effort est fait mais il n’y a pas encore de résultats. Que proposez-vous pour qu’il y ait de résultats ? On est en guerre. La logique est de durcir les méthodes de combat, ce dont vous n’encouragez nullement IB a faire, à moins que vous voulez qu’on se rende à l’ennemi.

    IB doit continuer. S’il se ramolit et echoue, vous serez les premiers à dire : on a eu raison. S’il réussit, ses critiques setont plus amers mais le peuple ne les écoutera pas.

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