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Burkina Faso : Le projet de loi portant révision de la constitution adopté

1er janvier, 05:40, par Diassibo

Souk : "Et vous prévoyez combien d’heures pour les élèves ?
Si vous étiez enseignant, vous seriez plus modeste dans vos propositions."

Souk, je suis enseignant depuis plus de 30 ans. Je sais parfaitement de quoi je parle. Par exemple même aujourd’hui tous les élèves burkinabè apprennent leur langue maternelle, mais aussi le français et l’anglais et même parfois une 4eme langue. Combien d’heures ont-ils ? Comment font-ils ?

Eh bien, dans l’enseignement multilingue que je propose, il n’y aura pas plus d’heures que le nombre d’heures que nous consacrons aujourd’hui au français, à l’anglais, etc.

1. L’enfant entre à l’école et commence l’apprentissage des langues avec sa seule langue maternelle et dans sa langue maternelle.

2. A partir du CE1, on introduit l’étude de la langue unitaire a côté de la langue maternelle de l’enfant dont l’apprentissage se poursuivra jusqu’en CM2. Les mathématiques et sciences élémentaires se feront dans la langue maternelle de l’enfant.

Contrairement à ce que beaucoup de gens croient, la traduction des manuels élémentaires dans nos langues ne présentera aucune difficulté. Dans tous les pays du monde, ces manuels sont traduits en des centaines et des centaines de langues locales différentes en Asie par exemple. On n’est pas obligé d’apprendre les maths élémentaires en français ou en anglais. Nous ferons comme les Chinois et les autres Asiatiques. Les concepts qui n’ont pas d’équivalents dans nos langues seront retenus tels quels, c’est tout. Par exemple, pour dire "cercle" en mooré, on dira tout simplement "cercle". C’est ce qu’on fait dans tous les pays non-européens qui ont exactement les mêmes problèmes que nous. D’ailleurs, même aujourd’hui, de nombreux mots européens qui n’ont pas d’équivalent dans nos langues ont été retenus tels quels et tout le monde comprend. Par exemple pour dire "voiture" dans ma langue on dit "mooto" (motor, moteur) ; pour dire "seau", on dit "bokoti" (bucket, mot anglais pour seau), etc. etc.

Nous ferons la même chose avec des mots comme "carrés", "triangles", "cercle", etc. Certains ont des équivalents dans nos langues et d’autres n’en ont pas. Les maitres sauront expliquer dans nos langues et ces mots entreront plus tard dans nos langues et nos mœurs comme sont entrés "mooto", "bokoti", etc. On n’est pas obligé d’avoir un équivalent africain pour chaque mot.

Si nous voulons aussi, nous pourrons inventer de nouveaux mots dans nos langues pour les exprimer. Mais c’est un processus fastidieux et inutile. Faisons comme on fait en hindi (Inde) et en chinois, etc. Ces mots européens existent tels quels dans ces langues.

Enfin, je voudrais souligner trois choses pour conclure.

1. Les nouvelles technologies de l’information et de la communication, qui se développent à un rythme exponentiel vont rende tout cela beaucoup plus facile que de par le passé. Par exemple, avec l’intelligence artificielle et les nouvelles méthodes de traduction automatique, nous pourrons traduire en un temps record des milliers et des milliers de manuels et d’ouvrages de la littérature mondiale (scientifique ou non) dans nos langues, sans perdre beaucoup d’argent ou de temps. De même, ces TIC nous permettront de traduire dans toutes nos différentes langues tout document administratif que nous voudrons. Il nous faut simplement développer les logiciels à cet effet.

2. Pour l’enseignement de la science et la recherche scientifique au niveau secondaire et supérieur, nous pourrons retenir l’anglais comme le font de très nombreux pays du monde. La francophonie nous maintient dans un ghetto scientifique qui fait que notre production scientifique n’est pas intégrée à la production scientifique mondiale du fait que nous n’avons pas accès à la majeure partie de la littérature scientifique internationale parce que nous ne lisons que le français et notre production scientifique n’est pas lue par les autres scientifiques du monde parce que nous écrivons en français.

3. Beaucoup de gens se demandent aussi comment enseigner un si grand nombre de langues. S’il en est ainsi, c’est parce qu’ils réfléchissent dans la perspective du système centralisé français. Au contraire, nous, nous aurons UN SYSTÈME DÉCENTRALISÉ. Qu’est-ce que cela veut dire, un système décentralisé ? Eh bien, cela veut dire que chaque communauté ou district s’organisera à son niveau pour enseigner sa langue maternelle à ses enfants. Seule la langue unitaire et l’anglais seront du ressort des services centraux. L’enseignement de la langue maternelle à la base jusqu’au CM2 sera du ressort des conseils communaux qui se chargeront de recruter et former les maitres dans les langues en usage dans leur district. Nul ne saura faire cela mieux qu’eux.

Rappelons à cet effet que 978 pour cent (oui, 98 pour cent) des articles scientifiques dans le monde sont rédigés en anglais. Et d’ailleurs 90 pour cent des chercheurs francais eux-memes redigent leurs articles en francais.

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