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Journée nationale de pardon : Le NON de certaines familles

Publié le mercredi 30 mars 2005 à 07h52min

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Le 4e anniversaire de la Journée nationale de pardon sera-t-il à tout point de vue semblable aux précédents ? Certainement pas sur tous les plans, car au titre des engagements pris par Blaise Compaoré le 30 mars 2001, plusieurs ont été réalisés. Toutefois, des familles de victimes campent sur leur refus d’accorder le pardon. Et la JNP en son acte 4 risque de se dérouler toujours sans ce pardon.

Pardon. Prononcé dans un cas bénin ou dans une situation de gravité, ce concept est plus qu’un simple mot. Il évoque le symbole de l’humilité et tout en grandissant celui qui demande pardon, il en noblit celui qui l’accorde. Dans la société traditionnelle africaine, le pardon demandé est rarement refusé et il s’obtient généralement après des sacrifices bien déterminés.

Dans la société moderne, le pardon tient également une place prépondérante, si bien qu’un adage énonce qu’une faute avouée est à moitié pardonnée. Là, il faut donc que la faute fasse l’objet d’un aveu. Les chrétiens et les musulmans quant à eux connaissent mieux que quiconque le sens que revêt le pardon. Dans cette logique, les catholiques implorent tout le temps la magnanimité de Dieu pour leurs péchés. "Comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés", prient-ils.

Pardonner est une vertu mondialement partagée. Mais il faut savoir pourquoi l’on pardonne, ce que l’on pardonne et à qui l’on pardonne. En d’autres termes, il faut au préalable que le pécheur reconnaisse son tort. En principe cela suffit pour réparer la faute commise. C’est ce que des familles burkinabè qui ont été endeuillées ou des personnes qui ont subi l’arbitraire des gouvernants et autres, ont fait. Elles ont pardonné, contrairement à d’autres dont celles de Thomas Sankara, Norbert Zongo, Clément Oumarou Ouédraogo.

Pour des parents du président Sankara, du journaliste Zongo et du professeur Ouédraogo, il n’est pas question de pardonner tant que la vérité ne sera pas connue sur la mort des intéressés. Ce n’est pas tout. Le scénario exigé par ces familles doit déboucher sur la justice avant de parler de toute réconciliation. Et même si des parents de ces illustres défunts voudraient bien pardonner, cela sera très difficile pour eux de le faire unilatéralement. Ces "affaires" ont franchi les frontières nationales.

Internationalisée et fortement politisée, la lutte engagée suite aux disparitions notamment de Thomas Sankara et Norbert Zongo semble échapper au pardon vu de Ouagadougou. Pendant ce temps, selon le bilan du Comité technique d’appui au gouvernement, la famille Oumarou Clément Ouédraogo a adopté une position "équilibriste" tandis que celle de Emile Sidiane, Blaise Zigani "a accordé le pardon mais refuse l’indemnisation". Chacun a sa conception de la chose.

"La main reste tendue", a affirmé Mahamadou Ouédraogo, le président de ce comité. Depuis sa mise en place jusqu’en 2004, cette structure qui était présidée par l’ancien ministre d’Etat Ram Ouédraogo et est toujours dirigée par un membre de l’Exécutif, a sillonné tout le Burkina. Dans ses pérégrinations, le comité a rendu visite à plus de 120 familles, qui ont "toutes accepté le pardon" à quelques exceptions près. Avec d’autres structures telles que le Fonds d’indemnisation, il a mené plus de 130 enquêtes administratives et montré plus de 40 tombes aux parents des victimes.

En attendant que la catharsis espérée par la création de la JNP aboutisse à la réconciliation totale, du chemin reste à faire. Et pardonner n’est pas oublier, dit-on.

Par Morin YAMONGBE
Le Pays

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