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L’élargissement de l’Europe : Enjeux et perspectives

Publié le jeudi 30 septembre 2004 à 06h36min

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Longtemps restée limitée au cercle des philosophes et des visionnaires qui y voyaient un idéal humaniste et pacifique, l’idée de l’Europe est devenue une réalité dans les années 50, avec la création le 9 mai 1950 d’une Communauté européenne du charbon et de l’acier. Elle s’élargira par vagues successives pour "naître" en 1992 avec le traité de Maastricht qui lui donnera une assise institutionnelle.

Espace économique petit par sa superficie (3 892 000 km2) mais grand par son potentiel, l’Union européenne (UE) suscite des interrogations quant au rôle et à la place qu’elle veut se donner dans le monde.

Aussi, ses propres "contradictions" internes sont sujettes à débat, si tant est que celles-ci laissent transparaître en filigrane la "philosophie de vie" qu’elle veut se donner. Autant d’enjeux et de questionnements que nous nous proposons d’aborder dans le présent dossier, l’Europe, comme l’a dit Blaise Compaoré en avril 2004 à Lyon étant "notre Nord historique", c’est-à-dire un partenaire incontournable, dont toutes les péripéties de la vie nous intéressent au premier chef.

Le 1er mai 2004, l’Europe opérait le plus grand mouvement intégrateur de son histoire, en passant de 15 pays adhérents à 25. Ce cinquième élargissement depuis la signature du traité de Rome en 1957, a accru sa population de 75 millions d’habitants, soit une augmentation de 20% pour totaliser environ 455 millions de citoyens européens, pour une superficie totale de 3 892 000 km2. L’Europe étendait ainsi sa zone de stabilité et de paix et stimulait sa croissance économique et commerciale, le marché unique passant de 378 à 455 millions de consommateurs en 2004, et à plus de 480 millions en 2007. Un potentiel socioséconomique fort donc, pour relever non seulement le défi de la paix et de la sécurité, mais aussi promouvoir la solidarité économique et sociale. Car, en effet, l’Europe du XXIe siècle reste confrontée aux défis de la sécurité, ce qui l’oblige à travailler de manière constructive avec les régions se situant sur ses frontières à savoir le Sud de la Méditerranée, les Balkans, le Caucase, le Moyen-Orient. Paix et sécurité (sécurité intérieure et sécurité extérieure), objectifs politiques s’il en est, credo de la construction européenne qui doit cependant sa dynamique et son succès à ses fondements économiques. Le grand marché intérieur au sein des quinze Etats membres et la circulation d’une monnaie unique, l’euro, entre douze d’entre eux, sont le socle de l’UE. Une Union rendue nécessaire dans un siècle où les tendances démographiques privilégient d’autres continents. De même, les stratégies commerciales et les investissements des entreprises européennes ont besoin d’un espace plus vaste que le marché national pour bénéficier des économies d’échelle et trouver de nouveaux clients. La solidarité est le corollaire nécessaire à ce grand espace de libre concurrence, même si elle est mise à mal par certaines survivances du passé telles que les entraves à la libre circulation des personnes.

L’objectif final reste d’agir ensemble pour promouvoir un modèle de société, même si les sociétés postindustrielles européennes deviennent de plus en plus complexes. Les citoyens ont connu une élévation de leur niveau de vie, mais des écarts subsistent et peuvent même s’accroître avec l’adhésion des anciens pays communistes. La force de l’UE est donc fondée sur une capacité d’action commune gérée par des institutions démocratiques : le Conseil européen, le Parlement européen, le Conseil des ministres, la Commission européenne, la Cour de justice et la Cour des comptes.

Trop beau pour être vrai ?

L’Union veut promouvoir une vision humaniste et progressiste de l’homme, placée au cœur d’une révolution de la planète qu’il lui appartient de maîtriser et non de subir. Une ligne de conduite qui amène à s’interroger sur certaines de ses prises de position et ses dissonances internes.

C’est ainsi que l’on est resté dans l’expectative face à son "apathie" devant l’unilatéralisme développé par les USA lors du déclenchement de la campagne d’Irak.

Bien sûr, l’Allemagne et la France ont émis des protestations de principe. Cela n’a pas pour autant empêché certains pays membres comme la Pologne d’apporter un soutien appuyé à Washington. Une "cacophonie" dans la gestion de la politique étrangère de l’Union qui illustre toute la difficulté à vivre ensemble.

De plus, on reste sceptique devant l’idée d’Europe, quand, dans le cas de Chypre, seule la partie grecque de l’île a intégré l’Union européenne.

La ligne verte, ligne de démarcation séparant les deux entités Chypriotes (turque et grecque) devient donc la frontière de l’Union, ce qui rend difficile la rentrée des Chypriotes turcs dans le Sud de l’île. Par ailleurs, le débat intellectuel ayant prévalu pour tenir la Turquie à l’écart de l’Union pour le moment, a heurté certaines consciences, si tant est qu’il avait une forte connotation "ethno-religieuse". Pour un regroupement qui veut promouvoir la démocratie et les droits humains, il y a de quoi s’interroger. Par ailleurs, le "cas" Fabius (l’ancien Premier ministre socialiste français, rejette la constitution actuelle) pose le problème fondamental du désir inachevé de faire l’Europe et ouvre la voie à une longue période d’incertitudes. Last but not least, le non-respect de certains critères de convergence tel que le Pacte de stabilité par certains grands (France, Allemagne, Grande Bretagne) et le désir de cette troïka de "régenter", l’UE, fissurent le bel édifice européen. Pour autant, l’Europe avance et reste aujourd’hui la première puissance commerciale du monde. Avec l’élargissement de 2004, l’UE entre dans une nouvelle ère, en mettant ainsi fin pacifiquement à la séparation d’après-guerre de l’Europe.

L’élargissement jette les bases d’une paix, d’une stabilité et d’une prospérité durables pour les générations futures. Les membres de la famille unissent leurs forces et leurs capacités pour renforcer encore le bien-être et la prospérité d’une Union élargie. Cependant, et comme l’a dit Gunter Verhengen, membre de la Commission européenne, "pour réaliser pleinement les bénéfices de l’élargissement, la Communauté devra revoir ses politiques et rendre ses institutions plus efficaces et démocratiques afin de mieux répondre aux besoins et aux attentes des citoyens d’Europe". Dont acte.

A suivre

Boubakar SY
Sidwaya

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