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ZIMBABWE : Les limites d’une cohabitation à l’africaine

Publié le lundi 20 décembre 2010 à 00h56min

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La cohabitation entre Robert Mugabé et Morgan Tsvangiraï va mal. C’est le moins que l’on puisse dire au regard de l’attitude des deux protagonistes, ces temps-ci. Mugabé a annoncé vouloir organiser des élections anticipées en 2011. Ce faisant, il a affiché, sans ambages, sa volonté de rompre le pacte politique scellé avec son opposant. Ce dernier, qui ne veut pas non plus continuer à travailler dans ce gouvernement, n’y voit aucun inconvénient. En rappel, le Zimbabwé a été secoué en 2008 par une crise à l’issue de la présidentielle ayant mis aux prises les deux hommes en question.

Les nombreuses violences enregistrées en son temps, ont fait plusieurs victimes à travers le pays. C’est dans l’optique de mettre fin à ces violences et de sortir de cette crise post-électorale que ce gouvernement d’union nationale a été mis en place.

Ce genre d’expériences s’inscrit dans la logique du court terme. Le cas zimbabwéen illustre à merveille les limites de cette cohabitation à l’africaine. Ce sont des gouvernements mis en place juste pour calmer l’orage. Ils volent en éclats dès que les premières dissensions refont surface. L’attelage formé, à l’occasion, ne tient pas ou, dans le meilleur des cas, tient très difficilement la route. Cela se justifie, entre autres, par le fait qu’il ne repose pas sur des bases fiables et que les acteurs l’acceptent juste en désespoir de cause ou dans l’optique de ruser avec le système à travers des calculs secrets. Par exemple, il arrive qu’en l’acceptant, les pouvoirs en place nourrissent le secret espoir de gagner du temps pour reprendre en main une situation difficile.

Quant aux opposants, lorsqu’ils acceptent d’une manière ou d’une autre ce partage, ils caressent, entre autres, le rêve de maîtriser quelque peu les rouages de l’Administration par leur participation quotidienne à la gestion de la chose publique. Chacun des acteurs accepte ainsi la cohabitation, juste le temps de mieux fourbir ses armes pour reprendre les hostilités au moment opportun. En d’autres termes, on ne résout pas les problèmes de façon durable avec cette formule de partage du pouvoir parce que les différents acteurs se mettent en équipe sans y croire vraiment. On met juste les difficultés en veilleuse et la moindre étincelle suffit à rallumer le feu de la crise qui couve. Dans le cas du Zimbabwé, le gouvernement était censé faire des réformes politiques. Visiblement, il n’a pas atteint ses objectifs.

Cela signifie, d’une manière ou d’une autre, qu’il y a eu des blocages en son sein, que la volonté de travailler ensemble n’a été que de façade. A présent, la volonté de toutes les parties d’aller à des élections anticipées prouve que cette cohabitation est inconfortable pour tout le monde. Il faut donc en sortir. Cette situation du Zimbabwé montre la nécessité d’évoluer vers un système électoral apaisé où la conquête du pouvoir d’Etat n’est plus perçue comme une question de vie ou de mort et où le perdant, de ce fait, accepte sa défaite avec fair play. Désormais, l’Afrique doit organiser des élections aux standards internationaux, avec un gagnant et un perdant. Un résultat franc et indiscutable devrait être la règle.

En tout cas, l’expérience de ce pays d’Afrique australe vaut son pesant d’or et il convient d’en tirer les leçons. Mais les élections projetées permettront-elles de régler les problèmes politiques du pays ? Une réponse affirmative à cette question ne va pas de soi étant donné que les élections censées consacrer des sorties de crise dans les pays d’Afrique ont la fâcheuse tendance de créer plus de problèmes qu’elles n’en résolvent. Surtout, à 86 ans, la candidature de Mugabé est un signe qui ne trompe pas sur sa volonté de continuer à tenir les rênes de son pays. Il est, certes, un héros de la lutte d’indépendance de son pays, mais à cet âge, il serait judicieux qu’il se retire pour une retraite bien méritée.

Relwendé Auguste SAWADOGO

Le Pays

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