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SITE D’ORPAILLAGE DE TONIOR : Les orpailleurs et le ministère des Mines à couteaux tirés

Publié le mardi 16 février 2010 à 01h13min

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Le ministre Kader Cissé

Le Syndicat national des orpailleurs artisanaux et traditionnels du Burkina, affilié à l’ONSL, manifeste dans cette lettre ouverte adressée au Premier ministre, son mécontentement face à "une destruction massive de biens et une remise en cause de l’autorisation d’organiser les orpailleurs sur le site de Tonior (département de Batié, province du Noumbiel).

Monsieur le Premier Ministre, Nous avons l’honneur par la présente de porter à votre connaissance des faits graves de la destruction massive de biens appartenant à des orpailleurs, la remise en cause de l’autorisation d’organiser nos camarades sur le site aurifère de Tonior, département de Batié, province du Noumbiel et demander votre soutien . Monsieur le Premier Ministre,

notre pays compte aujourd’hui plus de 300.000 (trois cent mille) orpailleurs en quête de leur pain quotidien et du bien-être de leurs familles. Malheureusement notre ministère de tutelle, le Ministère des Mines, qui est censé nous accompagner, nous met des bâtons dans les roues et nous complique la vie jusqu’à un tel point que l’on se demande si nous sommes dans notre propre pays. Il est bon de porter à votre connaissance que depuis la création de notre syndicat, le ministre des Mines en personne, au lieu de nous encourager, met tout en œuvre pour retirer notre récépissé de reconnaissance comme l’attestent les faits suivants :
- Le 31 juillet 2009, le Bureau exécutif du Syndicat des Orpailleurs artisanaux et Traditionnels du Burkina est informé que le Préfet de Batié, l’Adjoint au Maire et le Commandant Adjoint de la Gendarmerie se sont rendus sur le site aurifère de Tonior dans le département de Batié(Province du Noumbiel) pour signifier aux orpailleurs l’ordre de déguerpir du site avant le 04 août 2009. Selon la délégation, la décision provient de la hiérarchie, est irrévocable et sera exécutée sans complaisance.

Sans tarder, le Président du Syndicat des Orpailleurs porte l’information à la connaissance de l’Organisation nationale des Syndicats libres du Burkina (O.N.S.L) à laquelle les orpailleurs sont affiliés. Informé de la situation, le secrétaire général national de l’ONSL téléphone au Directeur général des mines pour en savoir davantage. Ce dernier a répondu que sa section n’était ni de près ni de loin mêlée à cette histoire et que cela relevait de la compétence des autorités locales.

- Le 05 août 2009, en pleine fête de l’indépendance, les autorités n’ont trouvé mieux que d’ordonner une descente musclée des forces de l’ordre sur le site. Les orpailleurs ont vécu ce jour les pires moments en 20 ans d’exercice du métier d’orpailleur. Sans hésiter, les forces de l’ordre ont mis le feu au site, détruisant plus de 540 moulins et des habitations. Les dégâts commis sont estimés à plus de 600 millions de nos francs.

Monsieur le Premier Ministre, pour mobiliser une telle force de sécurité, il faut énormément de moyens. Qui a donc financé cette initiative ? Est- ce le gouvernement dont vous êtes le chef ? Est- ce les puissants hommes d’affaires à la solde du Ministre ?

Dans tous les cas, les moyens engagés pour détruire sans ménagement le site auraient pu servir à déloger sans brutalité les orpailleurs et à fermer le site. L’usage excessif de la force contre les orpailleurs sur le site cache mal la volonté manifeste des autorités du ministère des Mines sinon d’en découdre avec tous ceux qui tenteraient de se mettre à travers des intérêts égoïstes et funestes inavoués. Il faut préciser que plus de 28.000 (vingt huit mille) personnes ont assisté impuissantes à la destruction de leurs biens. Imaginez un peu le choc subit par les femmes, les enfants et les habitants au moment de l’assaut.

Pour comprendre davantage la situation, le bureau national de l’ONSL à dépêché à Gaoua une délégation pour rencontrer le Gouverneur du Sud-Ouest. La délégation était composée des camarades El hadj Kaboré T. Dramane Secrétaire chargé de l’économie informelle du Bureau national, Kaboré Inoussa secrétaire à l’organisation à la section du Kadiogo et des camarades El hadj Kiemdé Hamado, Rabo Mahamoudou, Nacanabo Ousséni, respectivement Président, Vice-président et Secrétaire général du Syndicat national des Orpailleurs artisanaux et traditionnels du Burkina (SYNORARTRAB/ONSL).

- Le Lundi 6 août, la délégation est reçue par le Gouverneur en présence de tout son staff. D’entrée de jeu, le Gouverneur porte à la connaissance de la délégation le contenu de la lettre du Ministre des Mines, des carrières et de l’Energie lui demandant de fermer immédiatement le site de Tonior et de prendre les mesures sécuritaires nécessaires pour la cessation de toute activité (cf lettre n°09-018-MMCE du 15 Avril 2009). Le résultat des discussions avec le Gouverneur ne laissait pas la place à aucune perspective de voir les orpailleurs reprendre leurs activités sur le site.

Au sortir donc de la réunion, le Président du Syndicat des orpailleurs désigne un de nos camarades pour rencontrer le représentant de MALI GOLD MINING S.A, détenteur par arrêté 09-043 et 08-215 /MCE/SG/DGMGC du 4/09/2008 du permis de recherche Diouloumba Est et Ouest où est situé le site aurifère de Tonior. A l’occasion de l’entretien avec le représentant du PDG de MALI GOLD MINING S.A, il a été convenu d’adresser une demande d’autorisation d’exploiter le site au PDG. Ce qui fut fait. Le 25/08/2009, la demande est accordée avec les conditions suivantes :
- les activités ne devront pas perturber les travaux de recherche de la société MALI GOLD MINING S.A ;
- les rejets de traitements devront être entreposés en un lieu précis pour éviter la pollution géochimique de tout le secteur ;
- respecter scrupuleusement les dates de fermeture des sites ;
- la sécurisation du site d’orpaillage est entièrement sous la responsabilité du syndicat.

Malheureusement après cet accord, nous avons compris que le Ministre des Mines voulait coûte que coûte et de façon illégale attribuer le site à une des sociétés dirigées par Sawadogo Mamoudou et son frère qui se battaient pour le contrôle du site. Avant de mettre sa menace à exécution, le 10/08/2009 par lettre n° 09/566/MMCE, le Ministre à travers, le Directeur général des Mines intime l’ordre à la société MALI GOLD MINING S.A de faire cesser dans un délai d’un mois toute activité d’exploitation artisanale sur le site de Tonior. Monsieur le Premier Ministre, Déjà le 19 Mai 2009, le DG des Mines demande à la société MALI GOLD MINING S.A de retirer l’accord d’exploitation à Monsieur Belem Ratteba Rasmané et de fermer le site. Le 22 Octobre 2009, le Ministre adresse une lettre de mise en demeure à la société MALI GOLD MINING S.A, accusant la société de vouloir transformer son permis de recherche en zone d’orpaillage.

"Bras de fer"

En retour dans sa réponse du 27 Octobre 2009 au Ministre, le représentant de la société a écrit : "J’ai donc pensé que l’unique moyen d’éviter les difficultés qu’il y a eu à Tonior était d’avoir des encadreurs qui répondent de chaque site. C’est pour cela que j’ai donné mon accord à tous ceux qui ont demandé à encadrer les sites d’orpaillage dans mes permis de recherche. Il s’agit de Monsieur Belem Rattaba Rasmané et du syndicat des orpailleurs". Plus loin parlant du Directeur général des Mines, le représentant de la société ajoute : "J’ai souhaité le rencontrer la veille de son départ pour ses congés.

Quand je lui ai parlé de l’objet de la rencontre au téléphone, il m’a annoncé que le site d’orpaillage de Tonior a déjà été attribué. Je lui ai dit que je n’avais pas encore donné mon accord à personne et que cette attribution est illégale. Il m’a rétorqué qu’il ne fallait pas m’engager dans un bras de fer où je sortirais perdant". Pour mettre à exécution ces menaces, le 3 décembre 2009 des bulletins de liquidation sont adressés à la société MALI GOLD MINING S.A. Le 10/12/2009 la Société MALI GOLD MINING S.A, s’acquitte des taxes. Coup de théâtre, le 31/12/2009, la société se voit signifier par arrêté N°283-284/MCE/SG/DGMGC le retrait pur et simple de ses permis de recherche. Monsieur le Premier Ministre, Sans surprise, par décision n° 09/049/MCE/SG/DGMGC, les sites aurifères de Tonior sont attribués à monsieur Sawadogo Mamoudou.

Contre l’esprit et la lettre du code minier, le Ministre a sacrifié sur l’autel le décret portant gestion des autorisations et titres miniers du Burkina Faso au profit de ses intérêts personnels et ceux de ses amis. Autour de ses tractations se dégagent une forte odeur de corruption et une volonté affichée de détruire la vie de milliers d’orpailleurs et leurs familles qui ne demandent qu’à survivre malgré les risques qui planent quotidiennement sur la tête de chacun. Monsieur le Premier Ministre, face à l’attitude du Ministre des Mines, le syndicat a introduit une requête auprès du tribunal administratif de Bobo Dioulasso qui a rendu son jugement le 31 décembre 2009, jugement qui a ordonné le sursis d’exécution de la décision 09-049 MCE-DGMGC du 21 août 2009 portant autorisation d’exploitation artisanale du site aurifère de Tonior. Cette décision de justice sera t –elle appliquée et respectée ? Nous osons le croire car cela renforcera la crédibilité et l’indépendance de la justice de notre pays.

Monsieur le Premier Ministre, face à cette situation de désespoir de bon nombre de familles, nous vous demandons d’user de tout ce qui est en votre pouvoir pour que :
- les orpailleurs soient dédommagés à la hauteur des dégâts ;
- le Syndicat jouisse de son accord d’exploitation du site.
- qu’on remette à la Société MALI GOLD MINING S.A ses permis de recherche.
- la Paix et la sérénité reviennent sur le site ; Tout en vous souhaitant bonne réception de la présente lettre, nous vous assurons, monsieur le Premier Ministre, de notre considération distinguée.

Bobo Dioulasso, le 12 janvier

Le Président EL Hadj Kiemdé Hamado Le Secrétaire Général Nacanabo Ousséni

Le Pays

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