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Institutions de Bretton Woods : Ces argentiers qui nous veulent du bien

Publié le vendredi 2 juillet 2004 à 08h19min

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S’il y a des institutions qui ont marqué les esprits des citoyens
des pays en développement, c’est bien celles de Bretton Woods.
Rare est le ressortissant de ces pays qui ne sache pas que
derrière l’appellation d’institutions de Bretton Woods, se cachent
la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI).
Ce qui est peut-être moins connu c’est leur âge.

Pourtant, elles
existent depuis 60 ans. Hier 1er juillet 2004, la Banque
mondiale et le FMI ont soufflé leurs 60 bougies. Comme tout
anniversaire, une halte a été faite sur le chemin parcouru en
guise de bilan sans oublier de tracer la voie du futur. De notre
côté, nous posons une seule question à l’occasion de cet
anniversaire : qu’est-ce que ces institutions de crédit et de
financement du développement ont-elles apporté aux pays
africains notamment ? Les réponses à cette question varient
suivant les interlocuteurs.

Les dirigeants africains ne manqueront pas de louer l’action
des institutions de Bretton Woods, qui a permis de sauver leur
pays de l’asphyxie. Les fonds débloqués par la Banque
mondiale et le FMI, en contrepartie de l’acceptation des
programmes d’ajustement structurel (PAS), ont été de l’oxygène,
des bouées de sauvetage.

En fait, ils ne peuvent pas soutenir le
contraire parce que, confrontés à un moment donné à
d’énormes difficultés financières dues entre autres à la
mauvaise gestion, les pays en développement se sont pliés aux
conditionnalités des institutions de Bretton Woods. Les
dirigeants diront que les accepter sans broncher ou périr et
c’est donc la raison pour laquelle ils vont en rangs dispersés à
Washington signer les accords.

Mais ces appuis conditionnés
ont-ils permis d’éviter le naufrage programmé ? C’est ici que
d’autres points de vue diamétralement opposés par rapport à la
question posée ci-haut, se font entendre.
Pour beaucoup d’Africains d’en bas, les interventions des
institutions de Bretton Woods sont désastreuses sur les plans
économique et social. Les privatisations à tour de bras, les
compressions de personnel sont toujours frais dans les
mémoires. Pour eux, que les pays soient allés à Washington
sur des béquilles ou bien en jambes, cela n’ a pas amélioré leur
quotidien qui n’était guère reluisant. Ces avis, les plus
dominants d’ailleurs, décrient à tout bout de champ l’action des
institutions de Bretton Woods comme le font les syndicats.

En
somme, elles n’ont rien apporté sinon la désolation en lieu et
place du bonheur promis, l’aliénation des dirigeants africains
qui , comme drogués, ne peuvent plus se passer de ce soutien
catastrophique. Ces critiques semblent avoir été entendues au
regard des changements opérés par les deux institutions.
Comme pour rectifier le tir, les PAS ont été abandonnés au profit
de l’initiative de remise de dette dénommée PPTE (Pays
pauvres très endettés) , de cadres stratégiques de lutte contre la
pauvreté (CSLP).

Tous ces concepts ne sont en fait qu’une
réparation déguisée des effets néfastes des PAS. En somme ,
l’action de la Banque mondiale et du FMI a beaucoup plus porté
préjudice aux pays africains. Dès lors, l’on se demande
pourquoi ceux-ci continuent-ils de solliciter leurs appuis
financiers.
Il serait injuste d’incriminer uniquement les deux institutions
pour ce qui arrive aux pays africains qu’elles disent vouloir aider.
Les Africains, notamment les dirigeants, sont aussi
responsables.

Il y a une vérité à savoir pour de bon : les
institutions de Bretton Woods ne font pas des oeuvres sociales,
elles font le commerce de l’argent. En bons banquières et
financières, elles ne donnent donc pas leurs fonds sans
garantie de remboursement avec des profits. Vues sous cet
angle, elles font des prestations de services pour lesquelles
elles n’obligent personne à accepter. D’ailleurs, plus d’une fois,
leurs responsables n’ont pas manqué de le dire en réponse aux
critiques acerbes dont ils sont l’objet.

Toutefois, et sans
dédouaner les Africains, tout est fait pour obliger de façon
sournoise les pauvres à recourir à ces argentiers. Tout se
passe comme au niveau politique où il est aujourd’hui difficile à
un pays, à un régime africain de tourner le dos à la démocratie.
La mise en quarantaine , le blocage des financements seront
son lot quotidien jusqu’à ce qu’il se plie à cette exigence. La
question qui se pose est de savoir si les pays africains peuvent
se passer des institutions de Bretton Woods à défaut d’avoir des
relations d’égal à égal avec elles.

Toute la problématique réside là et l’on se demande si cela est
possible avec la défaillance des politiques africaines , la
malgouvernance, les détournements de fonds publics.
Cependant, il ya lieu pour les pays africains de privilégier
l’auto-ajustement pour ne plus recourir systématiquement aux
dettes, véritables goulots d’étranglement .

Il y a lieu aussi
d’élaborer une plate-forme africaine, un protocole d’accord avec
les institutions de Bretton Woods pour rendre plus équilibrées,
acceptables les relations bilatérales. Réussir à le faire
procurerait des avantages certains aux peuples au nom
desquels d’énormes dettes sont contractées sans qu’ils n’en
perçoivent l’impact.

Le Pays

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