Depuis, il n’a plus jamais donné signe de vie. On sait désormais qu’au moment de son rapt le journaliste indépendant enquêtait sur diverses malversations notamment dans la nébuleuse filière café- cacao. Un travail qui s’avèrera fructueux, puisque quelques années après la disparition de l’investigateur, l’Etat ivoirien n’a eu d’autre choix que de se lancer dans une opération main propres qui n’a épargné personne.

Or à l’époque des faits, on a très vite pointé un doigt accusateur en direction du palais présidentiel de Cocody et notamment sur l’entourage de la première dame, Simone Gbagbo, présumée cerveau de l’affaire. Depuis, le juge Ramaël éprouve toutes les peines du monde à entendre ce témoin capital ainsi que Paul Antoine Bohoun Bouabré, ministre d’Etat.

Une difficulté que l’on comprend aisément quand on connaît l’envergure de ces deux personnalités. C’est connu, la meilleure défense réside dans l’attaque. On l’a bien éprouvé à Abidjan, en répondant à l’action du juge parisien au moyen d’un pare-feu judiciaire. Un écran de fumée censé brouiller les pistes.

Et c’est Seydou Berté, citoyen ivoirien vivant en France, qui en fait les frais. Principal témoin du juge Ramaël, il est accusé par la Justice de son pays d’avoir fait des déclarations mensongères aussi bien au juge qu’à la presse hexagonale. C’est en effet lui, le chauffeur du chef du commando, qui a affirmé avoir assisté à l’assassinat de Guy- André Kieffer, sur ordre de Simone Gbagbo. Il reviendra par la suite sur ses déclarations, faisant de nouveau planer le doute sur cette sombre affaire.

Un « mensonge » qui pourrait profiter à Jean- Tony Oulaï, présumé chef du commando, interpellé et inculpé en 2006 alors qu’il se trouvait à Paris. Mais, si les personnes mises en cause dans l’enlèvement et l’assassinat du journaliste bénéficient, comme tout un chacun dans un Etat de droit, de la présomption d’innocence, on ne peut s’empêcher de penser que la rétractation du témoin principal vient à point nommé.

Quatre ans après son enlèvement en plein jour sur le parking d’un supermarché, Guy- André Kieffer est toujours porté disparu. Entre accusations de mensonge et convocations du juge non honorées, Paris et Abidjan se renvoient la balle. Mais, fort heureusement, l’instruction suit son court, et tôt ou tard la vérité finira par jaillir, même si, pour le moment, certains essaient de noyer le poisson dans la lagune Ebrié.

Par H. Marie Ouédraogo

L’Observateur Paalga