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Enlèvement de deux Autrichiens : La nécessaire sécurisation de la zone sahélo-saharienne

Publié le mercredi 19 mars 2008 à 09h46min

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Le nord du Mali est-il devenu la base de repli des activistes islamistes ? Le dernier incident en date, l’enlèvement de deux touristes autrichiens par des membres d’Al-Qaïda au Maghreb, met en tout cas en lumière la fragilité du Mali face à l’expansion du terrorisme maghrébin hors de son champ traditionnel d’opérations.

Désormais, le pays de Amadou Toumani Touré n’est plus à l’abri des secousses que connaît l’Afrique du Nord. Le Mali lui-même n’est certes pas visé, mais il court un risque en servant de base arrière par des djihadistes de tout acabit traqués dans leurs pays. La rébellion touarègue n’était déjà pas un dossier aisé pour le Mali. Il doit à présent intégrer la donne terroriste dans sa politique sécuritaire. Force est cependant de reconnaître que le Mali, comme la plupart des pays riverains de la bande sahélo-saharienne, est totalement démuni face à la menace terroriste. L’option la plus facile est de faire recours à l’expertise des Etats-Unis qui proposent à qui le veut leurs services. C’est une nécessité certainement pour les pays africains de développer une coopération internationale dans la lutte contre le terrorisme, eux qui sont dépourvus de tous moyens logistiques, humains et financiers. Mais l’alliance avec l’Amérique doit se faire avec discernement, au regard de l’engagement de Washington sur divers fronts, devenant ainsi la cible de tous les terroristes du monde. Une stratégie basée sur l’usage de la force tous azimuts dont les résultats restent d’ailleurs mitigés.

Sur ce plan, on peut croire au sens de la prudence des Africains. Le projet d’installer une base dénommée AFRICOM sur le continent n’a pas rencontré un grand succès. Cette réserve des

Africains tient à la philosophie unilatéraliste américaine de la lutte contre le terrorisme, avec souvent des amalgames malheureux entre assassins, rebelles, insurgés ou résistants. Tous sont mis dans le même sac. Par ailleurs, l’engagement américain en Irak et sur d’autres théâtres comme la Somalie est très discutable. Il n’a pas toujours été couvert du sceau de la légalité internationale. Mais la facette la plus controversée de la diplomatie américaine concerne le parti pris de Washington pour Israël. Le problème palestinien demeure une source de tension permanente tant pour le Proche-Orient que pour le reste du monde. La position partisane de l’Administration Bush dans ce conflit n’a fait que raviver un sentiment anti-américain, jusque dans les pays africains. Le jour où la justice prévaudra pour les Palestiniens, l’Amérique et le monde feront l’économie des crises qu’ils gèrent et dont la plupart sont inhérentes à l’impossibilité pour les Palestiniens de disposer d’un Etat indépendant. Comment alors collaborer avec un tel pays sans être accusé de partager sa vision sur les grands enjeux mondiaux ? Un vrai dilemme se pose donc à nombre de pays africains dans la coopération qu’ils ont avec les Etats-Unis en matière de lutte contre le terrorisme. Pour ne pas perdre leur âme dans une stratégie commune avec l’Amérique, les Africains ont intérêt à exiger de la première puissance mondiale qu’elle privilégie aussi le dialogue des cultures et des religions. La seule force des armes ne peut venir à bout d’actions de violences politiques que l’on réduit au vocable de terroriste. En prenant en otage de paisibles touristes autrichiens, Al-Qaïda au Maghreb exprime sans doute une opinion politique, puisqu’il exige la libération de certains de ses membres détenus en Algérie. Mais les otages sont aussi un trésor de guerre qui peuvent rapporter gros, d’où la rançon demandée par les ravisseurs. Il s’agit, tout en posant des actes à caractère spectaculaire, de se faire de l’argent pour alimenter l’effort de "guerre". Bien entendu, ce mode opératoire propre aux terroristes est condamnable puisque les premières victimes sont d’innocents civils.

En tout cas, le mouvement Al-Qaïda au Maghreb, par cet enlèvement, fait une démonstration de sa force de frappe transfrontalière. Sans difficulté majeure, il a pu transférer ses otages depuis la Tunisie jusqu’au Mali. Mais en même temps, ce repli jusqu’au Mali peut être un signe de faiblesse et d’impuissance face aux services de sécurité des pays maghrébins. Le Mali étant le maillon faible dans la région, il se présente donc comme une base arrière idéale. La tâche des dirigeants maliens sera donc prioritairement de coordonner les efforts avec les pays d’Afrique du nord déjà bien imprégnés du problème. Avec la crise touarègue, cette option de la coopération régionale a donné des résultats significatifs. Sans doute faut-il appliquer les mêmes préceptes pour enrayer le phénomène naissant du terrorisme au Mali. Le pays a besoin de sécurité sur l’ensemble de son territoire pour s’atteler à l’oeuvre de construction nationale. Il faudra l’y aider.

"Le Pays

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