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Solidarité et professionnalisme des journalistes : Eviter le mariage dans le mal

Publié le lundi 22 octobre 2007 à 07h11min

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Le Centre national de presse Norbert Zongo (CNP/NZ) a organisé le 20 octobre dernier un panel sur le thème "Solidarité et professionnalisme des journalistes burkinabè". C’était dans le cadre de la commémoration de la journée nationale de la liberté de la presse, qui a lieu chaque année à cette date.

Le panel a été animé par d’éminentes personnalités du monde des médias, en l’occurrence Luc Adolphe Tiao, président du Conseil supérieur de la communication (CSC), le Professeur Serge Théophile Balima, directeur du Centre africain d’études et de recherche sur les médias (CERAM), et Hervé Kam, magistrat.

"Solidarité et professionnalisme des journalistes burkinabè". Ce sujet jugé de controverse pour les journalistes a été retenu cette année par le comité d’organisation de la journée nationale de la liberté de la presse. Selon Justin Coulibaly, membre du comité de pilotage du CNP/NZ, c’est la récente affaire concernant L’Événement et qui a fait la Une de certains journaux de la place, qui a suscité le choix de ce thème. S’est ajouté à cela le fait que nombreux sont ceux qui se disent indignés par le comportement de la télévision nationale lors de la commémoration du 15 octobre dernier.

En premier lieu, le président du CSC, Luc Adolphe Tiao, a soutenu que la solidarité et le professionnalisme sont des valeurs qui tendent à s’effriter de nos jours au sein des hommes de média. Selon lui, jamais les pouvoirs politiques n’ont exercé autant d’influence sur les journalistes qu’aujourd’hui, à telle enseigne qu’on assiste à la prédominance d’un journalisme militant. Dans une telle situation, a-t-il soutenu, il est difficile que les journalistes soient solidaires entre eux. Le conférencier a également déploré la multitude d’associations de journalistes ainsi que l’absence d’une instance d’autorégulation au sein de la presse burkinabè, toutes choses qui contribuent à affaiblir l’esprit de confraternité tout autant que la qualité professionnelle. En ce qui concerne le professionnalisme, Luc Adolphe Tiao a fait comprendre que contrairement aux générations précédentes, où les journalistes étaient en général issus d’écoles de formation, le monde des médias est de nos jours si ouvert qu’on y rencontre toutes sortes de personnes. Pour lui, certaines parmi elles exercent le métier sans formation et cela entame également la solidarité au sein de la corporation, a-t-il fait remarquer.

Pour sa part, le Pr. Serge Théophile Balima s’est dit d’avis avec le président du CSC que l’entrée dans la profession doit être filtrée. Mais comment ? s’est-il interrogé. Le métier lui-même se voulant ouvert, il faut la diversité, a-t-il soutenu. Pour lui, cette diversité au sein du corps est a priori un avantage. Mais aussi un problème, cette ouverture permettant à n’importe qui de s’autoproclamer journaliste sans pour autant en avoir les qualités. C’est ainsi qu’il a cité l’exemple du Bénin où on enregistre plus de 3500 journalistes déclarés. La position du Professeur ne souffre d’aucune ambiguïté : n’est pas journaliste professionnel qui veut. Aussi, selon lui, le journalisme professionnel suppose forcément que l’action du journaliste se déroule nécessairement dans "l’orbite du droit et de la morale". De même, a-t-il lancé, qui se dit professionnel doit se légitimer aux yeux du public. Le Pr Balima trouve d’ailleurs que leur solidarité dépend forcément du professionnalisme dont font preuve les journalistes. L’existence de la solidarité, a-t-il soutenu, dépend d’abord de l’action journalistique, individuelle puis collective : l’éthique individuelle des journalistes vis-à-vis de la morale professionnelle. Pour le Pr Serge Théophile Balima, pour que les journalistes burkinabè soient solidaires, il faudrait que les uns et les autres s’accordent sur "une grammaire du journalisme". Pour ce faire, selon toujours le professeur, il faut le respect des principes de valeur que sont : la démocratie, la justice sociale, la défense des droits humains, ainsi que celle de la liberté d’expression et d’opinion.

La défense de la liberté d’expression, de la démocratie ainsi que des droits humains, ce sont les critères que le juriste Hervé Kam a retenus pour détecter le journaliste professionnel. Si, selon lui, le journaliste exerce une mission de service public, ce sont les journalistes qui font le premier pouvoir, et les hommes d’Etat tels que Sarkozy et Nixon en savent quelque chose, dixit Hervé Kam. C’est pourquoi, a ajouté le juriste, le professionnalisme impose aussi au journaliste, la narration de la vérité. Tout comme le Professeur Serge Théophile Balima, Hervé Kam déduit que le professionnalisme et la solidarité au sein du corps journalistique font bon ménage. Mais il prévient : il faut éviter qu’ils se marient dans le mal.

Pour conclure, le président du CSC a soutenu que la solidarité entre les journalistes burkinabè est difficile, sans une meilleure organisation. Toutefois, si pour M. Tiao, les rivalités d’autrefois étaient uniquement des divergences entre écoles, pour le Professeur Serge Théophile Balima, "la profession est victime des antécédents historiques entre les professionnels". Mais les deux hommes s’accordent au moins sur un fait : il faut nécessairement une instance d’autorégulation, car dira le Professeur Balima, il manque en fait un leadership dans le milieu de la presse burkinabè.

Par Lassina SANOU

Le Pays

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