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Gouvernement Tertius Zongo : Fini l’état de grâce

Publié le vendredi 7 septembre 2007 à 08h09min

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(Ph. L. Bazié)Après un petit mois de vacances diversement vécu par les uns et les autres, Tertius Zongo, Premier ministre depuis à peine 3 mois, et son équipe au grand complet viennent d’effectuer leur rentrée. S’agit-il seulement d’une rentrée dans le temps, ou plutôt d’une rentrée politique qui suppose une nouvelle volonté politique, de nouveaux engagements pour l’atteinte de nouveaux objectifs ?

Ce qui est sûr, c’est que Tertius Zongo et son gouvernement viennent enfin de ... vouloir commencer : aux défis classiques s’ajoutent d’autres plus ou moins prévisibles ou prévus, notamment ceux liés à la pluviométrie et à ses conséquences mi-figue, mi- raisin sur les récoltes prévisionnelles et sur les populations rurales, notamment. Inondations par- ci, dégâts matériels et pertes en vie humaine par-là.

Tel un père soucieux de trouver la meilleure école à son enfant avant la rentrée elle-même, le Premier ministre Zongo aura passé ses trois premiers mois à la Primature à chercher, écouter, voir, interroger, visiter et connaître les dispositifs, les réalités, voire les forces et faiblesses du chantier dont il a désormais la charge de poursuivre la construction.

Maintenant qu’il connaît tout, qu’il s’est ressourcé auprès des siens nationaux, régionaux et familiaux et a demandé, et certainement obtenu, des bénédictions de toutes parts, il lui reste à aller au charbon. Et le maçon se jugeant au pied du mur, c’est désormais plus à la tâche qu’aux discours et autres déclarations que M. Zongo sera jugé. En un mot, l’état de grâce est fini pour lui. Si l’on en croit ses ministres lors de la rentrée gouvernementale, le Premier ministre aura du pain sur la planche. Tous affirment avoir des dossiers aussi brûlants les uns que les autres à gérer. Ce qui, en soi, est une lapalissade (sinon ils ne seraient pas là !). Reste maintenant à savoir s’ils auront les moyens et la volonté politique de les réaliser jusqu’au bout, jusqu’à la prochaine rentrée en 2008. Et c’est là, toute la difficulté.

Il y a, pour commencer, le vieux et éternel problème du budget et des lois de finances qui, et pour cause, relèvent de la haute autorité du Président du Faso et de son Premier ministre, et sont particulièrement dépendants des paramètres qui ne relèvent pas toujours d’eux, ni de leur volonté : le contexte international, le poids et la nature de la dette, la détérioration des termes de l’échange, les questions liées à la nature et à l’environnement, etc. Puis seulement vient la kyrielle de défis plus ou moins récurrents, plus ou moins nouveaux qu’il va falloir relever au plus vite. La lutte contre la pauvreté doit cesser d’être cet épouvantail, cette hydre à mille têtes, ce slogan creux évoqué tantôt pour faire peur, tantôt pour justifier une gestion budgétaire et économique contestable, tantôt encore pour expliquer les insuffisances politiques et l’absence d’engagement et d’initiatives. Comment faire pour que la lutte contre la pauvreté ne serve pas à enrichir impunément une minorité tout en appauvrissant davantage une majorité de plus en plus écrasante ? On attend de voir, à ce sujet, quelle sera la politique "zongoienne" du développement à l’aune de laquelle il travaillera et fera travailler ses collaborateurs.

Des dossiers "subsidiaires" ne sont pas moins urgents à traiter et les syndicats sont à l’affût en attendant l’ouverture annoncée des négociations pour apprécier les mesures prises ou à prendre, les actes posés ou à poser pour lutter contre "la vie chère" et la répartition équitable des fruits de la croissance, pour garantir les libertés syndicales et garder dans les limites supportables les prix des denrées de grande consommation (pain, hydrocarbures...) et des prestations sociales (frais de santé, d’éducation...). La gratuité absolue des manuels scolaires est annoncée avec emphase, mais saura-t-elle résoudre, à elle seule, la question de la gratuité de l’éducation dans notre pays ?

Et la question de l’emploi des jeunes diplômés ou à former. L’Etat reste et demeure le principal employeur dans le pays, et la politique de privatisation est loin d’être efficace pour résoudre l’endémique problème du chômage. Les inondations constituent, certes, des dossiers inattendus, mais la seule intervention de la coopération internationale ne suffira pas à assister les populations à se reconstruire des logements fiables qui résistent aux prochaines inondations. Et même si les récoltes venaient à être globalement excédentaires, comme on le prévoit, il reste que plusieurs familles se retrouveront sans rien à récolter.

On connaît désormais les risques qui pèsent sur le coton et les établissements industriels qui dépendent de la filière (huileries, usines textiles...) Tertius Zongo a-t-il prévu des solutions viables pour les producteurs nationaux ? Aura-t-il les moyens de sauver l’or blanc du Burkina de sa descente aux enfers ? Parviendra-t-il à assainir la gestion des sociétés d’Etat, comme il l’a annoncé lui-même ? Pourra-t-il lutter, avec plus d’efficacité, contre l’impunité, la corruption et les détournements, toutes choses qui handicapent notre développement ? Peut-être que le discours sur l’état de la nation qu’il prononcera bientôt devant l’Assemblée nationale nous donnera la mesure de la force de l’engagement de l’enfant prodige du Sanguié.

Le Pays

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