LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Vous n’empêcherez pas les oiseaux de malheur de survoler votre têtе, mаis vοus рοuvеz lеs еmрêсhеz dе niсhеr dаns vοs сhеvеux.” Proverbe chinois

Résolution de la crise ivoirienne : L’Afrique réduit les pouvoirs de Gbagbo

Publié le vendredi 20 octobre 2006 à 07h42min

PARTAGER :                          

Réunis dans la capitale éthiopienne, au siège de la commission de l’Union africaine, les chefs d’Etat africains membres du conseil de paix et de sécurité, au rang duquel le président Blaise Compaoré, ont souhaité une réduction, par l’ONU, des pouvoirs du président Gbagbo, au profit du Premier ministre Charles Konan Banny, afin de favoriser le retour de la paix en Côte d’ Ivoire, en l’espace d’un an...

Salle de conférence de l’Union africaine, sise à Addis-Abeba, capitale de l’Ethiopie. Il est environ 22h00, temps local, ce mardi 17 octobre 2006... Le président Dénis Sassou Nguésso du Congo, au nom de ses pairs, l’air fatigué, voire préoccupé, mais à l’allure déterminée, rend publiques, les décisions du long huis clos , que viennent d’avoir les 15 pays membres du conseil de sécurité de l’Union africaine...

Toute phraséologie diplomatique mise à part, il en ressort que les chefs d’Etat ont décidé de mettre fin à la médiation en Côte d’Ivoire, du président sud africain Thabo Mbéki, au profit de celui du président de l’Union africaine, M. Sassou Nguésso. Prenant note des recommandations de la CEDEAO, ils ont, dans cette lancée de changement dans les stratégies de gestion de la crise ivoirienne, décidé qu’une nouvelle période de transition de douze (12) mois soit engagée dans ce pays. Et cela, à compter du 1er novembre 2006, pour parachever cinq (5) tâches. L’identification et la confection de la liste électorale. La restructuration des forces de défense et de sécurité. Le démantèlement des milices. La restauration de l’Etat de Côte d’Ivoire.

Et les préparatifs techniques des élections libres et démocratiques. Durant cette période, pour éviter les couacs connus jusque-là dans la gestion au quotidien de l’Etat de Côte d’Ivoire, sur les sentiers d’un retour à la paix, les 15 sont convenus de laisser au président Gbagbo, son titre de “ chef de l’Etat ”. Mais, ils ont surtout marqué leur volonté de donner les leviers de commandement de l’Etat de Côte d’Ivoire au Premier ministre Charles Konan Banny.

A celui-ci, revient, en droit, la gestion du désarmement des différentes forces armées, le processus d’identification de tous les Ivoiriens, le démantèlement des milices, la restauration de l’autorité de l’Etat sur toute l’étendue du pays, le management des questions électorales, le redéploiement de l’administration et des services publics sur l’ensemble des quatre (4) points cardinaux qui fonde la République de Côte d’Ivoire.

Et ce n’est pas tout... Au Premier ministre Banny, revient également l’autorité sur les forces intégrées de défense et de sécurité, ainsi que sur le gouvernement. Et pour ce faire, il lui a été donné droit, par la jurisprudence internationale en cours d’adoption à travers les canaux de la CEDEAO, de l’UA et in fine des Nations unies, de légiférer, par ordonnances ou décrets-lois, quand il en ressent le besoin ou la nécessité, lors des conseils de ministres.

Et cela, malgré la non suspension de la constitution et le maintien du chef de l’Etat, M. Laurent Koudou Gbagbo, à son poste. Evidemment et pour lui permettre de travailler “en toute sérénité républicaine et sans calculs nombrilistes ”, l’Union africaine, à travers les 15 de son conseil de sécurité, réaffirme que le Premier ministre Konan Banny est interdit de candidature pour la présidentielle d’octobre 2007.

Des élections qu’il est appelé à organiser (forcément) en bonne intelligence avec le Haut représentant pour les élections en Côte d’Ivoire, nommé par les Nations unies. L’organisation mondiale a d’ailleurs été appelé à sanctionner négativement, avec vigueur, tous ceux qui en Côte d’Ivoire ou ailleurs, se feront remarquer par la parole ou l’acte, comme des fossoyeurs de la dynamique d’un retour de la paix en Côte d’Ivoire.

Au plan sécuritaire, le conseil a maintenu sa confiance aux forces impartiales (qu’elles soient françaises ou de l’ONU) et appelé à leur renforcement. Cette somme de volonté pour la paix au pays de feu Félix Houphouët Boigny, a pris à contre-pied, l’essentiel du schéma du président Gbagbo. Au cœur du huis clos où il a été seulement appelé pour « son mémoire en défense » de 14 pages, nos informations affirment qu’il a plutôt sollicité le renvoi de Charles Ko nan Banny et de son équipe du gouvernement.

Demandé la condamnation de Guillaume Soro et des siens, appelé à un désarmement de gré ou de force des Forces nouvelles ( “ ex rebelles ”). Voulu le départ des forces françaises et de celles de l’ONU de la “ Zone dite de confiance ”, le maintien de Thabo M’béki comme médiateur malgré sa récusation de ce dernier par une partie des acteurs de la crise ivoirienne.

Au total, le chef de l’Etat ivoirien a demandé la prégnance des “ visions gbagboïstes ” pour un retour de la paix en Côte d’Ivoire . En tous les cas, le conseil de paix et de sécurité, consacré à la quête d’un retour à la paix en Côte d’Ivoire, a refermé ses portes sur une nébuleuse d’impressions générales, de questions. L’histoire quotidienne de la Côte d’Ivoire va y répondre, sans doute ... Que fera le Conseil de sécurité sous les prismes des décisions africaines. Comment réagiront Laurent Koudou Gbagbo et ses hommes de main, face à la douche froide de Addis-Abeba.

Le banquier de la tour d’ivoire de Dakar, M. Charles Konan Banny, a-t-il de la poigne pour assumer sa nouvelle mission ? Quelles attitudes nous réservent et le camp des “ ex rebelles ” et celui de l’opposition démocratique civile ?
La Côte d’Ivoire et l’Afrique ont, elles, fait un pas en arrière ou plutôt en avant, à travers la rencontre d’Addis-Abeba ? Pour résoudre une telle crise, peut-on tricher avec l’histoire ... ?

Ibrahiman SAKANDE (iibra.sak@caramail.com)
(Envoyé Spécial au Sommet d’Addis Abeba)


Ce qu’ils en disent...

Pierre Schori, Représentant spécial du secrétaire général des Nations unies en Côte d’Ivoire : Je salue la volonté et la détermination des leaders africains qui se sont penchés, avec courage, sur un des grands maux qui minent le continent africain ces dernières années : la crise ivoirienne... Cela, à travers deux sommets extraordinaires, en l’espace d’un mois. Des rencontres qui ont le mérite d’avoir “ accouché ” d’accords négociés et consensuels, donc solides.

Cette donne va bientôt être étudiée par le Conseil de sécurité avec sérénité, afin de la traduire en résolution. Je suis positivement impressionné par la dynamique africaine, au regard de la guerre des Balkans où, les leaders européens n’ont pas, à temps, su prendre les décisions pour éviter le pire que cette partie du monde a connu ! Il reste à appliquer tout ce modus vivendi pour un retour de la paix en Côte d’Ivoire...

Il est important à cette phase que les leaders politiques ivoiriens, à travers leurs faits et gestes, travaillent en faveur de la lettre et de l’esprit des décisions d’Abuja et d’Addis-Abeba auxquelles ils ont été associés activement.

Il n’y a pas d’autres chemins à suivre pour les leaders ivoiriens. Il y a tellement de souffrances en Côte d’Ivoire et dans le reste du monde, au sujet de la crise ivoirienne, qu’il leur faut s’employer, ipso facto, emprunter le chemin de la paix, employer les ressources humaines et matérielles de ce pays à cet effet. Dans les prochains jours, le Conseil de sécurité des Nations unies s’emploiera, en tous les cas, à les y accompagner.

Youssouf Ouédraogo, ministre d’Etat, ministre des Affaires étrangères et de la Coopération régionale : Les recommandations du sommet extraordinaire de la CEDEAO, le 6 octobre dernier, au sujet de la crise ivoirienne, ont été entérinées au cours de la présente session du conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine. Ce qui veut dire que l’architecture continentale de paix et de sécurité, qu’est en train de bâtir l’Union africaine fonctionne bien. Elle repose sur la capacité des entités sous régionales à élaborer des solutions, sur les dossiers qui font l’Afrique d’aujourd’hui, avec le “ maximum de proximité ”...

Et de se référer par la suite, à la structure continentale (l’UA) pour décision. La nouvelle donne ivoirienne, à la suite des travaux d’Adis-Abeba, va permettre aux Nations unies de traduire en résolutions, les décisions de l’Union africaine, pour indiquer concrètement à chacun des acteurs du processus de retour de la paix en Côte d’Ivoire, où commencent et où s’arrêtent ses prérogatives, ses droits et devoirs...

Le Burkina Faso à travers le président Compaoré qui, avec le président Abdoulaye Wade du Sénégal, a représenté la volonté ouest africaine d’aider les frères de Côte d’Ivoire à se réconcilier, y a joué un grand rôle d’acteur de la paix. Ce qui montre qu’il y a une grande confiance, une belle solidarité d’action, au sein du leadership de la CEDEAO, dans la quête d’un retour de la paix en Côte d’Ivoire. Il convient de s’en féliciter...

Interviews réalisées par Ibrahiman SAKANDE
-------------
Dans les coulisses : Bientôt un président de la commission de la CEDEAO

Entendu lors du sommet, le secrétaire Exécutif de la CEDEAO, Dr. Mohamed Ibn Chambas, devrait bientôt, à l’image de ses collègues de l’UEMOA, voire de l’Union africaine, porter le titre de Président de la commission de la CEDEAO.
Cela participerait de la volonté de cette instance régionale ouest africaine de renforcer sa prégnance sur les actions de conceptualisation et de supervision des politiques communautaires solidaires de cette partie du continent.

* Boycott camerounais ?

Paul Biya boycotte-t-il le conseil de paix et de sécurité ou la crise ivoirienne ? C’est là, une des questions cornéliennes qui fusaient lors du sommet, dans le paysage des journalistes africains. En effet, le Cameroun assure actuellement la présidence mensuelle tournante du conseil de paix et de sécurité.

Donc son président, M. Biya aurait pu accueillir le sommet ou à défaut, se déplacer à Addis-Abeba...
Mais tel ne fut pas le cas. Il y a été représenté par son ministre des Affaires étrangères ; laissant donc le soin au président de la conférence des chefs d’Etat, le Congolais Dénis Sassou N’guésso, de gérer (...) le “ brûlot ” ivoirien.

*Pauvre Laurent Koudou Gbagbo...

Adepte des grands rires aux éclats, même pendant les temps dures, le chef de l’Etat ivoirien malgré le déploiement d’une grosse stratégie de communication à la rencontre d’Addis- Abeba, en a été sevré, dès après l’ouverture du sommet.
On le sentait visage fermé, peu sûr d’être suivi par ses pairs, qui n’ont d’ailleurs pas manqué de « s’inscrire en faux vis-à-vis de sa longue intervention de 14 pages »...

*Blaise Compaoré au Tchad

Juste après le sommet, le président du Faso et sa délégation ont fait une halte d’amitié à N’djaména, la capitale tchadienne le mercredi 18 octobre 2006. A cette occasion, Compaoré et Déby ont eu un huis clos consacré aux questions bilatérales, à l’actualité africaine et internationale, mais aussi et surtout, au processus de paix engagé à Addis-Abeba pour la Côte d’Ivoire. C’est dans les infrastructures new look du salon présidentiel de l’aéroport de N’djamena qu’a eu lieu cette rencontre. Dans ce nouveau pays pétrolier africain, l’avion de commandement du président du Faso a profité pour faire le plein de carburant.

* Fortes odeurs de corruption de “l’Afrique d’en haut”

Canular ou pas, certains chefs d’Etat africains, et pas des moindres, sont de plus en plus taxés par nos informations, de rouler pour Laurent Koudou Gbagbo, pas par conviction , mais par devoir : ils se seraient laissés mouiller la barbe...

On parle ainsi de ce président africain qui, face à ses opposants, ô de taille, aurait instamment besoin d’argent, de beaucoup d’argent, pour financer sa probable prochaine campagne présidentielle... Décidément ( !) ..., argent, quand tu nous tiens !

Rassemblées par I. SAKANDE
----------------
Qu’est ce que le conseil de paix et de sécurité ?

Composé de 15 pays membres, ayant des droits égaux et élus pour 2 ans (10) et 3 ans (5), le conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine est un organe de décision permanent pour la prévention, la gestion et le règlement des conflits.

Il constitue un système de sécurité collective et d’alerte rapide, visant à permettre une réaction rapide et efficace aux situations de conflit et de crise en Afrique.
Il dispose à cet effet, d’un fonds spécial, d’un groupe de sages et de forces pré- positionnées. Il est appuyé par la commission de l’Union africaine.

Ses membres actuels sont l’Algérie, le Botswana, le Burkina Faso, le Cameroun, le Congo (Brazzaville), l’Egypte, l’Ethiopie, le Gabon, le Ghana, la Malawi, le Nigeria, le Rwanda, le Sénégal, l’Afrique du sud et l’Ouganda.

I. SAKANDE

Sidwaya

PARTAGER :                              
 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique