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ONU : Les réformes inachevées de Kofi Annan

Publié le mardi 10 octobre 2006 à 09h08min

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Kofi Annan

Kofi Annan quitte la tête de l’Organisation des Nations unies en fin décembre 2006 alors que l’institution est toujours en butte à de nombreux fléaux comme les guerres, les maladies et les actes terroristes à travers le monde. Toutefois, le diplomate africain a, en dix ans, insufflé une dynamique à l’ONU par ses réformes et son refus de cautionner ce qu’il estime aller contre la Charte de l’ONU.

A partir du 1er janvier 2007, on ne reverra peut-être plus dans les locaux du palais de verres, le « black » à l’allure timide, aux cheveux blancs et au regard toujours chargé d’émotions. Kofi Annan va quitter la tête du « navire » à polémiques. Ce sera donc la fin d’une carrière débutée en 1962.

En effet, il a intégré l’Organisation des Nations unis, cette année-là comme fonctionnaire de l’administration mondiale de la santé à Genève. Depuis, il a été en poste à la commission économique des Nations unies pour l’Afrique à Addis Abeba. Il a ensuite servi à la Force d’urgence des Nations unies (FUNU II) à Ismaïlia en Egypte.

Puis, il s’est de nouveau retrouvé à Genève au Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés. De 1987 à 1990, M. Annan est sous- secrétaire général à la gestion des ressources humaines et coordonnateur des Nations unies pour les questions de sécurité. En 1990, suite à l’invasion du Koweït par l’Irak, le Ghanéen a pour mission spéciale, le rapatriement de plus de 900 fonctionnaires internationaux et ressortissants de pays occidentaux de l’Irak.

Après cette mission, il est sous- secrétaire général à la planification des programmes, au budget et à la comptabilité, puis contrôleur de 1990-1992. Il a également rempli les fonctions de sous secrétaire-général (mars 1992 février 1993) et de secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix (mars 1993-décembre 1996).

Cette riche carrière le consacre le 1er janvier 1997 au poste de secrétaire général de l’ONU. Il est ainsi le septième mais le premier à sortir des rangs du personnel de l’institution. Le 29 juin 2001, sur recommandation du Conseil de sécurité, l’Assemblée générale l’a réélu par acclamation. Il rempile ainsi pour son deuxième mandat (1er janvier 2001-31 décembre 2006).

Durant dix années au poste de secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan a voulu comme il l’a annoncé à son arrivée, revitaliser « la maison » par un programme complet de réformes. Ceci, par le renforcement de l’action de l’ONU dans les domaines du développement, du maintien de la paix et de la sécurité internationale.

Aussi Annan s’est engagé à défendre les droits de l’homme et à partager le respect et la légalité. Il veut aussi lutter pour les valeurs universelles d’égalité, de tolérance, de dignité figurant dans la charge des Nations unies. Le diplomate africain a aussi à cœur de rétablir la confiance entre l’opinion publique et l’organisation.
Pour atteindre ses objectifs, le premier « Black » à la tête de l’ONU adopte sa propre stratégie. L’une des premières initiatives du secrétaire général est son plan de réformes intitulé « rénover les Nations unies » présenté aux Etats membres en juillet 1997.

Ce plan met l’accent sur l’amélioration de la cohérence et de la coordination de l’action de l’ONU. Dans la même lancée, il présente en avril 1998 un rapport au Conseil de sécurité dénommé « Les causes des conflits et la promotion de la paix et d’un développement durable en Afrique », le continent le plus désavantagé a remarqué le Ghanéen né à Koumassi en 1938 et économiste de formation (une maîtrise en sciences de gestion et un diplôme de 3e cycle en économie).

En avril 2000, il publie son rapport sur le millénaire intitulé « Nous les peuples : le rôle des Nations au XXIe siècle ». Il y invite les peuples à s’engager en faveur d’un plan d’action pour l’élimination de la pauvreté et de l’inégalité.

Cet économiste sait aussi écrire

L’amélioration de l’éducation, la santé... sont évoquées. C’est de ce rapport que s’est inspirée la déclaration du millénaire adoptée par les chefs d’Etat et de gouvernement au Sommet du millénaire tenu en septembre 2000. La deuxième publication de M. Annan en avril 2001 est « Appel à l’action » dont cinq points pour venir à bout du VIH/Sida, ceci, par la création d’un fonds mondial Sida, surtout pour soutenir les pays sous-développés.
Outre l’écrit, M. Annan a aussi profité de l’anglais, du français... qu’il parle couramment, pour faire passer ses plaidoyers.

Le sport, notamment le football, le langage universel ne sont pas en reste
car pour cet homme marié, père de trois enfants, cette discipline est un des meilleurs moyens de diffuser dans le monde, des images de non-violence, de tolérance et de paix. Toutefois, malgré toute sa détermination, plusieurs millions de personnes sont mortes sous ses deux mandats (de 10 ans) et les conflits continuent de déchirer le monde : Irak, Timor Oriental...

L’Afrique quant à elle est un véritable nid de tensions à commencer par l’Ethiopie qui abrite le siège de l’Union africaine. Aussi, l’ONU est confrontée à la course à l’arme nucléaire.

L’Irak a déjà subi les conséquences, l’Iran et la Corée du Nord sont sous les « sunlight » de la communauté internationale. Aussi, après les attentats du 11 septembre, le monde est entré dans une crise identitaire où les « longues barbes » ne passent plus inaperçues et le moindre propos à connotation religieuse donne lieu à des polémiques voire à des imbroglios diplomatiques.

Pire, les menaces terroristes planent dans tous les recoins de la terre, dans un monde où les exportations d’armes en 2001 sont estimées à environ 840 milliards de dollars. En plus des guerres, plus d’un milliard de personnes vivent avec la faim et des dizaines de millions, de malades du VIH/Sida n’ont pas de soins appropriés. Le paludisme quant à lui, continue de décimer les populations des tropiques.

Tout ceci dans un monde qui voit naître des murs après la chute de celui de Berlin en 1990, faussant ainsi la globalisation, nouveau concept apparu comme un couperet à la gorge des pays en développement. C’est dans ce monde déséquilibré que Kofi Annan a dû piloter des opérations pétrole contre nourriture en Irak et assister impuissant au génocide rwandais (environ un million de morts).

Que dire des massacres de Sebrenista où aujourd’hui des médecins déplorent l’utilisation de l’uranium appauvri par l’OTAN dans la région. En tout cas, l’impuissance de l’ONU dans certains conflits démontre clairement qu’elle a perdu de sa crédibilité mais Kofi Annan a tout de même eu du cran.

Il a su dire non quand il le fallait et les USA (le premier bailleur de fonds de l’institution) n’ont pas attaqué l’Irak avec l’aval de l’ONU. Pour une des rares fois, le monde entier fait la différence entre USA et ONU. Aussi, pour répondre aux divisions croissantes entre le monde musulman et l’Occident, M. Annan a créé un groupe de sages très actif. Il a aussi appelé la communauté internationale à une réforme du Conseil de sécurité pour l’adapter au nouveau monde.

Pour ces efforts de paix, le diplomate ghanéen a reçu le prix Nobel de la paix le 10 décembre 2001. Cependant, Annan reste conscient que la réforme n’est pas achevée, et il y a encore du travail à abattre. C’est pourquoi, lors de son dernier discours devant les 192 Etats membres de l’ONU, M. Annan, les larmes aux yeux, a confessé, « Nous sommes confrontés à un monde dont les divisions menacent la notion même de communauté internationale sur laquelle l’institution repose ».

Hamadou TOURE (hatoure@yahoo.fr)

Sidwaya

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