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Parti africain de l’indépendance : Regard rétrospectif sur 43 ans de vie

Publié le vendredi 18 août 2006 à 07h58min

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Philippe Ouédraogo

Après 43 ans de vie, dont 28 dans la clandestinité, le Parti africain de l’indépendance (PAI) de Philippe Ouédraogo fait son bilan. Dans ce message qui suit que nous vous proposons in extenso, vous découvrirez la vie du parti et ses ambitions.

Déclaration du Parti africain de l’indépendance à l’occasion de son 43ème anniversaire

Il y a 43 ans, le 15 août 1963 naissait à Ouagadougou, le Parti africain de l’indépendance (PAI) de Haute-Volta, à l’initiative de feu Adiouma Amirou Thiombiano et des autres fondateurs de ce parti. En se fondant sur la doctrine marxiste, le PAl se donnait pour ambition de rassembler dans la lutte les patriotes africains de Haute-Volta, afin de se débarrasser du néocolonialisme solidement installé, pour réaliser l’indépendance véritable, politique et économique du pays, pour construire une société socialiste et démocratique et réussir l’unité africaine.

Quarante trois (43) ans après la création du PAl, quelle est sa situation et quel bilan peut-on faire de l’évolution de la situation nationale ?

L’évolution du parti et sa situation actuelle

Restant dans la clandestinité pendant vingt-huit (28) ans, le PAl a d’abord lentement grandi et mûri, avant de s’affirmer comme une force politique incontournable. Durant cette longue phase, il a sans conteste, contribué à la naissance et au renforcement d’une prise de conscience politique des travailleurs, de la jeunesse, notamment de sa branche scolaire et estudiantine, sur la réalité de la situation nationale et internationale.

On lui doit l’engagement anti-impérialiste de la jeunesse urbaine et les débats suscités partout sur la question de la domination néocoloniale et les moyens pour notre pays d’être véritablement indépendant. Recourant à des stratégies variées allant de l’action en milieu de travailleurs à l’animation d’associations culturelles, le PAl s’est progressivement renforcé par le recrutement de militants patriotes et intègres, auxquels il s’efforçait d’apporter l’esprit de discipline et la rigueur de la doctrine et des méthodes marxistes.

Tous les mouvements populaires qui ont marqué l’histoire du pays jusqu’en 1991 portent témoignage de son activité dans la défense des libertés et des intérêts des travailleurs. Aucun des régimes d’exception qui se sont succédé depuis sa naissance n’a pu ignorer son existence, et nombre de leurs acteurs ont essayé de prendre langue avec quelques uns de ses dirigeants réels ou supposés, pour discuter des problèmes du pays et des moyens de les résoudre.

C’est avec le Conseil du Salut du Peuple (CSP) de 1982-83 et brièvement (1983-84), avec le Conseil national de la Révolution (CNR), que le parti a décidé la participation de quelques uns de ses militants à un gouvernement.

Depuis avril ]991, dans la perspective nouvelle d’un Etat démocratique, le PAl est devenu un parti légal. La légalisation du parti va entraîner certains militants de la période clandestine à démissionner officiellement ou tacitement, redoutant sans doute les conséquences pour eux-mêmes d’un engagement politique ouvert dans les rangs du PAl. Le PAl va connaître une première vague de démissions de mai à juillet 1993, orchestrée par les déçus de la non participation du PAl au premier gouvernement de la IVème République. La seconde crise du PAl est la crise de 1998, suite à la décision du Comité central extraordinaire du 18 septembre 1998 rejetant les deux propositions de Touré Soumane, élu depuis cent jours par le 7ème Congrès (30 et 31 mai 1998). Ces propositions étaient d’une part de quitter le Groupe du 14 février (GI4) dont le PAl était membre fondateur, et d’autre part, d’accompagner le candidat Blaise Compaoré par la candidature de Touré Soumane, à l’élection présidentielle du 15 novembre 1998. En outre, le Comité central avait pris acte de la démission de tout le bureau national du parti issu du 7ème congrès et mis en place une direction provisoire composée des membres d’honneur du parti, lesquels pouvaient s’adjoindre d’autres militants pour leur mission.

Le complot du pouvoir et du groupe de Touré Soumane contre le parti

Après son éviction de la direction du parti le 12 septembre 1998, Touré Soumane s’est mis à comploter contre le parti avec le soutien du gouvernement de la IVème République. Il a obtenu en octobre 1999 l’accord du ministre de l’Administration territoriale pour convoquer un congrès extraordinaire du parti pour le 4 décembre 1999, alors que les statuts du parti ne lui en donnaient plus le droit. Le ministre de l’Administration territoriale, pourtant prévenu par le bureau provisoire du PAl de ce que cette convocation se faisait en violation des statuts du PAl dont il avait copie, s’est empressé d’entériner les résultats de ce congrès, conférant illégalement ainsi à Touré Soumane le titre de « Secrétaire général du PAl « par un arrêté du 31 Janvier 2000 valant récépissé de reconnaissance du « bureau » issu de son congrès.

Les 5 et 6 Février 2000 se tenait le 2ème congrès extraordinaire du parti prévu par le Comité central du 18 septembre 1998, et dont le ministre de l’Administration territoriale avait été prévenu depuis décembre 1999. Le 22 février, l’ancien bureau provisoire et le bureau ainsi issu du 2ème congrès extraordinaire saisissaient la justice contre l’arrêté du ministre en date du 31 janvier 2000. Le 13 juillet 2000, le tribunal administratif annulait la décision du ministre. Refusant de s’incliner devant la justice, le ministre a fait appel de cette décision. Un an plus tard, le 29 juin 2001, la Chambre administrative de la Cour suprême confirmait la décision du Tribunal administratif. Le nouveau ministre de l’Administration territoriale (MATD) autorise à nouveau, par lettre du 1er août 2001, Touré Soumane à convoquer un congrès. Ce dernier se tient les 1er et 2 septembre 2001. En Septembre 2001, le PAl a attaqué la lettre du MATD. Ce dernier a, nouveau, donné au groupe de Touré Soumane, mais dans la plus grande discrétion, un récépissé de reconnaissance, daté du 5 Octobre 2001. Ce récépissé ne sera pas publié au Journal officiel. Informé de manière incidente de son existence en Février 2001, le PAl l’a attaqué devant le Tribunal administratif en Mars 2001. Pour débouter le PAl, ses adversaires ont imaginé et mis en œuvre un faux numéro du Journal officiel, daté du 13 Décembre 2001, et contenant l’arrêté valant récépissé. Avec cette supercherie, ils prétendent que la plainte du PAl contre l’arrêté du MATD aurait été déposée plus de deux mois après la publication par le « Journal Officiel » de l’arrêté, et serait donc irrecevable !

C’est seulement en Janvier 2005 que le Tribunal administratif examinera la plainte du PAl contre la lettre datée du 1er Août 2001 du MATD, et décidera l’annulation de cette lettre. C’est en Mai 2005 qu’il examinera la plainte contre le deuxième arrêté d’Octobre 2001 donné à Touré Soumane. Il rendra son délibéré le 30 Juin 2005, annulant ce deuxième arrêté et précisant explicitement que « Touré Soumane ayant démissionné de ses fonctions de Secrétaire général du PAl le 12 Septembre 1998, est devenu simple militant du PAl, et ne peut donc pas convoquer un congrès ». Comme à leur habitude, le MATD et le groupe de Touré Soumane ont fait appel de cette décision du Tribunal auprès du Conseil d’Etat, en Juillet et Août 2005. Mais le Conseil d’Etat ne paraît pas pressé de se prononcer.

La situation nationale actuelle et les tâches de notre parti

L’année 1998 a été une année singulière, non seulement pour le PAI, mais aussi pour tout le Burkina Faso. En Janvier 1998 mourrait David Ouédraogo, torturé affreusement par des membres de la garde présidentielle. Enquêtant sur ce meurtre, le journaliste Norbert Zongo et trois de ses compagnons seront assassinés le 13 décembre 1998 sur la route de Sapouy. Cet assassinat, révélant une des faces les plus hideuses du régime de la IVème République, celui du pouvoir absolu et de l’impunité, a impulsé la naissance et le développement du mouvement de masse le plus important du Burkina Faso, celui du Collectif contre l’impunité, dans lequel les partis politiques comme les organisations de la société civile luttant pour les libertés et la démocratie se sont retrouvés.

L’action du Collectif et ses justes revendications pour plus de justice, plus de liberté et la fin de l’impunité au Burkina ont reçu dans toutes les couches sociales à travers le pays, un écho immense et puissant. Seuls les larbins du pouvoir et les bénéficiaires du système de l’impunité voyaient d’un mauvais œil les manifestations du Collectif. Toutes les institutions de la République ont été sérieusement secouées durant la période 1998-2001 et ont été obligées d’accepter de se mettre en cause. Des réformes politiques et institutionnelles ont alors dues être menées, donnant plus de garanties de transparence à la gestion du pays et des compétitions électorales. Le juge d’instruction spécial nommé en Mai 1999 pour faire la lumière sur l’assassinat de Norbert Zongo et de ses compagnons, n’a inculpé qu’une seule personne en Février 2001, l’adjudant-chef Marcel Kafando, qui était le chef de la garde présidentielle au moment de l’assassinat. Mais le 18 Juillet 2006, il vient de prononcer à son endroit un non-lieu !

Ce non-lieu qui enlève tout espoir de voir la lumière un jour se faire sur le crime de Sapouy, souligne avec une cruauté brutale, que la justice au Burkina Faso est loin d’être indépendante, et que l’impunité continue d’y régner, dès lors que le pouvoir peut être concerné par un dossier en justice. Et cela doit préoccuper au plus haut point les militants du PAl, eux qui se sont donné pour vocation de lutter pour le triomphe de la justice et des libertés dans ce pays.

Tandis que les dirigeants du pouvoir s’auto-congratulent régulièrement et organisent de vastes campagnes de propagande à travers le pays autour de prétendues succès économiques, de lancement « de grands chantiers », dont personne hormis peut-être dans leur entourage ne ressent les effets, la vie continue à être « dure au Faso ». Le chômage s’accroît en même temps que la population active. La population active des zones urbaines ne trouve pas d’emplois, celle qui travaille a des difficultés de plus en plus grandes à couvrir ses besoins élémentaires. La population rurale se désole de la permanence de la sécheresse, des rendements décroissants et de la réduction des espaces de forêts. Sous prétexte de « faire participer » les usagers aux dépenses, l’Etat transfère allègrement les frais de santé, les frais de scolarisation, les amortissements des infrastructures de communication, etc. à la population. Parallèlement les prix des denrées, de carburant et des produits de première nécessité croissent sans mesure et sans limite.

La corruption est devenue aujourd’hui un phénomène envahissant des réalités politiques et économiques du Burkina Faso ! Peu de services de l’Etat lui échappent ! Aucune entreprise, aucun commerce ne peut fonctionner sans lui faire des concessions sérieuses ! Il est curieux qu’au lieu d’engager de front la lutte contre ce fléau qui pourrit notre administration, notre économie et notre société toute entière, le pouvoir se contente de multiplier les « institutions de lutte », sans leur donner les moyens de traquer la fraude et la corruption !

Pour changer tout cela et donner des perspectives réelles à notre peuple, le PAl propose au peuple burkinabè de changer radicalement de politique et de se donner de nouveaux dirigeants qui ont fait serment de ne travailler que pour les intérêts de notre peuple et du pays. A l’élection présidentielle de Novembre 2005, en alliance avec d’autres partis qui ont pris les mêmes engagements, le Secrétaire général du PAl a fait campagne pour une nouvelle politique plus soucieuse des besoins fondamentaux de la population, plus respectueuse de leurs préoccupations, plus responsable devant la nécessité de préparer l’avenir et de garantir aux générations futures des conditions plus sûres permettant de mieux affronter le monde tel qu’il est.

L’avenir de notre pays peut être différent et bien meilleur que ce que les dirigeants actuels de la IVème République préparent. Le PAl le proclame et s’inscrit dans le changement nécessaire pour cela !

Le changement de politique que le PAl propose, c’est celui qui permettra à notre pays et à notre peuple de s’assumer en toute responsabilité et de se donner des perspectives sûres et enthousiastes, en rapport avec nos ressources, nos potentialités, notre volonté et notre détermination à construire notre destin en le maîtrisant.

A l’occasion de son anniversaire, le PAl lance donc un appel à tous les patriotes conscients du pays à se démarquer de la politique actuelle et de ses méthodes corruptrices. Il lance un appel à tous ses militants afin qu’ils redoublent d’ardeur et de dynamisme, qu’ils acceptent tous les sacrifices nécessaires, pour élargir et renforcer les rangs du PAl, afin de donner à leur parti les moyens d’implanter sa présence et sa politique au sein de toutes les couches de la population.

Ouagadougou le 11 août 2006

Pour le Bureau Exécutif Central du PAI
Le Secrétaire général,
Philippe OUEDRAOGO

Sidwaya

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