LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Vous n’empêcherez pas les oiseaux de malheur de survoler votre têtе, mаis vοus рοuvеz lеs еmрêсhеz dе niсhеr dаns vοs сhеvеux.” Proverbe chinois

Report des élections municipales : Petite erreur aux grandes conséquences

Publié le samedi 18 février 2006 à 07h57min

PARTAGER :                          

Le ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, M. Clément Sawadogo, avait déclaré à la presse à la fin de la concertation entre le gouvernement et la classe politique lundi dernier, qu’une décision n’avait pas encore été prise pour ou contre le report des élections municipales. La soixantaine de partis qui ont déposé leurs listes de candidats sont également partagés sur la question.

A moins d’un mois de la date du 12 mars retenue après un premier report, cela fait un peu désordre. Le report désormais acquis pour le 23 avril, ceux qui étaient contre, doivent contre mauvaise fortune faire bon cœur. Néanmoins comment l’Exécutif et la Commission électorale nationale indépendante (CENI) ont-ils pu manquer de vigilance à ce point ? Du coup, c’est le Rassemblement politique nouveau (RPN) qui boit du petit lait, lui qui a levé le lièvre de l’irrégularité juridique dans laquelle évoluent les démembrements de la CENI. Une petite erreur aux graves conséquences.

En effet, c’est ni plus ni moins la crédibilité du processus démocratique qui est en jeu. L’Etat de droit commande d’agir selon la règle de droit et suivant le sacro saint principe de la séparation des pouvoirs. Dès lors, il est totalement exclu qu’un acte républicain d’une aussi grande importance que l’organisation d’un scrutin au suffrage direct sur toute l’étendue du territoire national, puisse se tenir sur des bases juridiques caduques.

C’est pourquoi, toute la classe politique mais aussi l’Exécutif et les autres institutions de la république devraient dire un grand merci aux responsable du RPN pour la pertinence de sa requête auprès du Conseil constitutionnel. Imaginons un tant soit peu ce qui se serait passé si c’est au soir de la proclamation des résultats provisoires des municipales que leur validité était remise en cause pour avoir été organisés par des démembrements sans mandat légal ?

Le Conseil constitutionnel pris au piège de la loi, notamment l’article 34 du code électoral qui met fin au mandat des démembrements de la CENI après la proclamation des résultats définitifs de la présidentielle, aurait été obligée d’invalider le scrutin. La suite se devine aisément. Un vrai tollé général, suivi des récriminations des vainqueurs du scrutin qui se verraient flouer d’une victoire. Mieux vaut tard que jamais !

On peut même se féliciter de "l’heureuse faute" de la Commission électorale indépendante de l’arrondissement de Bogodogo qui, par son refus de réceptionner le dossier des candidatures du RPN, a occasionné la requête salutaire auprès du Conseil constitutionnel. "Heureuse faute" car la République peut encore sauver les meubles. Ce second report est assurément le moindre mal. Les sommes déjà investies par l’Etat et les partis prenant part à ces municipales n’auront pas été dépensées pour rien. En vérité, tout le monde a failli. Aussi bien le parti au pouvoir et ses alliés que les partis d’opposition toutes tendances confondues. L’Etat aussi par le biais de ses institutions a manqué de vigilance.

Mais dans cette responsabilité collective, la direction de la CENI est plus coupable que quiconque. Elle ne manque pas de personnel compétent, notamment des juristes confirmés qui auraient pu éviter cette erreur devenue embarrassantes. Du coup, voilà tout le monde engagé dans une course pour rattraper une bévue que les fonctionnaires de la CENI sont grassement payés pour ne pas qu’elle survienne. C’est une faillite qui demande une révision du fonctionnement de la CENI pour éviter qu’elle ne devienne un gouffre à sous qui manque d’efficacité.

Djibril TOURE
L’Hebdo

PARTAGER :                              
 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique