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Liberia : Entre doutes et espoirs

Publié le mardi 15 novembre 2005 à 09h02min

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L’élection présidentielle libérienne est chargée de symboles. Election de
rupture avec des années de braise, elle consacre, en même temps,
l’avènement, à la magistrature suprême, d’une femme, Ellen Johnson Sirleaf.
Une première sur le continent, où les femmes, surtout les plus méritantes,
n’ont pas toujours voix au chapitre.

La future présidente du Liberia, au-delà
de son statut de femme, est d’abord une battante qui a su faire ses preuves
sur le terrain.

Depuis toujours, elle n’a jamais craint de se battre pour
l’avènement de l’Etat de droit dans son pays, face à des seigneurs de guerre
qui ne connaissaient que le langage des armes. Elle mérite donc sa victoire.
Il faut maintenant souhaiter que son principal challenger, George Weah,
reconnaisse le choix du peuple et qu’en bon démocrate, il l’accepte. Son
score n’est nullement ridicule, au regard de sa virginité politique qui, à bien
des égards, a pu constituer un handicap.

Sans oublier la qualité, quelquefois
douteuse, de son entourage politique fait entre autres d’ex-rebelles toujours
vindicatifs. Le bon sens veut donc que Weah, qui a l’avantage d’être jeune,
ronge ses freins et étoffe mieux sa carrure de dirigeant politique et d’homme
d’Etat pour les années à venir. Une victoire, dès lors, ne sera plus perçue
comme incongrue, voire trop facile comme cela aurait pu être le cas avec
l’élection du 11 octobre dernier.

Le Liberia d’aujourd’hui a besoin d’un dirigeant mûr, compétent et ayant la
confiance de la communauté internationale, pour s’engager sur le chemin de
la reconstruction. Il est évident que le pays, une fois les institutions
démocratiques installées, doit s’atteler à la longue tâche de développement.
Et vu l’état de délabrement des infrastructures, seule une aide massive des
bailleurs de fonds peut aider à accélérer la sortie de crise.

C’est vrai que
l’intelligentsia africaine a souvent déçu par son incapacité à proposer des
idées novatrices pour le développement du continent ou par sa complicité
avec les régimes autoritaires. Mais on ne peut nullement classer Ellen Sirleaf
Johnson dans ce registre, elle qui allie à la fois le profil de technocrate et de
politique et qui n’a jamais fui ses responsabilités quand les seigneurs de
guerre mettaient le pays à feu et à sang.

Après avoir vu son peuple souffrir et
mourir, elle ne peut être suspectée de vouloir vendre son pays à quelque
puissance que ce soit. Réconcilier les coeurs et bâtir le pays, tel devrait être
le credo de la nouvelle dirigeante. Déjà, son élection suscite un accueil très
enthousiaste de la part des organisations féminines africaines.

Rien que pour
le symbole qu’elle représente (être la première femme chef d’Etat en Afrique)
Ellen Sirleaf Johnson n ’a pas droit à l’échec, encore moins à la trahison des
engagements pris avec le peuple libérien. A ce titre, on peut croire qu’elle
saura éviter les pièges de la politique politicienne, de la corruption et du
clientélisme pour s’ériger en défenseur de l’intégrité et de la vertu. La paix
que retrouve peu à peu le Liberia ne peut se consolider qu’à ce prix. L’ombre
de Charles Taylor, qui plane toujours sur le pays, ne doit en aucun cas faire
oublier à la nouvelle équipe les véritables défis qui l’attendent.

On sait que
l’ONU travaille à éliminer tout risque de reprise du conflit et l’ex-seigneur de
guerre est surveillé comme de l’huile sur le feu. Le Conseil de sécurité de
l’ONU a autorisé vendredi dernier, les Casques bleus à arrêter Charles Taylor
et à le transférer au Tribunal spécial sierra-léonais, s’il venait à rentrer au
Liberia.

Outre ces précautions, on sait que l’ONU et les Etats-Unis notamment font
tout pour accompagner le processus encore fragile jusqu’à ce qu’il s’enracine
plus profondément. Il appartient donc aux Libériens de savoir profiter de cette
assistance en adoptant une attitude responsable. En cette période
post-électorale, l’ancienne vedette de football qui voulait devenir président
est, sans doute, le plus interpellé par la situation. Il doit travailler à la
consolidation de la démocratie naissante, soit en acceptant la main tendue
de sa rivale, soit en se positionnant comme le chef de file de l’opposition.

Il a
l’avenir devant lui et il ne tient qu’à lui, pour le rendre prospère. On peut, de
ce fait, oser croire que les menaces que profère son parti, le CDC, de ne pas
siéger dans la prochaine législature si la plainte pour fraude massive à
l’élection est rejetée, ne sont qu’un dernier baroud d’honneur, qui n’aura
aucune conséquence grave sur la suite des événements.

Le Pays

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