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Mouvements associatifs : Des nébuleuses incontrôlables ?

Publié le lundi 17 mai 2004 à 07h56min

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Combien de mouvements associatifs officiellement reconnus
existent-ils actuellement au Burkina ? Pour répondre à la
question, nous avons tenté de frapper à la bonne porte.
Autrement dit, nous nous sommes adressé à la source comme
on le dit dans notre jargon.

Malheureusement, nous nous
sommes retrouvés face à des portes hermétiquement
cadenassées. Fuite en avant, aveu d’impuissance à donner le
moindre indice sur des structures aux objectifs officiellement
nobles mais qui parfois, se comportent comme des nébuleuses
incontrôlables, culte du secret, défaillance, laxisme ou tout à la
fois ?

Toujours est-il que personne aujourd’hui, ne peut avec
exactitude, satisfaire la curiosité du citoyen sur le nombre des
associations qui ont pourtant toutes la prétention de répondre
aux attentes des populations à la base. Pour s’en faire une idée
approximative, nous nous sommes repliés sur des documents
qui révèlent qu’entre janvier et avril 2004, le ministère de
l’Administration territoriale et de la Décentralisation et les
Hauts-commissariats ont reconnu officiellement 42
associations, soit en moyenne 10 associations par mois.

Ces
mouvements associatifs qui ont donc réussi leur examen de
passage devant leurs structures de tutelle sont révélateurs du
vaste élan collectif qui s’est emparé de l’opinion grâce au vent
du processus démocratique amorcé depuis les années 90 et
qui a libéré des initiatives créatrices après tant d’années de
plomb qui ont mis à rude épreuve le mouvement citoyen.

Si l’on
peut donc se réjouir de ce pluralisme des associations dont le
dénominateur commun est le souci du développement
économique et social, l’impossibilité de fournir aujourd’hui des
chiffres exhaustifs sur leur nombre peut être symptomatique du
manque de suivi, d’une forme de laisser-aller, voire de l’anarchie
qui peuvent conduire à des confusions préjudiciables aux
objectifs officiellement poursuivis par ces associations.

C’est
pour éviter de telles confusions et pour permettre une meilleure
visibilité qu’au niveau des SPONG (Secrétariat permanent des
organisations non gouvernementales), un effort a été fait pour
consigner dans un fichier, le nombre et les objectifs des ONG.

Cela leur évite les empiétements dans leurs domaines
d’intervention, la dispersion des énergies et des moyens
financiers et les éventuels conflits de compétence. Une chose
est de reconnaître l’utilité publique d’une association. Encore
faut-il être à même de la suivre sur le terrain et prévenir
d’éventuels glissements vers des objectifs qui ne disent pas
toujours leur nom.

Le ministère de l’Administration territoriale,
ministère par excellence de souveraineté, centre névralgique de
notre sécurité extérieure, devrait être regardant sur les
demandes de reconnaissance formulées par les associations
en menant avec rigueur des enquêtes de moralité sur leurs
promoteurs : notamment le mode de financement, l’origine des
fonds, et l’utilisation faite de ces fonds.

En somme, un suivi
permanent de leurs activités sur le terrain. En plus, à ces
associations, il devrait leur imposer une obligation de résultat
assortie de sanctions et pourquoi pas de dissolution en cas de
défaillance ou de changement de feuille de route.

Loin de nous
l’intention de nous lancer dans une sorte de dramatisation
moralisatrice de cette pollueuse propension à l’obsession
égalitariste qui consiste à satisfaire tout le monde sans la
contrepartie de se conformer à l’incontournable éthique d’Etat. Il
n’est un secret pour personne que certaines associations sont
de véritables officines, de véritables citadelles impénétrables
qui, au fil du temps, se détournent de leur objet social.

Et ce
n’est nullement leur faire des procès d’intention que de
reconnaître qu’en l’absence de suivi de leur parcours, alors que
des textes existent pour les rappeler à l’ordre, certaines
associations se transforment pratiquement en entreprises
régionalistes, claniques sinon familiales et convertissent parfois
des fonds venus de l’extérieur, au nom de la collectivité
nationale, en dividendes personnels.

On pourrait par exemple
imposer aux promoteurs des associations, de s’auto-investir
d’abord financièrement plutôt que d’attendre le geste des bons
samaritains et des mécènes extérieurs. D’autant plus que ces
secours extérieurs, apportés de bonne foi, sont parfois blanchis
et utilisés par leurs bénéficiaires pour manipuler les
consciences à des fins inavouées. A la faveur d’un certain
laxisme pernicieux et généralisé, le Burkina est devenu un sorte
de vaste écurie qu’il convient de nettoyer.

Ce nettoyage exige
aujourd’hui, l’implication de l’Etat et non du seul département de
tutelle des mouvements associatifs. Ce qui exige des moyens
matériels, financiers et humains qui ne sont pas hors de portée
des finances publiques, pour peu qu’on renonce à certaines
dépenses non indispensables et à un certain train de vie de
l’Etat. Il y va de la crédibilité de notre pays dans la mesure où
ces associations gèrent des sous consentis par de bonnes
volontés extérieures dont le moins qu’elles puissent exiger, est
un bilan. En attendant le sursaut salvateur, l’application des
textes déjà existants (notamment les statuts et règlement
intérieur) constituerait déjà un début de bond qualitatif dans le
sens de la bonne gouvernance. La démocratie n’étant pas
synonyme d’anarchie, elle n’exclut pas le contrôle.

En laissant
libre champ à ceux qui ont la phobie du renouvellement des
instances dirigeantes de leurs associations, transformant ainsi
ces dernières en repaires de récupérateurs omnipotents qui
prennent en otage des symboles de la démocratie participative
alors que leur seul mérite est d’avoir réussi à se poser en seuls
interlocuteurs des cabinets ministériels, on tue l’enthousiasme
de ceux qui avaient espéré des lendemains meilleurs.

Le Pays

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