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Burkina/ Show-biz : Managers d’artistes, ces hommes de l’ombre qui éclairent les stars

Publié le dimanche 14 janvier 2024 à 21h40min

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Burkina/ Show-biz : Managers d’artistes, ces hommes de l’ombre qui éclairent les stars

Personne physique ou morale liée à un artiste ou un groupe d’artistes par un contrat ou un arrangement, le manager d’artistes est une personne de l’ombre. Leur nombre évolue en même temps que celui des artistes au Burkina Faso. Qu’ils travaillent pour des maisons de production ou de façon indépendante, ils sont l’interface entre l’artiste et le monde extérieur. Quelques-uns d’entre eux ont accepté partager avec nous leur vécu.

Le métier de manager, même s’il est plus fréquent dans le milieu de la musique, peut se retrouver dans plusieurs domaines d’activité. Derrière chaque artiste, se cache une équipe de travail dont le manager. Au Burkina Faso, comme partout ailleurs, ce sont généralement des personnes peu connues du public. Selon Ibrahim Zerbo, manager d’artistes et président de l’Association des managers d’artistes professionnels de musique du Burkina (AMPM/BF), les managers de nos jours au Burkina arrivent à pousser leurs artistes au sommet et c’est une fierté. « On peut être fier de voir de plus en plus de jeunes qui s’intéressent à ce métier. Ce sont des métiers de l’ombre mais il y a un peu plus de lumière », résume-t-il.

Ibrahim Zerbo, président de l’Association des managers professionnels de musique du Burkina

Un métier passionnant mais complexe

Pour réussir dans cette fonction, il faut, selon Abass Zongo, manager de l’artiste Floby, être dynamique. Il a débuté sa carrière de manager en 2013 avec l’artiste Sofiano, avant de rejoindre l’équipe de Floby. « C’est un métier compliqué qui prend du temps et il faut beaucoup penser à l’artiste. Il faut avoir de la mémoire, la connaissance et beaucoup d’autres choses pour faire évoluer ton artiste. On peut manager plusieurs artistes à la fois mais il est difficile de tous les suivre de la même manière à la fois », confesse-t-il. Il explique que s’il est le manager délégué auprès de Floby, l’administrateur général est Ismaël Zongo alias « Commandant Papus Zongo ».

Pour Abass Zongo manager de l’artiste Floby, il faut être dynamique pour s’en sortir dans le métier de manager

Le manager de l’artiste Pamika et de Greg Burkinbila, Maurice Zoungrana alias ‘‘Kenzo Cash Liguidi’’ pense lui aussi que le métier est très complexe. « Surtout que l’opinion publique ne comprend pas nos tâches, on nous attribue certaines étiquettes », regrette-t-il. Aujourd’hui, à la tête d’une maison de production, c’est en 2010 qu’il s’aventure dans l’univers des managers avec Walib Bara, dans une maison de production à l’époque. Il commence comme « tour manager », la personne qui accompagne l’artiste dans ses différentes prestations. Ensuite, il devient manager de l’artiste Sissao, puis de l’artiste Pamika, de Sofiano et de Greg Burkinbila. Mais actuellement, il manage l’artiste Pamika et Greg Burkinbila. Se définissant beaucoup plus comme administrateur de ces artistes que manager, ‘‘Kenzo Cash Liguidi’’ les accompagne sur tous les pans de leur carrière. Il est l’oreille et le maître à penser de ces artistes, avec leur collaboration.

« Quand, en tant que manager, tu dois trouver des marchés à ton artiste pour qu’il puisse subvenir à ses besoins et bien paraître, forcément tu t’oublies à un moment. Nous réfléchissons constamment à comment faire pour que ça marche. On ne pense plus à nous mais plutôt à l’artiste uniquement et c’est ce qui est difficile », indique Kenzo Cash Liguidi.

C’est aussi ce que pense le manager de l’artiste Floby. « L’objectif du manager est de développer la carrière de l’artiste. C’est le représentant de l’artiste. Les artistes sont comme des bébés pour les managers, il faut s’occuper d’eux et les guider pour éviter les faux pas », insiste Abass Zongo.

Une charge de travail qui dépend de la carrière de l’artiste

Qui parle d’artiste, parle aussi de tournées et de spectacles. Mais pour Kenzo Cash Liguidi, il y a des artistes qui sont souvent moins sollicités que d’autres. Et en tant que manager, il faut se bouger pour permettre à l’artiste de tourner. « Lorsque c’est un artiste sollicité, c’est moins difficile. Mais quand l’artiste n’est pas demandé, ça devient très compliqué. Chaque manager a pour souhait que son artiste soit sollicité partout. Et c’est souvent dû au manque de moyens financiers. C’est une industrie qui demande beaucoup d’argent pour la production et la promotion des œuvres. Alors que si ces moyens manquent et que vous souhaitez être au top, ça devient un casse-tête chinois », résume-t-il.

Steeve Alain Kaboré, entrepreneur culturel, a été le manager de Tiness la Déesse pendant trois ans. Etant dans l’évènementiel, l’artiste lui confie en 2016 l’organisation de son "incroyable anniversaire" et se voit très satisfaite de la créativité de Steeve. Par la suite, ils collaborent sur d’autres activités avant que Tiness la Déesse lui propose d’être son manager en 2017 car son manager de l’époque se rendait à Paris. Ses tâches avec l’artiste consistaient essentiellement à caler toutes ses dates de prestation et de sorties. En plus, il l’assistait pour son image et sa stratégie marketing. Ensemble, ils élaboraient une feuille de route annuelle.

Steeve Alain Kaboré, ancien manager de l’artiste Tiness la Déesse

« Les difficultés que j’avais étaient liées au fait qu’elle soit mariée et mère de famille car c’était difficile à gérer à cause des responsabilités. On ne pouvait pas voyager, surtout quand elle a eu des triplés. Nous ne prenions que des dates de Ouagadougou. C’était une période où plusieurs cachets nous sont passés sous le nez. Mais elle avait l’avantage d’avoir un mari compréhensif », nous confie l’ancien manager de Tiness la Déesse. Mais cette situation est, selon lui, temporaire et quand elle passe, le travail reprend de plus belle. Ce fut sa seule expérience de manager d’artistes. Si actuellement il conseille et travaille avec Tiness et d’autres artistes, il n’est plus manager.

« Ici au Burkina, les gens ne considère pas le manager »

A en croire Abass Zongo, les gens les côtoient pour accéder aux artistes et une fois cet objectif atteint, ils écartent le manager pour contacter directement l’artiste. « Quand il y a un évènement, certains contactent directement l’artiste. Mais à notre niveau, nous avons travaillé à gérer ces situations. On se parle et on s’informe. Et toujours l’artiste les renvoie vers nous », assure Abass Zongo.

Pour lui, les managers du Burkina sont de grands bosseurs car ils sont en général les hommes à tout faire de l’artiste. « Il faut respecter le boulot de manager et les accompagner car l’objectif commun est de faire évoluer l’artiste. Même si nous ne sommes pas compris, nous faisons un travail important pour l’artiste. Mais ici au Burkina, les gens ne considèrent pas le manager », ajoute le manager de Floby.
C’est le même constat que fait le manager Kenzo Cash Liguidi. « Il y en a qui insistent sur le fait qu’ils connaissent l’artiste et préfère y aller directement. Dans ces cas, l’artiste nous informe et nous demande d’appeler la personne pour discuter » dit-il.

Ces managers souhaitent être respectés à leur juste valeur. « C’est parce qu’il y a artiste qu’il y a manager et vice versa. Ce sont des personnes qui se battent pour élever les artistes au-delà des frontières. Aux autorités, nous leur demandons d’avoir un regard encore plus poussé sur la musique et les artistes en particulier », a signifié Kenzo Cash Liguidi.

Maurice Zoungrana, alias Kenzo Cash Liguidi, affirme qu’il faut beaucoup de moyens pour élever la carrière des artistes

Quelques anecdotes des managers lors de leurs sorties avec les artistes

Dans l’univers du showbiz, il faut être paré à toutes les éventualités. Et ces managers qui sont au cœur des activités des artistes vivent souvent des situations à la fois délicates et drôles. Le manager de Floby nous relate une situation chaude avec l’artiste dans un pays voisin. « Une fois nous devions jouer au bord de la plage en Côte d’Ivoire et notre staff n’avait pas une sécurité personnelle. Dans l’euphorie, il y a des gens qui montaient sur la scène et qui sautaient sur l’artiste. Donc nous avons dû repousser les gens. Nous avons mis l’artiste à l’arrière et nous avons formé une barrière pour contrer la foule. A ce moment, un jeune homme a sauté et a saisi le cou de Floby en criant son nom. Dans l’esprit de protéger l’artiste, je l’ai éjecté du podium. Mais ce dernier avait un groupe qui a observé et qui n’a pas apprécié. Ils ont commencé à me menacer et m’attendaient à la fin. Après la prestation, nous avons dû courir à vive allure jusqu’à une maison pas loin. Dans la panique, les autres ont refermé la porte me laissant dehors. C’est là que Floby a hurlé en disant : mon manager est dehors !. Et de justesse ils ont ouvert la porte et je suis entré », nous raconte-t-il en riant.

Kenzo Cash Liguidi affirme avoir une pile d’anecdotes avec ses artistes. Il se remémore celle qui s’est déroulée au Mali avec l’artiste Bonsa, lors des Tamini d’or, quand il était tour manager. « Je me souviens d’une année où j’ai accompagné l’artiste Bonsa au Mali où il a été lauréat des Tamani d’or. Après la soirée de récompenses, nous avons célébré le trophée en boite de nuit avant de rentrer à l’hôtel. Mais le matin, nous devions prendre le vol à 6h40 du matin et nous avons malheureusement oublié le trophée à l’hôtel. A cette époque, il y avait une crise au Mali qui faisait que les transports en commun ne se déplaçaient plus. Nous avons joint l’équipe des Tamani d’or pour qu’il garde le trophée avec elle. Mais je n’avais pas informé mon administrateur Walib Bara de la situation et quelques temps après, un média international souhaitait interviewer l’artiste avec son trophée. C’est ainsi que j’ai dû lui dire la vérité. Je m’attendais à ce qu’il pique une grosse colère mais contre toute attente, il a simplement dit que ce sont des situations qui arrivent mais qu’il fallait communiquer », explique-t-il aujourd’hui en précisant que ce fut un grand enseignement pour lui.

Farida Thiombiano
Lefaso.net

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