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Burkina Faso, voici 2015 : Allons à Kosyam les yeux ouverts

Publié le dimanche 4 janvier 2015 à 21h13min

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Burkina Faso, voici 2015 : Allons à Kosyam les yeux ouverts

2014 a tiré sa révérence. Voici 2015, année de tous les espoirs de consécrations démocratiques d’un pays qui par le courage de son peuple a fait pignon sur rue dans le champ d’appréciation des faits marquants de l’humanité en 2014. Ô fierté, quand tu nous tiens de nos aïeux, et une seule nuit nous a réconcilié avec tous les peuples du monde à la conquête de la liberté et du progrès, la patrie ou la mort… c’était les 30 et 31 octobre 2014.

Débout, débordant comme un fleuve en cru, un ouragan en rafale, le peuple burkinabé a chaviré le navire CDP et ses chalumeaux. Quand l’histoire se révolte ainsi comme les eaux d’une mer en furie, toute branche d’arbre, toute feuille morte peu servir à s’accrocher. Comme dans cette brousse, où le champion du régime n’a eu la vie sauve que grâce à l’armée française, venue l’exfiltrer.

Prenant en main la situation, le Lieutenant-colonel Yacouba Isaac Zida a lu avec la précision d’un tireur d’élite la cible fixée par le peuple. Plus rien ne sera comme avant. Les linéaments d’une telle conviction se ramifient aux aspirations fondamentales du peuple que sont : la justice sociale, la démocratie, la liberté. A Ouagadougou comme à Athènes dans la Grèce antique (en 508 avant J-C), les rues étaient en pleine tourmente. Le peuple s’est élevé contre le tyran qui dirigeait la ville jusque-là : après des siècles d’oppression, il a exigé et obtenu sa liberté. Après s’être délibérés du joug d’un dirigeant tyrannique, les Athéniens ont réussi à mettre en place leur démocratie. Après s’être libérés de Blaise Compaoré les burkinabé seront-ils à même de mettre en place la leur ? Le palais de Kosyam sentira-t-il le parfum de la démocratie et du vrai changement en novembre 2015 ? Rien n’est moins sûr. Certes, le tyran est parti, ceci éclaire l’horizon des espoirs mais le plus difficile est loin d’être fait pour l’entame d’une vraie alternance au Burkina. C’est là que le peuple tout en accordant la bonne fois aux autorités actuelles de transition, doit ouvrir l’œil.

Un cadre de référence de valeurs cardinales pour une société nouvelle

Les autorités de la transition sous pression doivent préciser leur feuille de route. Celle-ci devrait s’en tenir essentiellement à la restauration d’un cadre de référence de valeurs. Le temps de la transition est si court que les préoccupations majeures devraient moins consister à la gestion des pulsions individuelles ou groupusculaires qu’à un début de restauration des idéaux de base dans la perspective d’un nouveau contrat social. Les valeurs sont des idéaux collectifs servant de référence, de critère moral des comportements ou des évaluations des faits. Seront citées les référents de vivre ensemble : l’intégrité, la probité, la solidarité…, dépassant les simples préférences des individus pour s’imposer comme des référents sociaux collectifs. Ces valeurs ayant bien existé et fonctionné dans notre société, il conviendrait que les autorités de la transition les remettent au goût du jour dans leurs pensées, leurs paroles et leurs comportements.

Conficius indiquait que la direction de la tête couronnée obligeait celle de la tête rasée. Sankara disait ce qu’il faisait et faisait ce qu’il disait. Si la révolution sankarienne n’a été celle de la célébration du culte des valeurs, elle n’en était pas loin. L’hydre de la corruption qui gangrène notre société est le produit du système Compaoré, elle se situe dans la nature même de son pouvoir et ne va s’étioler que par la promotion de valeurs pierres angulaires de notre reconstruction socio-politique. Un cadre de référence doit faire rêver à nouveau les burkinabé, de justice, d’égalité, de liberté et de progrès, rompant d’avec le système d’affairisme dévergondé, de concussion érigé en droit par les dignitaires d’hier.

L’instauration d’une valeur sociétale procède du désir de vivre ensemble. Pour un peuple à la recherche des fondamentaux pour se consolider une nation, Kafando et Zida, dès l’entame de leur mission ont bénéficié dans une certaine mesure d’une onction populaire dont ils doivent profiter pour rentrer dans l’Histoire nationale et ce en fixant le décor. Un cadre de référence collective dominé par la justice, c’est ce que les burkinabé attendent de la transition. Le peuple attend ensuite des autorités de la transition, la dignité qu’il faut lui rendre à tout prix car sous l’ancien régime l’arrogance, l’insolence des gouvernants finissaient par convaincre de la rupture entre ceux d’en haut et ceux d’en bas dans une société burkinabé ou cependant personne ne peut cacher ses origines sociales. S’apprêtant à prendre le contrôle de la situation, les mots du Lt-colonel Zida au peuple ce matin du 31 octobre 2014 sonnaient fort : « l’armée vous a compris, elle prendra toutes ses responsabilités ». Premier Ministre, s’il a encore convaincu par les mots au détour d’une interview bien maitrisée, il doit maintenant convaincre par la preuve.

Comme Clisthène à Athènes, il doit convaincre qu’il a bel et bien rompu avec le passif du régime Compaoré, qu’il ne lui viendra point à l’esprit de le défendre et qu’il est et sera ce militaire stratège qui, en s’employant sur le terrain politique orientera le peuple vers ses plus belles victoires. Pour certains, c’est un bébé du vieux système dont il ne peut se sevrer. Pour d’autres, son puritanisme religieux compte pour paroles d’évangile. Dans tous les cas, l’an 2015 lui laisse avec son gouvernement, onze (11) mois pour s’immortaliser en pile ou face.

Pour la mémoire collective : un jugement public des affaires nébuleuses du système déchu

Les autorités de la transition doivent nous amener, non pas à des réparations mais à des décisions qui ouvre le chemin des réparations et de la projection du pays sur l’avenir. La meilleure de ces réparations nous semble être celle de la mémoire collective longtemps en panne de la vérité sur les affres du régime Compaoré. Cette réparation consistera à pousser certains dignitaires d’hier criminels, mafieux, insolents à s’adresser au peuple et lui dire toute la vérité, rien que la vérité autour des affaires nébuleuses :
-  les victimes du soulèvement populaire ;
-  les nombreuses pertes en vies humaine (les cas Sankara et Norbert Zongo ne sauraient ensevelir les autres) ;
-  les nombreux crimes économiques ;
-  la confiscation des terres aux paysans dans les campagnes ;
-  les détournements des espaces publics et des parcelles en ville ;

En sus, dresser un état des lieux sur l’éducation, la santé, la sécurité alimentaire servira de boussole au régime à venir par rapport aux réelles attentes consubstantielles au soulèvement populaire, interdit de les brader sous une politique politicienne quelconque. C’est en cela que l’initiative des états généraux de la justice est salutaire mais elle doit aller au-delà pour concerner d’autres domaines sensibles de la vie de la nation. Ces états généraux devront offrir une valeur ajoutée par la production de normes. Mieux vaut soigner que guérir. La gestion de la transition tirera un avantage pour elle-même et pour le peuple en disposant pour l’avenir sur des valeurs sacrées participe de cela, le verrouillage de l’article 37, une prise de lois plus rigoureuses sur la corruption, sur l’exclusion, l’ethnicisme politique rampant et la fraude fiscale entre autres.

C’est en faveur des valeurs que le Cardinal a appelé dans son message à l’occasion de Noël 2014, invitant les Burkinabè à bannir à jamais de notre nation toute tentation de régionalisme, éradiquer le spectre de l’ethnicité, le danger de l’intolérance religieuse, l’appât des gains frauduleux et faciles, la course effrénée au pouvoir qui constituent autant d’entraves à la consolidation de la paix véritable et du développement durable.

C’est à ce prix que nous pourrons construire une société d’avenir autour d’un idéal démocratique dont rêve le peuple burkinabé et en particulier sa jeunesse. Idéal que Norbert ZONGO avait défendu et a été assassiné.

Dr Désiré Boniface SOME
Enseignant à l’Université/ Conseiller des Affaires Etrangères

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Vos commentaires

  • Le 5 janvier 2015 à 10:58, par ACHILLE DE TAPSOBA En réponse à : Burkina Faso, voici 2015 : Allons à Kosyam les yeux ouverts

    Merci Mr SOME et bravo pour votre contribution d’un BURKINA NOUVEAU.

    BONNE ANNÉE ET HEUREUSE 2015 AU BRAVE PEUPLE BURKINABÉ
    QUE LE SEIGNEUR BÉNISSE LE BURKINA. AMEN
    PAIX ET SUCCÈS A TOUS LES BURKINABÉS. AMEN.

    ACHILLE TAPSOBA
    Partisan inconditionnel de l’Alternance

  • Le 6 janvier 2015 à 17:58, par ouedraogo abdou azize En réponse à : Burkina Faso, voici 2015 : Allons à Kosyam les yeux ouverts

    Merci mon frere some et grand respect vous.si zida dit que plus rien ne sera comme avant ces parce que lui meme il sait que plus rien ne sera comme avant.le burkina vient d’ouvrire le chemin d’une vrais democratie pour son peuple et qui va contamine presque tout les pays afrcain.merci encore

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