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Société nationale de gestion des stocks de sécurité : “…faire baisser les prix des produits de grande consommation”

Publié le mercredi 8 juin 2011 à 04h57min

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Dans le but de juguler la crise que traverse le Burkina depuis plus de trois mois, le gouvernement burkinabè a décidé de baisser le prix de certains produits de grande consommation dont le riz. La Société nationale de gestion des stocks de sécurité (SONAGESS) a été mandatée pour assurer la mise en œuvre de la vente du riz local. Comment cette vente est-elle organisée à travers l’ensemble du territoire ? Quelles sont les dispositions qui sont prises pour éviter la spéculation ? Quelles sont les ambitions de la SONAGESS dans le long terme ? Ce sont là, autant de questions auxquelles le directeur général de ladite structure, M. Charles Sawadogo apporte des éléments de réponses.

Sidwaya (S.) : Parmi les mesures prises par le gouvernement pour juguler la crise, figure la baisse du prix du riz local, vendu par votre structure. Parlez-nous de ce partenariat gouvernement-SONAGESS.

Charles Sawadogo (C.S) : Avant tout propos, nous disons merci aux Editions Sidwaya qui donnent l’occasion d’informer sainement la population burkinabè sur ce sujet sensible qui est celle de la vie chère. La Société nationale de gestion des stocks de sécurité (SONAGESS) est une société d’Etat au capital de 200 millions de francs CFA entièrement détenu par l’Etat. Le partenariat que nous avons avec ce dernier se traduit par un contrat-plan passé qui donne à notre structure entre autres missions, d’accompagner commercialement les producteurs et les organisations de producteurs pour la distribution de la production alimentaire locale.

S. : En vue de rendre le riz accessible aux populations, des boutiques-témoins ont été installées dans les cinq arrondissements de la commune de Ouagadougou ainsi que dans les chefs-lieux de provinces. Dites-nous la philosophie qui sous-tend la mise en place de ces boutiques ?

C.S : La mise en place de boutiques-témoins s’inscrit dans les mesures prises par le gouvernement pour faire baisser les prix des produits de grande consommation (cas du riz 25% brisure, riz local, des céréales locales et de la farine boulangère). Cela s’est concrétisé à travers une subvention du riz local que l’Etat a accordé à la SONAGESS, lui permettant de vendre ce riz à 15 000FCFA le sac de 50kg et à 7500 FCFA celui de 25kg. Aussi, il s’agit pour nous de rendre ce riz disponible aux consommateurs.

S. : Comment ces boutiques fonctionnent-elles ?

C.S : Ces boutiques-témoins fonctionnent sur la base de la popularité. Et nous privilégeons la fonction de vente. Notre objectif, c’est de rendre le produit accessible au plus grand nombre. Ces boutiques ont été mises en place grâce à l’appui des maires d’arrondissements qui ont mis à notre disposition les sites. Un personnel minimal a été recruté pour assurer la gestion de ces boutiques. Il s’agit d’un magasinier, d’un vendeur, d’un manœuvre payé à la tâche et d’un veilleur de nuit pour la garde de la boutique. L’approvisionnement des magasins se fait au fur et à mesure que les stocks s’épuisent dans les boutiques.

S. : Cinq boutiques-témoins pour une population ouagalaise d’environ deux millions d’habitants, cela ne va-t-il pas entrainer de la bousculade ?

C.S : Au regard de l’engouement que nous percevons pour le riz local dont la qualité n’est plus à démontrer, on peut craindre des ruptures de stock. Toutefois, les quantités disponibles actuellement (7 000 tonnes) et l’organisation mise en place permettront d’éviter les bousculades. A la date du 7 juin 2011, nous avons ouvert sept (7) boutiques pour toute la commune de Ouagadougou : une dans l’arrondissement de Baskuy, une à Bogodogo, deux à Boulmiougou, une à Nongr-massom, une à Sig-Noghin et une au siège de la SONAGESS. Trois boutiques ont été mises en place dans les trois arrondissements de Bobo-Dioulasso. L’ouverture d’une boutique à Zorgho, Koupèla, Tenkodogo, Boulsa, Bogandé, Kaya, Dédougou, Banfora et Diébougou est effective également. Il reste celle de Kongoussi, Djibo, Titao et Ouahigouya. Elles fonctionnent en journée continue de 8h à 15h du lundi au vendredi et de 8h à 12h le samedi. Au siège de la SONAGESS, la boutique est ouverte de 8h à 12h et de 15 à 18h les jours ouvrables. Dans ces boutiques, le riz est vendu à 7500 FCFA le sac de 25kg et 15 000 FCFA les 50kg.

S. : Comment vont-elles fonctionner dans le long terme ?

C.S : Les boutiques-témoins ont été mises en place suite à une décision du gouvernement, à l’issue des travaux de réflexion organisés avec les acteurs de la société civile et des opérateurs économiques. Le fonctionnement de ces boutiques est prévu dans un premier temps pour trois (03) mois. A l’issue de cette période, une évaluation sera faite. C’est cette évaluation qui permettra de poursuivre ou non, l’opération de vente dans les boutiques-témoins.

S. : En cas de non poursuite de l’opération, que comptez-vous faire ?

C.S. : L’objectif de cette opération est de contenir les prix des produits de grande consommation à un niveau acceptable. Il reste que si les habitudes pour le riz local sont bien acquises par la population burkinabè, la SONAGESS se fera le plaisir de poursuivre les opérations de vente, surtout que cela est l’un des volets du contrat-plan que nous avons signé avec le gouvernement. C’est également une opportunité qui nous est offerte pour accompagner commercialement les producteurs. En dehors de la vie chère, nous nous préparons à la commercialisation des produits locaux notamment les céréales.

S. : Pensez-vous pouvoir satisfaire la demande ?

C.S : Notre souhait c’est de pouvoir le faire et nous pensons gagner le pari en ce sens que le ministère en charge de l’Agriculture est très engagé dans la promotion de la production nationale. Ce qui se traduit par la subvention et la mise à disposition des semences améliorées et des intrants aux producteurs. Nous avons en stock plus de 7000 tonnes de riz local.

S : A l’heure actuelle, combien de tonnes avez-vous déjà écoulées ?

C.S : A la date du 6 juin 2011, 254 tonnes ont été vendus à Ouagadougou, soit soixante seize millions quatre cent dix mille (76 410 000) francs CFA.

S. : Quelles sont vos sources d’approvisionnement ?

C.S : Nous nous approvisionnons auprès des producteurs des plaines irriguées de Bagré, Bazon, Bama, Niassan et également auprès d’opérateurs économiques évoluant dans la transformation du riz paddy. Une fois ce riz acheté, nous le décortiquons nous-mêmes car nous disposons d’une technologie appropriée pour cela. Ce qui permet de mettre sur le marché un riz débarrassé de toutes impuretés. Le riz est produit en saison pluvieuse et en saison sèche, ce qui permet de dire que nos sources d’approvisionnement ne tariront pas.

S. : Pourquoi avez-vous choisi de ne vendre que du riz local ?

C.S : Nous avons choisi dans un premier temps de faire la promotion du riz local ; ceci en vue d’accomplir l’une de nos missions qui est d’accompagner les producteurs sur le plan commercial. Cependant, nous comptons très prochainement mettre à la disposition du public, le niébé. Nous avons actuellement dans nos magasins plus de 7000 tonnes de niébé que nous comptons mettre bientôt à la disposition des populations. Le niébé étant une denrée spécifique, nous attendons de réunir les conditions d’ensachage avant de le commercialiser. Le ministère entend promouvoir davantage la filière par le soutien de 45 000 productrices sur l’ensemble du territoire.

S. : Cela veut dire que la SONAGESS ne vendra que le riz local ?

C.S : Cela dépend car nous sommes une société d’Etat. Si la situation à un moment donné commande et que nous sentons une défaillance du privé, il se pourrait que l’Etat nous instruise de vendre le riz importé. Il nous est demandé actuellement, compte tenu de la conjoncture, de placer le riz importé. Nous ne l’avons pas encore fait mais cela ne saurait tarder.

S. : La SONAGESS œuvre-t-elle à une résurrection de la CGP, voire de l’OFNACER ?

C.S : Nous nous posons en effet cette question, à savoir est-ce que la SONAGESS n’est pas ou ne sera pas une synthèse probable de la Caisse générale de péréquation (CGP), de l’Office national des céréales (OFNACER) de Faso Yaar. En tous les cas, elle envisage ou demettre à la disposition des populations burkinabè, divers produits locaux tels que le mil, le maïs, le sorgho, le niébé, la farine ou la semoule de maïs.

S. : Comment allez-vous vous y prendre pour stocker tous ces produits ?

C.S : Nous disposons d’un espace de stockage à travers le territoire de près de 100 000 tonnes. Nous avons également en projet, en collaboration avec le ministère en charge de l’Agriculture et le conseil national de sécurité alimentaire, augmenter cette capacité.

S : Quelles stratégies la SONAGESS compte-t-elle mettre en place pour empêcher la spéculation ?

C.S : La spéculation zéro n’existe pas. La meilleure façon de lutter contre la spéculation, c’est de rendre le produit disponible et accessible. Nous avons mis en place une stratégie qui est de ne pas dépasser un sac de 50kg par acheteur.

S. : Les prix changeront-ils après les trois mois donnés par le gouvernement ?

C.S : Le gouvernement peut être amené à reconduire l’opération si la situation l’oblige. Pour le moment, l’Etat est en train d’étudier la structure des prix. Il entend mettre à long terme un mécanisme de contrôle de ces denrées afin d’éviter qu’il y ait une envolée des prix. L’objectif est d’avoir les prix à un niveau raisonnable.

S. : Les prix que vous fixez à l’heure actuelle ne sont-ils pas une forme de concurrence déloyale ?

C.S : Absolument pas, puisque cela a été décidé lors d’une réunion entre l’Etat, les associations des consommateurs, la société civile et les commerçants. Un effort a été demandé aux importateurs et à la SONAGESS (en ce qui concerne le riz local) qui ont accepté de baisser les marges bénéficiaires. Subvenir aux besoins des populations quand le privé n’y parvient pas, est une mission régalienne de l’Etat. L’absence de l’Etat en cette période de vie chère serait une démission. Du reste, les opérateurs économiques ont chacun mis du sien dans cette opération, notamment en ce qui concerne les produits importés.

L’Etat est appelé à rembourser sous forme de subventions le différentiel qui se dégage entre le prix convenu avec l’opérateur et le prix fixé par le gouvernement. Nous ne voyons donc pas comment cela peut être perçu comme une concurrence déloyale dans la mesure où au Burkina Faso nous consommons 300 000 tonnes de riz par an. Un besoin que la SONAGESS seule ne peut couvrir. La quantité que dispose notre société ne peut en aucun cas influencer le marché du riz au Burkina.

Interview réalisée par Aline Verlaine KABORE

Sidwaya

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