Le découragement était le sentiment le mieux partagé chez plus d’un supporter à Johannesburg en Afrique du Sud. Toute la ville, ou du moins les Africains, n’avaient qu’un seul rêve : voir ces jeunes soldats ghanéens écrire une belle histoire de notre football dans une coupe du monde. Malheureusement, ce ne sera pas pour cette fois-ci. La faute à une solide équipe de l’Uruguay, avec dans ses rangs un certain désormais très célèbre Luis Suarez, muni d’une main de diable. Cette main-là qui a empêché le dernier représentant d’inscrire le but victorieux, mais qui a aussi occasionné le penalty qu’Assamoah Gyan a raté plus tard.

Tout avait pourtant bien démarré pour John Mensah et ses camarades qui, malgré l’absence très remarquée d’André Ayew sur le flanc gauche, étaient parvenus à ouvrir le score grâce à un coup de patte de Sulley Ali Muntari (45e mn+2 ; 1-0). Ce but venait de récompenser tous ceux qui avaient foi en cette génération de joueurs ghanéens. Et cela donnait l’occasion à tout le Statium de se lâcher. Le rêve de tout un continent prenait forme, mais au cours de la seconde période, les Uruguayens remettaient les pendules à l’heure sur une balle arrêtée de ce diable de Diego Forlan (55e mn, 1:1). La suite, on la connaît, Gyan assombrit le ciel de Jo’burg en envoyant dans les airs le fameux penalty dans les dernières secondes. Le signe annonciateur d’une défaite en cours. Puis les Black Stars et l’Afrique vont finalement perdre à l’issue de la séance des tirs au but (2-4).

C’était impensable. Le Soccer City est resté muet une heure après le coup de sifflet final. Les supporters n’en revenaient pas. Ils avaient du mal à quitter le stade comme si en y restant, la défaite pourrait se transformer en victoire. Les plus abattus ne savaient que dire. Les plus coléreux blâmaient aussi bien Assamoah que Suarez qui a illégalement stoppé une balle au but. Le seul spectateur à qui nous avons pu arracher un mot, été plus que blasphémateur : « Je viens d’avoir la preuve que Bon Dieu est un Blanc », nous a-t-il jeté à la figure avant de fondre dans la foule. C’était trop osé ; toujours est-il que la belle page d’histoire écrite par cette génération de starlettes venait de se fermer ; le rêve des Africains s’est aussi achevé.

De notre envoyé spécial au mondial, Kader Traoré

Propos et coulisses du match

• Le lendemain du match, le président de la Fédération ghanéenne de football (GFA), Kwesi Nyantakyi, a déclaré que Nelson Mandela a envoyé une lettre de consolation à l’attaquant Assamoah Gyan et à toute l’équipe. « Mandela dit qu’il voulait que tout le monde sache qu’il est fier de nous en tant que seule équipe africaine à atteindre les quarts de finale », a rapporté le président de la GFA. Dans cette missive, le leader charismatique de l’ANC a réconforté Assamoah Gyan après son penalty raté. Mandela a exhorté les Ghanéens à aller de l’avant pour les échéances à venir. En tout cas, la majeure partie du message était consacrée à Gyan qui aurait pu qualifier son équipe pour les demi-finales.

• Le défenseur Jonh Pantsil, malgré l’amertume, était l’un des rares joueurs ghanéens à se prêter aux questions des journalistes. « On a été très malchanceux, mais on doit continuer notre chemin. Ce n’était pas notre jour, tout simplement. On était tout proche de réaliser un gros exploit, ça s’est joué à peu. Nous avons tout donné pour le Ghana et pour l’Afrique. On aurait vraiment pu faire mieux. Mais ce qui est arrivé est arrivé, c’est comme ça. Nous avons tous parlé à Gyan, il est très triste. En tant que coéquipiers, c’est notre rôle de lui parler, de le soutenir dans ces moments-là », a-t-il commenté.

• Assamoah Gyan a assumé son penalty raté. Il a toutefois regretté que l’arbitre n’ait pas accordé de but sur la tête de Dominic Adiyah. Il a estimé que le ballon a bel et bien franchi la ligne avant cette main de Suarez. Mais aucune image ne confirme jusque-là cette version. « C’est très dur de rater le penalty mais je suis le tireur de l’équipe et je devais le frapper », a ajouté le buteur ghanéen. Quant au coach, Milovan Rajevac, il s’est contenté de dire que c’est le football et qu’il faut faire avec.

Mandela a salué les Black Stars

L’ancien président sud-africain Nelson Mandela et son ex-femme Winnie Madikizela-Mandela ont reçu chacun les Black Stars du Ghana dans leur résidence respective à Johannesburg et à Sowéto.

Ils les ont félicités pour leur match contre l’Uruguay le vendredi dernier. La Fondation Mandela indique que l’ancien Président a fait les éloges de l’équipe ghanéenne malgré la défaite face aux Sud-Américains à l’issue des tirs au but. « Ils ont fièrement représenté le continent et bien qu’ils ne se soient pas qualifiés pour les demi-finales, ils peuvent rentrer à la maison la tête haute », a déclaré le guide de l’ANC.

Les temps forts de la visite des joueurs chez Madiba ont été la présentation des maillots du Ghana et d’autres articles au Prix Nobel. Les joueurs et le staff ont pu serrer la main au père de l’indépendance sud-africaine et ont eu l’occasion rare de pouvoir être photographiés avec lui. A leur sortie, le milieu de terrain Derek Boateng a affirmé que c’est un rêve qui se réalise ainsi. « C’est une légende, vous savez, et tout le monde le connaît. C’est la première fois que nous le rencontrons et c’est que du bonheur », a-t-il conclu.

L’équipe s’est ensuite rendue à Sowéto chez Winnie Madikizela, l’ex-femme de Mandela. Dans les rues du quartier, les habitants ont montré que la popularité du Ghana était toujours intacte malgré son élimination, en saluant les joueurs par des applaudissements. La sélection ghanéenne s’apprêtait à l’heure actuelle de quitter l’Afrique du Sud.

De Jo’burg à Sowéto, K.T.

L’Observateur Paalga