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Fait divers : Mâ Poko, vraie-fausse revenante

Publié le mardi 12 juin 2007 à 07h44min

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Mâ Poko est morte ce matin sans crier gare. On la savait souffrante mais nul dans le village ne pouvait s’imaginer qu’elle pouvait partir comme ça sans la moindre civilité. Dans le village c’est l’émoi, c’est la tristesse.

Rapidement les autres villages sont informés du départ précipité de Mâ Poko et peu de temps après parents, amis et connaissances commencèrent à arriver pleurant, chantant des complaintes funéraires ou faisant les deux à la fois.

Mâ Poko avait été couchée dans sa chambre où elle était veillée par des femmes plus âgées qu’elle. Dehors, les groupes se formaient et dans chaque groupe l’on rappelait les qualités de la défunte à moins que l’on en soit à pourfendre la féroce vilainie de la mort qui tôt ou tard fauchera tout le monde.

Alors que dans la concession et aux alentours les gens se pressaient, Mâ Poko allait créer l’événement. Une des vieilles qui la veillait, remarqua qu’elle avait bougé. Elle en parla aux deux autres qui étaient avec elle. Ensemble elles se frottèrent les yeux et les braquèrent sur Mâ Poko qui à leur grand étonnement bougea franchement la tête de gauche à droite.

Les vieilles se regardaient pour savoir si chacune d’entre elles avait vu la même chose ; puis, faisant fi de leurs rhumatismes et de leurs courbatures, de leurs jambes tremblantes, elles sortirent se bousculant pour porter l’information aux hommes.

Ceux-ci, le plus ancien en tête allèrent pour constater si les femmes ne radotaient pas sous le double coup de la douleur et du dolo. Ils arrivèrent et constatèrent que la morte ne faisait plus que bouger : elle tentait maintenant de se redresser sur ses fesses. Les vieux ne se regardèrent pas ; ils ne se concertèrent pas. Ils cherchèrent à savoir comment faire demi-tour le plus rapidement possible, afin de ne pas rencontrer le regard de la réssuscitée car il est dit par là-bas que rencontrer le regard d’un revenant équivaut à mourir soi aussi.

Dehors, ils ne s’arrêtèrent pas pour donner l’information aux autres. Chacun selon la vitesse de ses courbatures criait à la cantonade « Mâ Poko est revenue de la mort !...la morte s’est réveillée... ». Ceux qui les entendirent se dirent qu’il serait plus intelligent de se retrouver ailleurs.

En quelques minutes, une véritable panique se saisit de la foule ; panique aggravée par quelqu’un qui cria qu’il a entendu la revenante éternuer. Cela voulant dire qu’elle est en train de sortir de la maison, acheva d’affoler.

Quelques minutes plus tard, plus âme qui vive sur les lieux, des lieux jonchés de chaussures, de coiffes, de cannes, des canaris de dolo renversés et de calebasses écrasées.

Plus âme qui vive ? non ! un vieux qui certainement était le parent de Mâ Poko pénétra dans la chambre et aida la morte- revenue à s’asseoir. Les autres le surent et les plus courageux en firent de même.

Une dizaine de jours plus tard, Mâ Poko mourut pour de bon. Lui a-t-on dit la panique que sa première résurrection a jetée sur le village ? non et c’est dommage car elle aurait pu en rire avec les autres qu’elle est allée rejoindre dans l’au-delà.

Paix à son âme.

Sacré Chédou OUEDRAOGO

Sidwaya

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